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29/04/2014 | FRANCE | N°12VE02432

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 29 avril 2014, 12VE02432


Vu le recours, enregistré le 9 juillet 2012, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ;

Le ministre demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1102774 en date du 16 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a accordé à la société AutoEurope Inc. le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 712 533 euros dont elle disposait à l'expiration de l'année 2009 ;

Il soutient que :

- la Cour de justice de l'Union européenne qualifie de " prestation indirecte " la succession de deux prestations distinctes cons

istant en une première prestation entre le prestataire de service et un preneur...

Vu le recours, enregistré le 9 juillet 2012, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ;

Le ministre demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1102774 en date du 16 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a accordé à la société AutoEurope Inc. le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 712 533 euros dont elle disposait à l'expiration de l'année 2009 ;

Il soutient que :

- la Cour de justice de l'Union européenne qualifie de " prestation indirecte " la succession de deux prestations distinctes consistant en une première prestation entre le prestataire de service et un preneur intermédiaire, puis une seconde prestation entre le preneur intermédiaire et le preneur final ; dans cette hypothèse, il convient de déterminer la nature et le lieu de chacune des prestations de service effectué ;

- en l'espèce, l'activité commerciale de la société AutoEurope Inc. consiste en la réservation auprès de la société française Europcar des véhicules dont ses clientes, des agences de voyages américaines, ont besoin pour composer les voyages qu'elles proposent à la vente ; la société fournit ainsi des prestations de locations de moyens de transports à l'agence de voyage américaine, même si elle n'utilise pas, pour ce faire, ses propres moyens d'exploitation ; il y a lieu à cet égard d'insister sur la nature et les mentions des factures qu'elle émet et sur le fait qu'elle est le seul interlocuteur des agences de voyages ; ces prestations de service sont, conformément aux dispositions de l'article 259 A 1° b du code général des impôts réputées se situer en France ;

- ainsi, conformément aux dispositions de l'article 242-0 M de l'annexe II au code général des impôts, la société AutoEurope Inc. ayant réalisé des prestations de service en France au cours des années visées par les demandes de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée, c'est à bon droit que le service a rejeté ces demandes ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 86/560/CEE du Conseil du 17 novembre 1986 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Modalités de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée aux assujettis non établis sur le territoire de la Communauté ;

Vu la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2014 :

- le rapport de M. Coudert, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

1. Considérant que la société AutoEurope Inc., établie aux Etats-Unis, a demandé le 21 juin 2010, le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait à l'expiration de l'année 2009 pour un montant 712 533 euros ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES relève régulièrement appel du jugement du 16 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a accordé à la société AutoEurope Inc. le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont s'agit ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes du V de l'article 271 du code général des impôts : " Ouvrent droit à déduction dans les mêmes conditions que s'ils étaient soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) d) Les opérations non imposables en France réalisées par des assujettis dans la mesure où elles ouvriraient droit à déduction si leur lieu d'imposition se situait en France. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités et les limites du remboursement de la taxe déductible au titre de ces opérations; ce décret peut instituer des règles différentes suivant que les assujettis sont domiciliés ou établis dans les Etats membres de la Communauté européenne ou dans d'autres pays. " ; qu'aux termes du 1 de l'article 242-0 M de l'annexe II au même code, pris pour l'application de son article 271, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Les assujettis établis à l'étranger peuvent obtenir le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée qui leur a été régulièrement facturée si, au cours du trimestre civil ou de l'année civile auquel se rapporte la demande de remboursement, ils n'ont pas eu en France le siège de leur activité ou un établissement stable ou, à défaut, leur domicile ou leur résidence habituelle et n'y ont pas réalisé, durant la même période, de livraisons de biens ou de prestations de services entrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée au sens des articles 256, 256 A à 258 B, 259 à 259 C du code général des impôts " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts : " Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle " ; qu'aux termes de l'article 259 A du même code : " Par dérogation aux dispositions de l'article 259, le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France : 1° Les locations de moyens de transport : a. Lorsque le prestataire est établi en France et le bien utilisé en France ou dans un autre Etat membre de la Communauté ; b. Lorsque le prestataire est établi en dehors de la Communauté européenne et le bien utilisé en France ; (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les assujettis établis hors de l'Union européenne, qui satisfont à la condition d'absence de résidence ou d'établissement en France posée par l'article 242-0 M de l'annexe II, ne peuvent demander le remboursement de la taxe qui leur a été régulièrement facturée que si, au cours du trimestre civil ou de l'année civile auquel se rapporte la demande de remboursement, ils n'ont pas réalisé en France d'autres livraisons de biens ou prestations de service entrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée que, le cas échéant, celles qui sont énumérées au 2 de cet article ;

5. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société AutoEurope Inc. aurait réalisé des prestations de locations de moyens de transport afférentes à des véhicules utilisés en France ; qu'en effet, il ne résulte pas des termes de l'accord cadre 2008-2010 conclu entre la société Europcar International et la société intimée que cette dernière agirait en son nom propre, en tant que loueur de voitures, à l'égard de ses clients américains organisant des voyages en France, le préambule de cet accord indiquant à cet égard que la société AutoEurop Inc. " est un intermédiaire dont l'activité principale est d'agir en tant que courtier entre les fournisseurs de services de location de voiture et les clients à travers divers réseaux de distribution " ; que la circonstance que la société AutoEurop Inc. perçoit de ses clients le montant des locations de véhicules ne permet pas, à elle seule, de considérer qu'elle aurait réalisé des prestations de locations de véhicules ; que, dans ces conditions, la société intimée ne saurait être regardée comme ayant réalisé, même de façon indirecte, au cours de la période en litige, des prestations de locations de moyens de transport ; que, dès lors, l'administration fiscale ne pouvait faire application à la société des dispositions précitées du 1° de l'article 259 A du code général des impôts ; que ladite société, qui n'a pas en France le siège de son activité ou un établissement stable, ne peut pas davantage être regardée comme ayant réalisé en France des prestations de services en application des dispositions de l'article 259 du code général des impôts ; que, par suite, ainsi que le Tribunal administratif de Montreuil l'a jugé, les dispositions de l'article 242-0 M de l'annexe II ne faisaient pas obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande de la société AutoEurop Inc. tendant au remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait à l'expiration de l'année 2009 ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de la société AutoEurop Inc. ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est rejeté.

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N° 12VE02432


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12VE02432
Date de la décision : 29/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-06 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Remboursements de TVA.


Composition du Tribunal
Président : M. BARBILLON
Rapporteur ?: M. Bruno COUDERT
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : CABINET B.V.F. D LEXTER DROITS DES AFFAIRES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-04-29;12ve02432 ?
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