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06/02/2014 | FRANCE | N°11VE01848

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 06 février 2014, 11VE01848


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2011, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Douvier, avocat ; M. A...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0907034 du 10 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2002, et des pénalités y afférentes ;

2° de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes a

u titre de l'année 2002 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 eu...

Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2011, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Douvier, avocat ; M. A...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0907034 du 10 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2002, et des pénalités y afférentes ;

2° de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes au titre de l'année 2002 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'article 167 bis du code général des impôts n'est pas conforme aux stipulations de l'accord sur la libre circulation des personnes conclu entre l'Union européenne et la Suisse ; ces stipulations confèrent une liberté d'établissement équivalente à celle prévue par le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; les dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts ne sont pas proportionnées à l'objectif de lutte contre l'évasion fiscale qu'elles poursuivent, dès lors que l'administration aurait pu atteindre ce but par d'autres biais ; les réserves prévues par l'article 21 de l'accord sur la libre circulation des personnes sont inapplicables ;

- les dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts ne sont pas conformes aux stipulations de la convention franco-suisse ; le fait générateur du report d'imposition se situe au moment de la cession effective des titres ; ces dispositions créent une double imposition juridique à laquelle la convention franco-suisse vise à remédier ;

- à titre subsidiaire, l'article 15.5 de la convention franco-suisse s'oppose à la taxation en France d'une plus-value latente ; il est devenu résident fiscal suisse dès le jour du transfert de son domicile ;

- le tribunal a méconnu les règles relatives à la charge de la preuve en estimant qu'il ne justifiait pas que sa méthode était plus pertinente que celle utilisée par l'administration ;

- la période de référence retenue par l'expert permet de prendre en compte les variations du cours de bourse, l'administration ne justifie pas quant à elle les raisons du recours à une période de référence différente, alors même qu'elle s'appuie sur la même méthodologie que celle retenue par l'expert ; la déclaration de transfert de domicile devait nécessairement être déposée à l'avance, pour tenir compte des délais nécessaires à l'expert pour pouvoir évaluer les titres ;

- le recours par l'administration à une période de trois mois n'est pas justifié, les raisons qui ont conduit l'expert à retenir une telle période ne sont plus pertinentes si la période de référence change ; l'administration n'explique pas davantage la valeur de 26 % retenue au... ; de la même manière, l'administration ne saurait se retrancher derrière la circonstance que l'expert avait retenu une valeur de décote identique ;

- le tribunal a écarté les éléments de preuve qu'il apportait en s'appuyant sur l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, alors qu'il n'a jamais entendu s'en prévaloir ; aucune doctrine opposable n'existe d'ailleurs en ce qui concerne l'évaluation des titres non cotés ;

- dès lors que les dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts ne sont pas conformes aux stipulations de la convention franco-suisse et de l'accord sur la libre circulation des personnes, il y a lieu de lui accorder également la décharge des cotisations supplémentaires de contributions sociales ;

- le tribunal n'a pas répondu à son moyen tiré de ce que la doctrine, opposable en application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ne permettait pas de taxer les contributions sociales ; il a ainsi entaché son jugement d'une insuffisance de motivation ;

- la doctrine administrative énumère de manière limitative les catégories de plus-values assujetties aux prélèvements sociaux, et ne cite pas les plus-values latentes ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ses protocoles additionnels n° 1 et 4 ;

Vu la convention entre la République française et la Confédération suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune du 9 septembre 1966 ;

Vu l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, fait à Luxembourg le 21 juin 1999 ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 janvier 2014 :

- le rapport de Mlle Rudeaux, premier conseiller,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., substituant Me Douvier, pour M.A... ;

1. Considérant que M. A...a transféré son domicile fiscal en Suisse le 7 juin 2002 et a déclaré notamment, conformément aux dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts, une plus-value latente constatée sur des titres qu'il détenait dans la SA SAIP, pour laquelle il a demandé et obtenu le bénéfice du sursis de paiement prévu au II du même article ; qu'à la suite de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont il a fait l'objet au titre de l'année 2002, l'administration a rehaussé le montant de la plus-value ainsi déclarée et a mis à sa charge des suppléments d'impôt sur le revenu et des cotisations supplémentaires de contributions sociales, assortis de pénalités ; que le requérant relève appel du jugement du 10 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge de ces impositions supplémentaires ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, dans son mémoire en réplique devant les premiers juges, M. A... se prévalait, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des instructions administratives 5 L-4-97 et 5 L-5-97 du 26 mai 1997 et soutenait qu'il ne pouvait être assujetti aux contributions sociales ; qu'il résulte des mentions du jugement attaqué que les premiers juges ont considéré que le requérant n'était pas fondé à se prévaloir, sur le fondement de ces dispositions, des instructions susmentionnées, dès lors qu'elles n'excluaient pas l'assujettissement à ces contributions des plus-values imposables en application de l'article 167 bis du code général des impôts ; que les premiers juges ont ainsi répondu au moyen de M.A..., par un jugement suffisamment motivé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'impôt sur le revenu :

