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22/03/2012 | FRANCE | N°10VE03014-10VE03016

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 22 mars 2012, 10VE03014-10VE03016


Vu I) la requête, enregistrée le 8 septembre 2010 sous le n° 10VE03014, présentée pour la société INTER-ROUTAGE, dont le siège est au 49, rue des Ecoles à Aubervilliers (93300), par Me Benelli ; la société INTER-ROUTAGE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900992 du 25 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à ce que l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) soit condamné à lui verser la somme de 799 512,62 euros au titre du marché de routage de 2006 et de 100 000 euros au titr

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Vu I) la requête, enregistrée le 8 septembre 2010 sous le n° 10VE03014, présentée pour la société INTER-ROUTAGE, dont le siège est au 49, rue des Ecoles à Aubervilliers (93300), par Me Benelli ; la société INTER-ROUTAGE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900992 du 25 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à ce que l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) soit condamné à lui verser la somme de 799 512,62 euros au titre du marché de routage de 2006 et de 100 000 euros au titre des dommages et intérêts pour mauvaise foi et l'a condamnée à verser à l'INPES une somme de 68 237,28 euros ;

2°) de condamner l'INPES à lui verser la somme de 799 512,62 euros au titre du marché de routage de 2006 et de 100 000 euros au titre des dommages et intérêts pour manquement à ses obligations contractuelles, assortie des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société soutient que le tribunal a omis de statuer sur des moyens ; que l'article 12.3 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services n'est pas applicable au marché en litige, le terme du marché intervenant normalement au 18 avril 2009 et non en 2008 ; que le maximum du marché étant atteint, ce marché était devenu caduc et est assimilable dans ses effets à une résiliation en absence de toute faute du cocontractant et qu'ainsi, l'article 30.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services est applicable ; que les prestations de mise à disposition du stock n'étaient pas réalisables à titre gratuit comme le démontre la demande de devis de l'INPES ; que le transfert du matériel incombait à la société DHL, nouveau titulaire du marché comme le démontrent les courriers de l'INPES des 19 novembre et 4 décembre 2008 ainsi que sa proposition de règlement de la mise à disposition du stock pour 105 000 euros ; que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en considérant que les conclusions de condamnation de 100 000 euros étaient irrecevables faute de demande préalable, cette demande étant liée à la réclamation préalable formulée le 24 novembre 2008 ; que la mise à disposition du stock doit être assimilée aux prestations de " picking " telles que prévues par le cahier des clauses techniques particulières ; que ces opérations nécessitent des prestations de conditionnement d'emballage assimilables au colisage et donc facturables ; que, lors du changement de prestataire, près de 1 000 tonnes de documents ont été restitués ; que l'existence de cette prestation résulte, comme le démontrent les échanges de courriers avec l'INPES, de la commune intention des parties ; que l'INPES, par son comportement, a fait preuve de mauvaise foi à un moment où la société INTER-ROUTAGE connaissait des problèmes de trésorerie ; qu'ainsi, un préjudice s'élevant à 100 000 euros a été subi par la société ;

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Vu II) la requête, enregistrée le 8 septembre 2010 sous le n° 10VE03016, présentée pour la société INTER-ROUTAGE, dont le siège est au 49, rue des Ecoles à Aubervilliers (93300), par Me Benelli ; la société INTER-ROUTAGE demande à la Cour de décider qu'il sera sursis à l'exécution du jugement n° 0900992 du 25 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a condamné la société INTER-ROUTAGE à verser à l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé une indemnité de 68 237,28 euros ;

La société INTER-ROUTAGE soutient que l'exécution du jugement du 25 mai 2010 aurait des conséquences difficilement réparables, connaissant une conjoncture économique et financière difficile l'ayant conduite à solliciter un étalement de ses dettes sociales et fiscales et qui pourrait avoir des répercussions en terme d'emplois ; que, comme le démontrera la requête au fond et les moyens qui y sont développés, les moyens d'appel sont sérieux, le jugement du tribunal administratif étant irrégulier et mal fondé ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et services issu du décret du 27 mai 1977 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2012 :

- le rapport de Mme Mégret, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Courault, rapporteur public,

- et les observations de Me Martin substituant Me Benelli pour la société INTER-ROUTAGE et de Me Billery substituant Me de Combles de Nayves pour l'INPES ;

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement en date du 25 mai 2010 du Tribunal administratif de Montreuil ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur la requête n° 10VE03014 :

