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22/01/2013 | FRANCE | N°11VE02317

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 22 janvier 2013, 11VE02317


Vu I°), la requête, enregistrée le 27 juin 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 11VE02317, présentée pour la SARL VUILLERMOZ, dont le siège est 60, avenue J. F. Raclet à Lyon (69007), par Me Chauplannaz, avocat à la Cour ;

La SARL VUILLERMOZ demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0712562 en date du 3 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de perception émis à son encontre le 28 novembre 2006 par le directeur régional des affaires culturelle

s d'Ile-de-France d'un montant de 168 767,56 euros et à la décharge de cette...

Vu I°), la requête, enregistrée le 27 juin 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 11VE02317, présentée pour la SARL VUILLERMOZ, dont le siège est 60, avenue J. F. Raclet à Lyon (69007), par Me Chauplannaz, avocat à la Cour ;

La SARL VUILLERMOZ demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0712562 en date du 3 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de perception émis à son encontre le 28 novembre 2006 par le directeur régional des affaires culturelles d'Ile-de-France d'un montant de 168 767,56 euros et à la décharge de cette somme ;

2°) que l'Etat soit reconnu comme responsable pour les deux tiers de la somme réclamée et en conséquence, de réduire la somme mise à sa charge au titre du surcoût du marché de substitution ;

3°) d'ordonner, à titre subsidiaire, une expertise à fin d'évaluer le coût normal d'un marché de substitution pour les prestations demandées dans le marché passé avec la direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France le 3 novembre 2004 ;

Elle soutient :

- que la résiliation du marché ne pouvait être prononcée à ses frais et risques ; que s'il est exact qu'elle a refusé d'exécuter les prestations du marché signé avec la direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France, ce n'est pas au motif que le prix qu'elle avait accepté lui avait paru insuffisant, mais en raison d'une absence des moyens humains et financiers nécessaires pour les réaliser au moment où l'Etat s'est décidé à exécuter le marché ; qu'en effet, suite à des difficultés économiques, elle a été dans l'obligation de se séparer d'une partie de son personnel et ne disposait plus que de 5 monteurs sur les 13 initialement présents dans la société ; que la responsable des affaires administratives de la société est par ailleurs tombée gravement malade et ne pouvait être remplacée ;

- que, la direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France doit être regardée comme responsable de cette situation, en raison d'un délai anormal entre la signature du marché le 3 novembre 2004 et la demande d'installation de l'échafaudage le 23 mars 2006 ; que si les prestations du marché avaient été réalisées dans un délai raisonnable, elle aurait pu honorer ses engagements ;

- que le montant du marché de substitution équivaut à deux fois et demi le montant du marché passé par elle et à pratiquement trois fois le montant proposé par l'architecte en chef des monuments historiques avant la signature de l'acte d'engagement ; que cette augmentation ne peut s'expliquer par l'évolution des prix ;

- qu'une expertise est ainsi nécessaire pour évaluer la valeur des travaux exécutés par la société Layher ;

- que l'article 49-5 du CCAG de travaux prévoit que l'entreprise dont le marché a été résilié doit pouvoir suivre l'exécution du marché de substitution ; que si elle a été informée de l'existence du marché de substitution, ni le nom de l'entreprise, ni le montant du nouveau marché ne lui ont été communiqués ; qu'ainsi la DRAC d'Ile-de-France a commis une faute de nature à réduire le montant de la somme qu'elle doit à l'Etat ;

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Vu II°), la requête enregistrée le 8 août 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 11VE02983, présentée pour la SARL VUILLERMOZ, par Me Chauplannaz, avocat à la Cour ;

La SARL VUILLERMOZ demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 0712562 du 3 mai 2011 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'urgence est justifiée par la circonstance qu'elle est exposée à des poursuites en exécution, à la saisie de son compte en banque et de ses biens et pourrait être amené à déposer le bilan ;

- elle n'avait plus les moyens financiers et humains d'assurer les prestations prévues au marché ; que le marché de substitution a été passé pour un prix disproportionné ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 janvier 2013 :

- le rapport de M. Pilven, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Courault, rapporteur public ;

