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04/11/2010 | FRANCE | N°09VE01716

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 04 novembre 2010, 09VE01716


Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2009, présentée pour M. Gilles B, demeurant ... et pour Mme Jocelyne , demeurant ..., par Me Giudicelli, avocat au barreau de Paris ; M. B et Mme demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0608235 du 24 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant des commandements de payer du 12 décembre 2005 émis par le trésorier des Mureaux, en vue du recouvrement de diverses taxes d'urbanisme afférentes à un permis de construire délivré à la

SCI Domaine du Belvédère le 1er février 1990 ;

2°) de prononcer la déch...

Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2009, présentée pour M. Gilles B, demeurant ... et pour Mme Jocelyne , demeurant ..., par Me Giudicelli, avocat au barreau de Paris ; M. B et Mme demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0608235 du 24 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant des commandements de payer du 12 décembre 2005 émis par le trésorier des Mureaux, en vue du recouvrement de diverses taxes d'urbanisme afférentes à un permis de construire délivré à la SCI Domaine du Belvédère le 1er février 1990 ;

2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer résultant de ces actes de poursuite ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que le tribunal administratif s'est fondé sur les dispositions de l'article L. 211-2 du code la construction et de l'habitation, alors que ces dispositions ne figuraient pas sur les commandements de payer litigieux et n'étaient pas invoquées en défense ; qu'il a été procédé d'office à cette substitution sans que les parties aient été mises à même de présenter leurs observations sur ce point ; que, par suite, le jugement est entaché d'irrégularité ; que, dès lors que les commandements de payer litigieux ont pour seul fondement l'article 1857 du code civil et que l'autorité administrative n'a, à aucun moment, soutenu que l'obligation de payer avait pour fondement l'article L. 211-2 du code de la construction et de l'habitation, le tribunal administratif a commis une erreur de droit en faisant application des dispositions de cet article ; qu'aucun acte de poursuite n'a été engagé à l'encontre de la société civile immobilière du Belvédère avant l'émission des commandements de payer édictés à l'encontre des associés de cette société alors que, selon les articles 1857 et 1858 du code civil, de vaines poursuites doivent avoir été exercées contre la société ; qu'en outre, l'existence de l'obligation de payer n'est pas établie à l'égard des associés de la SCI du Belvédère, dès lors qu'aucun titre exécutoire ne leur a été délivré avant l'engagement des poursuites ; qu'enfin, la société ABC Gestion s'est comportée en gestionnaire de fait de la SCI du Belvédère et se trouve donc être le véritable débiteur de la créance litigieuse ; qu'ainsi, nonobstant l'absence de transfert à la société ABC Gestion du permis de construire accordé à la SCI du Belvédère, le Trésor public ne détient aucune créance sur cette dernière ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 octobre 2010 :

- le rapport de Mme Barnaba, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Kermorgant, rapporteur public,

- et les observations de Me Giudicellei, pour M. B et Mme ;

Considérant que la société civile immobilière du Belvédère, soumise, selon ses statuts, aux dispositions des articles L. 211-1 à L. 211-4 du code de la construction et de l'habitation, n'a pas acquitté diverses taxes d'urbanisme auxquelles elle avait été assujettie à la suite de la délivrance d'un permis de construire onze maisons individuelles sur un terrain situé à Triel-sur-Seine (Yvelines) ; que le règlement de ces taxes a été demandé à M. Gilles B et à Mmes Jocelyne et Yvonne B, en leur qualité d'associés de la société civile immobilière du Belvédère ; que, par jugement du 24 mars 2009, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande en décharge de l'obligation de payer les taxes susmentionnées ; que M. Gilles B et Mme Jocelyne interjettent appel de ce jugement, Mme Yvonne B étant décédée alors que l'instance était pendante devant le tribunal administratif ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement (...) en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué (...) ;

Considérant que M. B et Mme font valoir que, pour rejeter leur demande en décharge de l'obligation de payer les taxes litigieuses, le tribunal administratif s'est fondé sur les dispositions de l'article L. 211-2 du code la construction et de l'habitation alors que celles-ci n'étaient ni visées par les commandements de payer qui leur ont été notifiés le 14 décembre 2005 ni invoquées par le trésorier-payeur général des Yvelines à l'appui de ses observations en défense ; qu'ils soutiennent qu'en substituant ainsi d'office les dispositions de l'article L. 211-2 du code de la construction et de l'habitation à celles de l'article 1857 du code civil, sans avoir préalablement mis les parties en mesure de présenter leurs observations sur ce point, le tribunal administratif a méconnu les dispositions précitées de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Considérant qu'à l'appui de la demande en décharge de l'obligation de payer dont ils ont saisi le tribunal administratif, les consorts B ont invoqué l'absence de créance détenue à leur encontre par le comptable du Trésor, celui-ci n'ayant pas, selon eux, apporté la preuve qu'avant de les poursuivre, il avait vainement poursuivi la SCI du Belvédère, comme l'exige l'article 1858 du code la construction et de l'habitation ; que, pour écarter ce moyen, le tribunal administratif a considéré qu'étaient réunies les conditions d'application des dispositions de l'article 1858 du code civil comme de celles de l'article L. 211-2 du code la construction et de l'habitation, après avoir énuméré les diverses mesures que le trésorier des Mureaux avait mises en oeuvre à l'encontre de la SCI du Belvédère, avant d'adresser à chaque associé une lettre de rappel puis un commandement de payer ; qu'en se prononçant en ces termes, et alors même que les modalités d'application de l'article L. 211-2 du code la construction et de l'habitation n'avaient pas été discutées par les parties, le tribunal administratif s'est borné, comme il lui appartenait de le faire, à répondre à un moyen dont il était saisi et n'a pas soulevé d'office un moyen qu'il aurait été tenu de communiquer aux parties ;

