Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. et Mme Vitali A, élisant domicile chez Me Mafranc, ..., par Me Mafranc, avocat à la Cour ;
M. et Mme A demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0906942 du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande aux fins de décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 et des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que la proposition de rectification concernant les impositions litigieuses ne leur a pas été régulièrement notifiée, alors que leur adresse à Moscou était connue de l'administration fiscale et qu'ils ne portent pas la responsabilité du défaut de distribution du pli que leur aurait adressé l'administration ; que la doctrine administrative, opposable à l'administration fiscale en application des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, exclut l'application des dispositions de l'article 164 C du code général des impôts aux contribuables domiciliés dans un pays ayant conclu avec la France une convention tendant à éviter les doubles impositions ; qu'ils sont domiciliés fiscalement en Russie ; que la France et la Russie ont conclu le 26 novembre 1996 une convention fiscale destinée à éviter les doubles impositions ; qu'ainsi, il ne peut leur être appliqué les dispositions de l'article 164 C du code général des impôts ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2011 :
- le rapport de M. Tar, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;
Considérant que M. et Mme A relèvent régulièrement appel du jugement du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande aux fins de décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 en application des dispositions de l'article 164 C du code général des impôts, du fait de biens immobiliers dont ils étaient propriétaires à Cannes (Alpes-Maritimes) ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ;
Considérant, en premier lieu, que le ministre, en se bornant à constater que le cabinet d'avocats auquel l'administration fiscale a envoyé, le 21 novembre 2005, une notification de redressements portant sur les années d'imposition 2002, 2003 et 2004 représente M. et Mme A dans le cadre du présent litige, n'établit pas que ce cabinet disposait, à la date de l'envoi, d'un mandat l'habilitant à recevoir cette notification de redressements pour ces derniers ; qu'ainsi, cet envoi ne constitue pas notification régulière de ces redressements ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que l'administration fiscale avait connaissance, le 15 novembre 2005, de l'adresse de M. et Mme A à Moscou, à savoir 6-19 rue Asceva, 10100 Moscou ; qu'elle a choisi d'envoyer la notification de redressement précitée à cette adresse par l'intermédiaire d'un transporteur privé ; que ce transporteur n'a pas livré le pli au motif qu'il ne disposait pas des renseignements utiles pour le faire ; qu'ainsi, cet envoi ne peut être regardé comme constituant notification régulière des redressements en litige ;
Considérant, en troisième lieu, que le ministre n'établit pas que l'adresse à Londres à laquelle il a envoyé, le 7 mars 2006, une notification de redressements portant sur les seules années d'imposition 2003 et 2004, correspondrait à un domicile de M. et Mme A ; qu'ainsi cet envoi, qui n'a pas été réclamé, ne constitue pas notification régulière de ces redressements ;
Considérant, en quatrième lieu, que le ministre ne conteste pas que M. et Mme A n'étaient plus propriétaires du logement sis 42, boulevard de la Croisette à Cannes lorsque l'administration fiscale a envoyé, le 9 mars 2006, cette même notification de redressements à cette adresse ; que comme il a déjà été dit, l'administration fiscale avait alors connaissance de l'adresse du domicile de M. et Mme A à Moscou ; qu'ainsi cet envoi, qui a été retourné à l'envoyeur avec la mention n'habite pas à l'adresse indiquée , ne constitue pas notification régulière des redressements ;
Considérant, en cinquième lieu, que le ministre n'établit ni même n'allègue que M. et Mme A auraient indiqué à l'administration fiscale, à quelque moment que ce soit, être domiciliés au logement sis 103, boulevard de la Croisette à Cannes ; que comme il a déjà été dit, l'administration fiscale avait connaissance, lorsqu'elle a envoyé le 9 mars 2006 à cette adresse à Cannes cette même notification de redressements, de l'adresse de M. et Mme A à Moscou ; que dans ces conditions, cet envoi, qui a été retourné à l'envoyeur avec la mention non réclamé , ne constitue pas notification régulière des redressements ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A sont fondés à soutenir que les redressements servant à établir les impositions litigieuses ne leur ont pas été régulièrement notifiés ; que cette circonstance constitue une irrégularité de la procédure d'imposition entraînant la décharge des impositions litigieuses ; que par suite, M. et Mme A sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande de décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil en date du 10 juin 2010 est annulé.
Article 2 : M. et Mme A sont déchargés des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 et des pénalités correspondantes.
Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 10VE02170