Considérant que l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) et la société INTER-ROUTAGE ont conclu, en 2006, un marché relatif à la réalisation de prestations de stockage, de conditionnement, de routage et de prestations annexes ; que le montant maximal prévu par le contrat ayant été atteint, un avenant a été conclu le 18 juillet 2008 par l'INPES avec la société INTER-ROUTAGE afin de permettre la continuité du service public et un nouvel appel d'offres lancé ; qu'un nouveau marché ayant été conclu et attribué à un autre prestataire, l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé a demandé à la société INTER-ROUTAGE de procéder à la restitution du stock ; qu'un différend sur les modalités d'exécution de cette restitution est apparu ; que le stock, objet du litige, a été récupéré par le nouveau titulaire du marché entre le 15 et 31 décembre 2008 sous le contrôle d'un huissier ; que, le 9 septembre 2010, la société INTER-ROUTAGE relève régulièrement appel du jugement en date du 25 mai 2010, notifié à l'entreprise le 8 juillet 2010, par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a condamné la société INTER-ROUTAGE à verser à l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé une indemnité de 68 237,28 euros ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'en indiquant " que le différend entre les parties sur les modalités contractuelles de restitution des stocks ne peut qu'être réglé au vu des stipulations de l'article 12.3 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services ", le Tribunal administratif de Montreuil a écarté implicitement mais nécessairement les autres dispositions du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services ainsi que le moyen tiré de la pratique contractuelle ; qu'ainsi le Tribunal administratif de Montreuil n'a pas commis d'omission à statuer ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant que les stipulations de l'article 12 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de fournitures courantes et de services prévoient que " si le marché prévoit la remise au titulaire (...) d'approvisionnements, c'est-à-dire de produits finis ou semi-finis (...), les approvisionnements non consommés sont restitués au lieu et à la date fixés par le marché " ;

Considérant que le marché de stockage, de conditionnement, de routage et de prestations annexes conclu entre l'INPES et la société INTER-ROUTAGE avait pour objet la diffusion notamment par voie postale de documents et matériels édités par l'INPES à destination du grand public ou des professionnels de la santé ; que ces matériels et documents étaient entreposés dans les locaux de la société INTER-ROUTAGE dans l'attente de leur expédition après mise sous pli ou conditionnement ; qu'il ne résulte d'aucune stipulation du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché en cause que ces documents et matériels devaient être restitués à la personne publique à l'issue du marché ; que, par suite, ces documents et matériels doivent être regardés, non comme des approvisionnements confiés au titulaire sous réserve de leur restitution à la personne publique au sens de l'article 12 précité, mais comme des fournitures laissées en dépôt chez le titulaire aux fins de leur stockage, emballage et transport au sens des articles 13 et 14 du même cahier ; qu'ainsi, en jugeant que, sur le fondement des stipulations de l'article 12.3 non applicable au marché en cause, que les frais de déstockage et de transfert du stock entre l'ancien et le nouveau titulaire devaient mis à la charge de la société INTER-ROUTAGE pour un montant de 68 237,28 euros, le Tribunal administratif de Montreuil a commis une erreur de droit ; que la société INTER-ROUTAGE est, par suite, fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société INTER-ROUTAGE devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

