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03/11/2011 | FRANCE | N°09VE00598

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 03 novembre 2011, 09VE00598


Vu la requête, enregistrée le 17 février 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SARL SOVIDIS, dont le siège est 2, place de France à Massy (91300), par Me Serpentier-Linares et Me Debord, avocats à la Cour ; la SARL SOVIDIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504660 en date du 18 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur les achats de viande auxquels elle a été assujettie du 1er janvier 2003 au 31 octobre 2003 pour un montant

de 24 024 euros, assortis d'intérêts moratoires ;

2°) de prononcer ...

Vu la requête, enregistrée le 17 février 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SARL SOVIDIS, dont le siège est 2, place de France à Massy (91300), par Me Serpentier-Linares et Me Debord, avocats à la Cour ; la SARL SOVIDIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504660 en date du 18 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur les achats de viande auxquels elle a été assujettie du 1er janvier 2003 au 31 octobre 2003 pour un montant de 24 024 euros, assortis d'intérêts moratoires ;

2°) de prononcer la restitution des droits en litige, assortis des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, à titre liminaire, que compte tenu du dégrèvement accordé par l'administration, elle pouvait légitimement espérer obtenir la restitution de la somme dégrevée ; que, dès lors, l'absence de restitution de ladite somme porte atteinte à son droit au respect de ses biens, protégé par l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en outre, comme l'a jugé le Tribunal administratif de Pau, l'administration devait, après avoir prononcé le dégrèvement de l'imposition en litige, émettre un avis de mise en recouvrement ; en premier lieu, que les stipulations de l'article 88 §3 du traité instituant la Communauté européenne obligeaient l'Etat à informer préalablement la Commission européenne du projet tendant à instituer, mais aussi à modifier, l'aide en cause et son mode de financement et à ne pas mettre à exécution cette aide dans l'attente de la décision ; que l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) du 20 novembre 2003, qui ne précise pas que son interprétation ne vaut que pour la taxe acquittée avant le 1er janvier 2001, frappe la taxe d'illégalité pour l'ensemble de sa période d'application ; que l'affectation de la taxe au budget de l'Etat n'a en rien rompu le lien d'affectation direct entre la taxe et le financement du service public de l'équarrissage ; que la décision du 14 décembre 2004 de la commission, qui a estimé qu'à compter du 1er janvier 2001, ladite taxe était compatible avec l'article 87 du traité, ne peut régulariser a posteriori ce défaut de notification ; en deuxième lieu, que, contrairement à ce qu'a considéré le tribunal administratif, elle est fondée à se prévaloir des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales dès lors que l'administration a entendu rétablir une imposition après un dégrèvement, ce qui constitue un rehaussement ; en troisième lieu, que la remise en cause du dégrèvement, pris en connaissance de cause par l'administration et alors qu'aucune erreur dans la liquidation ne peut être invoquée, viole le principe de sécurité juridique ; en quatrième lieu, que la taxe sur les achats de viande constitue une taxe d'effet équivalent à un droit de douane à l'importation, contraire aux articles 23 et 25 du traité de Rome dès lors que le produit de cette taxe bénéficie aux seuls produits nationaux ; que le chapitre budgétaire auquel il est affecté sert exclusivement au financement du service public de l'équarrissage, les crédits affectés à ce service et le produit de la taxe étant en étroite corrélation ; que le service public de l'équarrissage, rendu uniquement sur le territoire français, ne bénéficie pas aux opérateurs non établis en France qui supportent ainsi une charge sans contrepartie ; en cinquième lieu, que dans une note du 6 janvier 2004, le directeur du service juridique de la direction générale des impôts a indiqué aux directeurs des services fiscaux que la taxe sur les achats de viande devait être regardée comme contraire aux textes communautaires, y compris après son affectation au budget général de l'Etat ; qu'en outre, le député Carrez, rapporteur de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2004, a proposé l'abandon de la taxe compte tenu de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 20 novembre 2003 ; en sixième lieu, que l'arrêt de la CJCE du 20 novembre 2003 a l'autorité de la chose jugée, alors que les modifications budgétaires n'ont aucune incidence sur la qualification d'aide d'Etat ; en sixième lieu, que le principe d'affectation juridique qui résulte de l'article 18 de l'ordonnance du 2 janvier 1959, pris en application de l'article 34 de la Constitution, ne saurait faire échec à une règle de droit supérieure sauf, pour l'Etat, à méconnaître le droit communautaire au mépris de son obligation de loyauté, la taxe ne pouvant retrouver sa légitimité du seul fait d'une mesure d'ordre comptable ou d'un simple habillage juridique ; qu'enfin, la taxe en litige méconnaît le principe pollueur-payeur, qui constitue à la fois un principe de droit communautaire et un principe général du droit interne, repris à l'article L. 110-1 du code de l'environnement et aux articles 3 et 4 de la Charte constitutionnelle de l'environnement laquelle a valeur constitutionnelle ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code rural ;

Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 ;

Vu la loi n° 96-1139 du 26 décembre 1996 ;

Vu la loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000, notamment son article 35 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2011 :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président assesseur,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre chargé du budget :

Considérant que la circonstance que, dans le cadre d'une précédente instance, la SARL SOVIDIS a déjà, en vain, saisi le juge de l'impôt de conclusions tendant à la restitution de la taxe en litige dans la présente requête n'a pour effet ni d'entacher cette requête d'irrecevabilité, ni de la priver d'objet ;

Sur les conclusions de la SARL SOVIDIS tendant à la restitution des droits en litige :

Considérant que la SARL SOVIDIS, après avoir déclaré conformément aux dispositions de l'article 302 bis ZD du code général des impôts alors en vigueur la valeur de ses achats et payé la taxe sur les achats de viande qu'elle estimait en conséquence devoir au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 octobre 2003, en a demandé la restitution par une réclamation du 22 décembre 2003 ; que l'administration lui a accordé le dégrèvement des impositions en litige par une décision du 28 septembre 2004 ; qu'après avoir adressé à la société une lettre l'informant qu'elle envisageait d'annuler ce dégrèvement et que les taxes ne seraient pas remboursées, elle a rapporté la décision de dégrèvement et rejeté la réclamation de la société par une décision du 31 mars 2005 ; que la SARL SOVIDIS fait appel du jugement du 18 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la restitution de ces impositions, assorties des intérêts moratoires ;

Considérant qu'en vertu du VI de l'article 302 bis ZD du code général des impôts, alors en vigueur, la taxe sur les achats de viande est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée ; que selon l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, dont les dispositions ont ainsi été rendues applicables à cette taxe : Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité (...) ;

Considérant que lorsque l'administration, saisie d'une réclamation en ce sens, prononce le dégrèvement d'une imposition, sa décision a pour effet d'annuler le titre fondant le paiement de cette imposition, que ce titre résulte d'un acte de l'administration ou, si les dispositions applicables le prévoient, d'une simple déclaration du redevable ; que la circonstance que les sommes déjà versées par le contribuable en exécution de ce titre ne lui aient pas été remboursées en méconnaissance des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ou n'aient pas fait l'objet d'une compensation pour avoir paiement d'autres impositions dues, est sans incidence sur la portée de la décision prononçant le dégrèvement ; qu'il s'ensuit que, lorsqu'une taxe a été déclarée et payée spontanément par le redevable, puis a fait l'objet d'un dégrèvement, cette décision implique, alors même que le paiement a été effectué à la date d'exigibilité, que l'administration émette un avis de mise en recouvrement si elle entend rétablir l'imposition ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que faute d'avoir, après avoir prononcé le dégrèvement des taxes payées par la société au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 octobre 2003, émis un avis de mise en recouvrement correspondant au montant dégrevé, l'administration ne pouvait lui refuser la restitution de ces taxes ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, la SARL SOVIDIS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à leur restitution ; que ce jugement doit donc être annulé ;

Sur les conclusions relatives aux intérêts moratoires :

Considérant qu'en l'absence de litige né et actuel entre le comptable et la SARL SOVIDIS concernant les intérêts prévus aux articles L. 208 et R. 208-1 du livre des procédures fiscales, les conclusions tendant à ce que la restitution accordée soit assortie de ces intérêts sont irrecevables ;

Sur les conclusions de la SARL SOVIDIS tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à la SARL SOVIDIS, d'une somme de 1 500 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 0504660 en date du 18 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande en restitution des droits de taxe sur les achats de viande présentée par la SARL SOVIDIS est annulé.

Article 2 : Il est accordé à la SARL SOVIDIS la restitution de la taxe sur les achats de viande qu'elle a versée au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 octobre 2003.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL SOVIDIS la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la SARL SOVIDIS est rejeté.

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N° 09VE00598 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09VE00598
Date de la décision : 03/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-04 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Autres taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Corinne SIGNERIN-ICRE
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : SERPENTIER-LINARES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-11-03;09ve00598 ?
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