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06/02/2007 | FRANCE | N°06VE00318

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 06 février 2007, 06VE00318


Vu la requête, enregistrée le 10 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0406103 en date du 4 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles la société Muir Beddall Mise avait été assujettie au titre des

exercices clos en 1999 et 2000 ;

2°) de remettre les impositions supplémentaires ...

Vu la requête, enregistrée le 10 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0406103 en date du 4 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles la société Muir Beddall Mise avait été assujettie au titre des exercices clos en 1999 et 2000 ;

2°) de remettre les impositions supplémentaires en litige à la charge de la société ;

Il soutient que le tribunal administratif a prononcé à tort la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés en litige résultant de la réintégration dans les résultats imposables de cette société de la renonciation anormale à recettes ayant pour origine le montant de l'indemnité d'occupation de l'immeuble situé 5 rue Edmond Blanc à La Celle-Saint-Cloud réclamée à Mme X ; qu'en application des dispositions de l'article 82 du code général des impôts, l'avantage de logement consentie à l'intéressée, associée de la société, doit être évalué, dans la mesure où la rémunération excède le plafond de la sécurité sociale, par référence à la valeur locative réelle ; que si une instruction du 31 mars 1976 a admis, à titre de règle pratique, que l'avantage de logement puisse être réputé égal à la valeur locative cadastrale et si lors d'un précédent contrôle, l'administration a, dans une réponse adressée le 6 janvier 1984 aux observations de M. X, appliqué cette règle pour l'imposition de l'avantage alors consenti par la même société à son salarié, Mme X qui ne se trouvait pas, en 1999 et 2000, dans la même situation de fait que celle évoquée dans la réponse de 1984 ne pouvait se prévaloir de cette prise de position formelle de l'administration ; que le tribunal, en faisant droit à cette argumentation fondée sur une doctrine administrative, a inexactement appliqué les dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; que l'indemnité d'occupation d'une maison de 220 m² mise à la disposition de Mme X a été limitée par la société propriétaire à 104 000 F par an en 1999 alors que la valeur locative réelle atteignait 301 416 F ; que la différence entre ces montants, pour les deux années 1999 et 2000 ont été à juste titre regardée comme une renonciation anormale à recettes et soumise à l'impôt sur les sociétés ; que la société qui était propriétaire d'un immeuble de même valeur qu'elle donnait en location pour un loyer de 234 144 F hors taxe par an, a ainsi minoré indûment ses recettes imposables et doit être regardée comme ayant tenté délibérément d'éluder l'impôt ; que les pénalités de mauvaise foi ont, par suite, été appliquées à bon droit ;

………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 janvier 2007 :

- le rapport de M. Evrard, président-assesseur

- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE relève appel du jugement en date du 4 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a fait droit aux conclusions de la société Muir Bedall Mise et a prononcé la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution supplémentaire à l'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des exercices clos en 1999 et 2000 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Muir Beddall Mise a mis à la disposition de M. X, salarié et associé, une maison d'habitation lui appartenant, sise à La Celle-Saint-Cloud ; qu'à la suite du décès de ce dernier en 1992, l'avantage de logement a été maintenu au profit de Mme X ; qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la société a fait l'objet, l'administration a regardé comme constituant une renonciation anormale à des recettes et a réintégré en conséquence dans les résultats sociaux soumis à l'impôt sur les sociétés, la différence entre le montant des recettes inscrites en comptabilité correspondant à l'indemnité d'occupation réclamée à Mme X, associée, pour les années 1999 et 2000, et la valeur locative réelle de l'immeuble mis à sa disposition ; que pour contester les impositions supplémentaires mises à sa charge, la société a opposé, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, la prise de position formelle contenue dans une réponse adressée par l'administration à M. X, le 6 janvier 1984, selon laquelle la valeur de l'avantage de logement devait être déterminée par référence à la valeur locative cadastrale de l'immeuble ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : « Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a. été, à l'époque, formellement admise par l'administration » , qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : « La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1°) lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal » ; que peuvent se prévaloir de cette dernière disposition les contribuables qui se trouvent dans la situation de fait sur laquelle l'appréciation invoquée a été portée ainsi que les contribuables qui ont participé à l'acte ou à l'opération qui a donné naissance à cette situation, sans que les autres contribuables puissent utilement invoquer une rupture à leur détriment du principe d'égalité ;

