Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour LA POSTE, dont le siège est situé 44, boulevard de Vaugirard à Paris (75757), par Me Bellanger, avocat ; LA POSTE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0607479 en date du 4 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à verser à Mme A la somme de 8 000 euros au titre d'un préjudice moral et de troubles dans les conditions d'existence ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Versailles ;
3°) de mettre à la charge de Mme A le versement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; qu'il est entaché d'un vice de procédure et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 6 quinquiès de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, aucun comportement constitutif d'un harcèlement moral ne pouvant être reproché à LA POSTE ;
.............................................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu le décret n° 2001-614 du 9 juillet 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2011 :
- le rapport de M. Demouveaux, président assesseur,
- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,
- les observations de Me Viegas pour Mme A,
- et les observations de Me Bellanger pour LA POSTE ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 222-13 du code de justice administrative : Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller statue en audience publique et après audition du commissaire du gouvernement : /(...) 2° Sur les litiges relatifs à la situation individuelle des fonctionnaires (...), à l'exception de ceux concernant l'entrée au service, la discipline et la sortie du service (...)/ 7° Sur les actions indemnitaires, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ; qu'aux termes de l'article R. 222-14 : Les dispositions du 7° de l'article précédent son applicables aux demandes dont le montant n'excède pas 8 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort dans les litiges relatifs à la situation individuelle des agents publics, à l'exception de ceux concernant l'entrée au service, la discipline ou la sortie du service, sauf pour les recours comportant des conclusions tendant au versement ou à la décharge de sommes d'un montant supérieur à 8 000 euros ;
Considérant qu'en l'espèce, Mme A, fonctionnaire à LA POSTE, a demandé au tribunal administratif, d'une part, d'annuler la décision par laquelle il a été procédé à sa notation au titre de l'année 2001, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant de 50 000 euros en réparation des préjudices moral, de santé et de carrière qu'elle estime avoir subis du fait du comportement de son supérieur hiérarchique au cours des années 2000 à 2003, ce comportement ayant été constitutif selon elle d'un harcèlement moral ; qu'un tel litige entre dans le champ de l'exception à la règle suivant laquelle il peut être statué, sur les litiges relatifs à la situation individuelle des agents publics, par un juge statuant seul ; que le jugement du 4 mai 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a statué sur la demande présentée par Mme A est donc entaché d'incompétence et doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A ;
Sur l'appel principal de LA POSTE :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, des témoignages recueillis en vue du protocole de prévention du harcèlement moral demandée le 16 septembre 2003, témoignages dont la sincérité n'a pas lieu d'être mise en doute du fait que la directrice des transports sous l'autorité de qui l'enquête a été menée n'aurait pas eu l'impartialité requise, que Mme A qui exerçait au moment des faits les fonctions de responsable de production au centre d'exploitation des transports de Clamart, a rencontré au cours des années 2000 à 2003 des difficultés professionnelles et relationnelles avec son nouveau supérieur hiérarchique direct, M. Savignac, chef d'établissement de ce centre ; que ces difficultés avaient trait notamment aux conditions de mise en oeuvre de la mission confiée à celui-ci, laquelle aurait été de redresser la qualité du service au sein du centre et d'y rétablir une paix sociale , compromise par l'équipe précédente dont faisait partie Mme A ; qu'il en est résulté, compte tenu de la position hiérarchique élevée occupée par chacun des protagonistes, un climat tendu dans l'établissement, attesté par tous les témoignages, et se traduisant notamment par une division entre les agents selon leurs allégeances respectives envers l'un des deux responsables du centre ; qu'en présence de ces difficultés, M. Savignac a fini par adopter envers sa collaboratrice, dans l'attente du départ de celle-ci, une stratégie d'évitement , consistant à n'avoir avec elle que le minimum de relations directes ; que, pour regrettable qu'ait été une telle situation, il n'est pas établi qu'elle se soit accompagnée d'une volonté persévérante, de sa part, de dégrader les conditions de travail de Mme A ou de lui nuire personnellement ;
Considérant que Mme A se plaint également, sans toutefois d'ailleurs les établir formellement, de propos agressifs ou vexatoires que lui aurait adressés son supérieur ; que s'il résulte des divers témoignages produits que celui-ci avait effectivement un management cassant et un style sévère ou autoritaire, tout comme d'ailleurs Mme A elle-même, un tel comportement n'est pas à lui seul constitutif d'un harcèlement moral au sens des dispositions précitées, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait excédé les limites de la discussion vive au cours de laquelle deux fortes personnalités, sans la présence d'un tiers, défendent des points-de-vue opposés ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, l'existence d'un tel harcèlement n'étant pas démontrée, Mme A n'est pas fondée à demander que LA POSTE soit condamnée à lui verser une indemnité ;
Sur l'appel incident de Mme A :
Considérant que l'appel principal de LA POSTE tend à l'annulation du jugement susvisé du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il l'a condamnée à payer à Mme A la somme de 8 000 euros ; que les conclusions incidentes de Mme A tendant à l'annulation d'une décision de notation intervenue en 2001 et qui, contrairement à ce que soutient cette dernière, soulèvent un litige distinct, ont été présentées après l'expiration du délai d'appel ; que, par suite, elles ne sont pas recevables et ne peuvent être accueillies ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A doivent être également rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que, d'une part, les dispositions précitées font obstacle à ce que LA POSTE, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à Mme A une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de LA POSTE tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Versailles en date du 4 mai 2009 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par LA POSTE au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
''
''
''
''
N° 09VE02269 2