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20/05/2014 | FRANCE | N°12VE03245

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 20 mai 2014, 12VE03245


Vu la requête, enregistrée le 4 septembre 2012, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT par son maire en exercice par Me Anthian-Sarbatx, avocat ;

La COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n°0703709 du 29 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune a rejeté sa demande tendant à l'attribution d'une indemnité de 127 767 euros du fait de la faute simple commise par le service des impôts dans l'établi

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Vu la requête, enregistrée le 4 septembre 2012, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT par son maire en exercice par Me Anthian-Sarbatx, avocat ;

La COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n°0703709 du 29 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune a rejeté sa demande tendant à l'attribution d'une indemnité de 127 767 euros du fait de la faute simple commise par le service des impôts dans l'établissement de la taxe professionnelle sur le territoire de la commune pour les années 2003 à 2006 ;

2° de condamner l'Etat à verser à la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT le montant de cette somme de 127 767 euros en réparation du préjudice subi ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, en premier lieu, que le jugement est entaché d'un vice de procédure ; qu'une convocation à l'audience du 8 décembre 2011 avait été adressée aux parties et que le greffe les a informées que l'audience était renvoyée à un date ultérieure ; que, toutefois, la requérante a assisté à l'audience ; que la discussion qui a eu lieu le 8 décembre 2011, à la suite de la production de moyens nouveaux sur la jurisprudence Krupa, liait le juge de première instance qui devait obligatoirement viser et analyser cette audience régulière qui n'a pas été enregistrée dans la fiche Sagace ; que ses arguments à l'audience devaient être analysés et visés ; que par suite le jugement attaqué doit être annulé pour irrégularité ; qu'en second lieu, le juge a nécessairement commis une erreur dans l'appréciation des faits puisqu'en application de la jurisprudence Commune de Kourou du Conseil d'Etat, la victime n'a pas à effectuer le travail de calcul qui incombe à l'administration fiscale dont la responsabilité est engagée ; qu'en troisième lieu en produisant les rôles de l'année suivante à la taxe professionnelle, soit de l'année 2007, la collectivité locale a démontré que les corrections n'étaient pas intégrées ; que pour certaines bases et contribuables elles ne l'étaient pas non plus pour l'année 2011 ; qu'en quatrième lieu, l'application de l'article 1647 D du code général des impôts suppose que la base brute soit correctement formée avant qu'elle ne soit comparée à la cotisation de référence ; qu'en cinquième lieu une erreur d'affectation de la valeur locative foncière qui serait imposée chez un redevable plutôt qu'un autre peut avoir des conséquences et qu'il n'est pas possible d'opérer de compensation de l'impôt entre divers redevables ; qu'en sixième lieu des constatations effectuées en 2005 peuvent avoir un impact en 2005 et 2006 quand il s'agit d'immatriculation des établissements au greffe du tribunal de commerce, d'émission de rôles d'imposition par le ministère des finances et d'établissement du plan cadastral par les services du cadastre ; que l'exonération de l'article 1452 du code général des impôts, applicable à certains artisans et ouvriers, au demeurant non justifiée par le service des impôts, ne suffit pas à caractériser une valeur locative foncière nulle ; qu'en septième lieu l'administration fiscale ne peut se fonder sur ce qu'elle n'aurait pas disposé de suffisamment de temps pour agir ; que si dans certains cas le juge a considéré qu'il appartenait à la collectivité de signaler les dysfonctionnements rien ne permet de penser qu'il faut y procéder dans un délai suffisant pour que l'Etat puisse les corriger ; qu'en huitième lieu, lorsque l'administration se soumet préalablement à une procédure elle est liée par celle-ci ; qu'en omettant la procédure de la valeur locative d'attente dont la pratique ne fait pas de doute, le service des impôts a exercé une influence sur le droit de la requérante à disposer de ressources légitimes ; que, dès lors, le rôle initialement émis doit être annulé et reconstitué dans les conditions de droit commun pour former les bases de l'indemnisation ; que s'agissant enfin du préjudice moins de dix contribuables sont concernés par les oppositions de l'Etat ; que les autres ne font l'objet d'aucune remarque générale ou précise ; que, par ces motifs, les préjudices non discutés doivent être regardés comme tacitement acceptés, en application de la jurisprudence Commune de Kourou ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2014 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public,

- et les observations de Me Anthian-Sarbatx, avocat ;

1. Considérant que la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT a saisi, le 5 décembre 2006, la direction des services fiscaux du Val d'Oise aux fins de corriger les bases d'imposition à la taxe professionnelle au titre des années 2002 à 2006 pour la situation de 92 contribuables qui exerçaient leur activité sur le territoire de celle-ci, en raison de la sous-évaluation de la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière et demandé l'émission de rôles complémentaires ; que, par la présente requête, la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT demande l'annulation du jugement du 29 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune a rejeté sa demande tendant à l'attribution d'une indemnité de 127 767 euros pour le préjudice qu'elle a subi du fait de la faute simple commise par le service des impôts dans l'établissement de la taxe professionnelle sur le territoire de la commune pour les années 2003 à 2006 ;

