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13/11/2012 | FRANCE | N°12VE00395

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 13 novembre 2012, 12VE00395


Vu la requête, enregistrée le 26 janvier 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Sylvestre A, demeurant chez Mme B, ..., par Me N'Demazou, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106115 du 21 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 6 juillet 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine

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2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre a...

Vu la requête, enregistrée le 26 janvier 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Sylvestre A, demeurant chez Mme B, ..., par Me N'Demazou, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106115 du 21 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 6 juillet 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, ou, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient, en premier lieu, que l'arrêté attaqué, qui comporte des mentions stéréotypées, est insuffisamment motivé en droit comme en fait ; en deuxième lieu, que l'arrêté qui mentionne un délai de départ volontaire de trente jours est insuffisamment motivé, ne prévoit pas de délai de départ supplémentaire en méconnaissance de l'article 7 de la directive 2008/115/CE et viole l'article 16 de ladite directive ; en troisième lieu, que l'arrêté méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors, qu'entré en France en 2006, l'exposant y est intégré, a produit une promesse d'embauche, et a noué des liens personnels et familiaux sur le territoire ; enfin que l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil en date du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 23 octobre 2012, le rapport de M. Formery, président assesseur ;

Considérant que M. A, ressortissant centrafricain né en 1982, fait appel du jugement du 21 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 6 juillet 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué, pris au visa des articles L. 313-14 et L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relève, d'une part, que, si M. A postule pour un emploi qui concerne un métier visé dans la liste annexée à l'arrêté ministériel du 18 janvier 2008, il ne peut justifier d'une expérience professionnelle en France, et d'autre part, qu'il ne peut bénéficier des dispositions de l'article L. 313-11, 7° de ce code dès lors que, célibataire, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses enfants ; qu'il suit de là que cet arrêté comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles il est fondé ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier : " Aux fins de la présente directive, on entend par : / (...) 4) "décision de retour" : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d'un ressortissant d'un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour (...) " ; que l'article 7 de cette directive, relatif au " départ volontaire ", dispose que : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4 (...) / 2. Si nécessaire, les Etats membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. / (...) 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours " ; qu'aux termes de l'article 12 de cette même directive : " 1. Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles (...) " ;

Considérant que la transposition en droit interne des directives communautaires, qui est une obligation résultant du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, revêt, en outre, en vertu de l'article 88-1 de la Constitution, le caractère d'une obligation constitutionnelle ; que pour chacun de ces deux motifs, il appartient au juge national, juge de droit commun de l'application du droit de l'Union européenne, de garantir l'effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l'égard des autorités publiques ; que tout justiciable peut, en conséquence, se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ; que les dispositions précitées de la directive du 16 décembre 2008 sont précises et inconditionnelles et n'avaient pas fait l'objet d'une transposition le 6 juillet 2011, date de l'arrêté attaqué, alors que la date limite fixée au 24 décembre 2010 était dépassée ;

Considérant, toutefois, que l'obligation de quitter le territoire français qui assortit un refus de titre de séjour constitue, avec le refus de titre de séjour, une décision unique de retour au sens de la directive du 16 décembre 2008 et n'a pas, par suite, à faire l'objet d'une motivation distincte de celle que comporte ce refus, à moins notamment qu'un délai plus court que le délai de principe n'ait été accordé à l'étranger pour quitter volontairement le territoire ; qu'ayant laissé à M. A un délai de départ volontaire d'un mois, l'autorité administrative n'avait pas à motiver spécifiquement cet aspect de sa décision ; que le moyen tiré de ce que ce délai serait insuffisamment motivé doit, par suite, être écarté comme inopérant ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte clairement de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 qu'une décision de retour doit indiquer le délai, approprié à chaque situation, dont dispose le ressortissant d'un pays tiers pour quitter volontairement le territoire national, sans que ce délai puisse être inférieur à sept jours, sauf dans les cas prévus au paragraphe 4 du même article, ni être supérieur à trente jours, à moins que des circonstances propres à la situation de l'étranger ne rendent nécessaire une prolongation de ce délai, comme le prévoit le paragraphe 2 du même article ; que toutefois, et ainsi qu'il a été dit, la fixation par l'autorité administrative d'un délai de retour volontaire d'un mois n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique ; que dans ces conditions, et alors que la situation personnelle de M. A ne comportait aucun élément de nature à justifier une prolongation du délai, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise aurait méconnu les prescriptions de ladite directive ;

Considérant, en quatrième lieu, que le requérant ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 16 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée, relatif au placement en rétention ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

Considérant que M. A soutient qu'il vit en France depuis le mois de mai 2006 et qu'il est intégré dans ce pays, ayant développé des liens personnels et familiaux, notamment que le 18 juillet 2011, il a déclaré vivre en concubinage depuis le 25 juin 2011 avec une ressortissante étrangère en situation régulière et bénéficie d'une promesse d'embauche ; que, toutefois, alors qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant, âgé de vingt-neuf ans, est célibataire et sans charge de famille en France à la date de l'arrêté attaqué, l'intéressé n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il aurait vécu jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans et où ses trois enfants, ses deux soeurs et son frère résident ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté litigieux aurait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que cet arrêté n'a donc pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise aurait fait une appréciation manifestement erronée de la situation personnelle de M. A ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 12VE00395


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12VE00395
Date de la décision : 13/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GAYET
Rapporteur ?: M. Simon FORMERY
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : N'DEMAZOU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-11-13;12ve00395 ?
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