Vu la requête, enregistrée le 6 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, par laquelle le PREFET DE SEINE-SAINT-DENIS, demeurant 1, Esplanade Jean Moulin Bobigny Cedex (93007), demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0103003 en date du 8 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, d'une part, annulé l'arrêté du préfet de Seine-Saint-Denis du 3 avril 2001 prononçant la fermeture pour six mois de l'établissement « Espace Villette » sis à Aubervilliers, d'autre part condamné l'Etat à verser 21 000 euros à la société des artistes ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société des artistes devant le Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise ;
Il soutient que la fermeture administrative temporaire du débit de boissons « Espace Villette » est fondée sur des faits précis, répétés et concordants constituant des troubles sérieux à l'ordre public ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 décembre 2007 :
- le rapport de M. Bruand, président assesseur ;
- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique alors en vigueur : « La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par arrêté du représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, soit à la suite d'infraction aux lois et règlements relatifs à ces établissements, soit en vue de préserver l'ordre, la santé ou la moralité publics » ;
Considérant que la société des artistes exploite à Aubervilliers une salle à l'enseigne « Espace Villette » qu'elle loue pour des réceptions et des soirées ; que l'établissement qui offre à la vente de façon épisodique mais régulière, notamment en fin de semaine, des boissons alcoolisées à consommer sur place relève des lois et règlements relatifs aux débits de boissons ; que par un arrêté en date du 3 avril 2001, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a ordonné la fermeture pour six mois de l'établissement en cause au motif que le fonctionnement de cet établissement génère de nombreuses nuisances aux riverains ayant conduit au dépôt d'une plainte le 6 mars 2000 et à l'intervention des services de police le 24 avril 2000 pour tapage nocturne ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour ordonner la mesure de police, le préfet s'est fondé d'une part, sur les plaintes de deux riverains nommément identifiés faisant état, de nuisances sonores causées à l'extérieur de l'établissement par les personnes fréquentant la salle «Espace Villette » alors qu'elle servait à usage de discothèque, d'autre part, sur un rapport des services de police du 24 avril 2000 constatant qu'à 5H45 plusieurs personnes sortaient de l'établissement dans le bruit et que la musique émanant de la salle s'entendait depuis la voie publique ; que ces faits précis, avérés et concordants rapportés dans des documents annexés à un rapport en date du 11 décembre 2000 du commissaire de police en fonction à Aubervilliers, établissent suffisamment la réalité des faits à l'origine de la décision préfectorale de fermeture administrative ; que c'est dès lors à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a jugé que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS s'est fondé sur des faits matériellement inexacts faute de précisions suffisantes ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société des artistes en première instance et en appel ;
Considérant que les nuisances sonores nocturnes motivant la décision préfectorale de fermeture de l'établissement «Espace Villette» ne sont matériellement établies que par deux plaintes de riverains les 6 mars et 24 avril 2000, espacées d'un mois et demi et relativement isolées s'agissant d'une salle implantée dans une cité d'habitation dense, et qui constituent des faits anciens à la date du 3 avril 2001 à laquelle le préfet a prononcé la fermeture ; qu'en outre, hormis les deux plaintes susmentionnées, le maire de la commune et le commissaire de police se bornent a faire état de façon globale et non circonstanciée de diverses plaintes de riverains ; qu'eu égard au caractère ponctuel des troubles à l'ordre public précisément établis, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en prenant une mesure de fermeture pour la durée maximale de six mois ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens d'annulation de la société des artistes, que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 3 avril 2001, ni à demander par voie de conséquence la décharge de la somme de 21 000 euros, dont le montant n'est au demeurant pas discuté, que l'Etat a été condamné à verser à la société des artistes en réparation du préjudice subi, alors qu'en tout état de cause le préfet n'a pas qualité pour présenter au nom de l'Etat des conclusions tendant à l'annulation d'un jugement en tant qu'il condamne l'Etat à réparer les conséquences dommageables d'une fermeture administrative ;
Sur la demande incidente de la société des artistes :
Considérant que la société des artistes demande en appel que soit porté à 200 000 euros le montant de l'indemnité que doit lui verser l'Etat en réparation du préjudice lié à la perte d'exploitation subie pendant la période de fermeture de l'établissement ; que c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a jugé que la société requérante est fondée à demander réparation du préjudice résultant du paiement des charges fixes qu'elle a dû supporter sans contrepartie pendant la durée de la fermeture ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le Tribunal aurait fait une inexacte appréciation de ces charges fixes en évaluant à 21 000 euros leur montant au regard du compte de résultat de la société pour l'exercice 2000, alors que la société des artistes n'assortit ses prétentions d'aucun élément utile de contestation de ce montant ;
DECIDE :
Article 1er : La requête du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'appel incident formé par la société des artistes sont rejetées.
N° 06VE00256 3