Vu la requête, enregistrée le 26 octobre 2005 au greffe de la Cour, présentée pour la société VIA TP, dont le siège est 4 rue Galilée à Vigneux-sur-Seine (91270), par Me Quibel ;
La société VIA TP demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0304142, en date du 19 juillet 2005, par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire du 8 août 2003 émis à son encontre par la commune de Quincy-sous-Sénart pour un montant de 20 182,57 euros, ainsi qu'à la condamnation de cette commune à lui verser une somme de 372,41 euros à raison de prestations effectuées ;
2°) de prononcer l'annulation du titre exécutoire susvisé et de condamner la commune de Quincy-sous-Sénart à lui payer la somme de 372,41 euros TTC ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Quincy-sous-Sénart, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le paiement de la somme de 1 525 euros pour la procédure de première instance et celle de 1 525 euros pour la procédure d'appel ;
Elle soutient que, s'agissant de la part de la commune de Quincy-sous-Sénart d'une action en répétition de l'indu, elle ne pouvait émettre un titre exécutoire sans qu'aient été constatées judiciairement les conditions de la répétition de l'indu prévues par les dispositions des articles 1235 et 1376 du code civil ; que le tribunal n'a pas répondu à cet argument soulevé par la société ; que le caractère forfaitaire du marché conclu ne peut pas être opposé à la société ; qu'en effet, il s'agit d'un marché forfaitaire « imparfait » qui autorise à tenir compte des plus ou moins-values et des travaux supplémentaires reconnus nécessaires ; que ces travaux supplémentaires ont été décidés au cours des réunions de chantier et approuvés par le maître d'oeuvre ainsi que par le maître de l'ouvrage et ont été réglés sans réserve par la commune, laquelle les a donc agréés ; que la société VIA TP reste créancière de la somme de 372,41 euros à raison de travaux supplémentaires ; que l'absence d'ordre de service est sans incidence en l'espèce ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2007 :
- le rapport de Mme Brin, président-assesseur ;
- les observations de Me Amathieu-Ruckert, substituant Me Pignot, pour la commune de Quincy-sous-Sénart ;
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation du titre exécutoire émis le 8 août 2003 à son encontre par la commune de Quincy-sous-Sénart, pour un montant de 20 182,57 euros, la société VIA TP soutenait devant le Tribunal administratif de Versailles, dans son mémoire en réplique du 27 juillet 2004, que le maire de cette commune ne pouvait émettre un tel titre sans que, préalablement, aient été constatées judiciairement les conditions de la répétition de l'indu prévues par les dispositions des articles 1255 et 1376 du code civil ; que, comme le fait valoir la société VIA TP, les premiers juges ont omis de répondre à ce moyen qui n'était pas inopérant ; que, par suite, il y a lieu d'annuler le jugement en date du 19 juillet 2005 en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de la société VIA TP tendant à l'annulation du titre exécutoire du 8 août 2003, d'évoquer et de statuer immédiatement sur lesdites conclusions présentées par la société devant le Tribunal administratif de Versailles ;
Sur les conclusions à fin d'annulation du titre exécutoire du 8 août 2003 :
Considérant que le titre exécutoire du 8 août 2003, dont le montant correspond à un « trop perçu injustifié pour les travaux de voirie 2001 », a été émis par le maire de la commune de Quincy-sous-Sénart, en application des dispositions de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales et en vertu des dispositions de l'article R. 2341-4 du code général des collectivités territoriales ;
Considérant qu'aux termes de cet article R. 2341-4 : « Les produits des communes (…) qui ne sont pas assis et liquidés par les services fiscaux de l'Etat en exécution des lois et règlements en vigueur sont recouvrés : - soit en vertu de jugements ou de contrats exécutoires ; - soit en vertu d'arrêtés ou de rôles pris ou émis et rendus exécutoires par le maire en ce qui concerne la commune (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales : « Constituent des titres exécutoires les arrêtés, états, rôles, avis de mise en recouvrement, titres de perception ou de recette que (…) les collectivités territoriales (…) délivrent pour le recouvrement des recettes de toute nature qu'ils sont habilités à recevoir » ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait que le maire ait arrêté, comme c'est le cas en l'espèce, le titre de recettes suffit à lui donner immédiatement force exécutoire ; que, par suite, la société VIA TP n'est pas fondée à soutenir que le titre exécutoire litigieux émis à son encontre en vue du reversement par elle d'un encaissement indu serait illégal au motif que les conditions de la répétition de l'indu n'auraient pas été constatées judiciairement ; que, dès lors, les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de ce titre exécutoire doivent être rejetées ;
Sur les conclusions indemnitaires :
