Vu la requête, enregistrée le 31 août 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Agostino X, demeurant ..., par Me Jean-Luc Bouton ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0306243 en date du 3 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme représentant le montant des frais exposés et non compris dans les dépens, dont le montant sera précisé ultérieurement ;
Il soutient que la notification de redressement était insuffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; que l'administration, qui a écarté sa comptabilité comme dépourvue de valeur probante et procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires à partir d'éléments obtenus de ses fournisseurs, ne lui a pas communiqué, malgré ses demandes répétées, les documents sur lesquels elle s'est fondée pour reconstituer le montant de ses achats auprès de ses fournisseurs ; que le contribuable a ainsi été privé de la possibilité de connaître la teneur exacte des renseignements utilisés par l'administration et de les contester ; que l'administration a refusé de faire droit à sa demande de visite sur place pour contrôler à l'occasion d'opérations de vente sur les marchés les conditions réelles d'exercice de cette activité dans la zone de chalandise en question ; que ce refus a conduit l'administration à retenir des données inexactes sur le coefficient-multiplicateur sur achats revendus ; que l'administration n'a pas apporté la preuve de sa mauvaise foi, de simples irrégularités comptables ne pouvant caractériser une intention délibérée d'éluder l'impôt ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2008 :
- le rapport de M. Morri, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X, qui exerce une activité de poissonnier ambulant, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos de 1994 à 1996 ; qu'à l'issue de cette vérification, il s'est vu appliquer, selon une procédure contradictoire, des redressements portant sur la taxe sur la valeur ajoutée au titre des exercices clos en 1995 et 1996 ; qu'il interjette appel du jugement en date du 3 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions contestées ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par l'administration ;
Sur la régularité du jugement contesté :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 7 du code de justice administrative : « Un membre de la juridiction, chargé des fonctions de commissaire du gouvernement, expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu'elles appellent » ;
Considérant que M. X soutient qu'en se prononçant sur des impositions dont il avait sollicité la décharge et pour lesquelles le commissaire du gouvernement avait conclu à une telle décharge, le tribunal a statué sur une question qui n'était plus en litige et au-delà des conclusions dont il était saisi ; que toutefois, ainsi qu'il résulte des dispositions précitées, le commissaire du gouvernement, qui n'est pas une partie à l'instance, ne représente pas l'administration ; qu'il n'a pas le pouvoir d'accorder la décharge des impositions contestées ; qu'ainsi, en l'absence de désistement du contribuable ou de décharge opérée par l'administration, les impositions en cause demeuraient en litige ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient M. X, c'est à bon droit que le tribunal s'est prononcé, comme il y était tenu, sur les conclusions tendant à leur décharge ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressements qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation.» ;
Considérant que la notification de redressement du 15 mai 1998 indique clairement la nature des redressements envisagés, le montant de chacun de ces redressements, l'impôt en cause et l'année d'imposition ; qu'elle précise les raisons pour lesquelles le caractère probant de la comptabilité de M. X n'a pas été admis et indique de façon détaillée la façon dont l'administration a rectifié le montant des cotisations de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la notification de redressement doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : « Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. » ; qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure de redressement mise en oeuvre, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis dans l'exercice de son droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements, afin que l'intéressé ait la possibilité de demander, avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ;
Considérant que M. X soutient qu'il n'a pas été informé, malgré des demandes en ce sens, de la teneur exacte des documents obtenus par l'administration auprès d'un de ses principaux fournisseurs concernant le montant de ses commandes de poissons et de coquillages ; que l'origine et la teneur des renseignements obtenus figurait cependant dans la notification de redressement du 15 mai 1998 ; que si M. X a adressé plusieurs courriers à son fournisseur en vue d'obtenir des éclaircissements sur le montant des commandes communiqué par ce dernier à l'administration, il s'est borné à adresser une copie de ces courriers à l'administration et à préciser qu'il la tiendrait informée des suites de cette demande ; qu'il n'a pas formulé auprès des services fiscaux de demande explicite de communication des documents sur la base desquels avait été opéré le redressement ; qu'ainsi, faute d'avoir adressé une demande expresse à l'administration avant la mise en recouvrement, il ne saurait faire valoir qu'elle a irrégulièrement refusé de lui communiquer les renseignements ou documents en cause ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aucun texte ni aucun principe ne faisait obligation à l'administration d'accéder à la demande présentée par M. X et tendant à ce qu'un vérificateur l'accompagne dans une de ses tournées pour effectuer sur place des relevés de prix ;
Considérant, enfin, que l'administration n'avait pas l'obligation de répondre aux nouvelles observations présentées le 19 octobre 1998 par M. X à la suite de la réponse aux observations du contribuable ;
Sur le bien-fondé des impositions contestées :
Considérant que les redressements en cause ont été effectués selon une procédure contradictoire ; que le contribuable n'y ayant pas donné son accord, la charge de la preuve du bien-fondé des impositions en cause incombe à l'administration ;
Considérant, d'une part, que l'administration a relevé les insuffisances du brouillard de caisse pour la période vérifiée et une série d'achats inexistants ou anormalement faibles en dehors des périodes de fermeture du commerce indiquées sur ce brouillard ; qu'elle a par ailleurs mis en évidence, par l'exercice du droit de communication auprès d'un fournisseur, qu'une part très importante des achats de poissons et de coquillages opérés par M. X n'était pas portée en comptabilité ; qu'ainsi, elle a pu à bon droit tenir cette comptabilité comme non probante et procéder à une reconstitution extra-comptable des recettes ;
Considérant, d'autre part, que l'administration s'est fondée, pour déterminer le montant des achats de poissons et de coquillages effectués par M. X, sur les informations précises obtenues de l'un des ses fournisseurs dans le cadre du droit de communication ; qu'elle a ensuite appliqué à ces achats un coefficient multiplicateur de 1,79 pour 1995 et 1,80 pour 1996, qui a été déterminé à partir du rapport entre les ventes hors taxes et les achats revendus hors taxes constaté dans les déclarations du contribuable pour les années en cause ; que si M. X soutient que ces coefficients ne correspondent pas aux conditions effectives d'exercice de son activité dans la zone en cause et fait valoir que l'administration a refusé de faire droit à sa demande d'établissement, par le vérificateur, d'un relevé de prix effectué sur place lors des opérations de vente, il n'a apporté aucune justification quant au niveau des prix pratiqués et n'a proposé aucune méthode alternative de détermination de ses recettes ; qu'il n'a pas davantage contesté la pertinence du relevé de commandes établi par son fournisseur et qui lui a été communiqué en cours d'instance ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'exactitude de la reconstitution de recettes contestées ;
Sur les pénalités :
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) ;
Considérant que pour faire application aux redressements en cause de la pénalité de 40 % pour mauvaise foi, l'administration s'est fondée sur l'existence, pendant l'ensemble de la période vérifiée, d'omissions de recettes d'une fréquence et d'un montant élevés, accompagnées de dissimulations de charges destinées à assurer une cohérence apparente de la comptabilité ; qu'en mettant en évidence le caractère important et répété des manquements constatés, elle a apporté la preuve, qui lui incombe, du caractère intentionnel des minorations de recettes et, par suite, de la mauvaise foi du contribuable ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions contestées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. X des sommes qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
N° 07VE02255 2