La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/12/2013 | FRANCE | N°11VE01559

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 04 décembre 2013, 11VE01559


Vu le recours, enregistré le 29 avril 2011, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT ; le ministre demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0813640 en date du 21 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a accordé à la SAS Euro Dépôt Immobilier la restitution des cotisations minimales de taxe professionnelle qu'elle a acquittées au titre des années 2005 et 2006 ;

2° de rétablir la SAS Euro Dépôt Immobilier dans le rôle de la cotisation mi

nimale de taxe professionnelle au titre des années 2005 et 2006 à concurrence...

Vu le recours, enregistré le 29 avril 2011, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT ; le ministre demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0813640 en date du 21 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a accordé à la SAS Euro Dépôt Immobilier la restitution des cotisations minimales de taxe professionnelle qu'elle a acquittées au titre des années 2005 et 2006 ;

2° de rétablir la SAS Euro Dépôt Immobilier dans le rôle de la cotisation minimale de taxe professionnelle au titre des années 2005 et 2006 à concurrence de la restitution prononcée en première instance ;

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de droit sur la portée de l'article 1447 du code général des impôts ;

- le tribunal a commis une erreur de qualification juridique ; la qualification d'activité professionnelle au regard de la taxe professionnelle ne saurait faire abstraction de l'objet et du contexte dans lesquels la SAS Euro Dépôt Immobilier exerce son activité de location de locaux nus ; la restructuration décidée par le groupe en 2004 a été sans incidence sur l'objet, la destination des immeubles et le caractère professionnel de leur gestion ; la SAS Euro Dépôt Immobilier ne peut effectuer aucune gestion patrimoniale autonome, du fait de son appartenance au groupe ; elle ne dispose d'aucune ressource propre ; elle intervient à la place des entités exploitantes dans les demandes d'autorisation ou d'extension des grandes surfaces ; il est impossible de distinguer en l'espèce deux activités distinctes, l'une consistant dans l'exploitation commerciale et l'autre dans la gestion purement civile d'un patrimoine ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 2013 :

- le rapport de Mlle Rudeaux, premier conseiller,

- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la SAS Euro Dépôt Immobilier ;

Connaissance prise de la note en délibéré enregistrée le 25 novembre 2013, présentée pour la société Euro Dépôt Immobilier ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation du jugement et de rétablissement des impositions :

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Euro Dépôt, filiale de la société Castorama au sein du groupe Kingfisher, était propriétaire de locaux et exploitait des magasins d'articles de bricolage sous l'enseigne Brico Dépôt ; que, par une opération de restructuration du 30 novembre 2004 avec effet rétroactif au 1er février 2004, elle a apporté l'exploitation des magasins à sa filiale la SAS Brico Dépôt, et les locaux à une autre filiale, la SAS Euro Dépôt Immobilier ; que cette dernière, immatriculée le 23 janvier 2004 et créée pour assurer la gestion du patrimoine immobilier du groupe auquel elle appartient, est devenue propriétaire de plusieurs locaux à l'issue de l'opération de restructuration et a alors consenti à sa société soeur, la SAS Brico Dépôt, des baux commerciaux portant sur la location de locaux d'exploitation ; que la SAS Euro Dépôt Immobilier a spontanément souscrit des déclarations et acquitté la cotisation minimale de taxe professionnelle au titre des années 2005 et 2006 ; qu'elle a ensuite formé une réclamation tendant à obtenir la restitution de ces impositions au motif que son activité de location de locaux nus ne serait pas assujettie à la taxe professionnelle ; que cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet par l'administration ; que, par jugement du 21 décembre 2010, le Tribunal administratif de Montreuil a accordé à la SAS Euro Dépôt Immobilier la restitution des impositions contestées ; que le ministre relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes du I de l'article 1447 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. " ; que la location d'un immeuble nu par son propriétaire ne présente pas le caractère d'une activité professionnelle au sens de ces dispositions sauf dans l'hypothèse où, à travers cette location, le bailleur ne se borne pas à gérer son propre patrimoine mais poursuit, selon des modalités différentes, une exploitation commerciale antérieure ou participe à l'exploitation du locataire ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la requérante, qui n'exerçait aucune activité de location de locaux nus avant l'année 2004, n'intervient pas dans la gestion commerciale de ses locataires ; que, dans ces conditions, contrairement à ce qu'affirme le ministre, la SAS Euro Dépôt Immobilier ne poursuivrait pas, selon des modalités différentes, une exploitation commerciale antérieure ;

4. Considérant que, en deuxième lieu, si le ministre affirme que la SAS Euro Dépôt Immobilier employait une vingtaine de salariés, il n'établit ni même n'allègue que ces derniers seraient affectés à une activité autre que la gestion du patrimoine immobilier ; que s'il relève par ailleurs que la société intervient à la place des exploitants pour déposer des demandes d'autorisation d'implantation ou d'extension des magasins de la société Brico Dépôt auprès des commissions départementales et de la commission nationale d'équipement commercial, procède à des prêts intra-groupe et distribue plus de 87 % de ses résultats sous forme de dividendes à sa société mère, ces circonstances ne permettent pas d'établir que la SAS Euro Dépôt Immobilier participerait à l'exploitation de ses locataires ; que cette dernière souligne d'ailleurs, sans être contredite sur ces points, d'une part que 99,87 % et 98,33 % de son chiffre d'affaires, respectivement au titre des années 2005 et 2006, sont constitués par les revenus issus de la location de locaux nus, d'autre part que ses produits financiers provenant notamment des revenus de prêts représentent une très faible proportion de ses revenus, et enfin qu'elle n'impose aucune obligation à ses locataires et ne perçoit pas de loyers indexés même partiellement sur le chiffre d'affaires réalisé par chacun d'eux ; que, dans ces conditions, la SAS Euro Dépôt Immobilier ne peut être regardée comme participant à l'exploitation de ses locataires ;

5. Considérant, enfin, que, contrairement aux allégations du ministre, l'appartenance d'une filiale à un groupe fiscal intégré ne saurait faire obstacle, en elle-même, indépendamment de ce qui a été dit aux points 3 et 4, à ce qu'elle puisse effectuer une gestion patrimoniale autonome des biens qu'elle possède et donne en location nue ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'activité de location de locaux nus exercée par la SAS Euro Dépôt Immobilier correspond à une simple activité de gestion de son propre patrimoine, et ne présente pas le caractère d'une activité professionnelle au sens des dispositions de l'article 1447 du code général des impôts ; qu'il suit de là que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de la SAS Euro Dépôt Immobilier ;

Sur les conclusions de la SAS Euro Dépôt Immobilier tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Euro Dépôt Immobilier et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SAS Euro Dépôt Immobilier la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la SAS Euro Dépôt Immobilier est rejeté.

''

''

''

''

2

N° 11VE01559


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE01559
Date de la décision : 04/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Professions et personnes taxables.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: Melle Sandrine RUDEAUX
Rapporteur public ?: M. SOYEZ
Avocat(s) : CABINET FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-12-04;11ve01559 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award