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15/07/2011 | FRANCE | N°10VE00935

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 15 juillet 2011, 10VE00935


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 23 mars 2010, présentée pour la SARL IDEAL BAR, dont le siège est 140, avenue de Versailles à Gagny (93220), par Me Cieol, avocat à la Cour ; la SARL IDEAL BAR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0506943 en date du 17 novembre 2009 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, rectifié par une ordonnance du président de ce tribunal en date du 19 janvier 2010, en tant qu'après avoir constaté un non lieu à statuer sur les conclusions de sa demande à hauteur de 17 929 euros,

le tribunal a, par l'article 2 du jugement, rejeté le surplus de ses...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 23 mars 2010, présentée pour la SARL IDEAL BAR, dont le siège est 140, avenue de Versailles à Gagny (93220), par Me Cieol, avocat à la Cour ; la SARL IDEAL BAR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0506943 en date du 17 novembre 2009 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, rectifié par une ordonnance du président de ce tribunal en date du 19 janvier 2010, en tant qu'après avoir constaté un non lieu à statuer sur les conclusions de sa demande à hauteur de 17 929 euros, le tribunal a, par l'article 2 du jugement, rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1997 et 1998, des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1998 et des pénalités correspondantes, ainsi qu'au versement d'intérêts moratoires ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

Elle soutient, en premier lieu, que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande comme tardive dès lors que, comme l'établissent les pièces produites, tous les services dont dépend sa gestion administrative et, plus particulièrement, le centre des impôts du Raincy, ont été informés de sa domiciliation chez son gérant à la suite de la cession de son fonds de commerce le 31 mars 2004 ; en second lieu, que la procédure de vérification de comptabilité est irrégulière car viciée par le non respect d'une garantie essentielle du contribuable relative à son droit de recours ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2011 :

- le rapport de Mme Dioux-Moebs, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Dhers, rapporteur public ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité qui s'est déroulée du 26 novembre 1999 au 24 février 2000, la SARL IDEAL BAR, qui a exploité un commerce de café-bar-restaurant jusqu'au 31 mars 2004, a été assujettie à des compléments de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1998 ainsi qu'à des compléments d'impôt sur les sociétés au titre des exercices 1997 et 1998, assortis de pénalités de mauvaise foi ; qu'en cours d'instance devant les premiers juges, l'administration fiscale a dégrevé, en droits et pénalités, les compléments de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la SARL IDEAL BAR au titre de la période courant du 1er janvier au 31 décembre 1996 pour un montant total de 17 929 euros ; que, par un jugement du 17 novembre 2009, rectifié le 19 janvier 2010, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, d'une part, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la demande de la SARL IDEAL BAR à hauteur d'une somme de 17 929 euros et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la société en considérant que ces conclusions avaient été tardivement présentées ; que la SARL IDEAL BAR fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales : L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur la réclamation, que cette notification soit faite avant ou après l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 198-10 (...) ;

Considérant que la décision du 21 février 2005 par laquelle l'administration fiscale a rejeté la réclamation préalable de la SARL IDEAL BAR a été adressée au siège de la société, 5, avenue de la Résistance au Raincy et a été retournée à l'administration avec les mentions non réclamé , présentation du 23 février 2005 et avisé absent ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction que l'administration, comme elle l'admet d'ailleurs en appel, avait eu connaissance, avant le 21 février 2005, de la nouvelle adresse à laquelle elle devait désormais, compte tenu de la cession du fonds de commerce, adresser ses courriers au contribuable, soit au 140, avenue de Versailles à Gagny ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que le délai de deux mois, prévu par l'article R. 199-1 précité du livre des procédures fiscales, avait couru à compter du 23 février 2005, date de présentation du pli comportant la décision du 21 février 2005 au siège de la société, et a rejeté comme tardive la demande de la requérante ; qu'il suit de là que l'article 2 du jugement attaqué en date du 17 novembre 2009, doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SARL IDEAL BAR tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1997 et 1998 et des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1998, ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ; que le paragraphe 5 du chapitre III de cette charte dans la version remise à la SARL IDEAL BAR avant l'engagement de la vérification de sa comptabilité à laquelle il a été procédé du 26 novembre 1999 au 24 février 2000 indique que : Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal (...) Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ; que ces dispositions assurent au contribuable la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur sur les points où persiste un désaccord avec ce dernier, puis, le cas échéant, dans un second temps, avec un fonctionnaire de l'administration fiscale de rang plus élevé ; que l'utilité d'un tel débat n'est pas affectée par la circonstance que ledit supérieur hiérarchique ait, éventuellement, signé ou visé l'un des documents qui ont été notifiés au contribuable depuis l'engagement de la procédure de redressement ; que, par suite, la SARL IDEAL BAR n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée d'une garantie substantielle prévue par les dispositions précitées de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié au motif que le supérieur hiérarchique du vérificateur auquel il lui était indiqué qu'elle pourrait faire appel sur l'avis de vérification, a, ultérieurement, apposé, sur la notification de redressement en date du 22 mai 2000 qui comportait notamment motivation des pénalités de mauvaise foi mises à sa charge, le visa que l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales requiert d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal ;

