Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2011, présentée pour la COMMUNE D'AUBERVILLIERS, représentée par son maire en exercice, par Me Seban, avocat ; la COMMUNE D'AUBERVILLIERS demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1011676 du 20 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a, à la demande de M. D... et M. E..., annulé la décision en date du 8 septembre 2010 par laquelle le maire d'Aubervilliers a exercé le droit de préemption de la commune sur un bien sis 65/67 rue des Cités à Aubervilliers pour lequel ils s'étaient portés acquéreurs ;
2° de rejeter la demande de M. D... et M. E... ;
3° de mettre à la charge de M. D... et M. E... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le jugement qui n'est pas signé, en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, est irrégulier ;
- le jugement est entaché d'une erreur de fait tenant au rejet de l'exception de non-lieu à statuer opposée par la commune ; la décision attaquée a nécessairement fait l'objet d'un retrait dès lors qu'une nouvelle déclaration d'intention d'aliéner avait été déposée à la suite de laquelle le maire n'a pas usé du droit de préemption ;
- les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en considérant que la décision était insuffisamment motivée, nonobstant le caractère imprécis du projet qui ne faisait pas obstacle à l'exercice du droit de préemption surtout en vue de la constitution de réserves foncières ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2012, présenté pour M. D... et M. E..., par Me Assous, avocat, qui demandent à la Cour :
1° de rejeter la requête ;
2° d'enjoindre à la COMMUNE D'AUBERVILLIERS de mettre fin aux effets de la décision annulée et avant toute autre mesure de s'abstenir de revendre à un tiers le bien illégalement préempté, et qu'elle propose à l'acquéreur évincé, puis le cas échéant, au propriétaire initial d'acquérir le bien, et ce, à un prix visant à rétablir autant que possible et sans enrichissement sans cause de l'une quelconque des parties les conditions de la transaction à laquelle l'exercice du droit de préemption a fait obstacle ;
3° de mettre à la charge de la requérante la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils s'en remettent à la sagesse de la Cour sur le moyen d'irrégularité du jugement invoqué par la commune et font valoir que :
- c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré qu'en l'absence de décision de retrait, le recours en excès de pouvoir n'avait pas été privé d'objet ;
- c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré que la décision qui ne fait état que d'objectifs généraux est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;
- la contradiction de la décision avec l'article 7 bis de la convention publique d'aménagement excluant la constitution de réserves foncières entache la décision d'illégalité ;
- en méconnaissance de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme et de la loi du 11 juillet 1979, tant la décision attaquée que la convention publique d'aménagement sur laquelle elle se fonde ne présentent que des considérations générales et imprécises sur la politique de la commune pour le secteur ;
Vu le mémoire, enregistré le 20 septembre 2013, présenté pour la COMMUNE D'AUBERVILLIERS qui conclut aux mêmes fins et en outre demande à la Cour de rejeter les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. D... et M. E... ;
Elle soutient en outre que :
- le moyen tiré de la prétendue erreur de droit caractérisée par la violation de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté ;
- le moyen tiré de la prétendue violation de l'article 7 bis de la convention publique d'aménagement avec la Sodeat 93 ne peut qu'être écarté ;
- la commune n'ayant nullement la propriété du bien préempté, les conclusions aux fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 septembre 2013, présenté pour M. D... et M. E... qui se désistent de leurs conclusions aux fins d'injonction et concluent par ailleurs aux mêmes fins ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2013 :
- le rapport de Mme Geffroy, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Agier-Cabanes, rapporteur public,
- et les observations de Me A... de la SCP d'avocats Seban et Associés pour la COMMUNE D'AUBERVILLIERS et Me F...substituant Me Assous pour M. D... et M. E... ;
1. Considérant que, par jugement du 20 octobre 2011 le Tribunal administratif de Montreuil a annulé, à la demande de M. D... et M. E..., la décision en date du 8 septembre 2010 par laquelle le maire d'Aubervilliers a exercé le droit de préemption de la commune sur un bien situé 65/67 rue des Cités à Aubervilliers pour lequel ils s'étaient portés acquéreurs ; que la COMMUNE D'AUBERVILLIERS relève régulièrement appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation du jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué comporte la signature du président de la formation de jugement, celle du rapporteur et celle du greffier d'audience ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que ce jugement serait irrégulier faute d'avoir été signé, manque en fait et doit être écarté ;
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Considérant que la commune reprend en appel l'exception de non-lieu à statuer sur la demande d'annulation dès lors qu'à la suite d'une nouvelle déclaration d'intention d'aliéner déposée le 17 décembre 2010, le maire n'aurait pas usé du droit de préemption ce qui signifierait selon la commune que la décision de préemption attaquée aurait nécessairement fait l'objet d'un retrait ; que cette exception de non-lieu reprise en appel dans les mêmes termes qu'en première instance et sans critiquer le jugement attaqué ni justifier d'éléments nouveaux doit être écartée par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
5. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme, le droit de préemption peut être exercé pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation d'actions ou d'opérations d'aménagement qui répondent aux objectifs énoncés par l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ; qu'en application du dernier alinéa de l'article L. 210-1 précité, la décision de préemption peut se référer aux dispositions de la délibération par laquelle une commune a délimité des périmètres déterminés dans lesquels elle décide d'intervenir pour les aménager et améliorer leur qualité urbaine ; qu'il résulte de ces dispositions et de ce qui a été dit ci-dessus que, lorsqu'une collectivité publique décide d'exercer le droit de préemption urbain pour constituer une réserve foncière à l'intérieur d'un périmètre qu'elle a délimité en vue d'y mener une opération d'aménagement et d'amélioration de la qualité urbaine, les exigences de motivation résultant de l'article L. 210-1 doivent être regardées comme remplies lorsque la décision fait référence aux dispositions de la délibération délimitant ce périmètre et qu'un tel renvoi permet de déterminer la nature de l'action ou de l'opération d'aménagement que la collectivité publique entend mener pour améliorer la qualité urbaine au moyen de cette préemption ; qu'à cette fin, la collectivité peut soit indiquer l'action ou l'opération d'aménagement prévue par la délibération délimitant ce périmètre à laquelle la décision de préemption participe, soit renvoyer à cette délibération elle-même si celle-ci permet d'identifier la nature de l'opération ou de l'action d'aménagement poursuivie ; qu'en outre, la mise en oeuvre de ce droit doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre à un intérêt général suffisant ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision de préemption du 8 septembre 2010 rappelle que le bien préempté est inclus dans le secteur de renouvellement urbain du quartier Villette Quatre Chemins et à ce titre dans la convention publique d'aménagement y afférent et ajoute que ce bien, de par sa superficie de 8 236 m² et sa localisation " entre les deux secteurs Ponts de Stains et Villette Quatre Chemins occupe une position stratégique qui va l'amener à jouer un rôle prépondérant dans la mise en oeuvre des projets " de renouvellement urbain, de résorption de l'habitat indigne, de diversification de l'offre de logements, de redynamisation de l'activité économique et commerciale et d'ouverture du secteur vers les pôles urbains notamment le pont de Stains " qui doit faire l'objet d'une restructuration " par des travaux " d'élargissement du pont, la création d'une place, l'élargissement de la rue Sadi Carnot, l'implantation d'un groupe scolaire et la restructuration de plusieurs îlots " dans le cadre de la création prochaine de la station de métro ; que si la décision de préemption se réfère ainsi à la convention publique d'aménagement telle qu'annexée à la délibération prise par le conseil municipal le 31 mars 2004, ni les mentions qu'elle comporte, ni celles qui figurent dans cette convention en ce qui concerne notamment l'îlot opérationnel prioritaire n° 3 " délimité par la rue des Cités, la rue Henri Barbusse, la rue Auvry " ni le reste de la convention ne permettent de déterminer la nature de l'opération ou de l'action d'aménagement que la collectivité publique entend mener dans ce secteur et à laquelle doit concourir la préemption litigieuse ; qu'au demeurant, d'une part, cette convention d'aménagement exclut des missions confiées à l'aménageur toute préemption pour constitution de réserve foncière, d'autre part, la commune ne justifie pas davantage d'un projet en précisant qu'elle n'a ultérieurement pas préempté le bien à la réception d'une nouvelle déclaration d'intention d'aliéner au prix de vente inchangé le 17 décembre de la même année ; qu'enfin la commune n'établit pas davantage en appel la nature d'un projet exigeant selon ses dires la constitution des réserves foncières exclues par la convention ; qu'ainsi la décision attaquée ne répond pas aux exigences des articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE D'AUBERVILLIERS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision de préemption du 8 septembre 2010 ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
8. Considérant que M. D... et M. E..., par mémoire susvisé du 27 septembre 2013, déclarent se désister purement et simplement de leurs conclusions aux fins d'injonction ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;
9. Considérant que les conclusions de la COMMUNE D'AUBERVILLIERS présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE D'AUBERVILLIERS le versement à M. D... et M. E... de la somme globale de 4 000 euros à ce titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE D'AUBERVILLIERS est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE D'AUBERVILLIERS versera à M. D... et M. E... une somme globale de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Il est donné acte du désistement de M. D... et M. E... de leurs conclusions aux fins d'injonction.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE D'AUBERVILLIERS, à M. C... D... et à M. B... E....
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2013, où siégeaient :
M. Bouleau, président ;
M. Lenoir, président assesseur ;
Mme Geffroy, premier conseiller ;
Lu en audience publique, le 17 octobre 2013.
Le rapporteur,
B. GEFFROYLe président,
M. BOULEAU Le greffier,
V. HINGANT
La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le greffier,
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N° 11VE04305