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29/11/2012 | FRANCE | N°11VE02151

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 29 novembre 2012, 11VE02151


Vu I) la requête, enregistrée le 17 juin 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 11VE02151, présentée pour M. Ahmed A, demeurant ..., par Me Bensaid, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1009926 du 13 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2010 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de re

nvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoi...

Vu I) la requête, enregistrée le 17 juin 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 11VE02151, présentée pour M. Ahmed A, demeurant ..., par Me Bensaid, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1009926 du 13 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2010 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que les premiers juges ont confondu sa situation et celle d'un autre requérant et qu'ainsi le jugement est irrégulier ;

- que l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- qu'il n'est pas concerné par les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que sa situation est exceptionnelle, puisqu'il vit en France depuis 1992, qu'il justifie de sa présence de manière continue et qu'il y mène une vie familiale en France, puisqu'il vit en concubinage avec une ressortissante marocaine titulaire d'une carte de résident avec laquelle il a eu un enfant ;

- que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ;

- que le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire méconnaissent l'article 3-1 de la convention de New-York ;

- que l'arrêté attaqué méconnait l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il a initialement formulé une demande de titre sur ce fondement, auquel l'administration n'a pas répondu ;

- que le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour, dès lors qu'il justifie d'une présence en France de plus de dix ans ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu II) la requête, enregistrée le 18 juillet 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n°11VE02661, présentée pour M. Ahmed A, demeurant ..., par Me Bensaid, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1009926 du 21 juin 2011 par laquelle le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rectifié pour erreur matérielle le jugement n° 1009926 du 13 mai 2011, ainsi que ledit jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 30 juin 2010 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il conclut par des moyens identiques à ceux de la requête n° 11VE02151 ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 et notamment ses articles 3 et 9 ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code d'entrée et de sortie des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Mégret, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Courault, rapporteur public,

- et les observations de Me Bensaid pour M. A ;

Considérant que les requêtes susvisées n° 11VE02151 et n° 11VE02661 présentées pour M. A, concernent la même décision administrative et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que M. A, ressortissant marocain, né en le 19 janvier 1964, relève régulièrement appel du jugement du 13 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2010 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, et de l'ordonnance du 21 juin 2011 par laquelle le président du même Tribunal a procédé à diverses rectifications d'erreurs matérielles affectant ce jugement ;

Sur la régularité du jugement et de l'ordonnance attaqués :

Considérant qu'il ressort de la lecture même du jugement du 13 mai 2011 que les premiers juges, ont dans les motifs du jugement, et notamment dans ses considérants 2 à 4 et 6 commis plusieurs erreurs matérielles relatives à la date de l'arrêté contesté, au nom du requérant et au fondement légal qu'il invoquait au soutien de ses conclusions ; que, par ailleurs, l'ordonnance du président du Tribunal administratif en date du 21 juin 2011 portant rectification d'erreur matérielle dudit jugement, est elle-même entachée de plusieurs erreurs matérielles ; que, dès lors, et compte tenu du nombre, de l'ampleur et de la répétition des erreurs matérielles, M. A est fondé à soutenir que sa requête n'a pas été examinée dans des conditions régulières et que le jugement et l'ordonnance attaqués doivent être annulées ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Cergy Pontoise ;

Sur la légalité de l'arrêté du 30 juin 2010 :

Considérant, en premier lieu, que le préfet a retenu, dans les motifs de l'arrêté contesté d'une part, que M. A " est dans l'incapacité de présenter un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail ; qu'en conséquence le bénéfice de la carte de séjour temporaire mention salarié ne peut lui être accordé " et, d'autre part, " qu'après un examen approfondi de sa situation, la requête de l'intéressé ne répond pas à des considérations humanitaires ni à des motifs exceptionnels, appréciés notamment au regard de la durée de sa résidence habituelle sur le territoire français " ; que, par suite, l'arrêté doit être regardé comme suffisamment motivé au regard des exigences légales ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile : "(...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " et qu'en vertu de l'article L. 312-2, la commission du titre de séjour est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger ; que si M. A soutient justifier de dix-neuf années de présence en France, toutefois, par les pièces produites, il ne justifie de sa présence habituelle en France qu'à partir de février 2002, soit moins de dix ans à la date de l'arrêté contesté ; que, s'agissant des années antérieures, les pièces produites au titre de 1993, de 1995, de 1996, de 1999, de 2000 et de 2001 sont trop peu nombreuses, et inexistantes pour 1992, 1994, 1997 et 1998 ; qu'ainsi, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'absence de saisine de cette commission par le préfet aurait entaché d'irrégularité l'arrêté litigieux ;

