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29/06/2010 | FRANCE | N°06VE01651

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 29 juin 2010, 06VE01651


Vu l'arrêt, en date du 7 mai 2009, par lequel la Cour administrative d'appel de Versailles, avant de statuer sur le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE tendant à l'annulation du jugement n° 0504303 du 28 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a déchargé la société Vignola des cotisations supplémentaires à la taxe d'apprentissage et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1999 et 2000 et à ce que la Cour remette à la charge de ladite société ces cotisations supplémentaires, a, en appl

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Vu l'arrêt, en date du 7 mai 2009, par lequel la Cour administrative d'appel de Versailles, avant de statuer sur le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE tendant à l'annulation du jugement n° 0504303 du 28 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a déchargé la société Vignola des cotisations supplémentaires à la taxe d'apprentissage et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1999 et 2000 et à ce que la Cour remette à la charge de ladite société ces cotisations supplémentaires, a, en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, transmis au Conseil d'Etat le dossier du recours en soumettant à son examen les questions de savoir : 1°) si une entreprise du bâtiment obligatoirement affiliée à une caisse de congés payés est passible de la taxe d'apprentissage à raison des indemnités de congés payés versées à ses salariés par l'intermédiaire de cette caisse ; 2°) si dans l'affirmative, l'assiette de la taxe est constituée par le montant des indemnités effectivement versées aux salariés de l'entreprise par la caisse de congés payés, par la totalité du montant des cotisations acquittées par l'entreprise à la caisse de congés payés ou par une partie seulement de ce montant, pour tenir compte du fait que les cotisations versées par les employeurs à la caisse des congés payés sont supérieures aux sommes effectivement reversées aux salariés dès lors qu'elles couvrent aussi d'autres postes tels qu'un fonds de réserve et les dépenses de fonctionnement de la caisse ; 3°) dans ce dernier cas, selon quelles modalités déterminer cette partie ';

Vu l'avis n° 328015, en date du 30 octobre 2009, par lequel le Conseil d'Etat a statué sur les questions précitées ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de sécurité sociale ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2010 :

- le rapport de M. Bruand, président,

- les conclusions de M. Dhers, rapporteur public,

- et les observations de Me Guerard pour la société Vignola ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'en estimant que les cotisations forfaitaires payées par la société Vignola à la caisse de congés payés, qui ont été réintégrées par l'administration dans l'assiette de la taxe d'apprentissage, ne peuvent être regardées comme constituant des rémunérations versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion d'un travail au sens des dispositions de l'article L. 242-1 du code de sécurité sociale, les premiers juges ont suffisamment motivé leur décision ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour insuffisance de motivation doit être écarté ;

Sur les cotisations en litige :

Considérant que la société Vignola, qui exerce son activité dans le secteur du bâtiment et est, à ce titre, obligatoirement affiliée à une caisse de congés payés chargée de verser aux salariés les indemnités de congés payés, n'a inclus aucune indemnité de cette nature dans l'assiette de la taxe d'apprentissage dont elle est redevable au titre des années 1999 et 2000 en litige ; que l'administration a réintégré dans l'assiette de cette taxe les cotisations versées par l'entreprise à la caisse des congés payés du bâtiment pour un montant forfaitaire de 13,14 % de la masse salariale versée au cours de chacune des années d'imposition ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 224 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition concernées : 1. Il est établi une taxe, dite taxe d'apprentissage, dont le produit est inscrit au budget de l'Etat pour y recevoir l'affectation prévue par la loi (...) ; qu'aux termes de l'article 225 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier : La taxe est assise sur les rémunérations, selon les bases et les modalités prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale (...) ; que l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale prévoit que : Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés (...) ; que les articles L. 223-11 à L. 223-15 du code du travail, devenus les articles L. 3141-22 à L. 3141-29 de ce code, déterminent les modalités de calcul de l'indemnité de congés payés ;

