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19/01/2012 | FRANCE | N°11VE00789

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 19 janvier 2012, 11VE00789


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er mars 2011, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT ; le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0906580 du 21 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé la restitution à Mme Gisella A de la différence entre la cotisation qu'elle a acquittée sur la plus-value de cession de bien réalisée le 14 décembre 2

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Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er mars 2011, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT ; le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0906580 du 21 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé la restitution à Mme Gisella A de la différence entre la cotisation qu'elle a acquittée sur la plus-value de cession de bien réalisée le 14 décembre 2005 au titre du prélèvement de 33 1/3 % prévu par l'article 244 bis A du code général des impôts et la cotisation résultant de l'application du taux de 16 % à la même base, de remettre ladite imposition à la charge de Mme A et de prononcer le sursis à exécution du jugement ;

Le ministre soutient que :

- la différence de taux prévue à l'article 244 bis A du code général des impôts est uniquement fondée sur le lieu de résidence du contribuable et n'est donc pas contraire aux clauses, prévues par les conventions internationales, de non-discrimination en fonction de la nationalité ; qu'en outre le principe de non-discrimination n'est applicable qu'aux personnes placées dans une situation identique, ce qui n'est pas le cas d'une personne résidente et d'une personne non-résidente ;

- aucune des conventions fiscales bilatérales conclues par la France n'a entendu remettre en cause la différenciation des régimes fiscaux applicables aux résidents et aux non-résidents ; qu'à défaut de toute référence au taux du prélèvement libératoire, le calcul de ce dernier au sens des stipulations conventionnelles ne désigne qu'une identité d'assiette régissant chaque catégorie de gains concernée par l'article 15-4 ; qu'en estimant que le calcul du prélèvement libératoire au sens de l'article 15-4 désigne le taux, le Tribunal a commis une erreur de droit ;

- il est demandé à la Cour de prononcer le sursis à exécution du jugement, le recouvrement des sommes rétablies en cas d'annulation pouvant s'avérer difficile à défaut de tout autre bien détenu en France par Mme A et en l'absence de clause d'assistance administrative au recouvrement dans la convention franco-suisse ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée le 9 septembre 1966 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2012 :

- le rapport de M. Delage, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Soyez, rapporteur public ;

Considérant que Mme Gisella A, de nationalité suisse, a cédé le 14 décembre 2005 un bien immobilier ..., en France ; qu'au titre de cette cession, elle s'est acquittée du prélèvement sur les plus-values au taux de 33 1/3 % prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts ; qu'elle a ensuite demandé, sur le fondement de la convention fiscale franco-suisse susvisée, que ce prélèvement soit calculé par application d'un taux de 16 % ; que le service ayant rejeté sa réclamation, elle a saisi le Tribunal administratif de Montreuil ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève appel du jugement du 21 janvier 2011 par lequel le Tribunal a décidé la restitution à Mme A de la différence entre la cotisation qu'elle a acquittée et celle résultant de l'application du taux de 16 % à la même base ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de l'article 244 bis A du code général des impôts :

Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : I. - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. (...) ; qu'aux termes de l'article 200 B de ce code, alors en vigueur : Les plus-values réalisées dans les conditions prévues aux articles 150 U à 150 UB sont imposées au taux forfaitaire de 16 % (...) ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 244 bis A du code général des impôts, alors en vigueur : I. 1. Sous réserve des conventions internationales, les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B (...) sont soumis à un prélèvement d'un tiers sur les plus-values résultant de la cession d'immeubles (...) Par dérogation au premier alinéa, les personnes physiques, les associés personnes physiques de sociétés ou groupements dont les bénéfices sont imposés au nom des associés et les porteurs de parts, personnes physiques, de fonds de placement immobilier mentionnés à l'article 239 nonies, résidents d'un Etat membre de la Communauté européenne, ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale, sont soumis à un prélèvement de 16 % (...) ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes des articles 200 B et 244 bis A précités du code général des impôts que le taux de prélèvement de 16 % étant réservé aux résidents de France, d'un Etat membre de la Communauté européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale, Mme A, résidente suisse, ne peut prétendre à en bénéficier, ce qu'elle ne conteste au demeurant pas ;

En ce qui concerne l'application de la convention fiscale franco-suisse :

