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29/04/2014 | FRANCE | N°12VE00999

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 29 avril 2014, 12VE00999


Vu la requête, enregistrée le 20 mars 2012, présentée pour la COMMUNE DU RAINCY, représentée par son maire en exercice, par Me Nicolaï-Loty, avocat ;

La COMMUNE DU RAINCY demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1102267 du 26 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes tendant à :

- ordonner une expertise, en application de l'article R. 621-1 du code de justice administrative, afin de déterminer si les conditions de l'état de catastrophe naturelle étaient ou non réunies pour le territoire de la commune du Rai

ncy sur la période comprise entre le 1er juillet 2009 et le 19 octobre 2009 et af...

Vu la requête, enregistrée le 20 mars 2012, présentée pour la COMMUNE DU RAINCY, représentée par son maire en exercice, par Me Nicolaï-Loty, avocat ;

La COMMUNE DU RAINCY demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1102267 du 26 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes tendant à :

- ordonner une expertise, en application de l'article R. 621-1 du code de justice administrative, afin de déterminer si les conditions de l'état de catastrophe naturelle étaient ou non réunies pour le territoire de la commune du Raincy sur la période comprise entre le 1er juillet 2009 et le 19 octobre 2009 et afin de savoir si la commune a été l'objet de dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante " l'intensité anormale d'un agent naturel " au sens des dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances ;

- surseoir à statuer dans l'attente des conclusions du rapport d'expertise ;

- annuler l'arrêté du 13 décembre 2010 des ministres de l'intérieur, de l'économie et du budget refusant de reconnaitre l'état de catastrophe naturelle sur le territoire de la commune du Raincy du 1er juillet 2009 au 19 octobre 2009 ;

- annuler la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 24 janvier 2011 motivant le rejet de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle sur le territoire de la commune du Raincy du 1er juillet 2009 au 19 octobre 2009 ;

2° de faire droit aux demandes précitées ;

3° d'enjoindre aux ministres précités, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, de prendre un arrêté reconnaissant l'état de catastrophe naturelle sur le territoire de la commune du Raincy sur la période comprise entre le 1er juillet 2009 et le

19 octobre 2009 ;

4° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la nécessité d'une expertise est établie par la double circonstance que deux communes figurant sur la même maille météorologique se sont vu reconnaitre l'état de catastrophe naturelle et que l'exclusion de la commune repose uniquement sur les éléments fournis de façon non contradictoire et non vérifiable par Météo France ; l'argumentation retenue par le tribunal revient à entériner de fait des éléments unilatéralement fournis par Météo France sans possibilité de contrôle de la part du juge alors que le ministre de l'intérieur s'est exclusivement fondé sur ces éléments fournis par Météo France ;

- les décisions litigieuses sont entachées d'une erreur de droit dès lors que les ministres se sont dessaisis de leur compétence en se croyant liés par l'avis rendu par la commission comme le montrent les visas des avis rendus et les termes de la correspondance du préfet de la Seine-Saint-Denis du 24 janvier 2011 ;

- les décisions litigieuses sont entachées d'une autre erreur de droit dès lors que les critères employés sont arbitraires et inappropriés en ce qu'ils ne permettent pas de constater de manière objective et précise le caractère anormal de l'intensité du phénomène, la définition de " sécheresse hivernale " est impossible à connaitre et les critères empiriques sont dépourvus de prévisibilité, de précision et d'objectivité ;

- les décisions litigieuses sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle présente les mêmes caractéristiques géologiques et topographiques que les communes de Clichy-sous-Bois et de Livry-Gargan reconnues en état de catastrophe naturelle et que l'année 2009 a été dépourvue de précipitations à l'est de l'Ile de France ;

..................................................................................................................bon droit les premiers juges, l'administration a pu, de manière pertinente, utiliser notamment un critère fondé sur un indice d'humidité du sol superficiel pendant quatre trimestres consécutifs, dont une décade appelée " choc hivernal " du trimestre de fin de recharge, soit du mois de janvier au mois de mars, définissant une sécheresse dite " hivernale " dès lors qu'il serait inférieur à 80 % de la normale calculée par référence à la période 1971-2000

