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12/03/2013 | FRANCE | N°12VE00603

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Formation plénière, 12 mars 2013, 12VE00603


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 16 février 2012 sous le n° 12VE00603, présentée pour Mme B...F...néeC..., demeurant chez..., par Me Lévy, avocat ; Mme F... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106221 du 19 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 septembre 2011 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un dé

lai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays à destination duqu...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 16 février 2012 sous le n° 12VE00603, présentée pour Mme B...F...néeC..., demeurant chez..., par Me Lévy, avocat ; Mme F... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106221 du 19 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 septembre 2011 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

2°) d'annuler les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, interdiction de retour sur le territoire français, enfin fixation du délai de départ volontaire à trente jours, datées du 29 septembre 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer un certificat de résidence temporaire sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, subsidiairement d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et en tout état de cause, d'enjoindre au préfet de retirer le signalement de non-admission la concernant du système d'information Schengen dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat en application de dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle peut prétendre à un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; elle aurait dû être convoquée devant la commission du titre de séjour ;

- la décision de refus de titre de séjour a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle a quitté son pays d'origine depuis sept années ; son époux et ses trois enfants résident avec elle en France ; elle y a noué de nombreuses relations sociales, amicales et familiales ; ses enfants sont scolarisés en France ;

- la décision de refus de titre de séjour est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ; ses enfants ne peuvent pas être contraints à quitter la France ; ils parlent uniquement le français ; deux d'entre eux sont scolarisés ; ils ne connaissent pas l'Algérie ;

- cette décision viole les dispositions de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; elle n'a plus aucun lien avec son pays d'origine ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, en raison de la scolarisation de ses enfants et de l'ancienneté du séjour de son conjoint en France ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison des illégalités affectant le refus de titre de séjour ;

- cette décision a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ; l'intérêt des enfants, en raison de leur scolarité en France, interdit de les éloigner du territoire français ;

- elle est entachée d'une erreur de droit car elle peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, en raison de son insertion en France où vit l'essentiel de sa famille ;

- l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est contraire à l'article 7.2 de la directive retour par sa rédaction restrictive en ce qui concerne la possibilité d'accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

- la décision fixant un délai de trente jours n'est pas motivée et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation du fait de sa situation personnelle et familiale et de la durée de sa présence en France ;

- la décision d'interdiction de retour d'une durée d'un an, qui comporte une motivation type, n'est pas suffisamment motivée ;

- la signataire de cette décision n'est pas compétente, faute d'une délégation de signature spécifique ;

- cette décision n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire et a été rendue en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et de l'article 41.2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la décision d'interdiction de retour, d'une durée d'un an, est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, en raison de la durée de son séjour en France et de son insertion ;

........................................................................................................

II. Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 16 février 2012 sous le n° 12VE00604, présentée pour M. A...F..., demeurant chez..., par Me Lévy, avocat ; M. F...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106220 du 19 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 septembre 2011 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

2°) d'annuler les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, interdiction de retour sur le territoire français, enfin fixation du délai de départ volontaire à trente jours, datées du 29 septembre 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer un certificat de résidence temporaire sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, subsidiairement d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et en tout état de cause, d'enjoindre au préfet de retirer le signalement de non-admission le concernant du système d'information Schengen dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat en application de dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- il peut prétendre à un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; il aurait dû être convoqué devant la commission du titre de séjour ;

- la décision de refus de titre de séjour a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il a quitté son pays d'origine depuis neuf années et il y serait isolé ; son épouse et ses trois enfants résident avec lui en France ; il y a noué de nombreuses relations sociales, amicales et familiales ; ses enfants sont scolarisés en France ;

- la décision de refus de titre de séjour est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ; ses enfants ne peuvent pas être contraints à quitter la France ; ils parlent uniquement le français ; deux d'entre eux sont scolarisés ; ils ne connaissent pas l'Algérie ;

- cette décision viole les dispositions de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; il n'a plus aucun lien avec son pays d'origine ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, en raison de la scolarisation de ses enfants et de l'ancienneté du séjour de sa conjointe en France ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison des illégalités affectant le refus de titre de séjour ;

- cette décision a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ; l'intérêt des enfants, en raison de leur scolarité en France, interdit de les éloigner du territoire français ;

