Vu la requête, enregistrée le 9 juin 2008, présentée pour M. Moez A et Mme Entessar B, épouse A, demeurant ..., par Me Mir ; M. et Mme A demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0801653-0801662 en date du 6 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet des Hauts-de-Seine du 25 janvier 2008 refusant de leur délivrer un titre de séjour et leur faisant obligation de quitter le territoire français à destination de leurs pays d'origine ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces arrêtés ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de leur délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent, en premier lieu, que les décisions portant refus de titre de séjour, qui ne précisent pas leur fondement légal, ne sont pas suffisamment motivées ; que ces décisions ont été prises en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'étant entrés en France en 2001, et étant parents de trois enfants, dont la dernière est née et est scolarisée en France, le centre de leur vie privée et familiale est en France ; que leur passé fait obstacle à ce qu'ils s'installent tant en Lybie qu'en Tunisie, la famille libyenne de l'exposante n'ayant pas accepté leur mariage et l'exposant, alors militaire, ayant été contraint de quitter la Tunisie, après avoir été emprisonné à la suite d'un changement du pouvoir en place ; qu'en outre, il a également été emprisonné en Libye, où il a subi des sévices, médicalement constatés, dont des cicatrices et des séquelles stomatologiques attestent ; en deuxième lieu, que l'obligation de quitter le territoire, qui conduit à une séparation des membres de la famille, dès lors que les exposants n'ont pas la même nationalité, viole les articles 3-1 et 9-1 de la convention des droits de l'enfant et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; enfin, que la décision fixant le pays à destination duquel l'exposant pourra être reconduit a été prise en méconnaissance de l'article 3 de cette dernière convention, dès lors qu'il ne peut retourner sans risque pour sa sécurité, tant en Tunisie qu'en Lybie ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 février 2010 :
- le rapport de Mme Boret, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public ;
Considérant que M. A, ressortissant tunisien, et Mme A, son épouse, de nationalité libyenne, font appel du jugement du 6 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet des Hauts-de-Seine du 25 janvier 2008 refusant de leur délivrer un titre de séjour et leur faisant obligation de quitter le territoire français à destination de leurs pays d'origine ;
Sur la légalité des décisions de refus de titre de séjour :
Considérant, en premier lieu, que les décisions attaquées, qui citent notamment l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comportent les éléments de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'elle sont, par suite, suffisamment motivées au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° 1l ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant que M. et Mme A font valoir qu'ils vivent en France depuis 2001, qu'ils y sont intégrés et que leur troisième enfant y est né et y est scolarisé ; que, cependant, M. et Mme A ne sont pas dépourvus d'attaches familiales en Tunisie où vivent, chez leurs grands-parents paternels, leurs deux autres enfants ; que si les requérants soutiennent qu'ils ne peuvent pas reconstituer en Tunisie leur cellule familiale en raison des risques de persécution qu'y encourrait M. A, ils n'établissent pas la réalité de ces risques, alors, d'ailleurs, que M. A n'a pas saisi l'Office français de protection des réfugiés et apatrides d'une demande d'admission au statut de réfugié ; que, de la même façon, la circonstance que M. et Mme A ne pourraient s'établir en Libye, en raison de mauvais traitements qu'y aurait subis le requérant à la suite de l'hostilité de la famille de son épouse à leur mariage, ne saurait être regardée comme établie par les pièces versées au dossier ; que, dans ces conditions, les décisions de refus de titre de séjour n'ont pas porté au droit de M. et Mme A au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'il suit de là que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que ces décisions auraient méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :
Considérant, en premier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux retenus ci-dessus, les mesures d'éloignement contestées n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'en l'espèce, en l'absence de circonstances empêchant M. et Mme A d'emmener avec eux celui de leurs enfants qui réside en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que les décisions attaquées, qui n'impliquent pas que les enfants des requérants soient séparés de leur père ou de leur mère, n'aient pas pris en compte leur intérêt supérieur ;
Considérant, enfin, que les stipulations de l'article 9 de la convention relative aux droits de l'enfant créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que M. et Mme A ne peuvent donc utilement se prévaloir de ces stipulations pour demander l'annulation des décisions attaquées ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays à destination duquel M. A pourra être reconduit :
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant que si M. A invoque les risques de poursuites et de traitements dégradants qu'il courrait en cas de retour dans son pays d'origine, les éléments qu'il présente à l'appui de ses allégations sont, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, insuffisants pour établir l'existence de tels risques ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
DECIDE
Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.
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N° 08VE01722 2