Au fond :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 211-1 du code de la construction et de l'habitation : Les sociétés civiles dont l'objet est de construire un ou plusieurs immeubles en vue de leur vente en totalité ou par fractions sont régies (...) par les dispositions du présent chapitre (...) ; qu'aux termes de l'article L. 211-2 du même code : Les associés sont tenus du passif social sur tous leurs biens à proportion de leurs droits sociaux. / Les créanciers de la société ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après mise en demeure adressée à la société et restée infructueuse. (...) ; qu'aux termes de l'article 1857 du code civil : A l'égard des tiers, les associés [d'une société civile] répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l'exigibilité ou au jour de la cessation des paiements (...) ; qu'aux termes de l'article 1858 du même code: Les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale ;

Considérant, d'une part, que les dispositions précitées du premier alinéa de l'article L. 211-2 du code la construction et de l'habitation instituent, à l'égard des associés des sociétés civiles de construction-vente, une responsabilité strictement identique à celle que prévoit l'article 1857 du code civil à l'égard des associés des sociétés civiles de droit commun ; que, dès lors, c'est sans commettre une erreur de droit que le comptable du Trésor des Mureaux a émis des commandements de payer à l'encontre de M. B et de Mme en se fondant sur leur qualité d'associés de la SCI du Belvédère ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que, le 1er février 1990, le maire de Triel-sur-Seine a délivré à la société civile immobilière du Belvédère un permis de construire pour la réalisation de onze maisons individuelles ; qu'à raison de cette opération, la SCI a été assujettie à la taxe locale d'équipement, à la taxe complémentaire à ladite taxe, à la taxe départementale pour les espaces naturels et sensibles et à la taxe départementale pour le conseil d'architecture, d'urbanisme et d'environnement (CAUE) ; qu'à défaut de paiement spontané de ces taxes, le comptable du Trésor des Mureaux a notifié à la société divers commandements de payer émis les 13 janvier 1994, 17 avril 1996, 9 juin 1999 et 17 avril 2003 ; qu'il n'est pas contesté que ces commandements sont restés infructueux ; que le trésorier des Mureaux était fondé, dès lors, à poursuivre le recouvrement de sa créance à l'encontre des associés de la SCI, à proportion de leurs droits dans la société ; qu'ainsi, en leur notifiant une lettre de rappel le 31 janvier 2004 et en leur délivrant un commandement de payer le 14 décembre 2005, l'administration n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 211-2 du code la construction et de l'habitation ; que ces dispositions étant seules applicables en l'espèce, M. B et Mme ne peuvent utilement se prévaloir de la violation des dispositions de l'article 1858 du code civil ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur contestation sur ce point ;

Considérant, enfin, qu'en vertu de la solidarité établie par l'article L. 211-2 du code la construction et de l'habitation, l'administration n'était nullement tenue d'émettre un titre exécutoire au nom de chaque associé, préalablement à la notification des lettres de rappel et des commandements de payer susmentionnés ;

Considérant, en second lieu, que si M. B et Mme soutiennent que la société ABC Gestion s'est comportée en gestionnaire de fait de la société civile immobilière du Belvédère, ils reconnaissent eux-mêmes qu'aucune demande de transfert du permis de construire au profit de cette société n'a été présentée ; que, par suite, ils ne sauraient soutenir que la SCI ne serait pas redevable des taxes afférentes au permis de construire qui lui a été délivré le 1er février 1990 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. B et Mme doivent, dès lors, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 susmentionné du code de justice administrative et de condamner M. B et Mme à payer à l'Etat la somme que demande le trésorier-payeur général des Yvelines au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B et Mme est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du trésorier-payeur général des Yvelines tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 09VE01716
Date de la décision : 04/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Françoise BARNABA
Rapporteur public ?: Mme KERMORGANT
Avocat(s) : GIUDICELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-11-04;09ve01716 ?
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