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09/07/2012 | FRANCE | N°10VE02859

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 09 juillet 2012, 10VE02859


Vu la requête, enregistrée le 30 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Carole A, demeurant ... par la SCP J.P. Foucault, avocat à la Cour ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700146 du 29 juin 2010 du Tribunal administratif de Versailles, en tant que, par ce jugement, le tribunal n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie

au titre des années 2000 et 2001 ;

2°) de prononcer la décharge de ces ...

Vu la requête, enregistrée le 30 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Carole A, demeurant ... par la SCP J.P. Foucault, avocat à la Cour ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700146 du 29 juin 2010 du Tribunal administratif de Versailles, en tant que, par ce jugement, le tribunal n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2000 et 2001 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme A soutient, en premier lieu, que sa comptabilité présentait un caractère probant ; que, d'ailleurs, l'administration fiscale n'a pas rejeté sa comptabilité mais s'est appuyée sur elle pour reconstituer son chiffre d'affaires ; qu'on ne saurait lui reprocher l'absence d'inventaire du stock alors qu'à la clôture de l'exercice, le stock était négligeable, voire, inexistant, son activité portant sur des denrées très périssables et invendables pour l'essentiel après 24 heures ; que, dans un tel cas de figure, l'absence d'inventaire de stock ne peut justifier le rejet de la comptabilité ; que l'enregistrement des recettes en fin de journée se justifie par le fait qu'elle ne pouvait utiliser de caisse enregistreuse faute de disposer d'électricité sur les marchés où elle vendait ; que le contexte de distribution des fruits et légumes, eu égard au nombre de clients sur une tranche horaire réduite, ne permet pas de tenir une main courante ; qu'elle reportait quotidiennement et globalement, comme la doctrine 4 G 3334 l'y autorise, ses recettes, sans individualisation de chaque vente ; que c'est à tort que le tribunal administratif, suivant en cela la position du service, a estimé que les conditions de la tolérance administrative n'étaient pas réunies notamment en raison de l'absence d'inventaire de stock puisqu'il n'y avait pas de stock ; en deuxième lieu, que la reconstitution du chiffre d'affaires à laquelle l'administration a procédé n'est pas fondée ; que, d'une part, le service a, en méconnaissance de la doctrine 4G 3342 du 25 juin 1998, utilisé une seule méthode, consistant à déterminer un coefficient de bénéfice brut appliqué à l'ensemble des achats comptabilisés dits " éludés " par application de prix de vente ponctuels et de prix d'achat moyens ; que l'utilisation d'une unique méthode constitue un vice substantiel de procédure entachant celle-ci de nullité ; que, d'autre part, l'échantillon retenu est insuffisant ; que l'administration a effectué des relevés sur deux marchés d'Asnières et de Houilles, à des périodes rapprochées de mai et juin 2003, donc à des dates postérieures à la période vérifiée ; qu'à ces dates, les marchés étaient différents et certains concernaient des clientèles plus aisées que celles d'Argenteuil et Gennevilliers ; qu'il y a des variations de prix puisque les marchands ne vendent pas au même prix en début et en fin de marché et font des offres promotionnelles le dimanche ou en fin de marché ; que, dès lors, la méthode de reconstitution présente un caractère sommaire ; que, par ailleurs, s'agissant du relevé des prix d'achats, il n'est pas cohérent de comparer un prix de vente ponctuel sur une seule période au printemps avec un prix moyen d'achat pour déterminer le coefficient de marge compte tenu de la fluctuation ; qu'en outre, l'échantillon retenu n'est pas suffisant pour calculer un taux de marge fiable ; que la méthode retenue par l'administration aboutit à un coefficient de marge irréaliste de 1,72, soit une marge bénéficiaire de 38,66 %, ce qui ne correspond pas au coefficient habituellement pratiqué dans la profession ; que si elle avait pratiqué le taux de marge que l'administration lui prête, elle n'aurait pas augmenté son chiffre d'affaires de 164 % entre 1997 et 2001 ; qu'enfin, s'agissant des achats regardés comme éludés par l'administration, certains avaient été correctement comptabilisés et d'autres ne lui sont pas imputables, l'exposante ayant d'ailleurs porté plainte pour usurpation d'identité ; que, d'ailleurs, l'administration n'a jamais communiqué, ne serait-ce qu'en copie, des factures dites éludées alors que l'article 76 B du livre des procédures fiscales prévoit que l'administration est tenue de communiquer, avant la mise en recouvrement, les copies des documents au contribuable si celui-ci en fait la demande ; que si on applique un coefficient de 1,5, on retrouve approximativement son chiffre d'affaires ce qui corrobore le caractère probant de sa comptabilité ; que le chiffre d'affaires reconstitué par l'administration n'est pas corroboré par son train de vie et celui de son époux puisqu'ils ont dû emprunter 15 000 euros début 2002 à la banque pour combler leur découvert bancaire ; en troisième lieu, que, s'agissant des pénalités de mauvaise foi, il résulte de ce qui précède que sa comptabilité est probante et qu'aucune recette n'a été dissimulée ; qu'en se bornant à invoquer des irrégularités comptables ayant généré des minorations de recettes, l'administration n'établit pas sa mauvaise foi ; que, par suite, les pénalités de mauvaise foi ne sont pas fondées ; enfin, que les intérêts de retard, eu égard à leur montant, constituent une pénalité au sens de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ils doivent être réduits au taux de l'intérêt légal ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2012 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public,

