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14/12/2006 | FRANCE | N°05VE00831

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 14 décembre 2006, 05VE00831


Vu l'ordonnance du 28 avril 2005 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement de la requête de Mme Anne X, enregistrée le 23 décembre 2004 au secrétariat de la section du contentieux, à la Cour administrative d'appel de Versailles ;

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 9 mai 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentés pour Mme Anne X, demeurant ..., par la SCP Ancel et Couturier-Heller ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202316 du 30 septemb

re 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa dema...

Vu l'ordonnance du 28 avril 2005 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement de la requête de Mme Anne X, enregistrée le 23 décembre 2004 au secrétariat de la section du contentieux, à la Cour administrative d'appel de Versailles ;

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 9 mai 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentés pour Mme Anne X, demeurant ..., par la SCP Ancel et Couturier-Heller ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202316 du 30 septembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de deux décisions de France-Télécom, en date des 13 et 14 mai 2002, rejetant sa demande tendant à ce que sa carrière soit reconstituée rétroactivement, à ce qu'elle soit inscrite au tableau d'avancement et nommée au grade de directeur départemental, à ce que son dossier soit transmis en vue de la régularisation de sa situation administrative par le service des pensions et à ce qu'il soit versé une indemnité de 92 000 euros ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 13 mai 2002 ;

3°) d'enjoindre à France-Télécom de reconstituer sa carrière avec tous effets de droit ;

4°) de condamner France-Télécom à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement est insuffisamment motivé ; que sa carrière devait être reconstituée en tenant compte de « l'évaluation » de ses anciennes fonctions à un niveau supérieur et de ses droits à un avancement au choix; qu'elle a été intégrée au niveau IV-2 en 1993 alors que ses anciennes fonctions exercées jusqu'en 1991 étaient évaluées au niveau IV-3 ; que les premiers juges n'ont pas tenu compte de cette « évaluation » et n'ont pas statué sur sa reconstitution de carrière ; que le jugement est entaché d'une erreur de droit puisque « l'évaluation » de ses anciennes fonctions effectuées à la suite d'un précédent jugement du tribunal entraînait une modification du niveau de son intégration et la reconstitution de sa carrière ; que son intégration repose ainsi sur un classement erroné ; que, contrairement à ce qui a été jugé par le tribunal, France-Télécom a positionné les agents « à titre personnel » sur la grille de classification ; qu'elle ne saurait être regardée comme ayant accepté la proposition d'intégration notifiée le 14 janvier 1994, puisque cette proposition ne lui est pas opposable en l'absence « d'évaluation » préalable de ses fonctions et que la décision du 16 juillet 1992 sur laquelle l'intégration est fondée méconnaît l'instruction du 15 juillet 1992 qu'elle est censée appliquer; qu'en refusant de contrôler si les motifs de rejet de sa demande d'avancement au choix étaient entachés d'une erreur manifeste d'appréciation, les premiers juges ont commis une erreur de droit puisqu'elle disposait de chances sérieuses de promotion par rapport aux autres agents du fait que la seule condition de fond était de détenir le grade de directeur départemental adjoint depuis au moins le 31 décembre 1992, ce qui était son cas ; qu'au surplus, contrairement à ce qui a été jugé, elle a régulièrement adressé sa candidature à cette promotion au choix le 22 mars 1994, dans les délais fixés ; qu'elle était aussi concernée par une deuxième possibilité d'avancement au choix ouverte par France-Télécom le 31 août 1994 aux agents qui, comme elle, avaient auparavant occupé un poste de niveau statut de fonction ou de niveau IV-3 ;

…………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée ;

Vu le décret n° 93-517 du 25 mars 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 novembre 2006 :

