Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2012, présentée pour la société GENERALI VIE, dont le siège est au 7 boulevard Haussmann à Paris (75456), représentée par son président directeur général en exercice, par Me A...et Me B...du cabinet d'avocats Fidal ; la société GENERALI VIE demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1002255-1002270 du 8 novembre 2011 du Tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la restitution partielle de la cotisation minimale de taxe professionnelle qu'elle a acquittée au titre de l'année 2002 ;
2° de prononcer la restitution de l'imposition pour un montant de 1 631 481 euros ;
3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- l'article 1647 B sexies du code général des impôts reprend les éléments constitutifs de la valeur ajoutée issus du décret n°79-1154 du 28 décembre 1979 et repris par la loi du 10 janvier 1980 ;
- la doctrine administrative publiée postérieurement à ladite loi confirme que la loi fiscale n'a apporté aucune modification au mode de calcul de la valeur ajoutée des entreprises d'assurance qui doit continuer à être effectuée selon le plan comptable en vigueur en 1979, qui définissait de manière indiscutable les produits financiers et les charges financières, lesquels ne comprenaient que les revenus et charges générés par les actifs de placement, à l'exclusion des plus et moins-values sur actifs de placement qui étaient comptabilisés dans les comptes de pertes et profits exceptionnels ;
- si, pour la période antérieure à 1995, la doctrine était contenue dans l'instruction 6 E-1-80 du 21 janvier 1980, pour la période postérieure il convient de se référer à l'interprétation contenue dans l'instruction référencée 6 E-8-95 du 2 août 1995 qui mentionne l'inclusion dans la valeur ajoutée des produits financiers et non des produits de placements et renvoie à l'instruction 6 E-9-79 du 17 décembre 1979, laquelle reprend le plan comptable antérieur à celui de 1995 ;
- cette interprétation est confirmée par la doctrine parue au bulletin officiel des impôts (BOI) 6 E-6-96 du 8 novembre 1996 qui renvoie à la documentation administrative de base 6 E 433 ;
- la loi fiscale ayant légalisé un texte réglementaire, il n'apparaît pas conforme à la Constitution qu'un redressement puisse être valablement fondé sur une norme nouvelle édictée par voie réglementaire sans que le législateur, comme il l'a fait en 1980, dans le cadre de ses pouvoirs qu'il tient de l'article 34, ait préalablement modifié l'assiette de l'impôt en vue de l'aligner en tant que de besoin sur la règle comptable nouvelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 80-10 du 10 janvier 1980 ;
Vu les décrets n° 94-481 et n° 94-482 du 8 juin 1994 et n° 95-153 du 7 février 1995 modifiant le plan comptable particulier à l'assurance et à la capitalisation ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2013 :
- le rapport de M. Delage, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Soyez, rapporteur public ;
1. Considérant que l'administration fiscale a soumis d'office au Tribunal administratif de Montreuil la réclamation présentée par la société GENERALI VIE qui exerçait une activité d'assurance, et tendant à la restitution partielle de la cotisation minimale de taxe professionnelle qu'elle a acquittée au titre de l'année 2002 ; que la société relève appel du jugement du 8 novembre 2011 par lequel le tribunal a rejeté sa contestation ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1647 E du code général des impôts : " I. - La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies. Le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée à prendre en compte sont ceux de l'exercice de douze mois clos pendant l'année d'imposition ou, à défaut d'un tel exercice, ceux de l'année d'imposition (...) " ; que l'article 1647 B sexies du même code prévoit que : " (...) II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. (...) / 4. En ce qui concerne les entreprises d'assurance, de capitalisation et de réassurance de toute nature, la production est égale à la différence entre : / D'une part, les primes ou cotisations ; les produits financiers ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les commissions et participations reçues des réassureurs ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les provisions techniques au début de l'exercice ; / Et, d'autre part, les prestations ; les réductions et ristournes de primes ; les frais financiers ; les provisions techniques à la fin de l'exercice (...) " ; que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont calculées les cotisations minimales de taxe professionnelle ; que, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux normes comptables dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ;
3. Considérant, en premier lieu, que si, antérieurement à sa modification entrée en vigueur le 1er janvier 1995, le plan comptable particulier à l'assurance et à la capitalisation classait les moins et les plus-values sur cession d'éléments d'actif dans le compte 84 " pertes et profits exceptionnels " et comportait un compte 77 " produits financiers ", le même plan, modifié à compter du 1er janvier 1995 par les décrets susvisés des 8 juin 1994 et 7 février 1995, classe les pertes sur réalisation et réévaluation de placements dans le compte 66 " charges des placements " et les profits provenant de la réalisation ou de la réévaluation des placements dans le compte 76 " produits des placements ", et comporte les sous-comptes 760 et 764 intitulés respectivement " revenus des placements " et " profits provenant de la réalisation ou de la réévaluation des placements " ; qu'il suit de là que les plus-values ou moins-values de cession de valeurs mobilières et immobilières de placement réalisées par une société d'assurance constituent, pour cette société, des produits et frais financiers qui doivent être inclus dans la production, telle qu'elle est définie par les dispositions précitées du 4 du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, et qu'elles ne peuvent, dès lors, être rattachées, eu égard à leur importance et à leur caractère récurrent dans l'activité et l'exploitation de celle-ci, à des produits et des frais exceptionnels ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'alors même qu'il est entré en vigueur de manière réglementaire à compter du 1er janvier 1995, soit postérieurement aux dispositions législatives du 10 janvier 1980, le plan comptable des assurances applicable à l'année de l'imposition en litige ne donnait pas des produits et charges qu'il convient de retenir pour le calcul de la valeur ajoutée une définition contraire aux dispositions de l'article 1647 B sexies du code précité ;
5. Considérant, en troisième lieu, que les décrets susvisés des 8 juin 1994 et 7 février 1995 portant approbation du nouveau plan comptable du secteur des assurances et de la capitalisation, qui ne comportent aucune disposition de nature fiscale, ne peuvent être regardés, contrairement à ce que soutient la requérante, comme instituant des règles d'assiette de l'impôt relevant de la compétence du législateur en vertu des dispositions de l'article 34 de la Constitution ; que, par suite, et à supposer que la société ait entendu soulever un tel moyen, en jugeant qu'il convenait, pour l'application des dispositions de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, de faire application du plan comptable applicable à l'année d'imposition en litige, le tribunal n'a pas méconnu les règles régissant la répartition des compétences entre les pouvoirs législatif et réglementaire ;
En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :
6. Considérant que la société GENERALI VIE reprend sans changement en appel sa contestation développée sur le terrain de la doctrine administrative ; qu'il y a donc lieu pour la Cour d'adopter sur ce point les motifs des premiers juges ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société GENERALI VIE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société GENERALI VIE la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société GENERALI VIE est rejetée.
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N°12VE00078 2