Considérant que, par les requêtes n° 11VE02317 et n° 11VE02983, la SARL VUILLERMOZ demande l'annulation et le sursis à exécution du même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que, dans le cadre d'un marché ayant pour objet la restauration du clocher de l'église de Saint Didier à Villiers-le-Bel, le ministre de la culture et de la communication, représenté par la direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France (DRAC), a confié à la SARL VUILLERMOZ, le 3 novembre 2004, la réalisation du lot n° 1, relatif à la fourniture et l'installation d'échafaudages, moyennant un prix fixé à 127 852,40 euros TTC ; qu'un calendrier d'intervention, en date du 21 avril 2005, a fixé la durée des travaux à 11 mois ; que par un ordre de service du 25 avril 2005, le maitre d'ouvrage a prescrit à la société requérante de commencer les travaux à compter du 16 mai 2005 ; que, toutefois, en raison de la nécessité de réaliser des fouilles archéologiques, la DRAC, par lettre du 9 novembre 2005, a reporté le début des travaux d'installation des échafaudages au début du mois de janvier 2006 ; que la SARL VUILLERMOZ n'a réalisé aucune prestation au mois de janvier 2006 et a adressé une lettre le 7 février 2006 au maître de l'ouvrage pour l'informer qu'elle renonçait à exécuter le marché, au motif qu'elle ne disposait plus des moyens financiers et humains suffisants pour assumer les prestations prévues pour le chantier ; que, par lettre du 23 mars 2006, la DRAC lui a adressé une mise en demeure d'installer les échafaudages, puis devant le refus réitéré par lettre du 3 avril 2006 de la société requérante, a prononcé la résiliation du marché, à compter du 5 avril 2006, aux frais et risques du titulaire, en application de l'article 49-6 du cahier des clauses administratives générales, applicable aux marchés de travaux ; que la DRAC a ensuite passé un marché de substitution avec la société Layher pour un montant de 296 619,96 euros TTC et a réclamé à la société requérante la différence entre le coût de cette prestation et celle prévue initialement par le marché, soit la somme de 168 767,56 euros ; que le 28 novembre 2006, elle a émis un titre de perception de ce montant à l'encontre de la société requérante qui a formé opposition par une lettre du 26 janvier 2007 puis a saisi le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'une requête tendant à l'annulation du titre de perception et à la décharge de la somme de 168 767,56 euros ; que, par jugement du 3 mai 2011, le tribunal administratif a rejeté la requête de la société qui forme régulièrement appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé de la résiliation aux frais et risques du titulaire du marché :

Considérant qu'aux termes de l'article 49 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG), applicable au présent marché, dans sa rédaction alors en vigueur : " 49.1. A l'exception des cas prévus au 22 de l'article 15 et au 16 de l'article 46, lorsque l'entrepreneur ne se conforme pas aux dispositions du marché ou aux ordres de service, la personne responsable du marché le met en demeure d'y satisfaire dans un délai déterminé, par une décision qui lui est notifiée par écrit. (...) 49.2. Si l'entrepreneur n'a pas déféré à la mise en demeure, une mise en régie à ses frais et risques peut être ordonnée, ou la résiliation du marché peut être décidée. (...) 49.4. La résiliation du marché décidée en application du 2 ou du 3 du présent article peut être, soit simple, soit aux frais et risques de l'entrepreneur. (...) En cas de résiliation aux frais et risques de l'entrepreneur, il est passé un marché avec un autre entrepreneur pour l'achèvement des travaux. Ce marché est conclu après appel d'offres avec publicité préalable ; toutefois, pour les marchés intéressant la défense ou en cas d'urgence, il peut être passé un marché négocié. Par exception aux dispositions du 42 de l'article 13, le décompte général du marché résilié ne sera notifié à l'entrepreneur qu'après règlement définitif du nouveau marché passé pour l'achèvement des travaux. / 49.5. L'entrepreneur dont les travaux sont mis en régie est autorisé à en suivre l'exécution sans pouvoir entraver les ordres du maître d'oeuvre et de ses représentants. / Il en est de même en cas de nouveau marché passé à ses frais et risques. / 49.6. Les excédents de dépenses qui résultent de la régie ou du nouveau marché sont à la charge de l'entrepreneur. Ils sont prélevés sur les sommes qui peuvent lui être dues ou, à défaut, sur ses sûretés éventuelles, sans préjudice des droits à exercer contre lui en cas d'insuffisance. " ;