- le rapport de Mme Kermorgant, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que les premiers juges, en statuant sur la légalité du refus d'intégration de Mme X au niveau IV-3, se sont bornés à interpréter la décision n° 1134 du président du conseil d'administration de France-Télécom en date du 16 juillet 1992, laquelle prévoit que seules les fonctions exercées au moment de l'intégration doivent être prises en compte ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'ils n'auraient pas tenu compte de l'évaluation de ses anciennes fonctions et auraient, de ce fait, insuffisamment motivé leur jugement manque en fait ;

Considérant, en second lieu, que le jugement statue, contrairement à ce que soutient Mme X, sur les conclusions relatives à la reconstitution de sa carrière en les rejetant en conséquence de ce qui a été jugé sur ses demandes d'intégration au niveau IV-3 et de promotion dans l'emploi de directeur départemental ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'une omission à statuer ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant que Mme X a occupé les fonctions de responsable de la gestion comptable et financière des produits au sein de la direction régionale des télécommunications d'Ile de France de 1983 jusqu'en avril 1991 ; qu'à la suite du changement de statut de France Télécom par la loi du 2 juillet 1990, son poste a été supprimé ; qu'elle a été affectée à compter du 1er mai 1991 au service de la division comptable et financière de la direction générale de France Télécom avec le grade de directeur départemental adjoint et y a exercé les fonctions d'auditeur expert ; qu'elle a été intégrée en janvier 1994 dans le grade de cadre supérieur (classe IV) de niveau 2 ; que Mme X a estimé que le classement ne prenait pas en compte le niveau de ses anciennes fonctions et a demandé à France Télécom de procéder à « l'évaluation » du poste qu'elle occupait avant le 1er mai 1991 ; qu'à la suite du refus de France Télécom de procéder à cette « évaluation » et de la saisine du tribunal administratif qui a annulé ce refus, France Télécom par décision en date du 18 mai 1999 a classé le poste occupé par Mme X jusqu'au 30 avril 1991 au niveau IV-3 de la grille de classification ; que Mme X a alors demandé à France Télécom de reconstituer sa carrière à compter de janvier 1993, de l'inscrire au tableau d'avancement et de la nommer au grade de directeur départemental ; qu'à la suite du refus de la société, Mme X a saisi le Tribunal administratif de Versailles qui a rejeté sa demande par un jugement dont il est fait appel ;

Considérant qu'aux termes de l'article 21 du décret du 25 mars 1993 susvisé : « Pendant une période de cinq ans à compter de la date d'effet du présent décret, les fonctionnaires de La Poste et de France Télécom qui exercent l'une des fonctions correspondant à l'un des grades des corps régis par le présent décret, telle que cette correspondance est établie comme il est dit à l'article 4 ci-dessus, ont vocation à être intégrés dans ce grade.(…) Chaque exploitant public, après avis de la commission paritaire spéciale d'intégration, notifie au fonctionnaire remplissant les conditions fixées au premier alinéa ci-dessus, une proposition d'intégration. Un délai d'option d'une durée d'un mois à compter de la date à laquelle ils reçoivent la notification de cette proposition, est ouvert aux intéressés pour accepter cette intégration… » ; qu'aux termes de l'article 4 du même décret, auquel renvoie l'article 21 précité : « Une décision du président du conseil d'administration de l'exploitant public concerné fixe la liste des différentes spécialités professionnelles exercées par les membres des corps régis par le présent décret et définit les fonctions correspondant à chacun des grades de ces corps » ; qu'aux termes des dispositions de la décision n° 1134 du président du conseil d'administration de France-Télécom en date du 16 juillet 1992 : « Lorsque la fonction de rapprochement du poste tenu est d'un niveau inférieur à celui de la fonction de rapprochement du poste précédent, la reclassification s'opère sur le poste tenu et une priorité est accordée pour un poste du niveau de l'ancien poste, avec effet rétroactif de cette mesure à la date de reclassification du niveau concerné. »;

