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09/06/2011 | FRANCE | N°10VE00272

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 09 juin 2011, 10VE00272


Vu I°) la requête, enregistrée le 28 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 10VE00272, présentée pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par son président, par Me Claisse ; le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0612702 du 26 novembre 2009 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à être garanti par l'Etat des condamnations prononcées contre lui à l'égard de la compagnie Groupama d'Oc à raison des dommages résultant de l'incendie p

rovoqué par le mineur Nicolas A ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser l...

Vu I°) la requête, enregistrée le 28 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 10VE00272, présentée pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par son président, par Me Claisse ; le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0612702 du 26 novembre 2009 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à être garanti par l'Etat des condamnations prononcées contre lui à l'égard de la compagnie Groupama d'Oc à raison des dommages résultant de l'incendie provoqué par le mineur Nicolas A ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 391 113,66 euros en remboursement de l'indemnité versée à la compagnie Groupama d'Oc assortie des intérêts au taux légal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le jugement est entaché d'une omission à statuer et qu'il est donc irrégulier, dès lors qu'est insuffisamment motivé le rejet de sa demande aux termes de laquelle la responsabilité sans faute du gardien n'était pas exclusive de la responsabilité finale de l'Etat pour risque ; qu'en ne plaçant pas dans un établissement spécialisé le mineur auteur du dommage, eu égard aux troubles de sa personnalité, la puissance publique a choisi une méthode comportant pour les tiers un risque spécial susceptible d'engager, en dehors de toute faute, la responsabilité de l'Etat qui doit supporter la charge finale de la réparation de ce dommage ;

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Vu II°), la requête et les mémoires, enregistrés les 22 novembre, 27 et 29 décembre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 10VE03832, présentés pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par son président, par Me Claisse ; le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1003635 par laquelle le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 391 113,66 euros, assortie des intérêts au taux légal, en remboursement de l'indemnité versée à la compagnie Groupama d'Oc en application du jugement n° 0612702 du 26 novembre 2009 du même tribunal ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 391 113,66 euros en remboursement de l'indemnité versée à la compagnie Groupama d'Oc assortie des intérêts au taux légal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la demande a été écartée irrégulièrement par ordonnance pour irrecevabilité manifeste au motif que les moyens avaient été déjà écartés par un jugement du même tribunal le 26 novembre 2009 alors que les parties à l'instance dans les deux affaires n'étaient pas identiques ; que la motivation de l'ordonnance est ambiguë et qu'il n'y avait pas d'autorité de la chose jugée ; que l'absence de responsabilité pour risque spécial de l'Etat ne présentait pas un caractère évident justifiant l'application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; qu'en ne plaçant pas dans un établissement spécialisé le mineur auteur du dommage, eu égard aux troubles de sa personnalité, la puissance publique a choisi une méthode comportant pour les tiers un risque spécial susceptible d'engager, en dehors de toute faute, la responsabilité de l'Etat qui doit supporter la charge finale de la réparation de ce dommage ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 2011 :

- le rapport de M. Le Gars, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Kermorgant, rapporteur public,

- et les observations de Me Cano, substituant Me Claisse, pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE ;

Considérant que les requêtes nos 10VE00272 et 10VE03832 présentées pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que, par jugement n° 0612702 du 26 novembre 2009, le Tribunal administratif de Versailles a condamné le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE à verser à l'assureur de la commune de Bardos, la compagnie Groupama d'Oc, la somme de 391 113,66 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 23 octobre 2006, en réparation des dommages consécutifs à l'incendie de l'église du village par le mineur Nicolas A, lequel avait été placé sous la garde du Département par une ordonnance du 26 juillet 2002 du juge pour enfants du Tribunal de grande instance de Nanterre sur le fondement de l'article 375 du code civil ; que le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE relève appel de ce jugement en tant qu'il a écarté son appel en garantie de l'Etat à raison du risque spécial créé ; que la compagnie Groupama d'Oc, par la voie de l'appel incident, conclut à la condamnation dudit Département à lui verser, avec intérêts de droit à compter du 8 décembre 2004, une indemnité de 50 000 euros en réparation du préjudice moral résultant de la résistance abusive manifeste à l'indemniser, et à réformer en ce sens le jugement ; que le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE relève également appel de l'ordonnance n° 1003635 par laquelle le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 391 113,66 euros, assortie des intérêts au taux légal, en remboursement de l'indemnité versée à la compagnie Groupama d'Oc en application du jugement précité ;