- et les observations de Me Moraine, pour Mme A ;

Considérant que Mme A, qui exerçait une activité individuelle de vente de fruits et légumes sur plusieurs marchés de la région parisienne, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2000 et 2001 ; qu'après avoir écarté sa comptabilité comme non probante, l'administration a procédé à la reconstitution de son chiffre d'affaires et a notifié à l'intéressée, selon la procédure de redressement contradictoire, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, assorties des pénalités pour mauvaise foi ; qu'à la suite du rejet de sa réclamation, Mme A a saisi le Tribunal administratif de Versailles qui n'a que partiellement fait droit aux conclusions de sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires, en retenant un taux de perte de 5 % pour déterminer le montant des achats revendus et en ramenant à leur montant hors taxe certaines factures d'achats éludés ; que Mme A relève appel de ce jugement en tant que le tribunal a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle envisage de modifier les bases d'imposition d'un contribuable, d'informer celui-ci de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a pu obtenir auprès de tiers dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, afin qu'il soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les pièces concernées soient mises à sa disposition ; qu'il ressort des termes de la notification de redressement adressée le 19 septembre 2003 à Mme A que les services fiscaux l'ont informée des pièces qu'ils avaient obtenues auprès de ses fournisseurs et utilisées pour reconstituer le montant des achats éludés ; que Mme A ne soutient ni même n'allègue avoir demandé la communication de ces documents avant la mise en recouvrement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure serait entachée d'irrégularité au motif que ces documents ne lui ont pas été communiqués ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A soutient que l'administration ne pouvait, sans irrégularité, exercer son droit de communication auprès de ses fournisseurs en demandant les renseignements requis par un appel téléphonique ; que, toutefois, le droit de communication exercé par l'administration auprès des fournisseurs de Mme A n'était pas soumis à un formalisme particulier ; que, par suite, le service n'a, de ce fait, commis aucune irrégularité ;

Considérant, en troisième lieu, que la requérante fait valoir qu'à la suite d'une méprise, ni elle-même ni son conseil n'ont pu assister à la séance de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que Mme A a été invitée à assister à la séance de cette commission du 25 mars 2004 par lettre recommandée datée du 2 février 2004, dont il a été accusé réception le 17 février 2004 ; que, par suite, la circonstance que la requérante n'a été ni présente, ni représentée n'est pas de nature à entacher la procédure d'irrégularité ;

Considérant, enfin, que la circonstance que l'administration a utilisé une seule méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de Mme A est sans incidence sur la régularité de la procédure ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité et la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge. " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A, qui ne tenait aucun état de ses stocks, y compris pour certaines denrées moins périssables que d'autres et pouvant être conservées plusieurs jours, n'a produit aucun inventaire annuel de ceux-ci ; qu'en outre, elle enregistrait globalement et mensuellement ses recettes sans individualiser les produits vendus, les lieux de vente, et les quantités vendues ; que, si elle soutient qu'elle enregistrait quotidiennement ses recettes, comme l'y autorisait la doctrine 4 G 3334, les extraits de " feuilles de caisse " qu'elle produit, qui sont écrits à la main sur un cahier et qui se limitent à un chiffre par jour, ne présentent pas d'enregistrement détaillé des produits et des lieux de ventes, alors qu'elle intervenait sur cinq marchés différents, et pas davantage d'état de stock des produits, et ne peuvent être regardés comme suffisants pour considérer qu'elle enregistrait quotidiennement ses recettes ; qu'en outre, Mme A n'a pas enregistré la totalité de ses achats ; que l'ensemble de ces constatations, qui ont été d'ailleurs relevées lors de l'établissement du procès-verbal du 27 mai 2003, établissent suffisamment l'irrégularité de la comptabilité tenue par l'intéressée ; que, dans ces conditions, les redressements ayant été établis conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, la charge de la preuve de l'exagération des impositions en litige incombe à la requérante ;

