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01/03/2013 | FRANCE | N°10VE02597

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 01 mars 2013, 10VE02597


Vu la requête, enregistrée le 2 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SARL LE BRUEGEL, dont le siège est sis 61, avenue Pierre Grenier, à Boulogne-Billancourt (92100), par Me Cohen, avocat à la Cour ; la SARL LE BRUEGEL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701923/0705706/0705709 en date du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, des contributions à l'impôt sur les sociétés, des r

appels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie au tit...

Vu la requête, enregistrée le 2 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SARL LE BRUEGEL, dont le siège est sis 61, avenue Pierre Grenier, à Boulogne-Billancourt (92100), par Me Cohen, avocat à la Cour ; la SARL LE BRUEGEL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701923/0705706/0705709 en date du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, des contributions à l'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001, 2002 et 2003 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- qu'en ce qui concerne la régularité du jugement : ce dernier n'a pas pris en compte l'intégralité de ses observations ;

- qu'en ce qui concerne la charge de la preuve : elle incombe à l'administration car l'imposition n'a pas été établie conformément à l'avis de la Commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

- qu'en ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires : la méthode des liquides est erronée, dans la mesure où elle aboutit à un chiffre d'affaires exagéré et non conforme à la réalité d'exploitation de ce type d'établissement ;

- que par souci de simplification et de cohérence, elle a demandé que le pourcentage des cafés entre le bar (75%) et le restaurant (25%) soit identique pour chacun des exercices vérifiés et, en contrepartie, que les cafés soient intégrés dans la méthode des vins qui apparaît excessivement sommaire ;

- que la Commission départementale des impôts directs a adopté cette position dans son avis du 30 septembre 2005 ; que ladite Commission a également proposé de retenir les chiffres d'affaires calculés par la société compte tenu de l'incidence significative du double emploi des vins et cafés compris à la fois dans la reconstitution du chiffre d'affaires des solides et dans le chiffre d'affaires des boissons et cafés ; que l'administration fiscale n'a pas suivi cet avis ;

- que le Tribunal administratif de Versailles n'a pas statué sur ce double emploi ;

- qu'elle demande à la Cour de suivre l'avis de la Commission départementale des impôts ;

- qu'en ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires des solides du restaurant : le ratio proposé de 31,28% ne comporte pas d'erreur de raisonnement ; que l'intégration des cafés est justifiée, car le nombre de cafés vendus en salle est proportionnel aux recettes du restaurant, à l'instar des vins consommés en salle, et le but est de s'assurer que les cafés consommés lors des repas ont bien été comptabilisés en tant que cafés en salle ; que le calcul du ratio proposé est correct, car inclure le montant du chiffre d'affaires des menus à 22 euros, comme le soutient l'administration fiscale, reviendrait à considérer que tous les cafés consommés en salle seraient précédés d'un repas ;

- qu'en ce qui concerne le chiffre d'affaires des ventes à emporter : elle conteste la réintégration dans le chiffre d'affaires reconstitué de l'intégralité du montant du chiffre d'affaires déclaré, car l'administration comptabilise ainsi deux fois le chiffre d'affaires relatif aux ventes à emporter accompagnées de vin ; qu'elle demande donc que la Cour retienne l'avis de la Commission départementale des impôts proposant de compenser le fait que les ventes à emporter sans boisson n'aient pas été intégrées dans la rectification, par le fait que les tarifs retenus par l'administration pour 2001 soient identiques à ceux de 2003, même si elle considère anormal que les tarifs utilisés pour déterminer le chiffre d'affaires relatif aux autres boissons en 2001 et en 2002 soient identiques à ceux retenus en 2003 ;

- qu'en ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires par le nombre de couverts : le nombre moyen de repas servis par jour obtenu par l'administration est irréaliste puisque la capacité maximale du restaurant est de 46 couverts ; que l'affirmation du Tribunal administratif de Versailles, dans son jugement du 10 juin 2010, selon laquelle plusieurs services peuvent se succéder à l'heure du déjeuner, ne correspond pas aux conditions d'exploitation réelles du restaurant qui n'est ouvert qu'à l'heure du déjeuner et que la durée moyenne d'un repas est d'une heure trente ; que le restaurant n'emploie que le gérant, son épouse associée, et une aide cuisinière à temps partiel, qu'il ne sert que des plats sous vide et qu'il se situe près d'un cimetière, en bord de route et à l'écart du centre ville de Boulogne-Billancourt ; que la marge bénéficiaire sur la vente d'une restauration rapide, dont elle fait réchauffer les plats, est réduite, d'autant que le prix d'achat de ces plats auprès de la société Métro est élevé ; que les photographies de la salle de restaurant, du bar, de la cuisine et du voisinage prises à 13 heures prouvent que le restaurant est rarement plein ; que les comptes annuels de la société pour 2005 ont été établis par un expert comptable dont les chiffres fournis sont proches de ceux proposés par la société ; qu'elle démontre ainsi que la méthode appliquée par l'administration fiscale aboutit à des bases d'imposition manifestement excessives ; qu'elle demande que cette méthode soit écartée et que la Cour retienne l'avis de la Commission départementale des impôts ;