Considérant que la requérante a invoqué devant le tribunal les stipulations de l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 modifiée qui dispose : 1. Les gains provenant de l'aliénation des biens immobiliers, tels qu'ils sont définis à l'alinéa 1er du paragraphe 2 de l'article 6, sont imposables dans l'Etat contractant où ces biens sont situés 2. Les gains provenant de l'aliénation d'actions, parts ou autres droits dans une société, une fiducie ou une institution comparable, dont l'actif ou le patrimoine est principalement constitué, directement ou indirectement, de biens immobiliers définis au paragraphe 2 de l'article 6 et situés dans un Etat contractant ou de droits portant sur de tels biens sont imposables dans cet Etat. (...) 4. Les gains provenant de l'aliénation des biens mentionnés aux paragraphes 1, 2 et 3, tels qu'ils sont retenus pour l'assiette de l'impôt sur les plus-values, sont calculés dans les mêmes conditions, que le bénéficiaire soit résident de l'un ou l'autre Etat contractant. Si ces gains sont soumis dans un Etat contractant à un prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, ce prélèvement est calculé dans les mêmes conditions, que le bénéficiaire soit résident de l'un ou de l'autre Etat contractant (...) ;

Considérant, en premier lieu, que l'article 4 de la convention fiscale franco-suisse stipule : 1. Au sens de la présente Convention, l'expression résident d'un Etat contractant désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. ; que par les avis d'imposition cantonale et fédérale de l'année 2005 qu'elle produit, et non contestés par le ministre, la requérante justifie de sa qualité de résidente fiscale suisse au titre de l'année de cession du bien ;

Considérant, en deuxième lieu, que les stipulations précitées, qui précisent, en les distinguant, les règles de calcul des gains et, le cas échant, du prélèvement libératoire, imposent que le calcul du prélèvement libératoire soit effectué par l'application d'un même taux à une même assiette, contrairement à ce que soutient le ministre ; que ledit calcul ainsi entendu doit donc être effectué dans les mêmes conditions que le bénéficiaire soit résident de l'un ou de l'autre Etat contractant ; que l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 modifiée fait ainsi obstacle à l'application aux résidents suisses du taux d'un tiers visé par les dispositions précitées de l'article 244 bis A du code général des impôts ; qu'ainsi c'est à bon droit que le tribunal a jugé que la contribuable était fondée à se prévaloir desdites stipulations pour demander la réduction du taux du prélèvement libératoire de 33,1/3 % à 16 %, taux auquel sont soumises les plus-values de cession de valeurs immobilières qui relèvent, pour les résidents français, de l'article 150 U précité du code général des impôts ;

Considérant, en troisième lieu, que le ministre présente à titre subsidiaire des conclusions tendant à ce que le dégrèvement susceptible d'être prononcé soit limité à la différence entre, d'une part, le prélèvement d'un tiers et, d'autre part, le total constitué par l'impôt sur le revenu au taux de 16 %, et la contribution sociale généralisée et la contribution au remboursement de la dette sociale aux taux respectifs de 8,2 % et 0,5 % ; que, toutefois, en instituant ces impositions, et alors même qu'il a renvoyé, pour les règles régissant leur établissement, leur recouvrement et leur contentieux à celles qui régissent l'impôt sur le revenu, le législateur ne s'est pas borné à majorer un impôt existant, mais a créé des contributions nouvelles distinctes de l'impôt sur le revenu ; que, dès lors, les stipulations précitées de la convention franco-suisse, qui s'appliquent aux impôts sur le revenu et sur la fortune, ne peuvent être interprétées en ce sens que le calcul du prélèvement libératoire comprendrait la prise en compte desdites contributions ; qu'ainsi cette demande ne peut être accueillie ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de Mme A ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'annulation doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement :

Considérant que le présent arrêt statue sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué ; que, par suite, les conclusions susvisées tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement deviennent sans objet ; qu'elles ne peuvent dès lors, et en tout état de cause, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à Mme A une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11VE00789


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE00789
Date de la décision : 19/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-01-05 Contributions et taxes. Généralités. Textes fiscaux. Conventions internationales.


Composition du Tribunal
Président : M. HAÏM
Rapporteur ?: M. Philippe DELAGE
Rapporteur public ?: M. SOYEZ
Avocat(s) : HEMMET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-01-19;11ve00789 ?
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