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires :

Considérant que la circonstance que la comptabilité du contribuable ait été regardée comme non probante ne fait pas obstacle à ce que l'administration utilise des éléments tirés de celle-ci pour opérer des redressements ; qu'en l'espèce, pour reconstituer les recettes de l'activité de Mme A, l'administration a déterminé un coefficient de bénéfice brut global à partir, d'une part, de l'ensemble des factures d'achats produites pour la période du 1er mai au 12 juin 2003, d'autre part, des prix de vente relevés le 21 mai 2003 sur le marché de Houilles et le 12 juin 2003 sur le marché d'Asnières ; que ce coefficient multiplicateur de 1,72 a été appliqué à l'ensemble des achats des exercices 2000 et 2001, déterminés à partir des achats hors taxes comptabilisés par l'entreprise et des achats éludés décelés par l'administration à l'issue de l'exercice du droit de communication auprès des fournisseurs de Mme A ;

Considérant, en premier lieu, que Mme A conteste la pertinence de l'échantillon retenu par l'administration et soutient que la méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires serait excessivement sommaire ; que, toutefois, l'administration fiscale a procédé à des relevés des prix de vente de 73 produits de nature différente, sur deux jours différents, sur les marchés de Houilles et d'Asnières ; qu'elle a, en outre, présenté une demande visant à obtenir des informations complémentaires le 25 juin 2003 ; que, si Mme A soutient que les marchés de Houilles et d'Asnières présenteraient des caractéristiques particulières en terme de pouvoir d'achat des clients, elle ne l'établit par aucun élément chiffré, sa comptabilité ne fournissant d'ailleurs aucune information à cet égard, faute pour Mme A d'avoir tenu une comptabilité quotidienne distincte par marché ; que si la requérante soutient également que les prix pratiqués seraient sensiblement différents entre le début et la fin des marchés, elle n'apporte aucun élément probant à l'appui de cette allégation ; que, si elle fait état de la circonstance que l'administration n'a procédé à des relevés de prix qu'au cours du printemps, elle n'établit pas davantage que les variations saisonnières des prix d'achat et de vente auraient une incidence sur les marges pratiquées ; que si elle soutient, en outre, que le taux de marge, de 1,72, retenu par l'administration fiscale serait irréaliste au motif que celui de la profession serait, en général, de 1,5, elle ne peut, toutefois, se prévaloir d'un taux de marge moyen résultant d'une étude générale pour critiquer celui qui résulte des données réelles de son activité personnelle sur des marchés de la région parisienne ; que, par ailleurs, les éléments résultant de la liste des prix de vente et d'achat pour une quinzaine de produits, produite par la requérante, ne sont pas probants au regard de ceux résultant des 73 produits retenus par l'administration fiscale pour constituer le tableau de détermination du taux de marge ; qu'au surplus, il ressort des prix de vente constatés par le vérificateur et des prix d'achat recensés dans les factures d'achats pour un certain nombre de produits, que le taux de marge pratiqué était d'au moins 1,76 ; qu'ainsi, Mme A, qui se borne à demander la réduction du coefficient de bénéfice brut de 1,72 à 1,5 en se fondant sur un coefficient moyen utilisé par la profession et ne propose aucun élément chiffré alternatif pour aboutir à une reconstitution plus précise de son activité, ne démontre pas que la méthode suivie par l'administration, qui s'appuie sur des données réelles d'exploitation de l'entreprise, serait excessivement sommaire ou viciée dans son principe ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A soutient encore que certains achats auraient été considérés à tort comme éludés alors qu'elle les avait réglés par chèques et comptabilisés ; que, toutefois, lors des opérations de contrôle, le vérificateur a saisi l'intégralité des factures d'achats et communiqué cette liste à Mme A ; que les factures que Mme A prétend avoir comptabilisées ne se trouvaient pas sur les relevés du vérificateur ; que l'intéressée n'établit pas que, comme elle l'allègue, ces factures auraient été enregistrées dans la comptabilité de l'entreprise et que ce serait à tort que l'administration aurait considéré lesdits achats comme éludés ; qu'en outre, la circonstance que le montant total des achats correspondant aux factures saisies sur place par le vérificateur et aux factures produites par la requérante est supérieur au montant des achats portés sur les déclarations de bénéfices industriels et commerciaux de l'entreprise, est de nature à démontrer l'existence d'une minoration du montant des achats déclarés ; que, par ailleurs, si la requérante soutient que certains achats regardés comme éludés ne seraient pas de son fait mais auraient été effectués en espèces par une tierce personne ayant emprunté son nom sans autorisation au Marché d'intérêt national de Rungis, les éléments qu'elle produit à l'appui de ces affirmations ne sont toutefois pas probants alors qu'en outre, la juridiction pénale n'a pas regardé comme établis les faits d'usurpation d'identité dont elle se prévalait ; qu'enfin, si Mme A fait état d'erreurs qu'aurait commises l'administration sur le montant ou la comptabilisation de certaines factures, ces erreurs d'un montant minime ne sont pas de nature, alors que le montant des achats éludés a été évalué à 104 668 euros pour l'année 2000, à établir que la méthode retenue par l'administration fiscale serait excessivement sommaire ou radicalement viciée ;

