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22/11/2012 | FRANCE | N°11VE03109

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 22 novembre 2012, 11VE03109


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 18 août 2011, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT ; le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT demande à la Cour d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 1003762 du 6 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé la restitution à Mme Nicole A de la différence entre la cotisation qu'elle a acquittée sur la plus-value de cession de bien réalisée le 26 octobre 2007 au titre du prélèvement de 33,

1/3 % prévu par l'article 244 bis A du code général des impôt...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 18 août 2011, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT ; le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT demande à la Cour d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 1003762 du 6 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé la restitution à Mme Nicole A de la différence entre la cotisation qu'elle a acquittée sur la plus-value de cession de bien réalisée le 26 octobre 2007 au titre du prélèvement de 33,1/3 % prévu par l'article 244 bis A du code général des impôts et la cotisation résultant de l'application du taux de 16 % à la même base, et de rétablir à 33, 1/3% le taux du prélèvement auquel Mme A a été soumise ;

Le ministre soutient que :

- l'article 56 du Traité européen instituant la communauté européenne (devenu article 63 du traité de fonctionnement de l'Union européenne (TFUE)) ne s'oppose pas à ce que des résidents et des non résidents soient imposés à des taux différents ;

- le prélèvement du tiers n'est pas contraire au principe communautaire de libre circulation des capitaux prévu par l'article 56 du Traité européen puisqu'il ne fait pas systématiquement obstacle à la réalisation d'opérations de placement et d'investissements en France ; qu'en jugeant autrement, le Tribunal administratif de Montreuil a commis une erreur de droit ;

- si la Cour estimait que l'article 244 bis du code général des impôts restreint cette liberté, la clause de gel prévue à l'article 57 du traité instituant la communauté européenne (devenu article 64 du TFUE) serait applicable ;

- à défaut de toute référence au taux du prélèvement libératoire, le calcul de ce dernier au sens de l'article 15-4 de la convention fiscale franco-suisse ne désigne qu'une identité d'assiette régissant chaque catégorie de gains concernée par l'article 15-4 ;

- dans l'hypothèse où cet article ferait obstacle à l'application du taux de 33, 1/3 %, la contribuable doit justifier de sa qualité de résident fiscal suisse ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée le 9 septembre 1966 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 novembre 2012 :

- le rapport de M. Delage, premier conseiller,

- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,

- et les observations de Me Lemanissier, pour Mme A ;

1. Considérant que la SCI Danico, dont Mme Nicole A est associée, a cédé le 26 octobre 2007 un bien immobilier sis au Cap d'Antibes (06600) ; qu'au titre de cette cession, Mme A s'est acquittée du prélèvement sur les plus-values au taux du tiers prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts ; qu'elle a ensuite demandé que ce prélèvement soit calculé par application d'un taux de 16 % ; que le service n'ayant pas statué sur sa réclamation dans le délai de six mois prévu à l'article R.* 198-10 du livre des procédures fiscales, elle a saisi le Tribunal administratif de Montreuil ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève appel du jugement du 6 mai 2011 par lequel le tribunal a décidé la restitution à Mme A de la différence entre la cotisation qu'elle a acquittée et celle résultant de l'application du taux de 16 % à la même base ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I. - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH (...) " ; qu'aux termes de l'article 200 B du même code : " Les plus-values réalisées dans les conditions prévues aux articles 150 U à 150 UC sont imposées au taux forfaitaire de 16 % (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 244 bis A du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. 1. Sous réserve des conventions internationales, les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B, les personnes morales ou organismes, quelle qu'en soit la forme, dont le siège social est situé hors de France, les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter dont le siège social est situé en France et les fonds de placement immobilier mentionnés à l'article 239 nonies, au prorata des droits sociaux ou des parts détenus par des associés ou porteurs qui ne sont pas domiciliés en France ou dont le siège social est situé hors de France, sont soumis à un prélèvement d'un tiers sur les plus-values résultant de la cession d'immeubles (...) / Par dérogation au premier alinéa, les personnes physiques, les associés personnes physiques de sociétés ou groupements dont les bénéfices sont imposés au nom des associés et les porteurs de parts, personnes physiques, de fonds de placement immobilier mentionnés à l'article 239 nonies, résidents d'un Etat membre de la Communauté européenne, ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale, sont soumis à un prélèvement de 16 % (...) " ;