Considérant que, par un marché conclu le 15 juin 2001 pour un montant forfaitaire de 1 489 559,40 francs TTC, le commune de Quincy-sous-Sénart a chargé la société VIA TP des travaux de réfection des trottoirs des rues Franklin Roosevelt, Jean Jaurès, du général Leclerc, de Jarcy, ainsi que des travaux de réfection de la rue Marx Dormoy et du parking rue de Brunoy ; que, par ordre de service du 16 juillet 2001, la commune a autorisé la société VIA TP à sous-traiter une partie des prestations à la société SRT pour un montant de 837 433,22 francs ; que la réception des travaux a été prononcée le 5 février 2002 et le projet de décompte final a été notifié le 29 mars 2002 par la société VIA TP à la commune de Quincy-sous-Sénart ; que ladite commune, comme il vient d'être dit, a émis le 8 août 2003 un titre exécutoire régulier à l'encontre de la société VIA TP pour un montant de 20 182,57 euros ;
Considérant que la société VIA TP, prétendant que la commune de Quincy-sous-Sénart n'est pas fondée à lui demander le reversement de cette somme de 20 182,57 euros, conclut à ce qu'elle lui soit remboursée et à ce que la commune lui verse, en outre, la somme de 372,41 euros ; que le montant total de l'indemnisation ainsi demandée correspond, selon la société requérante, au coût des prestations supplémentaires qu'elle a réalisées et facturées à la commune de Quincy-sous-Sénart dans le cadre du marché conclu le 15 juin 2001 ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, compte tenu du montant initial du marché, soit 1 489 559,40 francs et de celui des travaux sous-traités à la société SRT, soit 837 433,22 francs, il revenait 625 126,18 francs à la société VIA TP ; qu'il est constant que cette dernière a encaissé une somme de 132 288,82 francs (soit 20 182,57 euros) qui aurait dû, selon l'ordre de service du 16 juillet 2001, être versée à son sous-traitant, la société SRT ; qu'ainsi, la commune était fondée à émettre le titre exécutoire en date du 8 août 2003 d'un montant de 20 182,57 euros ;
Considérant, en deuxième lieu, que, comme il vient d'être dit, le montant du marché dévolu à la société VIA TP était de 1 489 559,40 francs TTC ; que le caractère forfaitaire du prix résulte de l'acte d'engagement du 15 juin 2001 ainsi que de l'article 3 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché ; qu'il résulte de l'instruction que ce prix forfaitaire a été dépassé de 151 307 francs TTC, soit une augmentation de 10,5 % ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, ni le caractère estimatif du détail quantitatif, ni le caractère actualisable des prix fermes, ni la circonstance que le compte-rendu de la première réunion de chantier du 28 juin 2001 a prévu que l'entreprise informera la commune des incidents pouvant modifier le coût initial du marché ne sont de nature à faire perdre au marché son caractère forfaitaire ;
Considérant, en dernier lieu, que les dispositions de l'article 15.3 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, auxquelles ne déroge pas le cahier des clauses administratives particulières applicable au marché dont s'agit, qui prévoient l'indemnisation des travaux supplémentaires réalisés au-delà de la masse initiale des travaux et sur ordre de service du maître d'ouvrage, pour des montants, dans le cas des marchés à prix forfaitaire, excédant le vingtième de la masse initiale, ne font pas obstacle à l'indemnisation des travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service du maître d'ouvrage, mais indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art, quel qu'en soit le montant ; qu'il est constant que les travaux supplémentaires dont se prévaut la société VIA TP n'ont fait l'objet d'aucun ordre de service notifié par la commune de Quincy-sous-Sénart ; que, par ailleurs, la société requérante, n'apporte aucun élément de nature à justifier que les prestations supplémentaires exposées par elle excédant le montant forfaitaire de son marché, non prévues au contrat, auraient été indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ; que, par suite, les conclusions indemnitaires de la société VIA TP ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les conclusions que présente à ce titre la société VIA TP, qui est la partie perdante, doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de la société VIA TP le paiement à la commune de Quincy-sous-Sénart de la somme de 1 500 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 03041142, en date du 19 juillet 2005, du Tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la demande de la société VIA TP tendant à l'annulation du titre exécutoire du 8 août 2003 émis à son encontre par la commune de Quincy-sous-Sénart, pour un montant de 20 182,57 euros.
Article 2 : Les conclusions de la demande de la société VIA TP tendant à l'annulation du titre exécutoire du 8 août 2003 émis à son encontre par la commune de Quincy-sous-Sénart, pour un montant de 20 182,57 euros sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société VIA TP est rejeté.
Article 4 : La société VIA TP versera à la commune de Quincy-sous-Sénart la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
05VE01962 2