Considérant, enfin, que l'instruction administrative reprise à la documentation de base 4 G 3343 n° 4, qui précise que, le cas échéant, les bases imposables du contribuable sont reconstituées selon plusieurs méthodes de reconstitution, ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale, au sens et pour l'application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi Mme A ne peut utilement se prévaloir de cette instruction sur le fondement de ces dispositions ;

Sur les intérêts de retard :

Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions. Cet intérêt n'est pas dû lorsque sont applicables les dispositions de l'article 1732 ou les sanctions prévues aux articles 1791 à 1825 F. Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 % par mois. Il s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé. " ;

Considérant, en premier lieu, que Mme A soutient que l'application de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 précité du code général des impôts constitue une sanction dans la mesure où son taux est supérieur à celui de l'intérêt légal ; que l'intérêt de retard institué par ces dispositions, qui s'appliquent indépendamment de toute appréciation portée par l'administration fiscale sur le comportement du contribuable, vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que, si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; que Mme A n'établit pas que le niveau de l'intérêt de retard serait devenu manifestement excessif ; que, par ailleurs, il n'appartient au juge de l'impôt ni de moduler le montant des intérêts de retard dus, ni de limiter celui-ci au montant résultant de la seule application du taux légal ; que, par suite, le moyen tiré par la requérante de ce que les intérêts de retard mis à sa charge présenteraient un caractère excessif doit être rejeté ;

Considérant, en second lieu, que le juge de l'impôt, saisi d'une contestation sur les intérêts de retard, lesquels ne constituent pas une sanction mais la seule réparation du préjudice subi par le Trésor, ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas de contestation sur des droits et obligations de caractère civil ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'appui d'une telle contestation ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti (...) d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) " ;

Considérant que, pour faire application aux redressements en cause de la pénalité de 40 % pour mauvaise foi, l'administration s'est fondée sur l'importance et la répétition des omissions de recettes constatées par le vérificateur, ainsi que sur les motifs qui l'ont conduite à rejeter la comptabilité de l'entreprise tels que la constatation d'achats non comptabilisés pour des montants significatifs et l'absence de pièces justificatives de recettes ; qu'en mettant en évidence le caractère important et répété des manquements constatés, qui aboutissent à une dissimulation sur les deux exercices en litige de 30 et 32 % du chiffre d'affaires, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, du caractère intentionnel des minorations de recettes et, par suite, de la mauvaise foi de la contribuable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté le surplus de sa demande ;

Sur les conclusions de Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

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N° 10VE02859 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10VE02859
Date de la décision : 09/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : J-P FOUCAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-07-09;10ve02859 ?
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