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06/11/2012 | FRANCE | N°11VE03813

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 06 novembre 2012, 11VE03813


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 13 novembre 2011, présentée pour M. Frank Takyi A, demeurant ..., par Me Soubre M'Barki, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103720 en date du 7 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 6 avril 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler

pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 13 novembre 2011, présentée pour M. Frank Takyi A, demeurant ..., par Me Soubre M'Barki, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103720 en date du 7 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 6 avril 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que l'arrêté attaqué est entaché d'un vice d'incompétence ;

- que le préfet du Val-d'Oise a omis de saisir la commission du titre de séjour en violation des dispositions des articles L. 312-2 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- que l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il réside en France depuis 1993 et justifie d'une promesse d'embauche pour un emploi dont le préfet admet qu'il figurait sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 ;

- que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues, eu égard à la durée de son séjour en France et aux solides attaches qu'il y a tissées ;

- que le délai d'un mois fixé pour organiser son départ volontaire n'était pas adapté à sa situation, en violation de l'article 7 de la directive dite " retour " n° 2008/115/CE ;

......................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi et du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et la liste qui y est annexée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2012 le rapport de M. Guiard, premier conseiller ;

1. Considérant que M. A, ressortissant ghanéen né le 7 janvier 1960, fait appel du jugement du 7 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 6 avril 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;

2. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 10-172 du 23 décembre 2010 régulièrement publié le 30 décembre suivant au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Val-d'Oise a donné à Mme Thory, directrice de l'accueil du public, de l'immigration et de la citoyenneté, délégation pour signer, notamment, " tout arrêté de refus de délivrance de titre de séjour aux ressortissant étrangers assorti d'une obligation de quitter le territoire français (...) ainsi que toute décision fixant le pays de renvoi " ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que Mme Thory n'était pas compétente pour signer l'arrêté attaqué manque en fait et ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

4. Considérant, d'une part, que par la référence au troisième alinéa de l'article L. 313-10, le législateur a entendu, ainsi qu'il ressort des travaux parlementaires préalables à l'adoption de la loi du 20 novembre 2007, limiter le champ de l'admission exceptionnelle à la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " aux cas dans lesquels cette admission est sollicitée pour exercer une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national, laquelle était annexée à l'arrêté susvisé des ministres chargés de l'emploi et de l'immigration du 18 janvier 2008 ; que, d'autre part, pour l'application des dispositions de l'article L. 313-14, un demandeur qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant sur la liste annexée à l'arrêté interministériel du 18 janvier 2008, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des motifs exceptionnels exigés par la loi ; qu'il appartient en effet à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et recensés comme tels dans l'arrêté du 18 janvier 2008, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

5. Considérant qu'en l'espèce, si M. A se prévaut d'une promesse d'embauche en qualité de monteur en échafaudage, ni l'expérience professionnelle du requérant ni sa situation personnelle ne caractérisent un motif exceptionnel d'admission au séjour ; qu'au demeurant, à la date de l'arrêté attaqué, la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 ne recensait pas le métier de monteur en échafaudage dans la catégorie de ceux qui connaissaient des difficultés de recrutement en Ile-de-France ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auraient été méconnues ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) " ; que selon l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

7. Considérant que si M. A soutient qu'il vit sur le sol français depuis 1993, les documents qu'il produit à l'appui de cette allégation, qui se limitent pour la plupart des années en cause à une ordonnance médicale, un courrier ou une facture, sont insuffisants pour établir, à tout le moins jusqu'en 2006, la durée et le caractère habituel de son séjour en France ; que si le requérant soutient qu'il possède de solides attaches sociales et culturelles en France, il n'en apporte pas la preuve ; qu'il ressort, en outre, des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire et sans enfant à charge, alors qu'il n'est pas contesté que M. A possède des attaches familiales au Ghana ; que, dans ces conditions, le moyen tiré par l'intéressé de ce que l'arrêté attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'il poursuit et méconnaîtrait, en conséquence, les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour " est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; que selon l'article L. 313-14 alors en vigueur : " (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit, que M. A ne remplissait effectivement ni les conditions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni la condition de présence en France mentionnée au quatrième alinéa de l'article L. 313-14 du même code ; que, dans ces conditions, le préfet du Val-d'Oise n'était pas tenu de soumettre le cas du requérant à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

10. Considérant, enfin, que l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relatif au " départ volontaire " dispose que : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. (...) 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions, qui sont inconditionnelles et suffisamment précises et qui n'avaient pas été transposées à la date de l'arrêté attaqué, en dépit du délai de transposition fixé au plus tard au 24 décembre 2010 par l'article 20 de ladite directive, que le délai approprié accordé à chaque ressortissant étranger pour quitter volontairement le sol français ne peut être inférieur à sept jours, sauf dans les cas prévus au paragraphe 4 de l'article précité, ni être supérieur à trente jours, à moins que des circonstances propres à la situation de l'étranger ne rendent nécessaire une prolongation de ce délai, comme le prévoit le paragraphe 2 du même article ;

11. Considérant que M. A, qui ne conteste pas avoir bénéficié d'un délai de trente jours pour quitter volontairement la France, ne justifie d'aucune circonstance particulière impliquant la prolongation de ce délai ; qu'il s'ensuit que l'arrêté du 6 avril 2011 ne méconnaît pas les dispositions précitées de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 11VE03813 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE03813
Date de la décision : 06/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Olivier GUIARD
Rapporteur public ?: M. LOCATELLI
Avocat(s) : SOUBRE M'BARKI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-11-06;11ve03813 ?
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