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26/05/2006 | FRANCE | N°05VE00852

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites a la frontiere, 26 mai 2006, 05VE00852


Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2005, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0408530 du 29 mars 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 28 octobre 2004 décidant la reconduite à la frontière de Melle X ;

2°) de rejeter la demande présentée par Melle X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Il soutient que le premier juge a commis une erreur de droit en considéran

t que les documents fournis par Melle X permettaient d'établir de manière probante la ...

Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2005, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0408530 du 29 mars 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 28 octobre 2004 décidant la reconduite à la frontière de Melle X ;

2°) de rejeter la demande présentée par Melle X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Il soutient que le premier juge a commis une erreur de droit en considérant que les documents fournis par Melle X permettaient d'établir de manière probante la présence continue en France de l'intéressée depuis plus de dix ans ; que Melle X ne pouvait prétendre de plein droit à l'obtention d'un titre de séjour en application des dispositions de l'article 12 bis 3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que la mesure de reconduite à la frontière a été signée par une autorité compétente ; que la décision attaquée est suffisamment motivée ; qu'il n'a pas commis d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressée ; que l'arrêté de reconduite à la frontière ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

…………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2006 :

- le rapport de M. Martin, magistrat délégué ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : « Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Melle X, de nationalité colombienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 15 septembre 2004, de la décision du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” est délivrée de plein droit : (...) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant. Les années durant lesquelles l'étranger s'est prévalu de documents d'identité falsifiés ou d'une identité usurpée ne sont pas prises en compte. (...) » ;

Considérant qu'indépendamment de l'énumération faite par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris en dehors des cas d'urgence absolue ou de nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à la frontière à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi ou une convention bilatérale prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite ;

Considérant que pour annuler l'arrêté en date du 28 octobre 2004 par lequel le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a prononcé la reconduite à la frontière de Melle X, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a considéré que l'intéressée justifiait de dix ans de présence habituelle en France ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à supposer que les pièces produites par Melle X soient suffisamment probantes pour justifier d'une présence habituelle en France de l'intéressée depuis février 1995, elle ne détenait pas, en tout état de cause, à la date de l'arrêté du 28 octobre 2004, dix ans de présence habituelle en France ; qu'il suit de là que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté litigieux ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Melle X devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'arrêté du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS n° 04-2137 en date du 17 mai 2004 publié au numéro spécial du 26 mai 2004 du bulletin d'informations administratives de la préfecture de la Seine-Saint-Denis, Mme Dominique Y, directeur des étrangers, a reçu délégation de signature pour signer : les arrêtés de reconduite à la frontière ( . . . ) ; qu'ainsi le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté litigieux, en relevant que l'intéressée s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification du refus de lui accorder un titre de séjour, que la présente mesure ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits de l'intéressée et notamment à sa vie familiale et en mentionnant l'article 22-I-3°, 22 bis, 27 bis et 27 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lequel il se fonde et est ainsi suffisamment motivé ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué ne saurait être accueilli ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Melle X, née le 29 décembre 1957, est entrée à l'âge de 37 ans en France où elle vit avec sa soeur ; que, toutefois, elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où vivent ses deux enfants majeurs, ses parents et ses deux frères ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de l'âge de l'intéressée, des conditions de son séjour en France, l'arrêté du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS en date du 28 octobre 2004 n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, la mesure d'éloignement n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cet arrêté n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 28 octobre 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de Melle X ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 29 mars 2005 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Melle X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

N°05VE00852

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05VE00852
Date de la décision : 26/05/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : BESSE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-05-26;05ve00852 ?
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