Considérant, d'autre part, que l'article L. 223-16 du code du travail, devenu l'article L. 3141-30 de ce code, prévoit l'affiliation obligatoire de certains employeurs à une caisse de congés, notamment lorsque les salariés ne sont pas habituellement occupés de façon continue chez un même employeur au cours de la période reconnue pour l'appréciation du droit au congé ; qu'en vertu de l'article D. 732-1 du code du travail, devenu l'article D. 3141-12 de ce code, dans les entreprises relevant du secteur du bâtiment et des travaux publics, le service des congés payés est assuré par des caisses constituées à cet effet ; qu'aux termes de l'article D. 732-5 du code du travail, devenu l'article D. 3141-29 de ce code : La cotisation que doit verser chaque entreprise affiliée est déterminée par un pourcentage du montant des salaires payés aux travailleurs déclarés. / Ce pourcentage est fixé par le conseil d'administration de la caisse. Le règlement intérieur de celle-ci précise d'autre part les époques et les modes de versement des cotisations, les justifications dont ce versement doit être accompagné et les vérifications auxquelles doivent se soumettre les adhérents ; qu'enfin, aux termes des alinéas 4 à 6 de l'article D. 732-6 du code du travail, dont les dispositions sont reprises à l'article D. 3141- 31 de ce code : La caisse assure le service des droits à congés payés des travailleurs déclarés par l'employeur. / Toutefois, en cas de défaillance de l'employeur dans le paiement des cotisations, elle verse l'indemnité de congés payés à due proportion des périodes pour lesquelles les cotisations ont été payées (...) L'employeur défaillant n'est pas dégagé de l'obligation de payer à la caisse les cotisations, majorations de retard et pénalités qui restent dues (...) ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'assiette de la taxe d'apprentissage à laquelle est assujetti un employeur est constituée par l'ensemble des rémunérations dues par celui-ci à ses salariés en contrepartie ou à l'occasion du travail, y compris les indemnités de congés payés ; que la circonstance que le service de ces indemnités soit assuré pour son compte par la caisse de congés payés à laquelle il est affilié en exécution des dispositions de l'article L. 223-16 du code du travail, devenu l'article L. 3141-30 de ce code, est sans incidence sur l'assiette de cette taxe et sur l'assujettissement de l'employeur ; que, dans ces conditions, l'administration n'était pas fondée à retenir, pour le calcul des indemnités de congés payés à prendre en compte dans l'assiette de la taxe d'apprentissage, les cotisations versées par l'employeur à la caisse des congés payés qui ne constituent pas des rémunérations au sens des dispositions précitées et couvrent, par ailleurs, des charges autres que les indemnités versées aux salariés et notamment les frais de fonctionnement des caisses, ni, a fortiori, une part forfaitaire de ces cotisations à hauteur de 13,14 % de la masse salariale versée au cours de l'année d'imposition par transposition, sans base légale, des règles applicables en matière de participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue ; que, de même, il n'y a pas lieu de retenir les indemnités versées par les différentes caisses aux salariés au titre d'une période reconnue pour l'appréciation du droit au congé, dès lors que les sommes versées par les caisses à un salarié peuvent correspondre aux droits à congés payés qu'un salarié a acquis auprès de plusieurs employeurs, qui sont seuls redevables de la taxe d'apprentissage ; que ne peut, dès lors, être inclus dans l'assiette de la taxe d'apprentissage que le seul montant des indemnités de congés payés que la société Vignola aurait versées à ses salariés en application des dispositions du code du travail et des conventions collectives ou accords applicables à la profession en l'absence d'affiliation obligatoire à une caisse ; qu'il résulte du supplément d'instruction ordonné par la Cour que le montant de telles indemnités à ajouter aux rémunérations effectivement versées par l'entreprise s'élèvent, selon le calcul non contesté de la société Vignola, à 918 796 francs (140 070 euros) en 1999 et 862 729 francs (131 522 euros) en 2000 ; qu'il y a lieu, par suite, de ramener à ces sommes les bases des cotisations supplémentaires en litige, d'un montant respectif de 1 080 213 francs et 1 045 597 francs, soit une réduction en base des impositions de, respectivement, 161 417 francs (24 608 euros) et 182 868 francs (27 878 euros ) ; que c'est, dès lors, à tort que le Tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur le moyen tiré du caractère illégal des sommes forfaitaires représentatives des indemnités de congés payés retenues par l'administration pour la détermination de l'assiette des cotisations supplémentaires de taxe d'apprentissage auxquelles la société Vignola a été assujettie au titre des années 1999 et 2000 en litige, pour prononcer la décharge totale de ces cotisations au lieu de les réduire seulement des montants indiqués ci-dessus ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Vignola en première instance et en appel ;

Considérant, en premier lieu, que si la société Vignola soutient que la taxe d'apprentissage ne pouvait faire l'objet d'une vérification de comptabilité, il résulte en tout état de cause de l'instruction que les redressements afférents à cette taxe ne procèdent pas de la vérification de comptabilité dont la société a fait l'objet du 2 mai au 18 septembre 2002 et qui a porté seulement sur les bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés et sur la taxe sur la valeur ajoutée, mais du seul rapprochement, dans le cadre d'un contrôle sur pièces, des déclarations relatives à la taxe d'apprentissage souscrites par l'entreprise avec les informations figurant dans les déclarations annuelles des salaires ; que, par suite, le moyen manque en fait ;

Considérant, en second lieu, que la société Vignola ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ni de la circulaire du ministre du travail du 28 juillet 1993 et du guide du recouvrement de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) qui ne couvrent pas le champ d'un texte fiscal, ni de la réponse ministérielle Blary du 14 avril 1976 qui a trait à la participation des employeurs à l'effort de construction et à la formation professionnelle continue et non à la taxe d'apprentissage ici en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE l'ECONOMIE DES FINANCES ET DE l'INDUSTRIE est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a, par le jugement attaqué, déchargé la société Vignola des cotisations supplémentaires à la taxe d'apprentissage et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1999 et 2000 à concurrence, respectivement, de montants en base supérieurs à 24 608 euros et à 27 878 euros ;

Sur les conclusions incidentes de la société Vignola :

Considérant qu'en l'absence de litige né et actuel relatif à un refus de paiement des intérêts moratoires, les demandes susvisées de la société Vignola sont irrecevables ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la société Vignola et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les cotisations supplémentaires de taxe d'apprentissage qui avaient été assignées à la société Vignola au titre des années 1999 et 2000 sont remises à sa charge à concurrence des droits et pénalités correspondant à des bases d'un montant respectif de 918 796 francs (140 070 euros) pour 1999 et 862 729 francs (131 522 euros) pour 2000.

Article 2 : Le jugement n° 0504303 du 28 mars 2006 du Tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, ainsi que les conclusions de la société Vignola, sont rejetés.

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N° 06VE01651


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 06VE01651
Date de la décision : 29/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GAILLETON
Rapporteur ?: M. Thierry BRUAND
Rapporteur public ?: M. DHERS
Avocat(s) : GUERARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-06-29;06ve01651 ?
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