Considérant que si la décision du 16 juillet 1992 du président du conseil d'administration ne permettait pas à Mme X, du fait de son affectation au 1er mai 1991 sur un poste d'auditeur expert relevant du niveau IV-2, d'être intégrée dans les nouveaux corps de France-Télécom à partir de 1993 au niveau IV-3, même si les fonctions qu'elle avait exercées antérieurement à son affectation sur ce poste au 1er mai 1991 relevaient du niveau IV-3, elle lui ouvrait une priorité pour accéder à un emploi du niveau IV-3, conforme à « l'évaluation » ordonnée par le Tribunal administratif de Versailles le 3 juillet 1998 ; qu'il n'est pas contesté que la société France-Télécom a ouvert en 1994 un tableau complémentaire d'avancement pour le grade de directeur départemental au titre de l'année 1993 aux cadres de niveau IV-2 à condition qu'ils aient auparavant occupé un poste de niveau de IV-3 ; que Mme X, qui remplissaient ces conditions, bénéficiait ainsi d'une priorité pour accéder à un poste de niveau supérieur et pouvait prétendre à être inscrite à ce titre sur ce tableau complémentaire ; qu'il s'ensuit que la société France-Télécom, en n'inscrivant pas Mme X sur le tableau d'avancement au grade de directeur départemental, a privé l'intéressée d'une priorité pour être promue au grade supérieur avant son admission à faire valoir ses droits à la retraite en 1996 ; qu'ainsi, c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a estimé que la société n'avait pas commis d'erreur de droit en refusant d'inscrire la requérante sur le tableau complémentaire d'avancement pour l'année 1993 et en lui refusant le bénéfice de la priorité d'avancement prévue par les dispositions précitées de la décision du président du conseil d'administration de France Télécom du 16 juillet 1992 ; que, par suite, la décision du 13 mai 2002 doit être annulée en tant qu'elle refuse d'inscrire Mme X sur le tableau d'avancement et qu'elle rejette sa demande de promotion et de reconstitution de carrière en conséquence de ce refus, alors même que la requérante ne peut se prévaloir d'un droit acquis à un avancement au choix ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que si l'annulation, par le présent arrêt, de la décision refusant d'inscrire la requérante sur le tableau d'avancement à l'emploi de directeur départemental n'impose à l'administration ni de la promouvoir au grade de cadre supérieur de niveau IV-3 pour l'année 1993 ni de reconstituer sa carrière en conséquence d'une telle promotion, elle implique, en revanche, que les droits à l'avancement au choix de Mme X et, le cas échéant, à reconstitution de carrière soient à nouveau examinés dès lors qu'elle remplissait les conditions pour obtenir une telle promotion ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre à la société France-Télécom de procéder à ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X, qui n'a pas repris ses conclusions de première instance tendant à l'allocation d'une indemnité et à la révision de ses droits à pension, est seulement fondée à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 mai 2002 refusant de l'inscrire sur le tableau d'avancement à l'emploi de directeur départemental et rejetant ses demandes de promotion et de reconstitution de carrière ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de condamner la société France-Télécom à verser à Mme X la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions de la société France-Télécom tendant au bénéfice de ces mêmes dispositions ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0202316 du 30 septembre 2004 du Tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la requête de Mme X tendant à l'annulation de la décision du 13 mai 2002 refusant de l'inscrire sur le tableau d'avancement au grade de directeur départemental et rejetant par voie de conséquence de ce refus ses demandes de promotion et de reconstitution de carrière.

Article 2 : Il est enjoint à la société France-Télécom de réexaminer la situation de Mme X au regard des chances de promotion au choix pour 1993 dans le grade de directeur départemental et de reconstituer, le cas échéant, sa carrière.

Article 3 : La société France-Télécom versera à Mme X une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions de la société France-Télécom tendant au bénéfice des dispositions de l'article L . 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

N° 05VE00831 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 05VE00831
Date de la décision : 14/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: Mme Martine KERMORGANT
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : SCP ANCEL,COUTURIER-HELLER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-12-14;05ve00831 ?
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