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17/11/2009 | FRANCE | N°07VE03278

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 17 novembre 2009, 07VE03278


Vu la requête, enregistrée le 26 décembre 2007, présentée pour M. Jean-Pierre A, demeurant ..., par Me Joubert ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0407666 du 23 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale annulant la décision de l'inspecteur du travail du 23 janvier 2004 et autorisant son licenciement pour faute ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) de me

ttre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 ...

Vu la requête, enregistrée le 26 décembre 2007, présentée pour M. Jean-Pierre A, demeurant ..., par Me Joubert ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0407666 du 23 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale annulant la décision de l'inspecteur du travail du 23 janvier 2004 et autorisant son licenciement pour faute ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient, en premier lieu, que la décision ministérielle lui ayant été notifiée le 30 juillet 2004, soit plus de quatre mois après la réception par le ministre du recours hiérarchique formé par son employeur, elle a illégalement retiré la décision implicite de rejet de ce recours, née à l'expiration des quatre mois, laquelle avait créé des droits ; en deuxième lieu, que la matérialité des griefs n'est pas établie ; que, d'une part, il n'a commis aucune faute en ne se rendant pas aux entretiens prévus avec le directeur commercial dès lors qu'il devait, le 29 septembre 2003, répondre à la convocation de la médecine du travail, et que, s'agissant des deux autres rendez-vous, aucune prise en charge de ses frais de transport n'était prévue ; que, d'autre part, le grief tiré du désintérêt pour ses fonctions est infondé, l'exposant ayant seulement attiré l'attention de sa direction sur le manque de moyens et les témoignages des collaborateurs produits par celle-ci ayant été obtenus pendant la procédure de licenciement ; qu'enfin, il n'a pas fait preuve d'une attitude négative vis à vis de son employeur, ses réclamations relatives à l'obtention d'un véhicule de fonction étant légitimes ; en troisième lieu, que la procédure de licenciement est liée à ses mandats représentatifs ; que ses résultats personnels ont toujours été conformes aux objectifs, ses résultats globaux n'ayant diminué qu'en raison de la diminution du secteur géographique dont il avait la charge ; qu'il n'a pas demandé une réduction de son secteur d'activité mais a été victime d'un déclassement progressif lié à l'obtention de ses premiers mandats alors que jusque-là, sa carrière progressait ; enfin, que l'administration devait se fonder sur l'intérêt général pour refuser l'autorisation sollicitée dès lors que la direction a systématiquement éliminé les élus, le collège cadre du comité d'entreprise n'étant plus représenté que par l'exposant ; que si le tribunal administratif a retenu que des nouvelles élections pouvaient être organisées, il n'est pas établi que la société les aient organisées dans le délai légal ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le décret n° 2001-532 du 20 juin 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2009 :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur,

- et les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public ;

Considérant que, par une décision en date du 23 janvier 2004, l'inspecteur du travail de la 10ème section de la Seine-Saint-Denis a refusé à la société Pierre Laforest l'autorisation de licencier pour faute M. A, employé en qualité de chef régional des ventes et investi des fonctions de délégué du personnel, de membre du comité d'entreprise et de membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; que, sur recours hiérarchique, le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, par une décision en date du 23 juillet 2004, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et autorisé le licenciement de l'intéressé ; que M. A fait appel du jugement du 23 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale du 23 juillet 2004 ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 436-6 du code du travail, alors applicable : Le ministre compétent peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que le salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet. / Ce recours doit être introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur. / Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur ce recours vaut décision de rejet (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Pierre Laforest a formé contre la décision de l'inspecteur du travail un recours hiérarchique qui a été enregistré le 23 mars 2004 ; que le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a statué sur ledit recours le 23 juillet 2004, soit avant l'expiration du délai de quatre mois dont il disposait, la circonstance que cette décision n'a été notifiée à M. A que le 3 août 2004, et donc après l'expiration du délai de quatre mois imparti au ministre, étant sans incidence à cet égard ; que, par suite, le ministre ne peut être regardé comme ayant pris une décision rapportant une prétendue décision implicite de rejet résultant du silence qu'il aurait opposé pendant plus de quatre mois au recours hiérarchique ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que le ministre aurait illégalement retiré une décision implicite créatrice de droits doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'au cours des mois de septembre et octobre 2003, M. A a refusé de déférer aux convocations du directeur commercial de la société Pierre Laforest lui demandant de se rendre au siège de la société en vue de le rencontrer, et a persisté dans ce comportement en dépit d'une lettre du directeur des ressources humaines en date du 22 octobre 2003 l'avertissant que tout nouveau refus de sa part serait regardé par son employeur comme constitutif d'une faute grave de nature à conduire à l'engagement d'une procédure de licenciement ; que si M. A fait valoir que ces refus étaient justifiés par l'absence de prise en charge de ses frais de transport, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, qui n'avait pas choisi de disposer d'un véhicule de service comme la possibilité lui en avait été offerte en octobre 2002, bénéficiait d'une indemnité mensuelle de 458 euros destinée à compenser l'utilisation professionnelle de son véhicule personnel, ainsi que d'une prise en charge de ses frais de carburant ; qu'il n'est, en outre, pas sérieusement contesté que M. A a également cessé, pour le même motif, de se déplacer dans les agences commerciales dont il avait la charge ; que la circonstance que, depuis la modification, à la fin de l'année 2002, des conditions de prise en charge des déplacements professionnels par l'attribution d'un véhicule de service en remplacement d'un véhicule de fonction, un litige opposait M. A à la société Pierre Laforest du fait du désaccord manifesté par le salarié quant au montant de l'indemnité mensuelle compensatrice et de la suspension du versement de cette indemnité pendant la durée du congé de maladie du requérant, n'est pas de nature à justifier, eu égard notamment au niveau de responsabilité de l'intéressé, le refus de M. A de se conformer aux instructions de sa hiérarchie et à ses obligations contractuelles ; que, dans ces conditions, en estimant que les faits reprochés à l'intéressé étaient établis et constitutifs d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale n'a commis ni erreur de fait, ni erreur d'appréciation ;

Considérant, d'autre part, que si M. A, recruté en 1991 comme chef des ventes et promu en 1996 en qualité de directeur régional des ventes, a été rétrogradé au mois de janvier 2001 au poste de chef régional des ventes, il n'est pas établi, alors qu'il ressort des pièces du dossier que l'évolution des résultats commerciaux du secteur dont il avait la charge était défavorable, que, comme l'allègue le requérant, le déroulement de sa carrière au sein de la société Pierre Laforest aurait été en rapport avec l'acquisition et l'exercice de ses mandats représentatifs, ni que la direction de cette société aurait procédé, de façon discriminatoire, au licenciement des représentants du personnel les plus actifs dans l'exercice de leur mandat ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la mesure de licenciement prise à l'encontre du requérant était en rapport avec les mandats représentatifs qu'il détenait doit être écarté ;

Considérant, enfin, que si M. A soutient que la décision attaquée serait entachée d'illégalité, faute pour le ministre d'avoir fait usage de son pouvoir de refuser l'autorisation de licenciement pour un motif d'intérêt général, il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre aurait, ce faisant, entaché son appréciation d'une erreur manifeste ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu, de faire droit aux conclusions de la société Pierre Laforest tendant au bénéfice des mêmes dispositions ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Pierre Laforest tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 07VE03278


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE03278
Date de la décision : 17/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Corinne SIGNERIN-ICRE
Rapporteur public ?: Mme JARREAU
Avocat(s) : JOUBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2009-11-17;07ve03278 ?
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