4. Considérant que Mme A ayant été soumise au prélèvement sur les plus-values au taux d'un tiers conformément aux dispositions précitées du I de l'article 244 bis A du code général des impôts, le Tribunal administratif de Montreuil a considéré que l'imposition en litige constituait une restriction aux mouvements de capitaux entre les Etats membres de l'Union européenne et les Etats tiers prohibée par l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne ;

5. Considérant que, devant la Cour, Mme A invoque, en outre, les stipulations de l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 modifiée qui dispose : " 1. Les gains provenant de l'aliénation des biens immobiliers, tels qu'ils sont définis à l'alinéa 1er du paragraphe 2 de l'article 6, sont imposables dans l'Etat contractant où ces biens sont situés 2. Les gains provenant de l'aliénation d'actions, parts ou autres droits dans une société, une fiducie ou une institution comparable, dont l'actif ou le patrimoine est principalement constitué, directement ou indirectement, de biens immobiliers définis au paragraphe 2 de l'article 6 et situés dans un Etat contractant ou de droits portant sur de tels biens sont imposables dans cet Etat. (...) 4. Les gains provenant de l'aliénation des biens mentionnés aux paragraphes 1, 2 et 3, tels qu'ils sont retenus pour l'assiette de l'impôt sur les plus-values, sont calculés dans les mêmes conditions, que le bénéficiaire soit résident de l'un ou l'autre Etat contractant. Si ces gains sont soumis dans un Etat contractant à un prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, ce prélèvement est calculé dans les mêmes conditions, que le bénéficiaire soit résident de l'un ou de l'autre Etat contractant (...) " ;

6. Considérant, en premier lieu, que l'article 4 de la convention fiscale franco-suisse stipule : " 1. Au sens de la présente Convention, l'expression "résident d'un Etat contractant" désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. " ; que Mme A fait valoir sans être contredite que, de nationalité suisse et résidente en Suisse, elle n'y est pas soumise à un régime de forfait fiscal ; qu'elle doit donc être regardée comme justifiant de sa qualité de résidente fiscale suisse au titre de l'année de cession du bien ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que les stipulations précitées, qui précisent, en les distinguant, les règles de calcul des gains et, le cas échant, du prélèvement libératoire, imposent que le calcul du prélèvement libératoire soit effectué par l'application d'un même taux à une même assiette, contrairement à ce que soutient le ministre ; que ledit calcul ainsi entendu doit donc être effectué dans les mêmes conditions que le bénéficiaire soit résident de l'un ou de l'autre Etat contractant ; que l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 modifiée fait ainsi obstacle à l'application aux résidents suisses du taux d'un tiers visé par les dispositions précitées de l'article 244 bis A du code général des impôts ; qu'ainsi la contribuable est fondée à se prévaloir desdites stipulations pour demander la réduction du taux du prélèvement libératoire de 33,1/3 % à 16 %, taux auquel sont soumises les plus-values de cession de valeurs immobilières qui relèvent, pour les résidents français, de l'article 150 U précité du code général des impôts ;

8. Considérant, en troisième lieu, que le ministre soutient à titre subsidiaire que le dégrèvement susceptible d'être prononcé doit être limité à la différence entre, d'une part, le prélèvement d'un tiers et, d'autre part, le total constitué par l'impôt sur le revenu au taux de 16 %, la contribution sociale généralisée et la contribution au remboursement de la dette sociale ; que, toutefois, en instituant ces " contributions ", et alors même qu'il a renvoyé, pour les règles régissant leur établissement, leur recouvrement et leur contentieux à celles qui régissent l'impôt sur le revenu, le législateur ne s'est pas borné à majorer un impôt existant, mais a créé des impositions nouvelles distinctes de l'impôt sur le revenu ; que, dès lors, les stipulations précitées de la convention franco-suisse, qui s'appliquent aux impôts sur le revenu et sur la fortune, ne peuvent être interprétées en ce sens que le calcul du prélèvement libératoire comprendrait la prise en compte desdites contributions ; qu'ainsi cette demande ne peut être accueillie ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de Mme A ; que, par suite, ses conclusions doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à Mme A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11VE03109 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE03109
Date de la décision : 22/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Conventions internationales.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Plus-values des particuliers - Plus-values immobilières.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Philippe DELAGE
Rapporteur public ?: M. SOYEZ
Avocat(s) : LADREYT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-11-22;11ve03109 ?
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