- elle est entachée d'une erreur de droit car il peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, en raison de son insertion, notamment professionnelle, en France où vit l'essentiel de sa famille ;

- l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est contraire à l'article 7.2 de la directive retour par sa rédaction restrictive en ce qui concerne la possibilité d'accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

- la décision fixant un délai de trente jours n'est pas motivée et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation du fait de sa situation personnelle et familiale et de la durée de sa présence en France ;

- la décision d'interdiction de retour d'un an, qui comporte une motivation type, n'est pas suffisamment motivée ;

- la signataire de cette décision n'est pas compétente, faute d'une délégation de signature spécifique ;

- cette décision n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire et a été rendue en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et de l'article 41.2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la décision d'interdiction de retour d'un an est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, en raison de la durée de son séjour en France et de son insertion ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 février 2013 :

- le rapport de M. Brumeaux, président assesseur,

- et les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public ;

1. Considérant que les requêtes enregistrées sous les numéros 12VE00603 et 12VE00604 présentent à juger des questions identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;

Sur la régularité des jugements attaqués :

2. Considérant que si M. et Mme F...soutiennent que le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence de saisine par le préfet de la commission du titre de séjour, il ressort toutefois des motifs des jugements attaqués que les premiers juges ont statué sur ce moyen ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les jugements seraient irréguliers pour ce motif ;

Sur la légalité des arrêtés attaqués :

3. Considérant que M.F..., ressortissant algérien, entré régulièrement en France le 28 février 2003 à l'âge de trente et un ans, a été rejoint par son épouse le 11 février 2005 en compagnie de leur fils alors âgé de quatre ans ; que les époux F...ont fait l'objet d'une reconduite à la frontière le 14 novembre 2006 qui n'a pas été exécutée ; qu'ils se sont maintenus sur le territoire français et qu'ils ont sollicité le 11 octobre 2010 la délivrance d'un certificat de résidence " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 ; que par deux arrêtés du 29 septembre 2011, le préfet des Yvelines a rejeté leurs demandes, leur a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

En ce qui concerne les décisions portant refus de titre de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5 Au ressortissant algérien, qui n' entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) " et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que si M. et Mme F...soutiennent qu'ils vivent en France depuis respectivement huit et six ans, avec leurs enfants âgés de dix ans, cinq ans et onze mois à la date des décisions attaquées, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'ils seraient dépourvus de toutes attaches familiales en Algérie où ils ont vécu respectivement jusqu'à l'âge de trente et un ans et de trente-deux ans et que des circonstances particulières s'opposeraient à la poursuite de leur vie familiale dans leur pays d'origine, compte tenu de l'âge de leurs enfants ; que dès lors, dans ces circonstances, ces décisions n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises, et n'ont pas, par voie de conséquence, méconnu les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et celles de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d' institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant les décisions litigieuses le préfet des Yvelines n'aurait pas accordé une importance primordiale à l'intérêt supérieur des enfants de M. et Mme F...; que la seule circonstance que ces derniers ne connaissent pas l'Algérie et que deux d'entre eux sont scolarisés ne suffit pas, compte tenu de leur jeune âge, pour établir une atteinte à leur intérêt supérieur ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance, par le préfet des Yvelines, des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 doit être écarté ;

8. Considérant en troisième lieu que, compte tenu de ce qui précède, le préfet des Yvelines n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle et familiale des requérants ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...). " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme F... n'établissent pas qu'ils seraient au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'accord franco-algérien dont la portée est équivalente à celle des dispositions des articles susmentionnés ; que, par suite, le préfet des Yvelines n'était pas tenu de soumettre leur cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter leurs demandes ;

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant que M. et Mme F...n'établissant pas que les décisions refusant de leur délivrer un certificat de résidence seraient illégales, l'exception d'illégalité de ces décisions, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire français, n'est pas fondée et doit être rejetée ;

11. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 et de l'erreur manifeste d'appréciation qui entacherait les décisions litigieuses reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour ; qu'ils doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus ;

En ce qui concerne les décisions fixant un délai de départ volontaire de trente jours :

12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la directive susvisée du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. (...) 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux (...) " et qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ; que lesdites dispositions législatives, issues de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, ne sont pas incompatibles avec les objectifs de la directive du 16 décembre 2008, dès lors qu'elles prévoient un délai de départ d'un mois, la directive fixant un délai allant de 7 jours à 30 jours, qui peut être prolongé à titre exceptionnel, en raison de la situation personnelle de l'étranger ;

