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19/02/2009 | FRANCE | N°07VE00026

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 février 2009, 07VE00026


Vu la requête, enregistrée le 2 janvier 2007 au greffe de la Cour, présentée pour M. Michel X, demeurant ..., par Me Maugey ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507819 du 7 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge de la majoration de 40 pour 100 et des intérêts de retard dont a été assortie la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle M. Paul X, son père décédé, été assujetti au titre de l'année 2002 ;

2°) de prononcer la décharge de cette majoration et de ces

intérêts de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en...

Vu la requête, enregistrée le 2 janvier 2007 au greffe de la Cour, présentée pour M. Michel X, demeurant ..., par Me Maugey ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507819 du 7 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge de la majoration de 40 pour 100 et des intérêts de retard dont a été assortie la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle M. Paul X, son père décédé, été assujetti au titre de l'année 2002 ;

2°) de prononcer la décharge de cette majoration et de ces intérêts de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. X soutient que le notaire chargé de la succession a méconnu son devoir d'information et de conseil en ne l'alertant pas sur les formalités fiscales à accomplir ; qu'il n'a fait preuve d'aucun manque de diligence ; qu'il ignorait la nature et le montant des revenus de son père, contrairement à l'administration fiscale qui a indiqué dans l'avis d'imposition que les pensions et retraites de son père s'étaient élevées à 38 781 euros en 2002 ; qu'il souffrait de graves problèmes de santé ; qu'ainsi, sa bonne foi ne peut être mise en cause ; que le trésorier-payeur général des Yvelines s'est trompé sur le quantum de la dette dans le bordereau de situation dressé le 1er août 2005 et joint à sa lettre du 6 septembre 2005 ; que le centre des impôts de Versailles-Nord n'a pas répondu aux demandes de son conseil qui sollicitait des informations sur les montants restant à payer et proposait de débloquer une somme de 7 500 euros qui avait été consignée en vue de régler les impôts de son père ; que le même centre des impôts a, à partir de documents qu'il a refusé de produire, considéré que son père avait réalisé des gains mobiliers de 22 352 euros alors qu'il avait réalisé une perte de 3 123 euros ; que la majoration de 40 % prévue à l'article 1728 du code général des impôts qui lui a été infligée est une sanction présentant un caractère pénal au sens des stipulations de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette majoration peut faire l'objet d'une modulation par le juge de l'impôt et a été appliquée en méconnaissance des stipulations des articles 6 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la coexistence contradictoire des jurisprudences administrative et judiciaire constitue une violation du principe de sécurité juridique et une violation du principe de l'égalité des citoyens devant la loi ; que l'administration fiscale a commis un abus de droit ; que les intérêts de retard prévus à l'article 1727 du code général des impôts qui lui ont été infligés présentent le caractère d'une sanction et peuvent faire l'objet d'une modulation ou d'une limitation par le juge de l'impôt ; que l'administration fiscale n'apporte aucun élément justifiant qu'elle a subi un préjudice financier ; que ces intérêts de retard ont été appliqués en méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2009 :

- le rapport de M. Dhers, premier conseiller,

- les observations de Me Bataille substituant Me Maugey,

- les conclusions de M. Beaufaÿs, rapporteur public,

- et les nouvelles observations de Me Bataille ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Michel X n'a pas déclaré les revenus perçus en 2002 par son père M. Paul X, décédé le 9 février 2003 et dont il est l'unique héritier, comme les dispositions de l'article 204 du code général des impôts lui en faisaient obligation ; que l'administration a notifié le 9 décembre 2003 à M. Michel X une mise en demeure de procéder à une telle déclaration qui est restée sans effet ; que ces revenus ont été taxés d'office en 2004 en application des articles L. 66 et suivants du livre des procédures fiscales ; qu'en sa qualité d'héritier, M. Michel X a sollicité du Tribunal administratif de Versailles la décharge de la majoration de 40 pour 100 et des intérêts de retard dont a été assortie la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu de 2002 ; qu'il relève appel du jugement du 7 novembre 2006 par lequel le tribunal a rejeté cette demande en décharge ;

Sur la majoration de 40 pour 100 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa version applicable au présent litige : « 1. Lorsqu'une personne physique ou morale ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s'abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter cet acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 10 p. 100 (...) 3. La majoration visée au 1 est portée à : 40 p. 100 lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai (...) » ;

