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29/06/2006 | FRANCE | N°02VE02587

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 29 juin 2006, 02VE02587


Vu l'arrêt du 31 mars 2005, par lequel la Cour, avant de statuer sur la requête présentée pour M. X, par Me Quemoun, enregistrée le 18 juillet 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, puis le 1er septembre 2004 au greffe de la cour de céans sous le n° 02VE02587, et sur les conclusions de l'appel incident de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, a ordonné une expertise médicale ;

Vu le rapport d'expertise du professeur Y, enregistré le 25 janvier 2006 ;

Vu l'ordonnance du 16 mars 2006 par laquelle le président de la Cour a liquidé et taxé les fra

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Vu l'arrêt du 31 mars 2005, par lequel la Cour, avant de statuer sur la requête présentée pour M. X, par Me Quemoun, enregistrée le 18 juillet 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, puis le 1er septembre 2004 au greffe de la cour de céans sous le n° 02VE02587, et sur les conclusions de l'appel incident de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, a ordonné une expertise médicale ;

Vu le rapport d'expertise du professeur Y, enregistré le 25 janvier 2006 ;

Vu l'ordonnance du 16 mars 2006 par laquelle le président de la Cour a liquidé et taxé les frais et honoraires de l'expertise à la somme de 1 400 € TTC et a mis ces frais et honoraires à la charge de M. X ;

……………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 juin 2006 :

- le rapport de M. Blin, président-assesseur ;

- les observations de Me Quemoun, pour M. X et celles de Me Tsouderos, pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 21 mai 2002, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à verser à M. X la somme de 23 000 € en réparation du préjudice qu'il a subi du fait d'une faute commise par l'hôpital Jean verdier de Bondy ; que M. X demande que l'indemnité qui lui a été allouée soit portée à 231 800 € ; que par la voie de l'appel incident, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris demande l'annulation de ce jugement ainsi que le rejet de la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X a donné naissance à Ludovic X le 3 février 1979 à l'hôpital Jean Verdier de Bondy, lequel n'a pas de personnalité juridique distincte de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ; qu'à sa naissance, à la suite d'un accouchement prématuré à 34 semaines et d'un travail de cinq heures, Ludovic X est né cyanosé avec une détresse respiratoire ; que, malgré la prise en charge de cette détresse respiratoire au centre hospitalier Jean Verdier de Bondy et son transfert au service de réanimation néonatale de Montreuil, Ludovic X demeure atteint du syndrome de Little ; qu'il ressort du rapport d'expertise du professeur Jacques Y que, pour toutes les maternités en 1978 et 1979, « la bonne pratique consistait à transporter par SAMU vers les services de réanimation néonatale non pas les mères mais les nouveau-nés très prématurés ou atteints de souffrance néonatale. », que l'organisation des soins obstétricaux actuels n'exige l'orientation vers une maternité dotée d'un service de réanimation néonatale que pour les naissances de moins de 32 semaines, sauf malformations foetales qui requièrent une prise en charge immédiate spécialisée et qu'« on ne peut donc pas reprocher au centre hospitalier Jean Verdier de Bondy de n'avoir pas fait transférer Mme X près d'un service de réanimation néonatale. » ; que dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a jugé que la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris était engagée au motif que le centre hospitalier Jean Verdier avait commis une faute en ne prévoyant pas un accouchement à proximité immédiate d'une unité de soins spécialisés ou en n'organisant pas, durant l'accouchement, un transfert in utero de l'enfant ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le juge de première instance ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du professeur Y assisté du Dr Z et du Dr A, que si Ludovic présentait une cyanose généralisée à la naissance avec un coefficient d'Apgar coté à cinq à une minute, il a été ventilé au masque ; qu'à trois minutes le coefficient d'Apgar était coté à 7, puis à 9 à cinq minutes ; qu'une radiographie pulmonaire a été faite à 30 minutes de vie ; que si le SAMU n'a été appelé qu'à 9 h 30, soit une heure après la naissance, Ludovic avait à 10 h un état métabolique parfait ; que les examens réalisés alors excluent que le syndrome neurologique dont il souffre soit la conséquence d'une hypoxie néonatale sévère et prolongée ; qu'il résulte également du rapport des mêmes experts qu'en l'absence des documents retraçant le monitorage, il n'existe aucune preuve d'une asphyxie foetale survenue pendant le travail ; qu'en particulier, il existe des signes contraires à l'existence d'une telle asphyxie, tels que la clarté du liquide amniotique et le score de vitalité néonatale d'Apgar à cinq minutes, ainsi que l'absence d'encéphalopathie précoce ; qu'ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que, soit durant la prise en charge de l'accouchement, soit durant le travail de Mme X, soit encore durant la prise en charge néonatale de Ludovic, le centre hospitalier Jean Verdier de Bondy aurait commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;

Considérant que la circonstance que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ne soit pas en mesure, plus de 20 ans après les faits en litige, de produire les documents du monitorage de l'accouchement ne peut être regardé en l'espèce comme une faute de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant enfin que la circonstance que les médecins du centre hospitalier de Montreuil n'auraient pas posé un diagnostic correct après avoir constaté l'existence d'un valgus du pied de M. X n'est pas de nature, en tout état de cause, à engager la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris dès lors que le centre hospitalier de Montreuil possède une personnalité juridique distincte de celle de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;

Sur le défaut d'information :

Considérant que M. X n'est pas fondé à invoquer les dispositions de l'article L. 111-2 du code de la santé publique issu de la loi du 4 mars 2002, qui n'étaient pas applicables en 1979 ; que, toutefois, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le lien de causalité entre, d'une part, l'accompagnement médical de la grossesse et l'accouchement de Mme X au centre hospitalier de Bondy, d'autre part, le préjudice subi par M. X soit établi ; que, dès lors, en tout état de cause, M. X n'est pas fondé à soutenir que la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris serait engagée sur le fondement d'un défaut d'information ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est fondée à demander l'annulation du jugement du 21 mai 2002 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant que par ce jugement le Tribunal administratif l'a condamnée à verser à M. X la somme de 23 000 €, d'autre part, que M. X n'est pas fondé à demander que lui soit allouée une somme de 231 800 € ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : «Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. /Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties./L'Etat peut être condamné aux dépens. » ;

Considérant que dans les circonstances particulières de l'affaire, il y a lieu de mettre les frais d'expertise à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 un du code de justice administrative : «Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;

Considérant qu'en application desdites dispositions, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : L'article premier du jugement du 21 mai 2002 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La requête de M. X est rejetée.

Article 3 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 4 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 400 € TTC sont mis à la charge définitive de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

Article 5 : Le surplus des conclusions de l'appel incident de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est rejeté.

Article 6 : Les conclusions des parties relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 02VE02587
Date de la décision : 29/06/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre BLIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : QUEMOUN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-06-29;02ve02587 ?
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