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28/01/2014 | FRANCE | N°12VE03797

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 28 janvier 2014, 12VE03797


Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 2012, présentée pour Mme A... B..., demeurant..., par Me Partouche-Kohana, avocat ; Mme B... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1200369 en date du 18 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de médiation du département de la Seine-Saint-Denis du 14 décembre 2011 rejetant sa demande de classement prioritaire et urgent en vue de l'accès à un logement ;

2° d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui attribuer un logement dans ...

Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 2012, présentée pour Mme A... B..., demeurant..., par Me Partouche-Kohana, avocat ; Mme B... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1200369 en date du 18 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de médiation du département de la Seine-Saint-Denis du 14 décembre 2011 rejetant sa demande de classement prioritaire et urgent en vue de l'accès à un logement ;

2° d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui attribuer un logement dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, en application des articles L. 441-2 et suivants du code de la construction et de l'habitation ;

4° à défaut, d'enjoindre à la commission de médiation du département de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa demande ;

5° de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- le manque d'aération de son logement et la mauvaise étanchéité des menuiseries conduisent à la prolifération de moisissures sur des murs imbibés d'eau ; les branchements électriques de son appartement ne sont pas aux normes ; l'insalubrité de son logement contrevient aux prescriptions de l'article 2 du décret du 30 janvier 2002, alors que l'aîné de ses deux enfants souffre d'asthme et que le cadet est atteint d'eczéma ;

- ses conditions de ressources et de logement n'ont pas évolué depuis la date de la décision attaquée ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 janvier 2014 :

- le rapport de M. Guiard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Locatelli, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme B...fait appel du jugement du 18 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de médiation du département de la Seine-Saint-Denis du 14 décembre 2011 rejetant sa demande de classement prioritaire et urgent en vue de l'accès à un logement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes du II de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation : " La commission de médiation peut être saisie par toute personne qui, satisfaisant aux conditions réglementaires d'accès à un logement locatif social, n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande de logement dans le délai fixé en application de l'article L. 441-1-4. / (...) Elle peut également être saisie, sans condition de délai, lorsque le demandeur est logé dans des locaux (...) ne présentant pas le caractère d'un logement décent, s'il a au moins un enfant mineur (...). / Dans un délai fixé par décret, la commission de médiation désigne les demandeurs qu'elle reconnaît prioritaires et auxquels un logement doit être attribué en urgence (...) " ; que selon l'article R. 441-14-1 du même code : " La commission, saisie sur le fondement du II (...) de l'article L. 441-2-3, se prononce sur le caractère prioritaire de la demande et sur l'urgence qu'il y a à attribuer au demandeur un logement ou à l'accueillir dans une structure d'hébergement, en tenant compte notamment des démarches précédemment effectuées. Peuvent être désignées par la commission comme prioritaires et devant être logées d'urgence en application du II de l'article L. 441-2-3 les personnes de bonne foi qui satisfont aux conditions réglementaires d'accès au logement social et qui se trouvent dans l'une des situations suivantes : / (...) avoir à leur charge au moins un enfant mineur, et occuper un logement (...) présentant au moins un des risques pour la sécurité ou la santé énumérés à l'article 2 du décret du 30 janvier 2002 (...) / La commission peut, par décision spécialement motivée, désigner comme prioritaire et devant être logée en urgence une personne qui, se trouvant dans l'une des situations prévues à l'article L. 441-2-3, ne répond qu'incomplètement aux caractéristiques définies ci-dessus " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent : " Le logement doit satisfaire aux conditions suivantes, au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires : 1. Il assure le clos et le couvert. Le gros oeuvre du logement et de ses accès est en bon état d'entretien et de solidité et protège les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d'eau dans l'habitation. (...) " ;

4. Considérant que si la commission de médiation du département de la Seine-Saint-Denis n'a pas à rechercher si la qualité de demandeur prioritaire peut être attribuée à un autre titre que celui qui est invoqué devant elle, il ressort des pièces du dossier qu'en l'espèce, Mme B..., qui a signalé dans la rubrique " 9 - Soutiens éventuels " qu'elle ne bénéficiait d'aucune assistance pour formuler son recours amiable, a précisé dans la rubrique " 5 - Personnes à loger " et " 10 - Argumentaire libre " de son recours amiable du 27 avril 2011 qu'elle avait la charge de deux enfants et que son logement était " impropre à l'habitation " ; que, dans ces conditions, alors même que l'intéressée a omis de renseigner la rubrique 8.6 du formulaire consacrée aux locaux impropres à l'habitation ou insalubres, le ministre chargé du logement n'est pas fondé à faire valoir que Mme B... ne se serait pas prévalue de l'indécence de son logement dans lequel vivaient deux enfants à l'appui de son recours amiable et, par voie de conséquence, que ce moyen invoqué à l'appui de sa requête serait inopérant ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, des photographies produites par Mme B...en première instance, ainsi que du rapport d'enquête du 26 juin 2012 établi par l'inspecteur de salubrité de la ville de Drancy, que l'appartement dans lequel la requérante réside avec ses deux enfants est affecté d'une prolifération de moisissures qui trouvent notamment leur origine dans des infiltrations d'eau provenant de la toiture et de la mauvaise étanchéité des huisseries ; que, contrairement à ce que fait valoir le ministre, ce logement, dans lequel la protection contre les infiltrations d'eau n'est pas assurée, ne peut être regardé comme répondant aux caractéristiques du " logement décent " définies notamment au 1. de l'article 2 précité du décret du 30 janvier 2002 ; qu'il ressort également des pièces du dossier et, notamment, des certificats médicaux produits par Mme B..., que l'eczéma et l'asthme dont souffrent ses enfants peuvent être en rapport avec l'importante humidité qui règne dans son appartement ; que, dès lors, en refusant de reconnaître un caractère prioritaire et urgent à la demande de logement social présentée par l'intéressée, la commission de médiation du département de la Seine-Saint-Denis a méconnu les dispositions précitées de l'article R. 441-14-1 du code de la construction et de l'habitation ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Considérant que le présent arrêt n'implique pas qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis d'attribuer un logement social à Mme B... ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre à la commission de médiation du département de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation de Mme B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt qui sera faite au ministre de l'égalité des territoires et du logement ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Partouche-Kohana, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1200369 du 18 septembre 2012 du Tribunal administratif de Montreuil et la décision de la commission de médiation du département de la Seine-Saint-Denis du 14 décembre 2011 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la commission de médiation du département de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la demande de Mme B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt au ministre de l'égalité des territoires et du logement.

Article 3 : L'Etat versera à Me Partouche-Kohana une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE03797
Date de la décision : 28/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

38-07-01 Logement.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Olivier GUIARD
Rapporteur public ?: M. LOCATELLI
Avocat(s) : PARTOUCHE-KOHANA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-01-28;12ve03797 ?
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