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05/12/2013 | FRANCE | N°12VE01409

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 05 décembre 2013, 12VE01409


Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2012, présentée pour la société BRICORAMA FRANCE SAS, dont le siège est rue du Moulin Paillasson à Roanne (42300), par Me Chaumanet, avocat ; la société BRICORAMA FRANCE SAS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0801965 en date du 16 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 13 décembre 2007 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial a autorisé la société Leroy Merlin à procéder à l'extension de son ma

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Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2012, présentée pour la société BRICORAMA FRANCE SAS, dont le siège est rue du Moulin Paillasson à Roanne (42300), par Me Chaumanet, avocat ; la société BRICORAMA FRANCE SAS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0801965 en date du 16 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 13 décembre 2007 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial a autorisé la société Leroy Merlin à procéder à l'extension de son magasin situé sur le territoire de la commune de Buchelay pour une superficie supplémentaire de 4 000 m2 ;

2° d'annuler ladite décision ;

3° de mettre à la charge de l'Etat et de la société Leroy Merlin la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le préfet des Yvelines aurait dû procéder à une modification de l'arrêté instituant la commission départementale d'équipement commercial et que faute de l'avoir fait, en application des dispositions du code de commerce entrées en vigueur le 1er août 2006, la composition de la commission qui a pris la décision attaquée était irrégulière ;

- l'avis de la chambre des métiers et de l'artisanat a été irrégulièrement émis et qu'il s'agit, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, d'une formalité substantielle ;

- l'avis de la chambre de commerce et d'industrie a été émis par une autorité incompétente ;

- la société Leroy Merlin ne justifie pas sa maîtrise du foncier et qu'à la date de la décision attaquée, la commune de Buchelay avait autorisé la société Leroy Merlin à déposer un dossier de permis de construire et un dossier d'équipement commercial sans que la commune n'ait préalablement délibéré sur le principe de l'aliénation des parcelles en cause ou sur le devenir du chemin rural concerné ;

- le projet en cause méconnaît l'article L. 752-6 du code de commerce en vigueur à la date de la décision attaquée dans la mesure où il entraine une surdensité manifeste dans la zone de chalandise ainsi qu'une position dominante du groupe Mulliez dans ladite zone tout en étant dénué de tout effet positif en matière d'aménagement du territoire ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie ;

Vu la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, et notamment son article 70 ;

Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 relatif à l'autorisation d'implantation de certains magasins de commerce de détail, aux observatoires et aux commissions d'équipement commercial ;

Vu le décret n° 2006-665 du 7 juin 2006 relatif à la réduction du nombre et à la simplification de la composition de diverses commissions administratives ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 2013 :

- le rapport de Mme Colrat, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Agier-Cabanes, rapporteur public ;

1. Considérant que la société BRICORAMA FRANCE SAS demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 16 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tenant à l'annulation de la décision par laquelle la commission départementale d'équipement commercial (CDEC), lors de sa séance du 13 décembre 2007, a autorisé la société Leroy Merlin à procéder à l'extension du magasin Leroy Merlin situé sur le territoire de la commune de Buchelay pour une superficie supplémentaire de 4 000 m² ;