Considérant que si la SARL VUILLERMOZ soutient qu'elle rencontrait au mois de janvier 2006 des difficultés financières, une dégradation de sa situation économique et était privée du concours de son responsable administratif, arrêté pour maladie grave, il n'est toutefois pas établi par les pièces produites au dossier, que la société requérante aurait été dans l'impossibilité de fournir les moyens humains nécessaires à la réalisation des prestations prévues au mois de janvier 2006 ; que, si le report par la DRAC du début des prestations à ce moment était éventuellement de nature à autoriser la SARL VUILLERMOZ, sur le fondement des stipulations du CCAG, applicable aux marchés de travaux, à adresser une réclamation au maître de l'ouvrage en réparation du préjudice subi, il ne l'autorisait pas à refuser d'exécuter les prestations prévues et à méconnaître ainsi gravement ses obligations contractuelles ; que, par suite, l'administration était en droit de prononcer la résiliation du marché aux frais et risques de la société requérante sur le fondement des articles 49-2 et 49-4 du CCAG applicable aux marchés de travaux et, sur le fondement de l'article 49-6 dudit CCAG, de mettre à sa charge le coût résultant de la différence de prix entre le montant du marché de substitution et celui du marché résilié ;

Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article 49-5 du CCAG applicable aux marchés de travaux : " L'entrepreneur dont les travaux sont mis en régie est autorisé à en suivre l'exécution sans pouvoir entraver les ordres du maître d'oeuvre et de ses représentants. " ; que la SARL VUILLERMOZ soutient, sans être contredite par l'administration, que si elle a été informée de la passation d'un marché de substitution, elle ne l'a pas été du nom du titulaire de ce marché ni de son montant avant la procédure contentieuse devant le tribunal administratif ; que si l'administration a informé, par décision du 25 avril 2006, la société requérante que le marché était résilié à ses frais et risques et a mentionné qu'en application de l'article 49-5 précité du CCAG applicable aux marchés de travaux, elle était autorisée à suivre l'exécution du nouveau marché, elle ne conteste pas que la société requérante n'a pas eu notification du marché de substitution avant le commencement des travaux ; qu'ainsi, la SARL VUILLERMOZ doit être regardée comme n'ayant pas été mise à même d'user du droit qu'elle avait de suivre, en vue de sauvegarder ses intérêts, les opérations exécutées à ses risques et périls par le nouvel entrepreneur ; que, dès lors, la société requérante ne saurait être tenue de supporter les conséquences onéreuses résultant de sa substitution par une entreprise tierce ; que, par suite, le titre de perception émis le 28 novembre 2006 par la DRAC d'Ile-de-France d'un montant de 168 767,56 euros a été émis irrégulièrement ;

Considérant, cependant, que dans ses écritures, la société requérante reconnait que sa responsabilité est engagée à hauteur d'un tiers de la somme en cause, soit à hauteur de la somme de 56 255,85 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL VUILLERMOZ est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge de la somme de 112 511,70 euros ; qu'en conséquence il y a lieu de faire droit aux conclusions à fin de décharge de la société requérante à hauteur de ladite somme ;

Considérant que la Cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la SARL VUILLERMOZ tendant à l'annulation du jugement susvisé du 3 mai 2011 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la même société tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la SARL VUILLERMOZ au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 3 mai 2011 est annulé.

Article 2 : La SARL VUILLERMOZ est déchargée de la somme de 112 511,70 euros mise à sa charge par le titre de perception du 28 novembre 2006.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement du 3 mai 2011.

Article 4 : L'Etat versera à la SARL VUILLERMOZ la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Nos 11VE02317-11VE02983 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE02317
Date de la décision : 22/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02-005 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Formalités de publicité et de mise en concurrence.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : CHAUPLANNAZ ; CHAUPLANNAZ ; CHAUPLANNAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-01-22;11ve02317 ?
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