Quant aux moyens tirés de la méconnaissance de l'article 167 bis du code général des impôts :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 167 bis du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " 2. Une déclaration provisoire des revenus imposables en vertu du 1 et du 1 bis est produite dans les trente jours qui précèdent le transfert du domicile hors de France. Elle est soumise aux règles et sanctions prévues à l'égard des déclarations annuelles. Elle peut être complétée, s'il y a lieu, jusqu'à l'expiration des deux premiers mois de l'année suivant celle du départ. A défaut de déclaration rectificative souscrite dans ce délai, la déclaration provisoire est considérée comme confirmée par l'intéressé. " et qu'aux termes de l'article 167 bis du même code, dans sa rédaction applicable à la date des impositions en litige : " I. 1. Les contribuables fiscalement domiciliés en France pendant au moins six années au cours des dix dernières années sont imposables, à la date du transfert de leur domicile hors de France, au titre des plus-values constatées sur les droits sociaux mentionnés à l'article 150-0 A et détenus dans les conditions du f de l'article 164 B (titre de la décote, laquelle n'a pas vocation à couvrir seulement l'absence de liquidité) / II. 1. Le paiement de l'impôt afférent à la plus-value constatée peut être différé jusqu'au moment où s'opérera la transmission, le rachat, le remboursement ou l'annulation des droits sociaux concernés. (titre de la décote, laquelle n'a pas vocation à couvrir seulement l'absence de liquidité) / 3 (titre de la décote, laquelle n'a pas vocation à couvrir seulement l'absence de liquidité) L'impôt acquitté localement par le contribuable et afférent à la plus-value effectivement réalisée hors de France est imputable sur l'impôt sur le revenu établi en France à condition d'être comparable à cet impôt (titre de la décote, laquelle n'a pas vocation à couvrir seulement l'absence de liquidité) / III. À l'expiration d'un délai de cinq ans suivant la date du départ ou à la date à laquelle le contribuable transfère de nouveau son domicile en France si cet événement est antérieur, l'impôt établi en application du I est dégrevé d'office en tant qu'il se rapporte à des plus-values afférentes aux droits sociaux qui, à cette date, demeurent titre de la décote, laquelle n'a pas vocation à couvrir seulement l'absence de liquidité(titre de la décote, laquelle n'a pas vocation à couvrir seulement l'absence de liquidité " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'avant de transférer son domicile vers la Suisse le 7 juin 2002, M.A..., fondateur et dirigeant du groupe Buffalo Grill, a déposé le 10 mai 2002 une déclaration de ses revenus perçus au titre de l'année 2002, accompagnée d'une déclaration annexe modèle 2041, mentionnant les plus-values latentes constatées sur les droits sociaux qu'il détenait alors, imposables en application des dispositions précitées de l'article 167 bis du code général des impôts ; qu'il n'a pas par la suite déposé de déclaration rectificative ; que M. A...a notamment mentionné une plus-value latente de 56 555 851 euros, afférente aux actions qu'il possédait dans la SA SAIP, société holding non cotée détenant essentiellement des parts dans la société cotée Buffalo Grill ; que, pour parvenir à ce chiffre, le requérant a eu recours à l'expertise de la société BIPE Finance ; que celle-ci a évalué les titres de la société SAIP à partir de sa valeur patrimoniale, formée par la somme de la valeur comptable de ses capitaux propres et de la plus-value latente sur les titres détenus dans la société Buffalo Grill ; que, pour calculer cette plus-value latente, la valeur unitaire des titres détenus dans la société Buffalo Grill a été estimée à partir de la moyenne des cours boursiers au cours d'une période de trois mois allant du 1er janvier 2002 au 29 mars 2002, soit 10,18 euros ; que, par une proposition de rectification datée du 23 décembre 2005, l'administration a accepté d'évaluer les titres de la société SAIP au moyen de la valeur patrimoniale ainsi calculée, mais a retenu la moyenne des trente derniers cours de bourse de l'action Buffalo Grill au 6 mai 2002, soit une valeur unitaire de 12,65 euros ; qu'à la suite des observations formulées par M. A..., l'administration a finalement retenu une période de référence de trois mois expirant le 6 mai 2002, a ainsi déterminé une valeur unitaire de l'action Buffalo Grill égale à 11,82 euros, et a rectifié la plus-value latente de 8 159 308 euros en base ;