Considérant que pour prononcer, par le jugement attaqué, la décharge des impositions en litige, les premiers juges ont considéré que la société requérante était fondée à se prévaloir de la prise de position de l'administration dès lors qu'en sa qualité de propriétaire de l'immeuble et d'employeur de M. X, elle avait participé à l'acte ou à l'opération qui avait donné naissance à la situation de fait appréciée par l'administration ;

Considérant, toutefois, que la société Muir Beddall Mise ne se trouvait pas, en 1999 et 2000, dans une situation de fait au regard de la loi fiscale identique à celle sur laquelle le service s'est prononcé en 1984 dès lors, d'une part, que l'avantage de logement en litige n'était pas consenti à un salarié mais à un associé, d'autre part, que cet avantage ne comportait pas la gratuité totale du logement mais impliquait le paiement d'une indemnité d'occupation et enfin que la disposition fiscale à appliquer n'était pas l'article 82 du code général des impôts, mais l'article 39 du même code ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a estimé que la société requérante était fondée à invoquer la prise de position de l'administration pour prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel de statuer sur les moyens présentés par les parties tant en première instance qu'en appel ;

Sur l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 82 du code général des impôts : « Pour la détermination des bases d'imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés en sus des traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères proprement dits. Toutefois les logements mis à la disposition des personnels de la gendarmerie, dans les conditions prévues par l'article D 14 du code du domaine de l'État, ne sont pas considérés comme un avantage en nature. /L'estimation des rémunérations allouées sous la forme d'avantages en nature est faite d'après les évaluations prévues pour l'application aux salariés du régime de sécurité sociale lorsque le montant des sommes effectivement perçues en espèces par le bénéficiaire n'est pas supérieur au chiffre limite fixé pour le calcul des cotisations afférentes à ce régime d'assurances et, dans le cas contraire, d'après leur valeur réelle. » ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la valeur locative réelle de la maison d'habitation mise à la disposition de son associée par la société, déterminée par comparaison, s'élevait, pour les années 1999 et 2000 à 301 416 F et non à 104 000 F ; que c'est, par suite, à bon droit que l'administration a rapporté la différence entre ces sommes aux résultats sociaux des années vérifiées ;

Sur l'application de la doctrine administrative :

Considérant que si la société Muir Beddall Mise fait valoir que le service a estimé, le 6 janvier 1984, en se fondant sur l'instruction administrative 5-F-10-76 du 31 mars 1976, que l'avantage en nature de logement devait être évalué par référence à la valeur locative cadastrale de l'immeuble et non à celle de sa valeur locative réelle, la société qui ne se trouvait pas, au cours des années vérifiées, dans la situation de fait évoquée par cette prise de position, ne peut utilement invoquer, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 B, le bénéfice de cette mesure de faveur contraire aux dispositions de l'article 82 du code général des impôts ;

Sur les pénalités pour absence de bonne foi :

Considérant qu'en se bornant à soutenir que l'importance manifeste de la disproportion entre la valeur réelle du loyer et celle de l'indemnité réclamée à Mme X conduisait la société Muir Beddall Mise à minorer les recettes imposables et à éluder l'impôt, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'établit pas l'absence de bonne foi de la société qui s'est limitée, en l'espèce, à appliquer la doctrine de l'administration ; qu'il n'est par suite, pas fondé à demander que ces pénalités soient remises à la charge de la société contribuable ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est seulement fondé à demander la réformation du jugement attaqué et la remise à la charge de la société Muir Beddall Mise des impositions supplémentaires, en droits, dont elle a été déchargée ;

DECIDE :

Article 1er : La société Muir Beddal Mise est rétablie au rôle de l'impôt sur les sociétés au titre des années 1999 et 2000 à raison des cotisations supplémentaires qui lui ont été assignées, à l'exception des pénalités pour absence de bonne foi mises à sa charge.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 4 octobre 2005 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

N° 06VE00318 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 06VE00318
Date de la décision : 06/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GIPOULON
Rapporteur ?: M. Jean-Paul EVRARD
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : DECOOL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-02-06;06ve00318 ?
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