Sur la régularité du jugement de première instance :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du fichier Sagace produit en pièces jointes par la requérante elle-même, que l'audience prévue le 8 décembre 2011 devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a été renvoyée ; que, par suite, le moyen tiré par la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT de ce que la procédure à l'issue de laquelle le jugement a été adopté serait entachée d'irrégularité, faute d'avoir tenu compte de cette audience antérieure et des moyens qui y auraient été débattus, ne peut qu'être écarté comme manquant en fait ;

Sur la faute :

3. Considérant qu'une faute commise par l'administration lors de l'exécution d'opérations se rattachant aux procédures d'établissement et de recouvrement de l'impôt est de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard d'une collectivité territoriale ou de toute autre personne publique si elle leur a directement causé un préjudice ; qu'un tel préjudice peut être constitué des conséquences matérielles des décisions prises par l'administration et notamment du fait de ne pas avoir perçu des impôts ou taxes qui auraient dû être mis en recouvrement ; qu'enfin, l'administration peut invoquer le fait du contribuable ou, s'il n'est pas le contribuable, du demandeur d'indemnité comme cause d'atténuation ou d'exonération de responsabilité ;

4. Considérant que l'administration fiscale a examiné, à la suite de la réclamation présentée le 5 décembre 2006 par la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT, la situation de 92 contribuables et soutient avoir corrigé toutes les anomalies constatées, à l'exception de celles de trois contribuables pour des rôles de 2004 et pour un rôle de 2003 ;

Sur la faute commise en ce qui concerne le rôle d'un contribuable pour l'année 2003 :

5. Considérant que l'administration peut invoquer le fait du demandeur d'indemnité comme cause d'atténuation ou d'exonération de sa responsabilité ; que si l'administration fiscale se fonde sur la circonstance qu'elle a manqué de temps pour agir, la COMMUNE DE SAINT LEU LA FORET ayant présenté sa demande indemnitaire le 5 décembre 2006 pour un rôle de l'année 2003 pour lequel le délai de reprise de l'article L. 174 du livre des procédures fiscales expirait le 31 décembre 2006, cette circonstance, qui a trait exclusivement aux délais de reprise qui concernent l'Etat et le contribuable, est sans influence sur la solution du litige ; qu'est également inopérante la circonstance que les services fiscaux lorsqu'il redressent les bases imposables des contribuables doivent respecter le principe général de droits de la défense dès lors que le présent litige, qui a un objet indemnitaire, ne concerne pas la relation entre les contribuables et les services fiscaux ; que la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT pouvait présenter sa demande indemnitaire le 5 décembre 2006 et y contester un montant d'imposition de l'année 2003 sans que ces circonstances puissent atténuer la faute de l'Etat ou l'exonérer de sa responsabilité, dans l'exécution d'opérations se rattachant aux procédures d'établissement et de recouvrement de l'impôt ; que, par suite, l'existence d'une faute sur ce point doit être imputée aux services fiscaux ;

6. Considérant que la circonstance que les modifications de bases imposables opérées par l'Etat au bénéfice de la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT n'auraient pas été intégrées aux rôles généraux de l'année 2007 est inopérante s'agissant d'un litige circonscrit aux années 2003 à 2006 ; que la collectivité ne saurait davantage se prévaloir de constatations effectuées en 2011 pour contester l'imposition des années 2003 à 2006 ;

7. Considérant que la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT soutient que des fautes ont été commises dans l'établissement des rôles pour de nombreux contribuables ; que l'administration fiscale admet l'existence de certaines anomalies au nombre de neuf qui l'ont conduite à réexaminer les rôles et les valeurs locatives ; que la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT soutient que ces fautes ont entraîné une sous-évaluation des valeurs locatives qui lui a porté préjudice ;

Sur le préjudice non chiffré :

8. Considérant qu'il appartient au demandeur d'indemnité d'établir l'existence du préjudice allégué et de le chiffrer précisément ;

9. Considérant que LA COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT n'établit pas, comme elle l'allègue, que s'agissant de professionnels non exonérés la prise en compte d'une valeur locative foncière nulle constituerait une anomalie ni, qu'en tout état de cause, la correction de cette anomalie aboutirait à l'établissement d'un montant de taxe professionnelle supérieur à la taxe professionnelle minimale prévue à l'article 1647 D du code général des impôts ; que, s'agissant des professionnels non sédentaires dont la situation est régie par les dispositions du 4° de l'article 1469 et du 3° de l'article 310 HG de l'annexe II au même code, la collectivité n'établit par aucun élément précis que la prise en compte de la valeur foncière, augmentée de celle des équipements et biens mobiliers, conduirait à calculer des bases d'un montant supérieur à celui de la base minimum d'imposition ; qu'elle ne peut davantage utilement se prévaloir des réponses à la question écrite n°00284 de