Considérant, en troisième lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation " et qu'aux termes de l'article 3 du même accord :" Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. " ; d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que l'article 3 précité de l'accord franco-marocain prévoit les conditions dans lesquelles est délivré aux ressortissants marocains un titre de séjour en qualité de salarié ; que ces stipulations font dès lors obstacle à l'application aux ressortissants marocains des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ont le même objet ; que, par suite, M. A ne peut faire utilement valoir que les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant l'attribution d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " auraient été méconnues en l'espèce par le préfet des Hauts-de-Seine ;

Considérant, toutefois, que, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ; qu'en l'espèce, la décision attaquée trouve son fondement légal dans les stipulations de l'article 3 précité de l'accord franco-marocain, qui peuvent être substituées à celles des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors, en premier lieu, que M. A étant dépourvu d'un visa de long séjour et n'ayant pas été en mesure de présenter un contrat de travail visé par les autorités compétentes, le préfet était en tout état de cause fondé à rejeter sa demande de titre de séjour en qualité de salarié en application de l'article 3 précité de l'accord franco-marocain, en deuxième lieu, que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et, en troisième lieu, que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions ; que, par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions de articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

Considérant que M. A peut, en revanche, utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prétendre à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que, s'il se prévaut, à ce titre, de la réalité d'une vie privée et familiale en France, au motif qu'il a été marié pendant neuf années à une ressortissante française et qu'il vit depuis 2009 avec une ressortissante marocaine, titulaire d'une carte de résident, avec laquelle il a eu un enfant né en 2010, et de son intégration par le travail, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté il n'était plus marié à une ressortissante française et que, à supposer même que M. A vive effectivement en concubinage avec une compatriote titulaire d'une carte de résident, cette relation est très récente ; que, dès lors, l'ensemble de ces circonstances ne sont pas de nature à justifier l'admission exceptionnelle au séjour de l'intéressé ; qu'ainsi le préfet n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en quatrième lieu, que si, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ", il résulte de ce qui a été dit ci-dessus et de l'ensemble des circonstances de l'espèce que la décision attaquée n'a pas été porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;

Considérant, en cinquième lieu, que, contrairement à ce que soutient M. A il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait déposé une demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, le préfet n'était pas tenu d'examiner la demande de titre de séjour au regard de ces dispositions ;

Considérant, en sixième lieu, qu'il ressort de l'ensemble des pièces du dossier que le préfet a bien procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A ;

Considérant, en septième lieu, qu'aux termes du 1° de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, compte tenu du jeune âge de l'enfant dont M. A est le père, et de la possibilité de reconstituer la cellule familiale au Maroc, la décision du préfet des Hauts-de-Seine n'a pas porté atteinte à l'intérêt supérieur de cet enfant au sens des stipulations précitées ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit, et notamment de la méconnaissance des stipulations de la convention relative aux droits de l'enfant, que la décision refusant de l'admettre au séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à exciper de d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ; que le moyen ne peut qu'être écartée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2010 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de renvoi ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; que l'ensemble de sa requête doit ainsi être rejeté ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. A sont rejetées.

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N° 11VE02151 et 11VE02661


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE02151
Date de la décision : 29/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-01 Étrangers. Reconduite à la frontière. Légalité externe.


Composition du Tribunal
Président : M. DIÉMERT
Rapporteur ?: Mme Sylvie MEGRET
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : BENSAID ; BENSAID ; BENSAID

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-11-29;11ve02151 ?
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