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15/07/2010 | FRANCE | N°08VE03906

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 15 juillet 2010, 08VE03906


Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2008 au greffe de la Cour, présentée pour Mlle Caroline A, demeurant ..., par Me De Guéroult d'Aublay ; Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 20 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2008 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour portant la mention étudiant et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois à destination d

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2°) d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2008 ;

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Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2008 au greffe de la Cour, présentée pour Mlle Caroline A, demeurant ..., par Me De Guéroult d'Aublay ; Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 20 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2008 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour portant la mention étudiant et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois à destination de son pays d'origine ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2008 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, un titre de séjour en qualité d'étudiant dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mlle A soutient qu'elle est entrée en France en septembre 2002 sous couvert d'un visa afin d'y poursuivre ses études ; qu'elle a suivi avec assiduité des cours de préparation au brevet de technicien supérieur en hôtellerie-restauration au cours des années scolaires 2002-2003, 2003-2004 et 2004-2005 dans un lycée hôtelier ; qu'elle n'a pas obtenu son brevet de technicien supérieur en raison des graves difficultés financières qu'elle a éprouvées à la suite du vol de certains de ses chèques ; qu'elle a voulu compléter sa formation en hôtellerie-restauration en s'inscrivant en 1ère année de licence d'anglais ; qu'elle a continué à suivre en parallèle des cours de préparation au brevet de technicien supérieur en hôtellerie-restauration au cours de l'année scolaire 2006-2007 au Centre national d'enseignement à distance ; qu'elle exerce une activité professionnelle dans un restaurant afin d'acquérir une véritable expérience professionnelle ; qu'elle a validé une partie des modules dans le cadre de sa licence d'anglais ; que, si elle n'a pas réussi à valider l'ensemble de ses modules compte tenu du cumul de deux formations et d'un travail salarié, elle a toujours fait preuve de sérieux et d'assiduité dans ses études ; que le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation et méconnu les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle réside en France depuis septembre 2002 ; qu'elle est parfaitement intégrée à la société française ; qu'elle est dépourvue d'attaches familiales au Bénin ; que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle a obtenu la nationalité gabonaise par voie de naturalisation par décret du 25 janvier 2007 ; qu'elle remplit les conditions de l'accord conclu entre la France et la Gabon relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au Co-développement signé le 5 juillet 2007 ; que le préfet a commis une erreur en indiquant qu'elle était de nationalité béninoise et en fixant le Bénin comme pays de destination alors qu'elle ne dispose plus d'attaches au Bénin et que son père et sa soeur résident au Gabon ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord conclu entre la France et le Gabon relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au Co-développement signé le 5 juillet 2007 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 000170/PR/MJ du 25 janvier 2007 portant attribution de la nationalité gabonaise à Mlle A ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 2010 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

- les conclusions de M. Dhers, rapporteur public,

- et les observations de Me De Guéroult d'Aublay ;

Considérant que Mlle A, ressortissante gabonaise, relève appel du jugement du 20 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2008 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour en qualité d'étudiante, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. (...) L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration. L'obligation de quitter le territoire n'a pas à faire l'objet d'une motivation. ; qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention étudiant . (...). ; qu'il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'apprécier la réalité et le sérieux des études poursuivies ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2008 du préfet de la Seine-Saint-Denis :

En ce qui concerne la décision portant refus de renouveler son titre de séjour :

Considérant que Mlle A fait valoir qu'elle est entrée en France en septembre 2002 sous couvert d'un visa afin d'y poursuivre ses études ; qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante a suivi des cours de préparation au brevet de technicien supérieur en hôtellerie-restauration au cours des années scolaires 2002-2003, 2003-2004 et 2004-2005 dans un lycée hôtelier puis au cours de l'année scolaire 2006-2007 au Centre national d'enseignement à distance sans obtenir de diplôme et qu'elle est inscrite en 1ère année de licence d'anglais depuis 2005 sans plus de succès ; que si, pour expliquer ses échecs répétés, Mlle A invoque les difficultés financières qu'elle aurait éprouvées à la suite du vol de certains de ses chèques, ces explications, à les supposer pertinentes pour l'année universitaire 2004-2005, ne suffisent pas à expliquer ses échecs les années suivantes ; qu'en outre, si elle soutient que l'étude de la langue anglaise est nécessaire pour son insertion et qu'elle exerce une activité professionnelle à temps partiel afin d'acquérir une expérience, ces circonstances sont sans incidence sur la justification qu'elle doit apporter de la réalité et du sérieux des études poursuivies ; que, dès lors, eu égard à l'absence de progression dans les études suivies par Mlle A, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas commis d'erreur dans l'appréciation de la situation de l'intéressée ni méconnu les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en en estimant qu'elle n'apportait pas la preuve de la réalité et du sérieux des études poursuivies et en ne lui délivrant pas, pour ce motif, un titre de séjour en qualité d'étudiante ;

Considérant que lors de l'instruction d'une demande de titre de séjour en qualité d'étudiant, qui ne donne pas vocation à rester durablement sur le territoire français, l'administration a seulement à porter une appréciation sur la réalité et le sérieux des études poursuivies ; que, par suite le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant que l'accord conclu entre la France et la Gabon relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au co-développement, signé le 5 juillet 2007, est entré en vigueur le 1er septembre 2008 ; qu'ainsi, il n'était pas applicable à la date à laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a obligé Mlle A à quitter le territoire français ; que l'intéressée ne peut donc utilement s'en prévaloir à l'appui des conclusions susvisées ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle A a obtenu la nationalité gabonaise par voie de naturalisation par décret du 25 janvier 2007 ; que, toutefois, il ressort des termes mêmes de ce décret qu'elle n'était pas tenue, en acquérant la nationalité gabonaise, de renoncer à sa nationalité d'origine, ce qu'elle n'établit pas d'ailleurs avoir fait ; que, par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas commis d'erreur de fait en mentionnant dans sa décision du 29 janvier 2008 que la requérante était de nationalité béninoise ; qu'en revanche la requérante fait valoir que les membres de sa famille proche résident désormais au Gabon, qu'elle n'a plus aucune attache au Bénin, ce qui n'est pas contesté par le préfet qui n'a produit ni en première instance ni en appel ; que, par suite, l'autorité administrative ne pouvait, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, décider que Mlle A serait reconduite à destination du Bénin ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 20 novembre 2008, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande en ce qui concerne la décision, comprise dans l'arrêté du 29 janvier 2008 du préfet de la Seine-Saint-Denis, qui fixe le pays de destination de son éloignement ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :

Considérant que l'article L. 911-1 du code de justice administrative dispose : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; que selon l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ; que l'exécution du présent arrêt, qui se borne à annuler le pays de destination de l'éloignement de Mlle A n'implique pas que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre à Mlle A une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent qu'être rejetées ; qu'en revanche il implique nécessairement qu'il soit enjoint au préfet de prendre une nouvelle décision en ce qui concerne le pays de destination de l'éloignement de Mlle A, après réexamen de sa situation, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mlle A et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 20 novembre 2008 est annulé en tant que le Tribunal a rejeté les conclusions de la demande tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination de l'éloignement.

Article 2 : L'arrêté du 29 janvier 2008 du préfet de la Seine-Saint-Denis est annulé en tant qu'il fixe le Bénin comme pays de destination de Mlle A.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de Mlle A et de fixer le pays de destination de son éloignement dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Mlle A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Caroline A, au ministre de l'immigra

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N° 08VE03906 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 08VE03906
Date de la décision : 15/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GAILLETON
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: M. DHERS
Avocat(s) : DE GUEROULT D'AUBLAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-07-15;08ve03906 ?
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