2. Considérant que l'article 8 du décret du 9 mars 1993 relatif à l'autorisation d'implantation de certains magasins de commerce de détail, aux observatoires et aux commissions d'équipement commercial disposait que : " Le représentant des associations de consommateurs, ainsi qu'un suppléant, sont désignés en son sein par le collège des consommateurs et usagers du comité départemental de la consommation. Le représentant des associations de consommateur exerce un mandat de trois ans ; (...) " ; qu'à compter de sa modification par l'article 62-VII-II du décret du 7 juin 2006 relatif à la réduction du nombre et à la simplification de la composition de diverses commissions administratives, entré en vigueur le 1er août 2006, l'article 8 du décret du 9 mars 1993, devenu l'article R. 751-4 du code de commerce, dispose que : " Le représentant des associations de consommateurs, ainsi qu'un suppléant, sont désignés par les associations de consommateurs du département agréées, au titre de l'article L. 411-1 du code de la consommation, soit par arrêté du préfet de département, soit par leur affiliation à une association nationale elle-même agréée. / Le représentant des associations de consommateurs exerce un mandat de trois ans ; le membre titulaire ne peut effectuer deux mandats consécutifs, que ce soit en qualité de titulaire ou de suppléant. S'il perd la qualité en vertu de laquelle il a été désigné ou en cas de démission ou de décès, le représentant des consommateurs est immédiatement remplacé pour la durée du mandat restant à courir " ; qu'aux termes de l'article 61 du même décret : " (...) Les dispositions du titre II du présent décret entrent en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant sa publication. (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des visas de la décision attaquée que le représentant des associations des consommateurs qui a participé à la réunion de la commission départementale d'équipement commercial du 13 décembre 2007, a été désigné pour une durée de trois ans par un arrêté préfectoral en date du 25 octobre 2005 pris en application des dispositions du décret du 9 mars 1993 dans sa version applicable à la date de cet arrêté ; que le décret en date du 7 juin 2006, entré en vigueur le 1er août 2006, a modifié la procédure de désignation du représentant des associations de consommateurs ; qu'ainsi, la société requérante est fondée à soutenir que la composition de la commission départementale d'équipement commercial réunie le 13 décembre 2007 était irrégulière ; que, toutefois, il ressort du procès-verbal de la réunion que le représentant en cause a émis l'un des deux votes défavorables au projet et qu'ainsi il ne peut être tenu pour établi que sa participation irrégulière aux débats de la commission ait eu une influence sur le sens de la décision contestée ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 712-1 du code de commerce, dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " Dans chaque établissement public du réseau, l'assemblée générale des membres élus détermine les orientations et le programme d'action de l'établissement. A cette fin, elle délibère sur toutes les affaires relatives à l'objet de celui-ci, notamment le budget, les comptes et le règlement intérieur. Elle peut déléguer aux autres instances de l'établissement des compétences relatives à son administration et à son fonctionnement courant. (...) " ; qu'en application des dispositions de l'article R. 752-9 du même code, la demande d'autorisation commerciale doit, notamment, être accompagnée d'une étude destinée à permettre à la commission départementale d'équipement commercial d'apprécier l'impact prévisible du projet au regard des critères prévus par les articles L. 752-6 à L. 752-9 et justifiant du respect des principes posés par l'article L. 750-1 et par l'article 1er de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat ; qu'aux termes de l'article R. 752-19 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " L'étude d'impact jointe à la demande est adressée (...) à la chambre de commerce et d'industrie et à la chambre de métiers et de l'artisanat dont les circonscriptions englobent la commune d'implantation du projet ; ces organismes disposent d'un délai de six semaines à compter de leur saisine pour communiquer leurs observations à la commission. " ; qu'il résulte de la combinaison des dispositions qui précèdent que seule l'assemblée générale des membres élus de la chambre de commerce et d'industrie et celle de la chambre de métiers et de l'artisanat sont compétentes pour rendre un avis sur les demandes d'autorisation d'implantation d'équipements commerciaux ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les services de la chambre de commerce et d'industrie de Versailles ont rédigé une analyse purement descriptive du projet d'extension du magasin Leroy Merlin de Buchelay qui ne tire aucune conséquence favorable ou défavorable au projet ; que la société BRICORAMA FRANCE SAS n'est pas fondée à soutenir que ce document constituerait un avis irrégulièrement transmis aux membres de la commission départementale d'équipement commercial par une instance autre que l'assemblée générale de la chambre ;

6. Considérant qu'à supposer que le document défavorable au projet d'extension en cause émanant des services de la chambre des métiers et de l'artisanat des Yvelines, non daté, non signé et dont il n'est pas établi par le procès-verbal de la commission réunie le 13 décembre 2007 qu'il aurait été remis aux membres de la commission, puisse être regardé comme un avis défavorable au projet irrégulièrement émis par la chambre des métiers et de l'artisanat, cette circonstance est sans influence sur la décision favorable adoptée par la majorité des membres de la commission ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société BRICORAMA FRANCE SAS n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse serait illégale pour avoir été adoptée au vu d'avis irrégulièrement émis par les chambres consulaires ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 752-7 du code de commerce alors applicable : " La demande d'autorisation (...) est présentée soit par le propriétaire de l'immeuble, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain ou à exploiter commercialement l'immeuble " ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des autorisations de M. A...en date des 22 février et 23 mars 2007, que la commune de Buchelay, propriétaire des parcelles ZE 3 et ZE 6 et du chemin rural n° 36, et que la communauté d'agglomération de Mantes-en-Yvelines, propriétaire des parcelles ZE 2, 129 et 130, ont autorisé la société Leroy Merlin à déposer un dossier devant la commission départementale d'équipement commercial en vue de l'extension du magasin Leroy Merlin pour une superficie supplémentaire de 4 000 m² ; que le pétitionnaire a pu ainsi justifier par ces attestations, qui ne comportent pas de limite de validité, d'un titre l'habilitant à construire sur les terrains dont il n'est pas encore propriétaire ; qu'il a, par suite, satisfait à la condition posée par l'article R. 752-7 précité sans que la société requérante puisse utilement se prévaloir de ce que le conseil municipal de Buchelay n'a délibéré que postérieurement à la décision attaquée sur le déclassement et l'aliénation des parcelles en cause ;