S'agissant de la déclaration des plus-values latentes :

5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 167 bis du code général des impôts que la plus-value latente constatée sur les droits sociaux doit être évaluée à partir de la valeur de ces titres au jour du transfert du domicile ; que si le contribuable doit déposer une déclaration dans les trente jours précédant son départ, cette dernière revêt seulement un caractère provisoire et ne le dispense pas de produire une déclaration rectificative jusqu'à l'expiration des deux premiers mois de l'année suivant celle de son départ lorsque le montant de la plus-value ainsi déclarée doit être modifié, notamment en raison d'éléments nouveaux survenus entre le dépôt de la déclaration et la date effective du départ ; qu'il suit de là que M. A... ne saurait soutenir qu'il ne disposait pas des moyens pour effectuer une telle modification et que, dès lors que l'expert auquel il a eu recours aurait eu besoin d'un délai pour préparer la déclaration, il était lui-même tenu de respecter ce délai et d'arrêter au 29 mars 2002, soit à la date fixée par l'expert, le terme de la période de référence de trois mois qu'il a mise à la base de son évaluation ; qu'en outre et en tout état de cause, M. A...détenait également des actions de Buffalo Grill directement et les a évaluées dans sa déclaration déposée le 10 mai 2002 en tenant compte de la moyenne des trente derniers cours de bourse à la date du 6 mai 2002, soit 12,65 euros ; qu'il pouvait ainsi, contrairement à ce qu'il soutient, sans difficulté et sans modifier la méthodologie préconisée par son expert, déposer une déclaration provisoire retenant une période dont le terme serait plus proche du fait générateur de l'imposition ;

S'agissant de l'évaluation des titres :

6. Considérant que, pour déterminer la plus-value latente imposable conformément aux dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts, la valeur vénale des titres non cotés en bourse sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande au jour du transfert de domicile, date où la cession théorique de ces parts serait intervenue ;

7. Considérant, d'une part, que l'administration a accepté que la période de référence expire avant la date du transfert de domicile ; que, toutefois, afin de prendre en compte une valeur vénale des titres de la société Buffalo Grill plus proche du fait générateur de l'imposition que celle adoptée par M.A..., elle a déplacé au 6 mai 2002 le point d'arrivée de cette période tout en lui conservant une durée de trois mois ; que le requérant soutient que l'administration aurait dû dès lors étendre cette durée à six mois afin de pondérer les effets de la hausse conjoncturelle du montant des titres au cours de la période précédant son départ de France ; que, toutefois, il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport de l'expert de la société BIPE Finance que si la société Buffalo Grill détenait au 1er janvier 2002 une position dominante avec plus de 50 % de parts de marché, le groupe avait dû faire face, au cours de l'année 2001, à des pertes à la suite de ses opérations de diversification et de la crise dite de la " vache folle " ; que de ce fait l'action Buffalo Grill a subi une tendance baissière jusqu'en octobre 2001, suivie d'une reprise qui s'est accentuée au cours des premiers mois de l'année 2002 ; que le choix fait par l'expert d'une période de trois mois allant du 1er janvier 2002 au 29 mars 2002 s'explique ainsi par le parti méthodologique de ne pas prendre en compte l'année 2001 ; que ce parti est justifié en l'espèce et a été respecté par l'administration ; que, d'ailleurs, l'administration relève, dans ses écritures, que la tendance haussière s'est poursuivie au-delà du terme de la période qu'elle avait elle-même retenue, le cours de l'action de Buffalo Grill étant d'environ 16 euros le 7 juin 2002, jour du transfert du domicile de M. A... ; que, dès lors, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait dû retenir une période de référence de six mois ;

