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28/12/2012 | FRANCE | N°11VE00563

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 28 décembre 2012, 11VE00563


Vu, enregistrée le 14 février 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, la requête présentée pour la SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING, venant aux droits et obligations de la SNC Total gestion cadeaux, dont le siège est 24 Cours Michelet à Puteaux Cedex (92800), par Me José-Manuel Moreno ; la SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702432 du 9 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel la SNC Total gest

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Vu, enregistrée le 14 février 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, la requête présentée pour la SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING, venant aux droits et obligations de la SNC Total gestion cadeaux, dont le siège est 24 Cours Michelet à Puteaux Cedex (92800), par Me José-Manuel Moreno ; la SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702432 du 9 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel la SNC Total gestion cadeaux a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001 ;

2°) de prononcer la décharge de ce rappel de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que le remboursement des sommes de 3 131 654 euros en droits et de 567 542 euros en pénalités, outre les intérêts légaux à échoir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que si la SNC Total gestion cadeaux réalisait une prestation de gestion du programme de fidélisation de la clientèle du groupe Total, sa rémunération visait à couvrir le prix des cadeaux remis aux porteurs de cartes, ainsi que ses frais de gestion ; qu'en outre, la propriété des cadeaux était, ainsi qu'il en avait été décidé contractuellement, transférée à la société Total Raffinerie Distribution qui acquérait les biens avant leur remise aux clients ; que, dans ces conditions, l'administration fiscale n'est pas fondée à considérer que les biens que la SNC Total gestion cadeaux remettait aux clients de Total, dans le cadre du programme de fidélisation, l'étaient à titre gratuit ; que la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé l'acquisition de ces biens, ainsi que les frais engendrés par leur distribution, ne peut être remise en cause sur le fondement de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts ; que la décision de la Cour de justice des communautés européennes 48/97 Kuwait Petroleum ne lui est pas applicable ; qu'un rapport juridique existait bien entre la SNC Total gestion cadeaux et la société Total Raffinerie Distribution ; que, subsidiairement, elle entend contester le mode de calcul du prix de revient des cadeaux et la notion de bien de faible valeur retenus par l'administration pour l'application de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 décembre 2012 :

- le rapport de Mme Besson-Ledey, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public,

- et les observations de Me Benoist, substituant Me Breton pour la SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING ;