Considérant que M. Michel X n'a pas souscrit la déclaration d'ensemble des revenus perçus en 2002 par son père dans le délai de trente jours à compter de la notification d'une mise en demeure intervenue le 9 décembre 2003 ; que ses problèmes de santé ne sauraient être regardés en l'espèce comme un cas de force majeure l'ayant mis dans l'impossibilité de déposer cette déclaration ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir d'éventuelles carences du notaire chargé de régler la succession de son père et faire valoir qu'il est de bonne foi, qu'il ignorait la nature et le montant des revenus de ce dernier et que l'administration en avait connaissance et aurait refusé de les lui communiquer ; que le moyen tiré de l'erreur qu'aurait commise le trésorier principal de Versailles sur le montant de la dette fiscale de son père dans le bordereau de situation qu'il a établi le 1er août 2005 est également sans incidence sur le bien-fondé de la pénalité en litige ; que, par suite, par une exacte application des dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts que l'administration fiscale a appliqué au rappel d'impôt sur le revenu de 2002 émis au nom de son père la majoration de 40 pour 100 ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle » ; que les sanctions fiscales à caractère répressif, à l'exclusion des intérêts de retard, peuvent constituer des « accusations en matière pénale » au sens de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, les stipulations de l'article précité sont applicables à la contestation de la majoration de 40 pour 100 prévue à l'article 1728 du code général des impôts ;

Considérant toutefois que les dispositions de l'article 1728 du code général des impôts proportionnent la pénalité à la gravité des agissements du contribuable en prévoyant des taux de majoration différents selon que le défaut de déclaration dans le délai est constaté sans mise en demeure de l'intéressé ou après une ou deux mises en demeure infructueuses ; que le juge de l'impôt, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, décide, dans chaque cas, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir le taux auquel l'administration s'est arrêtée, soit de lui substituer un taux inférieur parmi ceux prévus par le texte s'il l'estime légalement justifié, soit de ne laisser à la charge du contribuable que les intérêts de retard, s'il estime que ce dernier ne s'est pas abstenu de souscrire une déclaration ou de déposer un acte dans le délai légal ; que le juge dispose, ainsi, d'un pouvoir de pleine juridiction conforme aux stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales lesquelles n'impliquent pas, alors même que le législateur a retenu un taux unique pour les pénalités en cause, que le juge puisse moduler l'application de cette dernière en substituant un taux inférieur à celui prévu par les textes ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article 1728 sont incompatibles avec les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les intérêts de retard :

Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts, alors applicable : « Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions. Cet intérêt n'est pas dû lorsque sont applicables les dispositions de l'article 1732 ou les sanctions prévues aux articles 1791 à 1825 F. Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 % par mois. Il s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé. » ;

Considérant, en premier lieu, que M. X soutient que l'application de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 précité du code général des impôts constitue une sanction dans la mesure où son taux est supérieur à celui de l'intérêt légal ; que l'intérêt de retard institué par ces dispositions, qui s'appliquent indépendamment de toute appréciation portée par l'administration fiscale sur le comportement du contribuable, vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que, si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; que, par ailleurs, il n'appartient au juge de l'impôt ni de moduler le montant des intérêts de retard dus, ni de limiter celui-ci au montant résultant de la seule application du taux légal ; que, par suite, le moyen tiré par le requérant de ce que les intérêts de retard mis à sa charge présenteraient un caractère excessif doit être rejeté ;

Considérant, en deuxième lieu, que le juge de l'impôt, saisi d'une contestation sur les intérêts de retard, lesquels ne constituent pas une sanction mais la seule réparation du préjudice subi par le Trésor, ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas de contestation sur des droits et obligations de caractère civil ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'appui d'une telle contestation ;

Considérant, enfin, que M. X ne peut utilement faire valoir que l'administration fiscale ne rapporte pas la preuve que l'Etat a subi un préjudice financier ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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N° 07VE00026 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 07VE00026
Date de la décision : 19/02/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GAILLETON
Rapporteur ?: M. Stéphane DHERS
Rapporteur public ?: M. BEAUFAYS
Avocat(s) : MAUGEY

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2009-02-19;07ve00026 ?
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