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16/07/2012 | FRANCE | N°10VE03034

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 16 juillet 2012, 10VE03034


Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Florin A, élisant domicile chez Me Lapijower, ..., par Me Lapijower ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0908572 du 8 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant la condamnation solidaire de la commune des Lilas et de la société Electricité de France (EDF), à lui verser la somme de 450 000 euros, ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la date de son accident et la capitalisat

ion des intérêts ;

2°) de condamner solidairement la commune des Lila...

Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Florin A, élisant domicile chez Me Lapijower, ..., par Me Lapijower ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0908572 du 8 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant la condamnation solidaire de la commune des Lilas et de la société Electricité de France (EDF), à lui verser la somme de 450 000 euros, ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la date de son accident et la capitalisation des intérêts ;

2°) de condamner solidairement la commune des Lilas et la société Electricité de France (EDF) à lui verser la somme de 300 000 euros, ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la date de son accident et la capitalisation des intérêts ;

3°) de condamner la CPAM à lui accorder de nouveau l'aide médicale d'Etat pour qu'il puisse être soigné et pris en charge à nouveau ;

4°) de mettre solidairement à la charge de la commune des Lilas et de la société Electricité de France (EDF) la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a considéré qu'il était un usager du transformateur alors qu'il est un tiers à cet ouvrage public et doit se voir appliquer un régime de responsabilité sans faute ; que ce dommage est anormal en ce qu'il excède les conséquences normales pouvant découler de l'existence et du fonctionnement d'un ouvrage public signalé comme étant hors tension et dans un état avancé de délabrement ; que le lien de causalité entre le dysfonctionnement de l'ouvrage public et le dommage est établi ; qu'en tout état de cause la Cour ne pourra que considérer qu'un défaut d'entretien normal imputable à la mairie des Lilas et à EDF est à l'origine du dommage ; que la faute de la victime n'exonère totalement le gardien de la chose au sens de l'article 1384-1 du code civil que si elle constitue une force majeure qui a toujours un caractère imprévisible et irrésistible ; que le fait d'avoir mis du grillage ne suffit pas à exonérer la mairie de sa responsabilité, la porte donnant accès au local où se trouvait le transformateur n'étant pas verrouillée et très facile d'accès, l'intrusion ne peut être considérée comme imprévisible en l'absence de sécurisation correcte incitant certains "sans domiciles fixes" à venir s'y installer ; que la Cour ne pourra que retenir la responsabilité partagée au sens de l'article 1383 du code civil dès lors que la mise hors tension aurait dû intervenir lors de la résiliation du contrat, que la mairie aurait dû demander à ce que la ligne soit mise hors service, et qu'un panneau "résilié depuis le 13 mars 2004" pouvait laisser croire à une mise hors tension de ce transformateur insuffisamment sécurisé ; qu'il a subi une incapacité totale de travail de six mois et reste handicapé, ainsi le préjudice corporel devra être réparé par la somme de 200 000 euros et le préjudice esthétique et d'agrément devra être réparé par la somme de 25 000 euros ; qu'en réparation des douleurs, il est fondé à demander la somme de 25 000 euros ; qu'en réparation du préjudice financier dès lors qu'il ne peut plus travailler et que les soins sont coûteux alors qu'il n'a bénéficié de l'aide médicale d'Etat qu'à partir de mars 2006 et de la CMU qu'à partir de février 2007, il est fondé à demander la somme de 25 000 euros ou tout au moins que la CPAM soit obligée de lui accorder l'aide médicale ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2012 :

- le rapport de Mme Geffroy, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Kermorgant, rapporteur public,

- et les observations de Me Thonard du Temple pour la commune des Lilas ;