- qu'en ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires par le nombre de serviettes : la méthode utilisée s'avère excessivement sommaire ; qu'en effet, il n'existe aucune corrélation entre le nombre de serviettes nettoyées et le nombre de repas servis puisque des serviettes servent également de sets de table et de torchons ;

- qu'en ce qui concerne les pénalités de mauvaise foi : leur application n'est pas justifiée, la mauvaise foi n'étant pas démontrée puisque la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires a été acceptée par la Commission départementale des impôts et que les deux contrôles précédents portaient sur des droits rectifiés de faibles montants ; qu'elle demande que ces pénalités soient abandonnées ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 19 février 2013 :

- le rapport de M. Formery, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

1. Considérant que la SARL LE BRUEGEL, qui exploite un bar-restaurant, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003 à l'issue de laquelle l'administration fiscale l'a assujettie, selon la procédure de rectification contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, des contributions à l'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités pour mauvaise foi ; qu'elle relève appel du jugement du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge de ces impositions supplémentaires ;

En ce qui concerne la régularité du jugement :

2. Considérant que les premiers juges, qui ont répondu à l'ensemble des moyens soulevés par la société requérante et qui n'étaient pas tenus de répondre à tous ses arguments, ont suffisamment exposé les raisons pour lesquelles les conclusions de la SARL LE BRUEGEL devaient être rejetées ; que, par suite, le jugement est, contrairement à ce que soutient la société requérante, suffisamment motivé ;

En ce qui concerne la charge de la preuve :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, " (...) la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...) " ;

4. Considérant que les impositions litigieuses, établies dans le cadre de la procédure contradictoire, n'ont pas été fixées conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires rendu le 30 septembre 2005 ; qu'en application des dispositions précitées de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve du bien-fondé de ces impositions incombe à l'administration fiscale ;

Sur le bien-fondé des impositions :

5. Considérant que, pour contester le bien-fondé des impositions en litige, la SARL LE BRUEGEL reprend en appel les moyens déjà développés en première instance, tirés de ce que la méthode des liquides, utilisée par l'administration pour reconstituer les recettes de la société, aboutirait à un chiffre d'affaires exagéré, non conforme à l'activité réelle de l'entreprise ; que cette méthode devait être rectifiée par l'intégration des cafés ; que le chiffre d'affaires des vins et cafés a fait l'objet d'un double emploi dont la commission départementale des impôts a recommandé la suppression ; qu'enfin, l'avis du 30 septembre 2005 de ladite commission devait être suivi, ayant retenu les chiffres d'affaires qu'elle lui avait proposés ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que, par les motifs qu'il a retenus et qu'il y a lieu pour la Cour d'adopter, le Tribunal administratif de Versailles n'a pas commis d'erreur en écartant ces moyens, et en considérant que l'administration fiscale avait apporté la preuve du bien-fondé des impositions litigieuses en démontrant qu'elle avait suivi les différents avis de la commission départementale des impôts, que la confusion faite par la société requérante entre les méthodes des liquides et des vins rendait sa démonstration incohérente, et enfin que les chiffres d'affaires reconstitués selon les méthodes du vérificateur étaient proches de la réalité économique de l'entreprise en tenant compte de ses facteurs humains, commerciaux et géographiques ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante en appel, le Tribunal administratif de Versailles a spécifiquement répondu au moyen du double emploi du chiffre d'affaires des vins et cafés en relevant que " l'avis de la Commission a également été suivi (...) par la rectification du double emploi " ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du bien-fondé de la reconstitution des recettes de la société, qui n'est ni radicalement viciée, ni excessivement sommaire et qui n'aboutit pas à des résultats exagérés ; que la SARL LE BRUEGEL n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôts insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40% si la mauvaise foi de l'intéressé est établie [...] " ; que la preuve de la mauvaise foi incombe à l'administration ;

8. Considérant que les multiples irrégularités comptables relevées ne pouvaient être ignorées par la société, celle-ci ayant déjà fait l'objet de deux précédentes vérifications qui avaient révélées des manquements similaires ; que la société ne peut se prévaloir de ce que ces deux contrôles précédents ne portaient que sur des droits rectifiés de faibles montants ; que le caractère répétitif, de l'ensemble des manquements constatés, que la requérante ne conteste pas, a valablement conduit le vérificateur à faire application des pénalités exclusives de bonne foi ; que l'administration établit la mauvaise foi de la requérante qui n'est, dès lors, pas fondée à demander la décharge des pénalités mises à sa charge à ce titre ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la SARL LE BRUEGEL au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL LE BRUEGEL est rejetée.

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N° 10VE02597


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10VE02597
Date de la décision : 01/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Simon FORMERY
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : BENAYOUN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-03-01;10ve02597 ?
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