Vu la requête, enregistrée le 28 mai 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Jonathan X, demeurant ..., par Me Bellouti ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0609015 du 3 avril 2008 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à annuler la décision 48S par laquelle le ministre chargé de l'intérieur lui a notifié l'ensemble des décisions de retrait de points affectant son permis de conduire, a constaté que ledit permis avait perdu sa validité et lui a fait interdiction de conduire et tendant à annuler l'ensemble des décisions de retrait de points affectant son permis de conduire ;
2°) d'annuler les décisions contestées et la décision du 11 juillet 2005 par laquelle le préfet de Seine-Saint-Denis lui a enjoint de restituer son permis de conduire ;
3°) d'enjoindre au ministre chargé de l'intérieur de reconstituer intégralement le capital de points de son permis sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l' arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. X soutient que le tribunal a commis une erreur en rejetant sa demande comme tardive ; que la décision 48 S a été notifiée à une adresse inexistante ; qu'il a toujours indiqué sa véritable adresse aux services de police ; qu'il a informé la préfecture de son changement d'adresse ; qu'il n'a jamais reçu aucune notification des décisions de retrait de points à l'exception de celle datée du 15 juin 2004 qui lui a été notifiée à son adresse ; que cette absence de notification l'a empêché de préserver ses droits et notamment d'effectuer un stage de sensibilisation ; que la décision 48 S ne lui a pas été régulièrement notifiée ; que les décisions contestées ne lui sont pas opposables ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 août 2009 :
- le rapport de Mme Courault, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Davesne, rapporteur public ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision récapitulant l'ensemble des points qui ont été retirés du permis de conduire de M. X n'a pas été notifiée à l'adresse du requérant, que l'administration ne pouvait ignorer, dès lors que cette adresse figurait sur le titre de conduite qui a été délivré à l'intéressé le 25 juin 2003 sous forme de réédition et sur les procès-verbaux de contravention dressés à son encontre les 13 avril 2002, 11 novembre 2002, 19 septembre 2003 et 6 octobre 2003 ; que c'est, par suite, à tort que le magistrat désigné a rejeté les demandes de M. X comme tardives au motif que la notification régulière de la décision avait fait courir le délai du recours contentieux à compter du 27 juin 2005, date à laquelle le pli contenant la décision avait été présenté à une adresse erronée ; qu'ainsi, le jugement attaqué doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par M. X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En tant que dirigées contre la décision du préfet de Seine-Saint-Denis :
Considérant que les conclusions à fin d'annulation de la décision du 11 juillet 2005 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a fait injonction à M. X de restituer son permis de conduire ont été présentées pour la première fois en appel ; que, par suite, ces conclusions sont irrecevables ;
En tant que dirigées contre la décision du ministre chargé de l'intérieur contestant la perte de validité du permis :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 en vigueur à la date de la décision attaquée : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. (...) Lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 223-3 du même code : (...) Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif. ; qu'aux termes de l'article R. 223-3 du même code : I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1. II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L. 225-1 à L. 225-9. III. - Lorsque le ministre de l'intérieur constate que la réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie dans les conditions prévues par le quatrième alinéa de l'article L. 223-1, il réduit en conséquence le nombre de points affecté au permis de conduire de l'auteur de cette infraction et en informe ce dernier par lettre simple. Le ministre de l'intérieur constate et notifie à l'intéressé, dans les mêmes conditions, les reconstitutions de points obtenues en application des alinéas 1 et 3 de l'article L. 223-6. IV. - Lorsque le nombre de points est nul, le préfet du département ou l'autorité compétente du territoire ou de la collectivité territoriale d'outre-mer, du lieu de résidence, enjoint à l'intéressé, par lettre recommandée, de restituer son titre de conduite dans un délai d'une semaine à compter de la réception de cette lettre ;
Considérant que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les dispositions précitées, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant, la légalité de ces retraits ; que cette procédure a pour seul objet de rendre ceux-ci opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont dispose celui-ci pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que la circonstance que le ministre de l'intérieur ne soit pas en mesure d'apporter la preuve que la notification des retraits successifs, effectuée par lettre simple, a bien été reçue par son destinataire, ne saurait lui interdire de constater que le permis a perdu sa validité, dès lors que dans la décision procédant au retrait des derniers points, il récapitule les retraits antérieurs et les rend ainsi opposables au conducteur qui demeure recevable à exciper de l'illégalité de chacun de ces retraits ;
Considérant qu'en l'espèce le ministre ne produit pas les décisions de notification des décisions successives de retrait de points ni la décision récapitulant les infractions commises et valant notification des décisions de retrait de points ; que s'il soutient que cette dernière décision a été notifiée au requérant et retournée comme non réclamée, il ne démontre pas, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la régularité de la notification ; qu'en conséquence, les retraits de points n'étant pas opposables à M. X, le ministre ne pouvait constater que le permis de ce dernier avait perdu sa validité ; que, par suite M. X est fondé à demander l'annulation de la décision 48 S en ce qu'elle porte invalidation de son permis pour solde nul ;
Sur la légalité des décisions de retrait de points :
Considérant que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les dispositions précitées, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant, la légalité de ces retraits ; que la circonstance que M. X n'aurait pas été informé des différentes décisions du ministre de l'intérieur procédant au retrait de points consécutivement aux infractions en date des 13 avril 2002, 11 novembre 2002, 19 septembre 2003 et 6 octobre 2003 est sans incidence sur la légalité des décisions en question ; que, par suite, le moyen est inopérant et doit être écarté ;
Considérant que M. X, qui n'allègue pas ne pas avoir été informé, lors des différentes interpellations auxquelles ont donné lieu les infractions qui lui sont reprochées, d'une part, des pertes de points qu'il était susceptible d'encourir lorsque serait établie la réalité de ces infractions par le paiement de l'amende ou par une condamnation devenue définitive, d'autre part, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et, enfin, de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès, avait la faculté de demander la reconstitution partielle du nombre de points initial dès la prise de la décision par le ministre et avant même la notification de celle-ci dès lors qu'il pouvait en avoir connaissance, après la constatation des diverses infractions commises, en utilisant le droit d'accès au traitement automatisé des retraits de points ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce qu'il a été privé de la possibilité de reconstituer son nombre de points initial en se soumettant à la formation spécifique prévue à l'article L. 223-6 du code de la route doit également être écarté ;
Sur les conclusions à fins d'injonction :
Considérant que l'exécution du présent arrêt annulant la décision du ministre chargé de l'intérieur en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de conduire de M. X n'implique pas, eu égard à ses motifs, la reconstitution du capital de points ; que les conclusions susmentionnées doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0609015 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 3 avril 2008 est annulé.
Article 2 : La décision du ministre de l'intérieur en tant qu'elle constate que le permis de conduire de M. X a perdu sa validité est annulée.
Article 3 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des demandes présentées par M. X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.
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N° 08VE01565 4