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26/06/2012 | FRANCE | N°11VE03786

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 26 juin 2012, 11VE03786


Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Aymen A, demeurant ..., par Me Tekari, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104352 du 10 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 2011 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination et de la décision

du 16 mars 2011 par laquelle le directeur régional des entreprises de la...

Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Aymen A, demeurant ..., par Me Tekari, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104352 du 10 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 2011 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination et de la décision du 16 mars 2011 par laquelle le directeur régional des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi de l'Ile-de-France a rejeté sa demande d'autorisation de travail ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du directeur régional des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi de l'Ile-de-France du 16 mars 2011 et l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 3 mai 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire " salarié " ou " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ; que les dispositions de l'accord franco-tunisien en matière d'entrée, de séjour et de travail ont été violées ; que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas répondu à la demande qu'il avait formulée sur la base de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le refus qui lui a été opposé ne pouvait pas se fonder sur le jugement du 8 mars 2011 plaçant en redressement judiciaire la société " 2AS " alors que celui-ci a été annulé par un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 7 juillet 2011 ; que la décision du directeur régional des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi de l'Ile-de-France prise au vu de ce jugement est illégale et que les premiers juges n'ont pas statué sur ses conclusions dirigées contre cette décision ; que l'arrêté méconnaît sa situation personnelle ; que l'obligation de quitter le territoire français a violé les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de son parcours professionnel et des attaches personnelles et familiales dont il dispose en France ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien modifié du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2012 :

- le rapport de M. Bresse, président assesseur,

- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant tunisien, né le 5 mars 1983, relève régulièrement appel du jugement en date du 10 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 2011 par lequel le préfet de Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas répondu aux conclusions présentées par M. A tendant à l'annulation du refus opposé le 16 mars 2011 par le directeur régional des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi de l'Ile-de-France à sa demande d'autorisation de travail formulées dans sa demande ; que cette omission à statuer entache d'irrégularité le jugement attaqué ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler ledit jugement en tant qu'il a omis de statuer sur ces conclusions et d'évoquer dans cette mesure les conclusions présentées par M. A devant le tribunal administratif ;

Sur la légalité des décisions contestées :

En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus d'autorisation de travail en date du 16 mars 2011 :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 5221-11 du code du travail : " La demande d'autorisation de travail relevant des 5°,6°,7°, 8°, 9°, 9° bis, 12° et 13° de l'article R. 5221-3 est faite par l'employeur ; qu'aux termes de l' article R. 5221-20 du même code : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule / 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur, l'entreprise d'accueil ou l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; / 4° Le cas échéant, le respect par l'employeur, l'utilisateur, l'entreprise d'accueil ou le salarié des conditions réglementaires d'exercice de l'activité considérée ; / 5° Les conditions d'emploi et de rémunération offertes à l'étranger, qui sont comparables à celles des salariés occupant un emploi de même nature dans l'entreprise ou, à défaut, dans la même branche professionnelle ; / 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 ; 7° Le cas échéant, lorsque l'étranger réside hors de France au moment de la demande et lorsque l'employeur ou l'entreprise d'accueil pourvoit à son hébergement, les dispositions prises par l'employeur pour assurer ou faire assurer, dans des conditions normales, le logement de l'étranger directement ou par une personne entrant dans le champ d'application de la loi n° 73-548 du 27 juin 1973 relative à l'hébergement collectif. Ces dispositions s'appliquent également lorsque l'étranger change d'employeur avant l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 5221-23 " ; que ces dispositions impliquent que l'autorisation de travail ne peut être délivrée que si l'étranger dispose de la part d'un employeur d'une proposition de travail présentant un caractère réel et suffisamment pérenne ;

Considérant que la décision du 16 mars 2011 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de l'Ile de France a refusé de délivrer une autorisation de travail à M. A pour exercer la profession de technicien d'installation d'équipements à Sauls-Les-Chartreux fait état du redressement judiciaire de la société 2 A.S, ne permettant pas la pérennité du recrutement d'un salarié ; qu'en se fondant, à titre principal, sur le jugement du 8 mars 2011 de placement en redressement judiciaire de cette société, jugement d'ailleurs infirmé par un arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 7 juillet 2011, pour en déduire l'absence de pertinence du recrutement d'un salarié alors que le placement en redressement judiciaire ne met pas fin à l'activité de la société et que le requérant avait déjà travaillé depuis le mois de septembre 2009 pour cette entreprise, l'administration a commis, dans les circonstances de l'espèce, une erreur manifeste d'appréciation ; qu'ainsi, la décision de refus d'autorisation de travail du 16 mars 2011 est entachée d'illégalité et doit être annulée ;

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation du refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire :

Considérant que l'article 3 de l'accord franco-tunisien modifié du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail précise que " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, (...) reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention salarié " ; que, dès lors que le refus d'autorisation de travail du 16 mars 2011 est, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, illégal, le refus de délivrance du titre de séjour en qualité de salarié du 3 mai 2011 qui y trouvait son fondement est lui-même, par voie de conséquence, entaché d'illégalité et doit être annulé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que le présent arrêt n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour à M. A ; qu'en revanche, il implique le réexamen de sa situation administrative ; que, par suite, il y a lieu, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder à un nouvel examen de cette situation dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt après que le directeur régional des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi de l'Ile-de-France ait à nouveau statué sur sa demande d'autorisation de travail ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à l'instance, la somme de 1 500 euros demandée par M. A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1104352 du 10 octobre 2011, la décision du 16 mars 2011 du directeur régional des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi de l'Ile-de-France et l'arrêté du 3 mai 2011 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation administrative de M. A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

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N° 11VE03786


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE03786
Date de la décision : 26/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : TEKARI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-06-26;11ve03786 ?
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