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24/05/2012 | FRANCE | N°10VE03325

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 24 mai 2012, 10VE03325


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 15 octobre 2010, présentée pour M. Abdelkader A, demeurant ..., par Me Courage ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003662 en date du 16 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne du 11 mai 2010 portant refus de renouvellement d'un titre de séjour en qualité de salarié, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination ;

2°) d'

annuler la décision de refus de renouvellement du titre de séjour prise par ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 15 octobre 2010, présentée pour M. Abdelkader A, demeurant ..., par Me Courage ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003662 en date du 16 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne du 11 mai 2010 portant refus de renouvellement d'un titre de séjour en qualité de salarié, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination ;

2°) d'annuler la décision de refus de renouvellement du titre de séjour prise par le préfet de l'Essonne ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le jugement du Tribunal administratif de Versailles n'est pas suffisamment motivé ; que l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ; que l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit ; que le préfet ne pouvait refuser de lui délivrer un titre de séjour au seul motif qu'il aurait changé de métier, circonstance par ailleurs inexacte dès lors qu'il a continué à exercer des fonctions de menuisier quand il a été promu chef d'équipe ; que l'évolution de son salaire n'est pas suffisamment caractérisée pour justifier le refus de renouvellement ; que les bulletins de paie qu'il a produits comportent une erreur sur les modalités de calcul de sa rémunération ; que le préfet ne pouvait s'appuyer sur les dispositions de l'article R. 5221-34 du code du travail ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2012 :

- le rapport de Mlle Rudeaux, premier conseiller,

- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,

- et les observations de Me Courage ;

Considérant que M. A, ressortissant marocain, relève appel du jugement du 16 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mai 2010 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de renouveler son titre séjour en qualité de salarié, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. " ; qu'aux termes de l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-4 du code du travail : " L'autorisation de travail permet à l'étranger d'exercer l'activité professionnelle salariée qu'elle mentionne, sous réserve de la justification des conditions d'exercice de cette activité lorsqu'elle est soumise à une réglementation particulière. " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-34 du même code : " Le renouvellement d'une des autorisations de travail mentionnées aux articles R. 5221-32 et R. 5221-33 peut être refusé en cas de non-respect des termes de l'autorisation par l'étranger ou en cas de non respect par l'employeur : / (...) / 2° Des conditions d'emploi, de rémunération ou de logement fixées par cette autorisation " ;

Considérant que M. A s'est vu délivrer le 29 mai 2009 une carte de séjour temporaire valable jusqu'au 13 avril 2010, pour exercer le métier de " menuisier spécialisé dans le décor marocain " dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée conclu le 20 août 2008 ; que, par un avenant à ce contrat de travail, en date du 10 août 2009, l'employeur de M. A lui a confié les fonctions de chef d'équipe chargé de gérer six personnes ; que le préfet de l'Essonne a refusé le 11 mai 2010 de renouveler le titre de séjour, sur le fondement des dispositions de l'article R. 5221-34 du code du travail, au motif que les conditions d'emploi et de rémunération prévues par l'autorisation de travail n'avaient pas été respectées ;

Mais considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A s'est vu confier une activité de chef-menuisier, qui consiste à superviser l'activité d'une petite équipe d'ouvriers-menuisiers oeuvrant dans le décor marocain ; que dès lors que, pour accomplir sa nouvelle mission, M. A a continué d'accomplir des actes de menuiserie et d'exercer la spécialité pour laquelle il a été recruté, il ne peut être regardé comme ayant changé de métier à l'occasion de la promotion professionnelle qu'il a obtenue ; qu'il suit de là que les conditions d'emploi fixées par l'autorisation de travail ont été respectées ;

Considérant, en second lieu, que le contrat de travail du 20 août 2008 prévoyait que M. A percevrait une rémunération nette de 1 300 euros ; qu'à la suite de sa nomination en qualité de chef d'équipe, l'avenant au contrat de travail du 10 août 2009 a porté cette rémunération à une somme de 1 900 euros net par mois, majorée de primes le cas échéant ; qu'ainsi, les conditions de rémunération prévues par l'autorisation de travail, qui se sont trouvées améliorées du fait de l'avenant litigieux, n'ont pas davantage été méconnues ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

Considérant qu'eu égard au motif d'annulation ci-dessus retenu, et sous réserve d'un changement substantiel dans la situation de droit ou de fait du requérant, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance à ce dernier d'une carte de séjour temporaire en qualité de salarié ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Essonne de délivrer à M. A ce titre dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros que M. A réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1003662 en date du 16 septembre 2010 du Tribunal administratif de Versailles, ensemble l'arrêté en date du 11 mai 2010 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de renouveler à M. A un titre de séjour en qualité de salarié, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne de délivrer un titre de séjour en qualité de salarié à M. A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

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N° 10VE03325


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE03325
Date de la décision : 24/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: Melle Sandrine RUDEAUX
Rapporteur public ?: M. SOYEZ
Avocat(s) : COURAGE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-05-24;10ve03325 ?
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