13. Considérant en second lieu, d'une part, que le délai d'un mois accordé à M. et à Mme F...pour exécuter spontanément cette obligation étant le délai de principe fixé au II de l'article L. 511-1, la fixation d'un tel délai n'avait, en tout état de cause, pas à faire l'objet d'une motivation particulière ; que, d'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en retenant un tel délai, le préfet des Yvelines aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français :

14. Considérant, en premier lieu, que Mme E...D..., directrice de la citoyenneté, de l'immigration et de l'intégration, qui a signé les décisions d'interdiction de retour sur le territoire français, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet des Yvelines en date du 5 septembre 2011, régulièrement publiée le même jour au recueil n° 51 des actes administratifs du département, pour signer en son nom tous arrêtés, décisions, documents et correspondances, relevant des attributions du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, à l'exception de certaines catégories d'actes auxquelles n'appartiennent pas les décisions litigieuses, et dans les limites d'attribution de ladite direction ; que cette délégation, postérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 16 juin 2011, inclut nécessairement les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français ; que par suite le moyen tiré de l'incompétence du signataire de ces décisions doit être écarté ;

15. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (...) / Lorsque l'étranger ne faisant pas l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative peut prononcer une interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans à compter de sa notification. / Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. / Lorsqu'un délai de départ volontaire a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour, prenant effet à l'expiration du délai, pour une durée maximale de deux ans à compter de sa notification. / Lorsque l'étranger faisant l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire ou alors qu'il était obligé de quitter sans délai le territoire français ou, ayant déféré à l'obligation de quitter le territoire français, y est revenu alors que l'interdiction de retour poursuit ses effets, l'autorité administrative peut prolonger cette mesure pour une durée maximale de deux ans. / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ; que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs ; que cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi ;

16. Considérant qu'en l'espèce, après avoir relevé la durée de la présence de M. et de Mme F...en France, ainsi que la nature et l'ancienneté de leurs liens avec la France, le préfet des Yvelines a fondé ses décisions d'interdiction de retour sur le comportement des intéressés qui, par le passé, se sont soustraits à une mesure d'éloignement ; qu'il a visé le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi il a indiqué les considérations de droit et de fait qui constituaient le fondement de ces décisions ; que s'il n'a pas précisé si la présence de M. et de Mme F...sur le territoire français constituait ou non une menace pour l'ordre public, cette circonstance, qui n'implique pas par elle-même l'absence d'examen de ce critère par le préfet, n'est pas de nature à faire regarder lesdites décisions comme insuffisamment motivées dès lors qu'il n'a pas retenu l'existence d'une menace à l'ordre public pour prendre ses décisions au vu de la situation des intéressés ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions doit être écarté ;

17. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort de ces mêmes dispositions que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles est soumise l'intervention des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'interdiction de retour sur le territoire français ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant interdiction de retour ; que, par suite, les requérants ne peuvent soutenir que ces décisions devaient être précédées d'une procédure contradictoire ;

18. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne qui est entrée en vigueur le 1er décembre 2009 : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : a) le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) " ; que M. et Mme F...soutiennent que les décisions d'interdiction de retour auraient dû être précédées d'une procédure contradictoire, en application des stipulations précitées de l'article 41.2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que toutefois ces stipulations ne trouvent à s'appliquer qu'aux seules mesures individuelles prises par les institutions, organes et organismes de l'Union, et non par les Etats membres, même lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union ; que, par suite, ces stipulations ne peuvent être utilement invoquées pour contester la légalité des décisions attaquées ;

19. Considérant enfin que la durée de la présence des époux F...sur le territoire français ainsi que l'ancienneté de leurs liens avec la France ne suffisent pas à établir que le préfet des Yvelines aurait commis une erreur d'appréciation en prononçant à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire national pour une durée d'un an ;

20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 29 septembre 2011; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme F...sont rejetées.

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Nos 12VE00603-12VE00604 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Formation plénière
Numéro d'arrêt : 12VE00603
Date de la décision : 12/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Questions générales - Motivation.

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : LEVY ; LEVY ; LEVY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-03-12;12ve00603 ?
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