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des assurances ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2014 :

- le rapport de Mme Geffroy, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Agier-Cabanes, rapporteur public,

- et les observations de Me A...de la Selarl genesis avocats pour la COMMUNE DU RAINCY ;

1. Considérant qu'à la suite de la sécheresse ayant caractérisé plusieurs mois de l'année 2009, la COMMUNE DU RAINCY, s'estimant en état de catastrophe naturelle, a présenté le 19 octobre 2009 au préfet de la Seine-Saint-Denis une demande de reconnaissance de cet état ; que cette demande a été rejetée par un arrêté du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat en date du 13 décembre 2010 ; que la COMMUNE DU RAINCY relève régulièrement appel du jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 26 janvier 2012 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté interministériel en tant qu'il ne la retient pas parmi les communes pour lesquelles il constate de l'état de catastrophe naturelle au titre des mouvements de terrains différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols du 1er juillet 2009 au 19 octobre 2009, ensemble la notification de cette décision en date du 24 janvier 2011 par le préfet de la Seine-Saint-Denis ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 125-1 du code des assurances : " Les contrats d'assurance, souscrits par toute personne physique ou morale autre que l'Etat et garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles, dont ceux des affaissements de terrain dus à des cavités souterraines et à des marnières sur les biens faisant l'objet de tels contrats.(...)Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises. / L'état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s'est située la catastrophe ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci couverts par la garantie visée au premier alinéa du présent article. Cet arrêté précise, pour chaque commune ayant demandé la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, la décision des ministres. Cette décision est ensuite notifiée à chaque commune concernée par le représentant de l'Etat dans le département, assortie d'une motivation. (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que si les ministres auteurs de l'arrêté litigieux ont repris à leur compte les éléments d'appréciation retenus par la Commission interministérielle instituée par la circulaire n° 84-90 du 27 mars 1984 relative à l'indemnisation des victimes de catastrophe naturelle et ont suivi sa position sur le cas de la COMMUNE DU RAINCY, laquelle s'est au demeurant bornée par sa demande de reconnaissance du 19 octobre 2009 à indiquer que neuf bâtiments étaient endommagés, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'ils se seraient estimés liés par l'avis émis par celle-ci ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que l'ensemble des dossiers de demande mentionnés par l'arrêté interministériel du 13 décembre 2010 attaqué portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle a fait l'objet d'une analyse à partir d'outils identiques de Météo-France ; que, d'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice explicative adressée à la commune que si le système de zonage Aurore a été remplacé en 2009 par un nouvel outil mis au point par Météo-France qui utilisant l'ensemble des données pluviométriques présentes dans la base de données climatologique des 4 500 postes Météo-France modélise le bilan hydrique de l'ensemble de la France métropolitaine à l'aide d'une grille composée de 8977 mailles carrées de 8 km de côté, ce remplacement de système de mesures qui tient compte de l'état des connaissances acquises et dont la pertinence n'est pas sérieusement contestée, n'est pas de nature à démontrer l'absence alléguée d'objectivité, de prévisibilité et de précision des critères du modèle utilisé en 2009 ; que, d'autre part, contrairement à ce que soutient la commune, et ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, l'administration a pu, de manière pertinente, utiliser notamment un critère fondé sur un indice d'humidité du sol superficiel pendant quatre trimestres consécutifs, dont une décade appelée " choc hivernal " du trimestre de fin de recharge, soit du mois de janvier au mois de mars, définissant une sécheresse dite " hivernale " dès lors qu'il serait inférieur à 80 % de la normale calculée par référence à la période 1971-2000; qu'enfin, si les communes de Livry-Gargan et de Clichy-sous-Bois ont fait l'objet par le même arrêté d'une constatation de l'état de catastrophe naturelle, il ressort des pièces du dossier que ces communes ne figurent que pour une partie de leur superficie sur la même maille météorologique de 8 kilomètres de côté n° 1456 ayant servi de seule base d'analyse pour Le Raincy et que, contrairement à ce que soutient la commune, il ressort clairement desdites pièces, notamment des éléments fournis par Météo-France soumis au contradictoire en première instance comme en appel, que la circonstance que l'état de catastrophe naturelle a été constaté dans ces deux communes situées, comme la commune requérante, dans le département de la Seine-Saint-Denis, mais qui appartiennent également pour Livry-Gargan aux mailles de 8km de côté n°s 1353, 1354 et 1457 et pour Clichy-sous-Bois n° 1457, ne démontre aucunement, dès lors que s'agissant de la maille commune n° 1456 les résultats sont cohérents pour les trois communes, que les critères d'appréciation seraient, ainsi que le soutient la commune sans apporter le moindre élément de preuve, arbitraires ou inappropriés ou empiriques ou dépourvus de prévisibilité, de précision et d'objectivité ; que la requérante n'est par suite pas fondée à soutenir que le caractère anormal de l'intensité du phénomène n'aurait pas été apprécié de manière objective et appropriée ;