Considérant que la SNC Total gestion cadeaux, qui avait pour activité la gestion d'un système de fidélisation de la clientèle du groupe Total, en vertu d'un protocole d'accord conclu le 6 mai 1997 avec la SA Total raffinage distribution, a fait l'objet d'une vérification de ses déclarations fiscales relatives à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001, à l'issue de laquelle l'administration a, sur le fondement des dispositions de l'article 271 du code général des impôts et du 1° de l'article 238 de l'annexe II au même code, remis en cause, par une notification de redressement du 2 juillet 2003, la déduction de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait opérée sur des biens cédés sans rémunération ou à une rémunération très inférieure à leur prix de revient ; que la SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING, qui vient aux droits et obligations de la SNC Total gestion cadeaux, relève appel du jugement du 6 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la SNC Total gestion cadeaux a été assujettie au titre de la période litigieuse ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) " ; qu'en application du 1 du II du même article, les redevables peuvent opérer la déduction de la taxe " dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction " ; qu'il résulte de ces dispositions, telles qu'interprétées au regard des objectifs de la sixième directive du Conseil des communautés européennes n° 77/388 du 17 mai 1977, qu'un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée est en droit de déduire ou, le cas échéant, d'obtenir le remboursement de la taxe dont il a été redevable pour des biens qui lui ont été livrés ou pour des services qui lui ont été fournis aux fins de travaux destinés à être utilisés dans le cadre d'activités économiques donnant lieu à des opérations taxées ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 238 de l'annexe II à ce code, alors applicable : " N'est pas déductible la taxe ayant grevé : / 1° des biens cédés sans rémunération ou moyennant une rémunération très inférieure à leur prix normal, notamment à titre de commission, salaire, gratification, rabais, bonification, cadeau, quelle que soit la qualité du bénéficiaire ou la forme de la distribution, sauf quand il s'agit de biens de très faible valeur (...) " ; qu'il résulte de cette disposition que la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat des biens, objets ou denrées, remis à titre de libéralité, ou même en vue d'obtenir des avantages commerciaux ou un comportement utile à l'entreprise qui les remet, n'est pas déductible, dès lors qu'aucune rémunération n'est perçue en contrepartie de la remise de ce bien ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SNC Total gestion cadeaux assurait la gestion du programme de fidélisation des clients du groupe Total comprenant, selon le protocole d'accord susmentionné du 6 mai 1997, modifié par un avenant du 3 janvier 2000, la gestion des systèmes des points de fidélité attribués à ces clients porteurs de cartes de fidélité, en fonction de leur consommation dans les stations services, le choix des cadeaux susceptibles d'être échangés par le consommateur contre les points acquis, voire une participation financière, en fonction des cartes détenues, la définition de la contre-valeur en points des cadeaux proposés aux clients et l'achat, ainsi que la livraison des cadeaux dans les stations services ou, par correspondance, chez le client de Total ; qu'en vertu de l'article 2.2.2 de ce même protocole modifié, la SA Total raffinage distribution s'engageait à acheter à la SNC Total gestion cadeaux les cadeaux remis aux clients porteurs de cartes, le transfert de propriété des cadeaux au profit de la SA Total raffinage distribution devant s'opérer à la date de livraison des cadeaux en station service ou, en cas de commande par correspondance, préalablement à la livraison au client, le jour même de cette livraison ; qu'il suit de là que la SNC Total gestion cadeaux, qui, contrairement à ce que soutient le ministre, ne remettait aucun bien aux clients à titre gratuit, agissait seulement en qualité de prestataire de services et de fournisseur de la SA Total raffinage distribution, percevant, en contrepartie de cette prestation de services, une rémunération, soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, calculée selon une part du prix du point destinée à couvrir le coût d'achat des cadeaux et ses frais de gestion ; qu'eu égard au lien direct et immédiat entre l'achat des biens par la SNC Total gestion cadeaux et la réalisation des services qu'elle assurait à la SA Total raffinage distribution, le prix des biens acquis constituait un élément du prix de revient de la prestation facturée ; que, dans ces conditions, cette prestation doit être regardée comme une opération entrant dans le champ d'application de l'article 271 précité ouvrant droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens acquis pour sa réalisation et non, ainsi que le prétend l'administration, comme une distribution ou cession sans rémunération de biens au sens de l'article 238 sus-rappelé de l'annexe II au code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING, venant aux droits de la SNC Total gestion cadeaux, est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001 ;

Sur les conclusions tendant au remboursement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée acquittés et au paiement d'intérêts moratoires au taux légal :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : " Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un Tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés. " ; qu'aux termes du 3ème alinéa de l'article R. 208-1 du même livre, ces intérêts moratoires " sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts " ; qu'il résulte de ces dispositions que la restitution des sommes déjà versées par un contribuable doit être faite par le comptable chargé du recouvrement, en exécution d'une décision de justice ordonnant une décharge ou une réduction d'imposition, sans qu'il soit besoin d'adresser à cette fin une injonction à l'administration fiscale ; qu'en l'absence de litige né et actuel entre le comptable responsable du remboursement et la société requérante, les conclusions sus-analysées ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING, et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0702432 du 9 décembre 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING, venant aux droits et obligations de la SNC Total gestion cadeaux, est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels cette dernière a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à la SA TOTAL RAFFINAGE MARKETING au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 11VE00563 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE00563
Date de la décision : 28/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Biens ou services ouvrant droit à déduction.


Composition du Tribunal
Président : M. COUZINET
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : MORENO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-12-28;11ve00563 ?
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