Considérant, en second lieu, que la circonstance que l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ne serait pas suffisamment motivé est, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté, d'une part, que l'administration a pu, à bon droit, écarter la comptabilité présentée par la SARL IDEAL BAR au titre de l'année 1997 comme irrégulière et non probante, d'autre part, que la requérante n'a pas présenté de comptabilité ou de pièces en tenant lieu au titre de l'année 1998 ; que les impositions contestées ayant été établies conformément à l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires dans sa séance du 18 avril 2001, il appartient à la SARL IDEAL BAR, en application des dispositions précitées de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, d'établir le caractère exagéré des bases d'imposition retenues par l'administration ;

Considérant, en second lieu, que le contribuable, auquel incombe la charge de prouver l'exagération de l'évaluation administrative, peut, s'il n'est pas en mesure d'établir le montant exact de ses résultats en s'appuyant sur une comptabilité régulière et probante, soit critiquer la méthode d'évaluation que l'administration a suivie et qu'elle doit faire connaître au contribuable, en vue de démontrer que cette méthode aboutit, au moins sur certains points et pour un certain montant, à une exagération des bases d'imposition, soit encore, aux mêmes fins, soumettre à l'appréciation du juge de l'impôt une nouvelle méthode d'évaluation permettant de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que celle qui pouvait être atteinte par la méthode primitivement utilisée par l'administration ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au titre de l'exercice clos en 1997, le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires de la SARL IDEAL BAR à partir des données d'inventaire et des factures d'achats des boissons fraîches, des alcools, des vins, des cafés et des boissons chaudes consommés au restaurant et au bar en tenant compte des pertes, de la consommation du personnel et des produits offerts ; qu'un coefficient multiplicateur achats-revendus a ainsi été déterminé au titre dudit exercice ; qu'en l'absence de comptabilité pour l'exercice 1998, l'administration a appliqué le coefficient multiplicateur défini pour 1997 aux achats-revendus de l'exercice 1998 pour obtenir le chiffre d'affaires de cet exercice ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la SARL IDEAL BAR, l'administration a tenu compte des conditions effectives d'exploitation de l'entreprise pour reconstituer ses résultats imposables au titre des exercices 1997 et 1998 ; qu'il suit de là que la SARL IDEAL BAR, qui ne critique pas de manière pertinente la méthode retenue par l'administration et ne propose pas une méthode plus fiable et plus précise que celle utilisée par l'administration, n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la date des impositions litigieuses : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ;

Considérant que la SARL IDEAL BAR soutient que l'administration n'aurait pas établi qu'elle aurait délibérément cherché à se soustraire à l'impôt et qu'elle doit, en conséquence, être déchargée des pénalités de mauvaise foi qui lui ont été assignées ; que, cependant, en invoquant, d'une part, le montant et la nature des redressements, à savoir des minorations de recettes et la rétention de taxes à verser au Trésor, et d'autre part, la gravité des irrégularités et anomalies entachant la comptabilité de la SARL IDEAL BAR au titre de l'exercice 1997 et l'absence de comptabilité au titre de l'exercice 1998, l'administration doit être regardée comme justifiant de l'intention délibérée de dissimulation du contribuable et, par suite, du bien fondé des pénalités de 40 % appliquées aux redressements en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL IDEAL BAR n'est pas fondée à demander la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1997 et 1998, des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1998 et des pénalités correspondantes ; que ses conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la SARL IDEAL BAR au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 0506943 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 17 novembre 2009 est annulé.

Article 2 : La demande de la SARL IDEAL BAR présentée devant le tribunal administratif tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1997 et 1998, des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1998 et des pénalités correspondantes, ainsi qu'au versement d'intérêts moratoires et à l'octroi d'une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, est rejetée.

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N° 10VE00935


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00935
Date de la décision : 15/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-02-03-02 Contributions et taxes. Règles de procédure contentieuse spéciales. Demandes et oppositions devant le tribunal administratif. Délais.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Lydie DIOUX-MOEBS
Rapporteur public ?: M. DHERS
Avocat(s) : CIEOL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-07-15;10ve00935 ?
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