Considérant qu'aux termes de l'article 17 du code des marchés publics applicable au marché contesté : " (...) un marché est conclu à un prix définitif " ; qu'aux termes de l'article 71 de ce code : " (...) I. - Le marché à bons de commande détermine les spécifications, la consistance et le prix des prestations ou ses modalités de détermination ; il en fixe le minimum et le maximum en valeur ou en quantité. (...) Le marché est exécuté par émission de bons de commande successifs, selon les besoins. (...) Le marché précise la durée maximale d'exécution des bons de commande. (...) " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le marché relatif à la réalisation de prestations de stockage, de conditionnement, de routage et de prestations annexes conclu entre l'INPES et la société INTER-ROUTAGE pour trois ans et notifié le 19 avril 2006 fixait un minimum de 3 037 040 € HT et un maximum de 9 111 120 € HT ; que ce maximum a été atteint, avant le terme prévu par ledit marché, dès le mois de janvier 2008 ; que le marché étant conclu au prix définitif maximal de 9 111 120 € HT et ce maximum étant atteint, l'objet du marché était entièrement réalisé et le terme du marché intervenu pour des motifs indépendants de la volonté des parties ; que, la fin prématurée du contrat ne résultant pas de la volonté d'une des parties, l'extinction des relations contractuelles ne présente pas le caractère d'une résiliation ; que, par suite, les conclusions de la société INTER-ROUTAGE tendant à ce que son indemnité soit calculée selon modalités prévues, en cas de résiliation, par l'article 30.1 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de fournitures courantes et de services ne peuvent être accueillies ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si le cahier des clauses particulières, qui déterminait les règles d'exécution du marché quant à la diffusion des documents et matériels, les règles applicables au stock en fin de marché et notamment le coût du déstockage et du transport de celui-ci vers le nouveau titulaire n'y étaient pas prévues ; que, toutefois, la société requérante a dû mettre le stock à disposition du nouveau titulaire du marché et a exposé des frais de déstockage ; qu'elle est, dès lors, fondée à être indemnisée du coût engendré par cette mise à disposition ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le stock entreposé par l'INPES dans les locaux de la société INTER-ROUTAGE s'élevait à 4100 palettes et 379 casiers ; que, si la société INTER-ROUTAGE a transmis à l'INPES, sur la demande de cette dernière, un devis portant sur la mise à disposition du stock, il est constant qu'aucun accord sur l'objet et le prix du contrat n'est intervenu entre les parties ; qu'en l'absence de disposition contractuelle applicable à la restitution du stock, les opérations de déstockage et transport vers le nouveau titulaire n'étaient pas assimilables aux prestations de " picking " et de colisage pour les envois en petite quantité prévues par le marché ; que, toutefois, les annexes à l'acte d'engagement chiffrent le coût " emballage palette " à 9.91 euros HT la palette et le coût du " comptage et remise en stock " à 7 euros HT la palette ; que compte tenu de ces éléments, il sera fait une juste appréciation des frais supportés par la société INTER-ROUTAGE à raison du déstockage de 4 100 palettes et 379 casiers, arrondis à 4 500 palettes, en leur appliquant, par palette, des frais d'emballage et de comptage d'un montant de 16,91 euros HT, soit une somme de 76 095 euros HT et de 91 009 euros TTC, arrondie à 91 000 euros, assortie des intérêts moratoires à compter du 30 janvier 2009, date à laquelle la société INTER-ROUTAGE a saisi le Tribunal administratif de Montreuil ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'INPES pour mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 34 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services : " Tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet de la part du titulaire d'un mémoire de réclamation qui doit être communiqué à la personne responsable du marché dans le délai de trente jours compté à partir du jour où le différend est apparu " ; qu'il ne ressort pas de l'analyse des documents contractuels du marché en litige que les parties ont souhaité déroger à cette clause ;

Considérant que la société INTER-ROUTAGE a, par une lettre en date du 24 novembre 2008, fait valoir que, conformément aux stipulations prévues par l'article 2 du cahier des charges administratives particulières du contrat, la remise à disposition du stock nécessitait de procéder préalablement à des opérations d'emballage et de colisage et être rémunérée en conséquence ; que ces conclusions tendait seulement à la condamnation de l'INPES à lui verser la somme correspondant à la réalisation de ces prestations ; que n'y figuraient pas le paiement de dommages-intérêts en cas de refus de l'INPES ; qu'ainsi, les conclusions tendant à la condamnation de l'INPES au paiement de la somme de 100 000 euros pour mauvaise foi n'ont pas été précédées d'une réclamation préalable et sont, par suite, irrecevables ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société INTER-ROUTAGE est seulement fondée à être indemnisée de la somme susvisée ;

Sur la requête n° 10VE03016 aux fins de sursis à exécution :

Considérant que, par le présent arrêt, la Cour se prononce sur l'appel formé par la société INTER ROUTAGE contre le jugement en date du 25 mai 2010 du Tribunal administratif de Montreuil ; que, par suite, les conclusions à fin de sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (l'INPES) à payer à la société INTER-ROUTAGE la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 25 mai 2010 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : L'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé est condamné à payer la somme de 91 000 euros à la société INTER-ROUTAGE assortie des intérêts moratoires à compter du 30 janvier 2009.

Article 3 : L'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé est condamné à payer à la société INTER-ROUTAGE la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête n° 10VE03014 est rejeté.

Article 5 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 10VE03016.

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N° 10VE03014-10VE03016


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE03014-10VE03016
Date de la décision : 22/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-03-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution technique du contrat. Conditions d'exécution des engagements contractuels en l'absence d'aléas.


Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: Mme Sylvie MEGRET
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : DE COMBLES DE NAYVES ; DE COMBLES DE NAYVES ; BENELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-03-22;10ve03014.10ve03016 ?
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