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01/06/2010 | FRANCE | N°09VE02945

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 01 juin 2010, 09VE02945


Vu la requête, enregistrée le 29 août 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Kongoli Constant A, demeurant ..., par Me Besse ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801884 en date du 23 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 13 décembre 2007 par lequel le préfet du Val-d'Oise a ordonné son expulsion du territoire français ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2007 ;

3°) de mettre à la charge de l'Eta

t la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice adm...

Vu la requête, enregistrée le 29 août 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Kongoli Constant A, demeurant ..., par Me Besse ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801884 en date du 23 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 13 décembre 2007 par lequel le préfet du Val-d'Oise a ordonné son expulsion du territoire français ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2007 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient la décision du préfet méconnaît l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où il résidait en France depuis plus de dix ans à la date de la décision contestée, était père d'enfants français mineurs à l'entretien et à l'éducation desquels il participait et n'avait commis aucun des crimes ou délits permettant de déroger à la protection instaurée par cet article ; qu'elle est entachée d'erreur d'appréciation, dans la mesure où, contrairement à ce qu'a estimé le préfet, le requérant ne représentait plus une menace grave pour l'ordre public à la date de la décision contestée ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mai 2010 :

- le rapport de M. Morri premier conseiller,

- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,

- et les observations de Me Besse, pour M. A ;

Considérant que par un arrêté en date du 13 décembre 2007, le préfet du Val-d'Oise a ordonné l'expulsion de M. A, ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 1er septembre 1966 ; que M. A fait appel du jugement en date du 23 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public ;

Considérant que M. A s'est rendu coupable, au mois d'août 2001, de faits de viol avec arme, de séquestration et d'extorsion pour lesquels il a été condamné, le 13 mai 2006, à sept ans de réclusion ; que M. A fait valoir qu'il n'avait jamais été condamné avant cet arrêt, qu'il a eu un bon comportement lors de la période de contrôle judiciaire avant le procès, qui a duré plus de 5 ans, ainsi qu'en détention, où il a travaillé et repris ses études pour obtenir divers diplômes, qu'il a fait l'objet d'un suivi psychologique à compter du 2 mai 2007 et commencé à indemniser la victime et qu'il s'agit de faits très anciens à la date de la décision attaquée ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'eu égard, notamment, à la gravité particulière des faits commis et au comportement d'ensemble de l'intéressé, que le préfet ait fait une appréciation erronée en estimant que sa présence en France constituait une menace grave pour l'ordre public ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion qu'en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes : (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ;

Considérant que M. A, qui résidait régulièrement en France depuis mars 1992, en dernier lieu sous couvert d'une carte de résident de dix ans, remplissait, contrairement à ce que soutient le préfet, la condition de résidence régulière en France depuis plus de dix ans prévue par cet article, alors même qu'il ne doit pas être tenu compte des seuls deux années et sept mois passés en détention ; qu'il justifie, par ailleurs, qu'il est le père de trois enfants de nationalité française nés en 1991, 1994 et 2005 de sa première compagne et d'un autre enfant de nationalité française né en 2005 d'une relation avec une nouvelle compagne ;

Considérant que le placement en détention ne fait pas obstacle, par lui même, à ce qu'un étranger soit considéré comme contribuant effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant, dans la mesure des possibilités offertes par la détention ; que dans les circonstances de l'espèce, si M. A a contribué à l'entretien et à l'éducation des enfants nés de sa première union, en les ayant notamment à charge jusqu'en 2004, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait maintenu des liens réguliers avec eux après sa séparation d'avec sa première compagne et avant son placement en détention, le 13 mai 2006, ainsi que lors de la première partie de sa détention ; qu'en effet, même si M. A a échangé des courriers avec deux de ses enfants, les premières rencontres au parloir n'ont eu lieu qu'au mois d'octobre 2007, et si M. A fait état de cadeaux envoyés à ses enfants, les achats en cause ont eu lieu à l'occasion de la fête de Noël 2007, postérieurement à la décision contestée ; que les rencontres avec le juge des enfants relatives à la situation de ses enfants ont eu lieu le 4 juin et le 13 décembre 2007, peu avant la décision contestée ; que, par ailleurs, il ne ressort pas davantage des documents produits, et notamment des seules attestations fournies, qu'il ait contribué à l'éducation et à l'entretien de son dernier enfant depuis sa naissance ou depuis au moins un an à la date de la décision contestée ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

Considérant que M. A fait valoir, ainsi qu'il a été dit, qu'il a conservé des liens avec les enfants issus de sa première union et qu'il vit désormais en concubinage avec une nouvelle compagne, dont il a eu un enfant de nationalité française ; que, toutefois, eu égard aux éléments qui viennent d'être rappelés quant à la nature de ses relations avec ses enfants, et à la gravité des faits commis par M. A, la décision du préfet n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il résulte toutefois de ce qui précède qu'eu égard aux circonstances de l'espèce, la décision d'expulsion n'a pas méconnu les stipulations précitées ;

Considérant, par suite, que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté contesté ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce soient mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présence instance, la partie perdante, les sommes demandées par M. A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 09VE02945 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 09VE02945
Date de la décision : 01/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Johan MORRI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : BESSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-06-01;09ve02945 ?
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