9. Considérant que l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 dispose que : " La liberté et la volonté d'entreprendre sont les fondements des activités commerciales et artisanales. Celles-ci s'exercent dans le cadre d'une concurrence claire et loyale. Le commerce et l'artisanat ont pour fonction de satisfaire les besoins des consommateurs, tant en ce qui concerne les prix que la qualité des services et des produits offerts. Ils doivent participer au développement de l'emploi et contribuer à accroître la compétitivité de l'économie nationale, animer la vie urbaine et rurale et améliorer sa qualité. Les pouvoirs publics veillent à ce que l'essor du commerce et de l'artisanat permette l'expansion de toutes les formes d'entreprises, indépendantes, groupées ou intégrées, en évitant qu'une croissance désordonnée des formes nouvelles de distribution ne provoque l'écrasement de la petite entreprise et le gaspillage des équipements commerciaux et ne soit préjudiciable à l'emploi " ; qu'aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce, dans sa version applicable au litige : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. Ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés. " ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce : " Dans le cadre des principes définis aux articles L. 720-1 et L. 720-2, la commission statue en prenant en considération 1º- L'offre et la demande globale pour chaque secteur d'activité pour la zone de chalandise concernée ; 2º- La densité d'équipement en moyennes et grandes surfaces dans cette zone ; 3° L'effet potentiel du projet sur l'appareil commercial et artisanal de cette zone et des agglomérations concernées, ainsi que sur l'équilibre souhaitable entre les différentes formes de commerce (...) ; 4º- L'impact éventuel du projet en termes d'emplois salariés et non salariés ; 5º- Les conditions d'exercice de la concurrence au sein du commerce et de l'artisanat (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article R.752-8 du code de commerce : " La demande est accompagnée (...) 2° Des renseignements suivants : a) Délimitation de la zone de chalandise du projet et mention de la population de chaque commune comprise dans cette zone (...) b) Marché théorique de la zone de chalandise ; c) Equipement commercial et artisanal de la zone de chalandise (...)

d) Equipements commerciaux exerçant une attraction sur la zone de chalandise (...) " ;

10. Considérant que, pour l'application des dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce, il appartient aux commissions d'équipement commercial, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs que le projet peut présenter au regard notamment de l'emploi, de l'aménagement du territoire, de la concurrence, de la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, de la satisfaction des besoins des consommateurs et, d'autre part, en évaluant son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site envisagé ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'extension de 4 000 m² du magasin Leroy Merlin de Buchelay conduira, dans la zone de chalandise, à une densité en équipements commerciaux comparables de 156 m² pour 1 000 habitants contre 152 m² ; que, si cette densité excède celle de 132 m² constatée dans le département des Yvelines, elle reste inférieure à la densité constatée sur l'ensemble de la France métropolitaine s'agissant des commerces de détail de bricolage qui s'élève à 201 m² pour 1 000 habitants ; que la société BRICORAMA FRANCE SAS n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse serait de nature à créer une surdensité desdits commerces dans la zone de chalandise ; qu'il ressort des pièces du dossier que le groupe Mulliez disposera après réalisation du projet de 20,8 % de la surface totale des magasins de bricolage de détail dans la zone de chalandise ; que, dans ces conditions, la requérante ne démontre pas que ce groupe serait susceptible d'abuser d'une position dominante dans la zone en cause ; qu'enfin, si la requérante soutient que le projet litigieux aurait un impact négatif en termes d'aménagement du territoire, elle n'assortit cette allégation d'aucune précision permettant d'en apprécier la portée ; que, par suite, la société BRICORAMA FRANCE SAS n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée méconnaîtrait le droit de la concurrence ou serait entachée d'une erreur d'appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société BRICORAMA FRANCE SAS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions de la société Leroy Merlin fondées sur lesdites dispositions et de condamner la société BRICORAMA FRANCE SAS à lui verser 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société BRICORAMA FRANCE SAS est rejetée.

Article 2 : La société BRICORAMA FRANCE SAS versera la somme de 2 000 euros à la société Leroy Merlin en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 12VE01409 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE01409
Date de la décision : 05/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-01 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Principes généraux.


Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme AGIER-CABANES
Avocat(s) : CHAUMANET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-12-05;12ve01409 ?
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