Considérant que, dans la nuit du 4 au 5 décembre 2005, M. Florin A, alors âgé de 24 ans, après avoir pénétré dans l'enceinte d'un entrepôt désaffecté propriété de la commune des Lilas et s'être introduit dans le local abritant un transformateur de moyenne et basse tension, a été victime d'une électrocution alors qu'il était monté sur une échelle dans le but de sectionner et dérober pour les revendre les câbles électriques alimentant le transformateur ; que, par un jugement du 8 juin 2010, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande présentée par M. A tendant à la condamnation solidaire de la commune des Lilas et de la société Electricité de France (EDF), à lui verser la somme de 450 000 euros en réparation des préjudices résultant de l'électrocution ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'à la date de l'accident dont a été victime M. A, si Electricité de France (EDF) exerçait les droits et obligations du maître d'ouvrage sur les transformateurs et lignes telles que la ligne à l'origine de l'électrocution du requérant, la société Electricité réseau distribution de France (ERDF) est venue aux droits d'EDF sur l'entretien du réseau ; que, par suite, EDF ne peut qu'être mise hors de cause ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des procès-verbaux de police, que M. A qui avait décidé avec un ami d'aller voler du cuivre en vue de sa revente d'abord dans l'entrepôt désaffecté puis dans le transformateur, situé au sein de cet entrepôt, a escaladé le mur d'enceinte de l'entrepôt, s'est introduit dans l'entrepôt puis dans la cage contenant le transformateur par effractions successives consistant à sectionner les cadenas de deux portes grillagées et le grillage d'accès d'une dernière porte fermée par une serrure ; que M. A a été électrocuté dans l'enceinte du transformateur en tentant de sectionner un câble électrique ; qu'il doit être regardé dans ces conditions comme un usager anormal de l'ouvrage public que constitue le transformateur électrique ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'accident est exclusivement imputable aux agissements fautifs de la victime qui a décidé de pénétrer dans un ouvrage public signalé comme dangereux et dont elle a déclaré ne pas ignorer les caractéristiques ; que les seules circonstances que l'entrepôt était désaffecté et qu'une étiquette apposée sur la porte du transformateur portait la mention "résilié le 13 mars 2004", résiliation qui n'a aucunement pour effet de faire cesser en amont du compteur l'alimentation électrique d'un site, n'étaient pas de nature à induire en erreur la victime sur la dangerosité d'un transformateur protégé par plusieurs grilles et portant des mentions de grande taille dépourvues de toute ambigüité sur la présence de "haute tension" et sur la "défense d'ouvrir" ; que cet accident est, dès lors, exclusivement imputable aux graves imprudences de la victime ; qu'il suit de là que M. A et la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande d'indemnité ;

Sur les conclusions de M. A tendant à condamner la CPAM à lui accorder l'aide médicale Etat (AME) :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête (...) contient l'exposé de faits et moyens. (...) L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours " ;

Considérant qu'à l'appui des conclusions susvisées, le requérant se borne à joindre une décision de refus du 24 avril 2006 de la CPAM de la Seine-Saint-Denis de donner un effet rétroactif à l'AME ainsi qu'une décision de refus du 15 février 2008 de protection complémentaire en matière de santé ; qu'il n'expose aucun moyen au soutien desdites conclusions ; que, par suite, lesdites conclusions sont irrecevables ; qu'il n'y a, dès lors, pas lieu de les transmettre à la commission départementale d'aide sociale de la Seine-Saint-Denis ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune des Lilas et de la société ERDF, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A et la CPAM de la Seine-Saint-Denis demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A, d'une part, la somme de 2 000 € au titre des frais exposés et non compris dans les dépens par la commune des Lilas, et d'autre part, la même somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens par la société ERDF ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la CPAM de la Seine-Saint-Denis sont rejetées.

Article 3 : M. A versera à la commune des Lilas une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Article 4 : M. A versera à la société ERDF une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

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N° 10VE03034


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-01-03-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute. Responsabilité encourue du fait de l'exécution, de l'existence ou du fonctionnement de travaux ou d'ouvrages publics. Usagers des ouvrages publics.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme KERMORGANT
Avocat(s) : LAPIJOWER

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 16/07/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10VE03034
Numéro NOR : CETATEXT000026368766 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-07-16;10ve03034 ?
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