Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Patrick A, demeurant ..., par Me Gaspar ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0611879 du 5 juin 2009 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes, ainsi que des contributions sociales, auxquelles il a été assujetti au titre des années 1998 et 1999 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que la durée de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle a dépassé le délai d'un an fixé par l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ; que l'administration n'a pas respecté le mandat général de représentation qu'il avait donné à son conseil, auquel les pièces de procédures n'ont pas été adressées ; que lui-même n'a pas reçu la notification de redressement ; que le principe du contradictoire a ainsi été méconnu ; qu'il a dûment justifié les remboursements de frais perçus de la société Cleophas ; que le virement de 150 000 francs constitue un prêt de son ancien associé effectué en vue de se libérer d'une caution visant à garantir les engagements de la société Ananas Production dans laquelle il était auparavant gérant-salarié ; qu'à titre subsidiaire, cette même somme constituerait une charge déductible de ses revenus ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2011 :
- le rapport de M. Delage, premier conseiller,
- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,
- et les observations de Me Gaspar, pour M. A ;
Considérant que M. A a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle portant sur la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999, à l'issue duquel le service vérificateur a procédé à la taxation d'office sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales au titre des années 1998 et 1999 ; que par un jugement du 5 juin 2009, le Tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, des pénalités y afférentes ainsi que des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1998 ; que M. A relève appel dudit jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande s'agissant des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'année 1999 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination (...) ; qu'il résulte desdites dispositions que, sauf stipulation contraire, le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable, personne physique ou morale, pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire ; que, par suite, lorsqu'un tel mandat a été porté à la connaissance du service en charge de cette procédure, celui-ci est, en principe, tenu d'adresser au mandataire l'ensemble des actes de cette procédure ; qu'en particulier, le mandataire doit en principe être destinataire des plis par lesquels le service notifie au contribuable, dans les conditions visées à l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, les redressements qu'il entend affecter aux bases de l'imposition du contribuable et les réponses qu'il formule aux observations présentées, le cas échéant, par l'intéressé sur ces redressements, ainsi que les éléments servant au calcul des impositions d'office auxquelles il envisage d'assujettir le contribuable ; que toutefois, l'expédition de tout ou partie des actes de la procédure d'imposition au domicile ou au siège du contribuable sera réputée régulière et faire courir les délais de réponse à ces actes s'il est établi que le pli de notification a été effectivement retiré par le contribuable ou par l'un de ses préposés ; qu'en revanche, lorsque ce pli est retourné par le service des postes à l'administration fiscale, faute d'avoir été retiré dans le délai imparti, il appartient à celle-ci de procéder à une nouvelle notification des mêmes actes au mandataire ;
Considérant que, si M. A se plaint de ce que ni lui ni son conseil n'auraient été destinataires de la notification de redressements le concernant avant la mise en recouvrement des impositions, et que, par suite, le service aurait méconnu le principe du contradictoire ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que le pli contenant la notification de redressements du 10 décembre 2001 a été distribué à son domicile le 12 décembre 2001, soit avant la mise en recouvrement des impositions qui est intervenue le 31 mai 2002 s'agissant de l'impôt sur le revenu et le 30 juin 2002 s'agissant des contributions sociales ; que le moyen ainsi soulevé ne peut donc qu'être écarté ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales alors applicable : Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt. A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. Cette période est prorogée du délai accordé, le cas échéant, au contribuable et, à la demande de celui-ci, pour répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications pour la partie qui excède les deux mois prévus à l'article L. 16 A. Elle est également prorogée des trente jours prévus à l'article L. 16 A et des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration ou pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères, lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger (...) ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressements du 5 octobre 2001 avait clos l'examen contradictoire commencé après l'avis du 17 octobre 2000 ayant pris effet le 20 octobre 2000, et qu'aucune investigation supplémentaire débouchant sur des redressements supplémentaires n'avait été effectuée ; que la notification de redressement du 10 décembre 2001, qui se bornait à changer la base légale des redressements déjà notifiés, n'a pas constitué un nouvel examen de situation fiscale personnelle ni constitué une prolongation de l'examen clos le 5 octobre 2001 ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales doit être écarté ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant, en premier lieu, que, sur le fondement de l'article 109-1-2° du code général des impôts, l'administration a taxé à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1999 des sommes qui apparaissaient sur les comptes bancaires personnels de M. A, pour un montant de 63 860,37 francs, et qui, selon lui, lui avaient été versées par la société Cléophas à titre de remboursement de frais ; que, pour contester cette taxation, ce dernier ne peut utilement se prévaloir qu'à la suite des opérations de vérification portant sur la société Cleophas, celle-ci n'a fait l'objet d'aucun redressement ; que, par ailleurs, en produisant le grand livre comptable de cette société et des notes de frais dépourvues de toute valeur probante, le requérant, qui ne justifie pas avoir effectivement engagé les dépenses correspondantes, n'établit pas que la somme ainsi imposée correspondrait à des remboursements de frais ; que dès lors, et sans qu'il soit besoin de faire droit à la demande de substitution de base légale présentée par le ministre, c'est à bon droit que l'administration a imposé ladite somme entre ses mains dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. A soutient que la somme de 150 000 francs (22 867,35 euros) portée au crédit de son compte à la société Générale le 26 janvier 1999 provient d'un prêt accordé par son associé M. B ; que, toutefois, il ne produit pas, pour établir cette allégation, un contrat de prêt enregistré et ayant date certaine, mais une simple attestation établie par M. B ainsi qu'un courrier de la banque Hervet, portant sur le chèque déposé par M. A et qui ne justifie pas des mouvements de fonds allégués en provenance du prêteur ; que les éléments ainsi produits, au demeurant entachés d'incohérences quant aux dates des événements invoqués, ne permettent pas de tenir pour établie la réalité dudit prêt ;
Considérant, en troisième lieu, qu'à titre subsidiaire, et pour la première fois devant la Cour, M. A sollicite la déduction de cette dernière somme du montant de ses traitements et salaires en soutenant qu'il l'a exposée en exécution d'un engagement de caution envers la société Ananas Production dont il était gérant salarié ; que les sommes qu'un salarié qui, s'étant rendu caution d'une obligation souscrite par la société dont il est le dirigeant de droit ou de fait, a dû payer au créancier de cette dernière, sont déductibles de son revenu imposable de l'année au cours de laquelle le paiement a été effectué, à condition que son engagement comme caution se rattache directement à sa qualité de dirigeant, qu'il ait été pris en vue de servir les intérêts de l'entreprise et qu'il n'ait pas été hors de proportion avec les rémunérations allouées à l'intéressé ou qu'il pouvait escompter au moment où il l'a contracté ;
Considérant qu'en l'espèce le requérant, qui ne produit pas l'engagement de caution invoqué, se prévaut d'un courrier de la banque Hervet mentionnant, sous réserve d'encaissement, la remise du chèque de 150 000 francs en règlement de l'engagement de caution souscrit le 26 février 1990 par lui pour garantir les engagements de la société Ananas Production ; qu'il produit également un jugement du Tribunal de commerce de Nanterre en date du 6 mai 1994, rendu dans le cadre du litige l'opposant, en tant que caution solidaire de la société Ananas Production, à la banque Hervet, créancière de cette société ; qu'en produisant ces documents le requérant doit être regardé comme établissant, d'une part, la réalité du versement effectué et, d'autre part, l'existence de l'engagement souscrit dans l'intérêt de la société ; que si, s'agissant des rémunérations qu'il pouvait escompter, il ne produit, pour l'année 1990, qu'un bulletin de paie établi au titre du mois de mars faisant état d'une rémunération de 17 341 francs, il justifie par les autres bulletins de paie qu'il produit, et en particulier celui du mois de décembre 1991, avoir perçu une rémunération brute totale de 410 000 francs en 1991 ; que, dès lors, M. A est fondé à soutenir que l'engagement de caution en cause, d'un montant de 400 000 francs selon le jugement du Tribunal de commerce, n'était pas hors de proportion avec les rémunérations qu'il pouvait escompter ; qu'il est, dès lors, fondé à demander la déduction de la somme de 150 000 francs, soit 22 867,35 euros, de sa base imposable à l'impôt sur le revenu ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est partiellement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La base imposable à l'impôt sur le revenu de M. A au titre de l'année 1999 sera déterminée sous déduction d'une somme de 22 867,35 euros.
Article 2 : M. A est déchargé, en droits et pénalités, de la différence entre la cotisation à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1999 et celle résultant de l'application de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement n° 0611879 du 5 juin 2009 du Tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 ci-dessus.
Article 4 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
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N° 09VE02594