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28/06/2007 | FRANCE | N°05VE02249

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 28 juin 2007, 05VE02249


Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2005, au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme demeurant ... par Me Bierling ; Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0502754 en date du 29 août 2005 par laquelle le président de la troisième chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 novembre 2004 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 10 nove

mbre 2004 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer u...

Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2005, au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme demeurant ... par Me Bierling ; Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0502754 en date du 29 août 2005 par laquelle le président de la troisième chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 novembre 2004 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 10 novembre 2004 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte d'une somme de 100 euros par jour de retard ;

Elle soutient que c'est à tort que l'ordonnance attaquée a rejeté sa demande de première instance pour tardiveté dès lors qu'ayant exercé un recours gracieux le 24 novembre 2004 contre l'arrêté en date du 10 novembre 2004 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, une décision implicite de rejet de son recours gracieux était intervenue le 24 mars 2005 de telle sorte que sa requête devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise enregistrée le 25 mars 2005 avait été déposée dans le délai présent ; que l'arrêté du 10 novembre 2004 est insuffisamment motivé ; que la décision attaquée a été prise par une autorité incompétente qui ne bénéficiait pas d ‘une délégation de signature régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture ; qu'elle n'a jamais pu solliciter la carte de séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français car ce dernier lui a fait subir des violences conjugales ; qu'elle a droit au bénéfice des dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 permettant au préfet de renouveler le titre de séjour d'un étranger lorsque la communauté a été rompue à son initiative à raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint ; que l'arrêté du 10 novembre 2004 méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

……………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2007 :

- le rapport de M. Martin, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : « Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée » ; que si l'article R. 421-2 du même code dispose : « Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet (…) », il ressort des dispositions de l'article 2 du décret du 30 juin 1946 susvisé, modifié par le décret du 3 mai 2002 publié le 5 mai 2002 au journal officiel de la République française, que, « sur les demandes de titre de séjour », le délai de naissance d'une telle décision implicite est de quatre mois ; qu'en vertu de l'article 18 de la loi du 12 avril 2000, il faut entendre comme « demande » non seulement la demande initiale de titre de séjour, mais aussi le recours gracieux ou hiérarchique adressé à l'administration ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier produites en appel que Mme X a déposé le 29 novembre 2004 un recours gracieux contre la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 10 novembre 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que la décision implicite de rejet de son recours gracieux n'est intervenue, en application des dispositions précitées de l'article 2 du décret du 30 juin 1946, que le 29 mars 2005 ; que dès lors, à la date d'enregistrement de sa requête devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 25 mars 2005, le délai de recours n'était pas expiré ; que dès lors la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la troisième chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté comme tardive sa requête tendant à l'annulation de la décision du 10 novembre 2004, implicitement confirmée sur recours gracieux ; qu 'ainsi cette ordonnance doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué en date du 10 novembre 2004 a été signé par M. Frédéric Y, secrétaire général de la préfecture de la Seine-Saint-Denis ; que Mme Oberti n'est signataire que de l'ampliation de cet arrêté ; que, par arrêté du 28 mai 2004, régulièrement publié au bulletin d'informations administratives le 2 juin suivant, M. Michel SAPPIN préfet de la Seine-Saint-Denis a donné à M. Frédéric Y délégation pour signer « tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents à l'exception : des actes pour lesquels une délégation a été conférée à un chef de service d'une administration civile de l'Etat dans le département ; des actes de réquisition du comptable ; des arrêtés de conflit. » ; qu'ainsi le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en second lieu, que Mme n'avait, en première instance, présenté que des moyens de légalité interne contre la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; qu'ainsi, elle n'est pas recevable, en appel, à soutenir que l'acte qu'elle attaque serait entaché d'un défaut de motivation, ce moyen reposant sur une cause juridique différente de celle qui fondait ses moyens de première instance ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : ( . . .) 4°) A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que la communauté de vie n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; ( . . .) Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger à raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, le préfet ou à Paris le préfet de police, peut accorder le renouvellement du titre ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme a contracté mariage avec M. Z, de nationalité française, le 9 avril 2003 à Pondichéry ; qu'elle est entrée en France le 13 juin 2003 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa portant la mention « famille de français, carte de séjour à solliciter dès son arrivée en France » délivré par les autorités consulaires françaises en poste à Pondichéry ; qu'elle a fui le 21 juillet 2003 le domicile conjugal au motif que son époux exerçait sur elle des violences conjugales ; qu'elle a d'ailleurs déposé plainte contre son mari ; qu'elle n'a sollicité une demande de titre de séjour que le 28 juillet 2004 à la suite de laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a le 10 novembre 2004 rejeté sa demande de titre de séjour au motif que l'intéressée ne justifiait pas d'une communauté de vie avec son époux ; que le moyen tiré de ce que le préfet aurait dû lui accorder le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées du 4° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 est inopérant dès lors que, n'ayant pas bénéficié à l'origine d'un titre de séjour en qualité de conjoint de ressortissant de nationalité française, elle ne pouvait en solliciter le renouvellement ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que si Mme X fait valoir qu'elle est entrée en France le 14 juin 2003, et que ses centres d'intérêts sont désormais en France auprès de sa soeur, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions du séjour de l'intéressée en France, l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 10 novembre 2004 n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la demande de Mme doit donc être rejetée ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt qui rejette la demande d'annulation de l'arrêté du 10 novembre 2004 du préfet de la Seine-Saint-DenisX n'appelle aucune mesure d' exécution ; que, dès lors, les conclusions de Mme X tendant à ce que soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance en date du 29 août 2005 du président de la troisième chambre du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.

Article 2 : La demande de Mme devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 05VE02249
Date de la décision : 28/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : BIERLING

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-06-28;05ve02249 ?
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