8. Considérant, d'autre part, qu'après avoir calculé la valeur comptable des capitaux propres et de la plus-value latente précités, l'expert a estimé que, dès lors que la SA SAIP détenait 49,84 % du capital de Buffalo Grill, il y avait lieu d'appliquer une surcote de 26 % ; que cette société étant une holding, l'expert a par ailleurs pratiqué une réfaction dite " décote de holding ", qu'il a fixée à 26 % ; que l'administration a repris, dans son estimation, les mêmes taux de décote et de surcote que ceux déterminés par l'expert ; que si le requérant affirme que ces taux cesseraient d'être pertinents dès lors que la période de référence de trois mois a, ainsi qu'il a été dit au point 7, été décalée par l'administration de plus de trente jours, il ne résulte pas de l'instruction qu'une telle modification aurait une incidence sur les motifs ayant conduit à la détermination des taux de décote et de surcote applicables ; qu'enfin à supposer, comme le soutient M.A..., dans le dernier état de ses écritures, que " la pratique commune " conduirait à retenir un taux de décote pour absence de liquidité de 30 %, supérieur au taux retenu par son propre expert, cette allégation ne repose sur aucun élément propre à la société de holding concernée, société dont il détenait 100 % du capital et dont par suite il décidait seul des cessions à entreprendre ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 6 à 8 que l'administration établit que son estimation de la valeur vénale des titres de la SA SAIP permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande au jour du transfert de domicile de M. A...; qu'ainsi les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts ne sont pas fondés et doivent être écartés ;

Quant au moyen tiré de l'atteinte à la liberté d'établissement :

10. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 43 du traité instituant la Communauté européenne, repris à l'article 49 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " (titre de la décote, laquelle n'a pas vocation à couvrir seulement l'absence de liquidité) les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un Etat membre dans le territoire d'un autre Etat membre sont interdites. Cette interdiction s'étend également aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d'un Etat membre établis sur le territoire d'un Etat membre " ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'accord du 21 juin 1999 sur la libre circulation des personnes conclu entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, fait à Luxembourg le 21 juin 1999 : " L'objectif de cet accord, en faveur des ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne et de la Suisse, est : / a) d'accorder un droit d'entrée, de séjour, d'accès à une activité économique salariée, d'établissement en tant qu'indépendant et le droit de demeurer sur le territoire des parties contractantes (titre de la décote, laquelle n'a pas vocation à couvrir seulement l'absence de liquidité) " ; que l'article 4 du même accord stipule que : " Le droit de séjour et d'accès à une activité économique est garanti sous réserve des dispositions de l'article 10 et conformément aux dispositions de l'annexe I " ; qu'aux termes de l'article 6 de ce même accord : " Le droit de séjour sur le territoire d'une partie contractante est garanti aux personnes n'exerçant pas d'activité économique selon les dispositions de l'annexe I relatives aux non actifs " ; qu'enfin, son article 16, intitulé " référence au droit communautaire ", stipule que : " 1. Pour atteindre les objectifs visés par le présent accord, les parties contractantes prendront toutes les mesures nécessaires pour que les droits et obligations équivalant à ceux contenus dans les actes juridiques de la Communauté européenne auxquels il est fait référence trouvent application dans leurs relations. 2. Dans la mesure où l'application du présent accord implique des notions de droit communautaire, il sera tenu compte de la jurisprudence pertinente de la Cour de justice des Communautés européennes antérieure à la date de sa signature. La jurisprudence postérieure à la date de la signature du présent accord sera communiquée à la Suisse. En vue d'assurer le bon fonctionnement de l'accord, à la demande d'une partie contractante, le comité mixte déterminera les implications de cette jurisprudence " ;