En ce qui concerne la requête n° 10VE00272 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de l'appel en garantie en première instance et de l'appel incident :

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il ressort des mentions du jugement attaqué que, pour rejeter l'appel en garantie présenté par le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, le Tribunal administratif de Versailles a répondu de manière suffisamment motivée, pour l'écarter, au moyen tiré de ce que la responsabilité de l'Etat pour risque spécial était engagée ainsi qu'aux arguments relatifs à la personnalité de l'auteur du dommage ; que, par suite, le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à soutenir que le jugement qu'il critique est entaché d'une omission à statuer et d'une insuffisance de motivation et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Considérant, en premier lieu, que les conclusions de l'appel incident de la compagnie Groupama d'Oc, qui sont reprises en appel sans changement, tendant à la condamnation du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE à lui verser une indemnité en réparation de son préjudice moral résultant d'une intention dilatoire de son assureur doivent être écartées pour les mêmes motifs que ceux correctement adoptés par les premiers juges ;

Considérant, en second lieu, que la décision par laquelle le juge pour enfants confie la garde d'un mineur, dans le cadre d'une mesure d'assistance éducative prise en vertu des articles 375 et suivants du code civil, à l'un des services ou établissement mentionnés à l'article 375-3 du même code, transfère la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie du mineur à ce service ou à cet établissement, dont la responsabilité est engagée pour les dommages causés aux tiers par ce mineur, même sans faute, sans qu'il puisse, lorsqu'il ne relève pas de l'autorité de l'Etat, rechercher la responsabilité pour risque de ce dernier au titre des agissements du mineur concerné ; que, dans ce cadre, le choix de la mesure de placement prise par le juge pour enfants, qui n'est d'ailleurs pas détachable de la marche des services judiciaires et relève du contrôle des seules juridictions judiciaires, ne saurait par suite caractériser un tel risque spécial engageant la responsabilité de l'Etat à l'égard du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE qui avait la garde de l'enfant mineur A en vertu d'une décision du juge pour enfant prise sur le seul fondement des articles 375 et suivants du code civil ; qu'il suit de là que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a rejeté son appel en garantie de l'Etat fondé sur le risque spécial, nonobstant la dangerosité de l'auteur du dommage à la réparation duquel il a été condamné ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté son appel en garantie de l'Etat ; que la compagnie Groupama d'Oc n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que ledit tribunal a rejeté le surplus de ses conclusions ;

En ce qui concerne la requête n° 10VE03832 :

Sur la régularité de l'ordonnance :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. ;

Considérant que, par l'ordonnance attaquée du 16 septembre 2010, le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté, sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 précité du code de justice administrative, la demande du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 391 113,66 euros, assortie des intérêts au taux légal, en remboursement de l'indemnité versée à la compagnie Groupama d'Oc en application du jugement n° 0612702 du 26 novembre 2009 du même tribunal ; qu'il résulte d'une motivation dépourvue d'ambiguïté, qui ne reposait pas sur une autorité de la chose jugée par ce dernier jugement, que le premier juge a estimé que la responsabilité de l'Etat ne pouvait être engagée à l'égard du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE à raison d'un risque spécial résultant de la décision du juge pour enfants concernant l'enfant mineur A, prise sur le seul fondement des articles 375 et suivants du code civil ; que, dès lors, le moyen invoqué était inopérant ; que le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Versailles a donc pu à bon droit rejeter pour ce motif la requête sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code précité ;

Sur le bien-fondé de l'ordonnance :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède dans l'affaire n° 10VE00272 que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande de condamnation de l'Etat fondée sur le risque spécial, nonobstant la dangerosité de l'auteur du dommage à la réparation duquel il a été lui-même condamné ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, en ce qui concerne le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, et à la charge de ce dernier, en ce qui concerne la compagnie Groupama d'Oc, les frais qu'ils demandent chacun à ce titre ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE et l'appel incident de la compagnie Groupama d'Oc sont rejetés.

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Nos 10VE00272-10VE03832 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00272
Date de la décision : 09/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-01-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute. Responsabilité fondée sur le risque créé par certaines activités de puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : Mme de BOISDEFFRE
Rapporteur ?: M. Julien LE GARS
Rapporteur public ?: Mme KERMORGANT
Avocat(s) : CLAISSE ; CLAISSE ; SCP CLAISSE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-06-09;10ve00272 ?
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