M. A...au Journal officiel du Sénat du 17 avril 1986, page 608, par le ministre du budget sur les bases d'imposition à la taxe professionnelle des commerçants non sédentaires ou des autres réponses publiées au Journal officiel le 18 mars 2008 page 2205 et au Journal officiel le 3 mars 2009, page 2041, qui n'ajoutent rien à la loi fiscale ; qu'elle ne démontre pas davantage que les services auraient inexactement appliqué l'article 1647 D du code général des impôts en commettant des erreurs s'agissant de la base brute d'imposition ou que certains artisans ou ouvriers auraient été, à tort, exonérés de taxe professionnelle en application de l'article 1452 du même code ; qu'en tout état de cause, la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT ne chiffre pas précisément le préjudice allégué, contribuable par contribuable, et se borne à indiquer qu'en raison de " la faute commise par les services fiscaux ", s'agissant de l'établissement des rôles, il revient à ceux-ci de chiffrer le préjudice ; que, toutefois, il lui revient d'un part, d'établir le préjudice et d'autre part de le chiffrer, contrairement à ce qu'elle soutient, les services de l'Etat n'ayant nullement en l'espèce et en tout état de cause, à l'égard de la COMMUNE DE SAINT LEU LA FÔRET, les responsabilités en matière de cadastre qui leur incombent en application de l'article 1649 decies du code général des impôts, s'agissant de collectivités locales d'outre-mer ; que si la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT soutient que le local de la SARL V. Trans de transport routier et le local de la société GSH présentent des bases locatives permettant de les taxer à la taxe professionnelle normale et non à la cotisation minimale de taxe professionnelle, elle n'évalue pas précisément le préjudice allégué alors que les services fiscaux font valoir dans leurs écritures qu'ils ont commis une erreur de ventilation entre les valeurs locatives des différentes entreprises situées dans les mêmes locaux et que cette erreur, en tout état de cause sans influence sur le montant global de l'imposition, a été corrigée ; que s'agissant du local de la supérette SARL Zakaria le préjudice n'est pas davantage chiffré en termes de montants de recettes fiscales perdues ; qu'enfin la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT n'établit pas l'existence du préjudice allégué, soit les conséquences matérielles des décisions prises par l'administration et notamment le fait de ne pas avoir perçu des impôts ou taxes qui auraient dû être mis en recouvrement, en se bornant à affirmer que celui-ci est vraisemblable, qu'il résulte de la valeur moyenne imposable ou en se fondant sur des éléments hypothétiques et généraux tels que "la valeur locative d'attente" ; que, par suite, la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT, à l'exception de trois contribuables pour lesquels les services de l'Etat reconnaissent l'existence d'un préjudice pour lequel ils produisent un chiffrage, n'établit pas l'existence de son préjudice ; que par suite, ses demandes en tant qu'elles portent sur les autres contribuables ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur le préjudice chiffré :

10. Considérant que l'administration fiscale s'est abstenu d'émettre une rôle supplémentaire pour l'année 2003 pour un montant de 39 euros et deux rôles supplémentaires au titre de l'année 2004 pour un montant de 82 euros ; que la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORÊT conteste que les cotisations qu'elle aurait dû percevoir de ces rôles supplémentaires à émettre soient venues compenser les surplus d'imposition qu'elle a perçus, évalués au montant non contesté de 3 758 euros ; que, toutefois, les pertes de recettes de la commune résultant de ces sous-évaluations des bases locatives de certains locaux doivent être calculées en prenant en compte non seulement les insuffisantes évaluations des immeubles mais aussi la surévaluation d'autres locaux constatée à l'occasion de l'examen des réclamations de la commune ; que, par suite, c'est à bon droit que le Tribunal a jugé qu'il y avait lieu d'opérer une somme algébrique entre ces sommes à l'issue de laquelle il apparaissait que la COMMUNE avait bénéficié d'un surplus de recettes fiscales et ne pouvait prétendre à l'indemnisation d'aucun préjudice ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE-DE-SAINT-LEU-LA- FORÊT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au versement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SAINT-LEU-LA-FORET est rejetée.

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N°12VE01891 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12VE03245
Date de la décision : 20/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-03 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxes foncières.


Composition du Tribunal
Président : M. BARBILLON
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : ANTHIAN-SARBATZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-05-20;12ve03245 ?
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