12. Considérant que les stipulations précitées de l'article 43 du traité instituant la Communauté européenne, qui s'opposent à l'institution, par un Etat membre de l'Union européenne, de règles qui auraient pour effet d'entraver la liberté d'établissement de certains de ses ressortissants sur le territoire d'un autre Etat membre, ne peuvent être utilement invoquées par un contribuable ayant établi son domicile fiscal en dehors de l'Union européenne ; que la Confédération suisse n'ayant pas adhéré au marché intérieur de l'Union, l'interprétation du droit de l'Union concernant la liberté d'établissement ne peut être automatiquement transposée à l'interprétation de l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la circulation des personnes du 21 juin 1999 en l'absence de disposition expresse à cet effet dans l'accord lui-même ; que les articles 1er et 6 précités de l'accord ainsi que l'annexe à laquelle ce dernier article renvoie ont pour objet de définir les conditions du droit d'entrée et de séjour sur le territoire des parties contractantes ainsi que le droit de bénéficier dans le pays d'accueil d'un traitement équivalent à celui accordé par ce dernier à ses propres ressortissants en ce qui concerne les conditions de séjour en tant qu'inactif et ne contiennent aucune stipulation faisant obstacle à l'application de l'article 167 bis du code général des impôts à un contribuable qui, n'exerçant pas d'activité économique, transfère son domicile fiscal en Suisse ; que le paragraphe 1 de l'article 16 de cet accord n'a pas pour effet de rendre applicables toutes les dispositions du droit de l'Union mais est limité aux droits et obligations qui découlent des actes du droit dérivé de l'Union mentionnés à l'annexe de ce même accord ; que le paragraphe 2 de l'article 16 ne permet d'invoquer la jurisprudence pertinente de la Cour de justice des Communautés européennes antérieure à la date de signature de l'accord que lorsque son application " implique des notions du droit communautaire " ; qu'en se bornant à indiquer qu'il détenait des participations substantielles dans plusieurs sociétés, dont la SA SAIP, au jour de son départ, et qu'il possède encore aujourd'hui ces titres, M. A...ne justifie pas qu'il aurait transféré son domicile en Suisse pour y exercer une activité professionnelle ; qu'il ne peut dès lors utilement se prévaloir de ce que les dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts méconnaîtraient le principe de la liberté d'établissement prévu par l'article 43 du traité que les stipulations de l'accord du 21 juin 1999 auraient, selon ses allégations, rendu applicable aux relations entre la France et la Suisse ;

Quant au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2-2 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

13. Considérant qu'aux termes de ces stipulations : " Toute personne est libre de quitter n'importe quel pays, y compris le sien " ;

14. Considérant que l'article 167 bis du code général des impôts prévoyait l'imposition immédiate, en cas de transfert du domicile fiscal du contribuable hors de France, des plus-values constatées sur les valeurs mobilières qu'il détenait lorsque l'ensemble des droits détenus par sa famille et lui-même dans les bénéfices d'une société avait dépassé 25 % des bénéfices au cours des cinq années précédentes ; que cet article n'avait ni pour objet, ni pour effet, de soumettre à de quelconques restrictions ou conditions l'exercice effectif, par les personnes qu'elles visent, de la liberté d'aller et venir, et notamment de quitter le territoire pour s'installer dans un autre Etat ; que, par suite, ces dispositions ne méconnaissent pas l'article 2-2 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Quant au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

15. Considérant qu'aux termes de ces stipulations : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précitées ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou amendes " ;

16. Considérant que le requérant soutient que l'imposition des plus-values latentes prévue au I de l'article 167 bis du code général des impôts ainsi que l'obligation de constituer des garanties afin de bénéficier du sursis de paiement prévu au II de cet article constituent une atteinte à son droit au respect des biens, dès lors qu'il a dû supporter des frais pour nantir des titres financiers donnés en garantie au Trésor et a payé l'impôt à la suite de la cession de ses titres moins de cinq années avant son départ ; qu'il résulte toutefois des stipulations précitées que le droit au respect de ses biens qu'elles reconnaissent à toute personne physique ou morale ne porte pas atteinte au droit des Etats de mettre en oeuvre les lois qu'ils jugent nécessaires pour assurer le paiement des impôts ; qu'il suit de là que, compte tenu de l'objet et de la portée de l'article 167 bis du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur et de la marge d'appréciation dont disposent les Etats en cette matière, l'imposition des plus-values latentes à la date du transfert du domicile fiscal hors de France, assortie de la faculté de différer le paiement de cette imposition jusqu'à la transmission, au rachat, au remboursement ou à l'annulation des droits sociaux concernés, et alors même que ce sursis de paiement est subordonné à l'obligation de constituer des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor, ne porte pas atteinte au droit au respect des biens protégé par ces stipulations ; qu'en tout état de cause, M. A...ne justifie pas avoir exposé des frais pour pouvoir fournir des garanties au Trésor ;

Quant au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

17. Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la convention doit être assurée sans distinction aucune fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, l'origine nationale ou sociale ou toute autre situation. " ;

18. Considérant qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est, au sens des stipulations des articles 14 de la convention européenne des droits de l'homme et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, discriminatoire, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne vise pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec l'objet de la loi ; que M. A...se plaint de ce qu'à la suite de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 11 mars 2004 " Lasteyrie du Saillant ", il aurait subi une discrimination dès lors que seuls les contribuables s'installant dans un autre Etat membre de l'Union européenne auraient bénéficié d'un dégrèvement auprès de l'administration fiscale ; que, toutefois, les ressortissants des Etats tiers et ceux de l'Union européenne ne se trouvent pas dans une situation analogue, notamment au regard de la liberté d'établissement ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Quant au moyen tiré de la méconnaissance des stipulations des articles 14 et 15 de la convention fiscale conclue entre la France et la Suisse en date du 9 septembre 1966 :

