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04/12/2012 | FRANCE | N°12VE00511

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 04 décembre 2012, 12VE00511


Vu la requête enregistrée le 6 février 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présenté pour M. B...A..., demeurant..., par Me Boudjellal, avocat à la Cour ; M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106341 en date du 21 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2011 du préfet des Hauts-de-Seine refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'

annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des H...

Vu la requête enregistrée le 6 février 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présenté pour M. B...A..., demeurant..., par Me Boudjellal, avocat à la Cour ; M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106341 en date du 21 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2011 du préfet des Hauts-de-Seine refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour temporaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que le jugement attaqué est irrégulier dès lors que l'avis médical joint au mémoire en défense présenté par le préfet des Hauts-de-Seine ne lui a pas été communiqué et qu'il n'a pas été mis en mesure de faire valoir ses observations alors qu'il avait sollicité le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure dans une note en délibéré ; que les dispositions de l'article R. 611-5 du code de justice administrative ont, dès lors, été méconnues ;

- que les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco algérien ont été méconnues et qu'une erreur manifeste d'appréciation a été commise ; qu'il est entré en France en janvier 2008 afin d'être pris en charge médicalement compte tenu d'une spondylarthrite ankylosante résistante aux anti-inflammatoires non stéroïdiens et que le traitement dont il a besoin n'est pas disponible dans son pays, ainsi qu'en attestent les certificats médicaux produits ;

- que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu des conséquences exceptionnellement graves sur sa santé qu'impliquerait son retour en Algérie ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 20 novembre 2012, le rapport de Mme Riou, premier conseiller ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien né le 25 octobre 1979, fait appel du jugement en date du 21 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 27 juin 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes de l'arrêté en litige que, pour refuser de délivrer à M. A...un titre de séjour en qualité d'étranger malade, le préfet des Hauts-de-Seine s'est fondé sur les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont les conditions de séjour sur le territoire français sont régies par l'accord franco-algérien susvisé ;

3. Considérant, toutefois, que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ;

4. Considérant qu'en l'espèce, l'arrêté attaqué trouve son fondement légal dans les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 selon lesquelles : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ", qui peuvent être substituées aux dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que cette substitution de base légale n'a pas pour effet de priver l'intéressé d'une garantie et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces dispositions ;

5. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des stipulations précitées de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur ce fondement, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables aux ressortissants algériens, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que, lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'avis du 19 mai 2011 rendu par le médecin de l'Agence régionale de santé d'Ile-de-France mentionne que, si l'état de santé de M. A...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié et avoir accès aux soins dans son pays d'origine ; que, toutefois, d'une part, si la fiche relative à l'état sanitaire de l'Algérie produite par le préfet des Hauts-de-Seine, au demeurant ancienne car datant de l'année 2006, mentionne que des médicaments sont disponibles à Alger pour soigner la spondylarthrite ankylosante, pathologie dont souffre M. A..., elle indique également qu'il existe une inadéquation entre l'offre et la demande de ces médicaments ; que, d'autre part, les certificats médicaux établis en 2010 et en 2011 par le chef de service de rhumatologie de l'hôpital Saint-Antoine et un praticien du même service précisent que la maladie de M.A..., qui n'avait pas été soignée en Algérie, est résistante aux anti-inflammatoires non stéroïdiens et qu'elle nécessite, par suite, un traitement à long terme par injections anti-TNF (" tumor necrosis factor ") qu'il ne pourra pas se procurer en Algérie ; que cette dernière circonstance est corroborée par un rapport de la clinique médico-chirurgicale d'Oran où a été suivi le requérant ; que, dans ces conditions, le préfet des Hauts-de-Seine n'établit pas que M. A...pourra bénéficier du traitement approprié à l'affection dont il est atteint dans son pays d'origine ; qu'il suit de là que les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien ont été méconnues ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

9. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation ci-dessus retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance à M. A...d'un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer ce titre dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1106341 du 21 décembre 2011 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du 27 juin 2011 du préfet des Hauts-de-Seine sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Hauts-de-Seine de délivrer à M. A...un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

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N° 12VE00511


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE00511
Date de la décision : 04/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Catherine RIOU
Rapporteur public ?: M. LOCATELLI
Avocat(s) : BOUDJELLAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-12-04;12ve00511 ?
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