5. Considérant, en troisième lieu, que si la COMMUNE DU RAINCY soutient en appel que l'Etat n'a pu légalement subordonner la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle dans une commune à un critère supplémentaire tenant à ce que les critères météorologiques précités soient satisfaits sur au moins 10% de son territoire, il est constant que ce n'est pas ce critère spatial qui a lui été opposé, dès lors qu'il ne résulte pas des pièces du dossier qu'une partie quelconque du territoire du Raincy aurait été touchée par une sécheresse répondant aux critères météorologiques alternatifs appliqués ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qui aurait été ainsi commise doit en tout état de cause être écarté ;

6. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, du rapport météorologique de la sécheresse en 2009 précis et argumenté établis par la direction de la climatologie de Météo-France dont les résultats ne présentent pas d'incohérences avec le contenu des douze bulletins mensuels de situation hydrologique en Ile-de-France établis par la direction régionale de l'environnement de la préfecture d'Ile de France produits en appel par la requérante, que la sécheresse et la réhydratation des sols, survenues du 1er juillet 2009 au 19 octobre 2009, sur le territoire de la COMMUNE DU RAINCY, n'a pas revêtu un caractère d'intensité anormale justifiant que soit constaté l'état de catastrophe naturelle ;

Sur les conclusions aux fins d'expertise :

7. Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances précitées qu'il appartient seulement à l'autorité administrative de rechercher si un agent naturel a revêtu une intensité anormale engendrant un état de catastrophe naturelle ; qu'il ressort des pièces du dossier et de ce qui a été dit précédemment que les éléments nécessaires à cette détermination, tels que l'indice d'humidité du sol superficiel égal à 84 % de la normale pour le critère de sécheresse dite " hivernale " et de 75 % pour le critère de sécheresse dite " estivale ", et la justification pour retenir une intensité anormale du phénomène notamment de la fixation de seuils inférieurs respectivement à 80 % et 70 % figurent déjà au dossier ; qu'ainsi, les mesures d'expertises demandées par la commune requérante dont les résultats étaient supérieurs aux seuils fixés en la matière sont dépourvues d'utilité ;

8. Considérant, d'autre part, que le constat de dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante " l'intensité anormale d'un agent naturel " allégués par la commune et la recherche d'un lien de causalité entre ces derniers et le phénomène climatique de 2009 sont, eu égard à ce qui a été dit précédemment, et en tout état de cause, dépourvues d'utilité ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DU RAINCY n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, les conclusions de la commune qui tendent au prononcé d'une injonction doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la COMMUNE DU RAINCY de la somme demandée par cette dernière au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

11. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DU RAINCY la somme que l'Etat demande au titre des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DU RAINCY, est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du ministre de l'intérieur présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 12VE00999


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE00999
Date de la décision : 29/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

01-02-02-01-03 Actes législatifs et administratifs. Validité des actes administratifs - Compétence. Répartition des compétences entre autorités disposant du pouvoir réglementaire. Autorités disposant du pouvoir réglementaire. Ministres.


Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme AGIER-CABANES
Avocat(s) : SELAS ARCOLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-04-29;12ve00999 ?
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