19. Considérant qu'aux termes du 4 de l'article 14 de cette convention : " Lorsqu'une personne physique a transféré définitivement son domicile d'un Etat contractant dans l'autre, elle cesse d'être assujettie dans le premier Etat aux impôts pour lesquels le domicile fait règle dès l'expiration du jour où s'est accompli le transfert du domicile. L'assujettissement aux impôts pour lesquels le domicile fait règle commence dans l'autre Etat à compter de la même date " et qu'aux termes du 5 de l'article 15 du même texte : " Les gains provenant de l'aliénation de tous biens autres que ceux qui sont mentionnés aux paragraphes 1, 2 et 3 ne sont imposables que dans l'Etat dont le cédant est un résident " ;

20. Considérant que les stipulations du 5 de l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse qui réservent à l'Etat de résidence l'imposition des plus-values réalisées lors de la cession de valeurs mobilières, qui ne relèvent pas du 2 ou du 3 de cet article, ne font pas obstacle à ce qu'une personne ayant son domicile fiscal en France soit imposée sur les plus-values constatées lorsqu'elle transfère son domicile fiscal hors de France ; que, par suite, M. A...lequel, en application du 4 de l'article 4 de cette même convention, conservait la qualité de résident de France jusqu'à l'expiration du jour où s'est accompli le transfert de son domicile en Suisse, n'est pas fondé à soutenir que l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse ferait obstacle à l'imposition de ses plus-values latentes ;

En ce qui concerne les contributions sociales :

Sur le terrain de la loi :

21. Considérant, en premier lieu, que M. A...soutient que, dès lors que les dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts seraient contraires à la convention fiscale franco-suisse, à l'accord sur la libre circulation des personnes signé entre la France et la Suisse et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les contributions sociales auxquelles il a été assujetti ne seraient pas dues ; qu'il résulte toutefois de ce qui a été dit aux points 5 à 20 que son moyen ne peut qu'être écarté ;

22. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu du e) des articles L. 136-6 du code de la sécurité sociale et 1600-0 C du code général des impôts, les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu des plus-values soumis à l'impôt sur le revenu à un taux proportionnel ; qu'en vertu de l'article 1600-0 F bis du code général des impôts, les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B de ce code sont assujetties à un prélèvement sur les revenus et les sommes visés à l'article 1600-0 C ; qu'aux termes de l'article 1600-0 G du même code, les personnes physiques désignées à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale sont assujetties à une contribution perçue à compter de 1996 et assise sur les revenus du patrimoine définis au I de l'article L. 136-6 de ce code ; que l'ensemble de ces dispositions, qui n'établissent aucune distinction entre les plus-values constatées et les plus-values effectivement réalisées, s'applique en conséquence aux plus-values mentionnées à l'article 167 bis du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige ; que, par suite, la circonstance que les dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale auraient été modifiées depuis 2011, postérieurement au litige, lors de l'adoption des nouvelles dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts, est sans incidence ;

23. Considérant, enfin, qu'ainsi qu'il a été dit au point 20, M. A...conservait la qualité de résident de France jusqu'à l'expiration du jour où s'est accompli le transfert de son domicile en Suisse ; qu'au moment de l'imposition, lors du transfert de son domicile en Suisse, de la plus-value latente réalisée sur le territoire français en application des dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts, il était fiscalement domicilié titre de la décote, laquelle n'a pas vocation à couvrir seulement l'absence de liquidité; que les dispositions relatives aux contributions sociales étaient dès lors applicables aux plus-values latentes ;

Sur le terrain de la doctrine :

24. Considérant que les instructions administratives 5 L-4-97 et 5 L-5-97 du 26 mai 1997 relatives, respectivement, à la contribution au remboursement de la dette sociale et à la contribution sociale généralisée, reprises par les documentations administratives de base 5 B 3233 et 5 B 3234 du 23 juin 2000, n'excluent pas l'assujettissement à ces contributions des plus-values imposables en application de l'article 167 bis du code général des impôts ; qu'en tout état de cause, ces instructions, qui ne contiennent aucune liste exhaustive des revenus soumis aux prélèvements sociaux, sont antérieures à l'entrée en vigueur des dispositions en litige relatives à l'article 167 bis de ce code ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de ces instructions administratives ;

25. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

26. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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N° 11VE01848


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