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26/05/2006 | FRANCE | N°03VE03423

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 26 mai 2006, 03VE03423


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une Cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R.221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, pris en la personne du président du conseil général,

par Me X... ;

Vu ladite requête, enregistrée le 25 août 200...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une Cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R.221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, pris en la personne du président du conseil général, par Me X... ;

Vu ladite requête, enregistrée le 25 août 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, par Me X... ; le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9800794 du Tribunal administratif de Versailles du 6 mai 2003 qui rejette sa requête tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Essonne du 17 novembre 1997 refusant de procéder à l'inscription d'office au budget 1997 de la commune de Ris-Orangis de la somme de 4 214 750 francs représentant l'échéance du 25 mai 1981 des emprunts contractés par la Société d'économie mixte pour l'aménagement de la Seine-et-Oise (SEMEASO) que le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE a garantis ;

2°) d'annuler la décision du préfet de l'Essonne du 17 novembre 1997 refusant de procéder à l'inscription d'office au budget 1997 de la commune de Ris-Orangis de la somme de 4 214 750 francs représentant l'échéance du 24 mai 1981 des emprunts contractés par la SEMEASO que le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE a garantis ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser 4 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Il soutient que le département ayant payé l'échéance du 25 mai 1981, il est fondé à obtenir le remboursement de cette échéance de la commune de Ris-Orangis qui a été substituée à la SEMEASO par l'acte du 2 juillet 1985 ; que le département de l'Essonne a saisi à deux reprises la chambre régionale des comptes qui, dans un avis du 1er juillet 1996 a constaté que la commune s'est effectivement substituée à la SEMEASO par l'effet de la convention du 2 juillet 1985 ; que dans son avis du 10 juillet 1997 elle a constaté que la somme de 4 214 750 francs réglée par le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE au profit de la caisse des dépôts et consignations constitue une créance de celui-ci sur la commune de Ris-Orangis et présente un caractère obligatoire ; que la chambre régionale des comptes a mis en demeure la commune d'ouvrir les crédits nécessaires ; que devant son refus le département a saisi le préfet de l'Essonne afin qu'il procède à leur inscription d'office ; que la caisse des dépôts et consignations a imputé le paiement de la somme de 4 214 750 francs effectué le 7 septembre 1982 par le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE sur l'échéance du 25 mai 1981 et le paiement d'une somme de même montant, effectué le 9 juillet 1982 par la ville de Ris-Orangis, sur l'échéance du 25 mai 1982 comme la caisse de dépôts l'a indiqué dans sa lettre du 26 août 1996 au président du conseil général ; qu'en versant le reliquat de 93 750 francs la commune a donné son accord à cette affectation des sommes mandatées par elle ; que la caisse des dépôts s'est conformée aux règles d'imputation des paiements et aux règles de la comptabilité publique ; que l'affectation effective du paiement de la commune sur la créance de 1982 est incontestable ; que la liberté du débiteur cesse lorsque l'usage qu'il désire en faire porte atteinte aux prérogatives du créancier ; qu'en indiquant le 13 mai 1982 qu'il acquittait la dette du 25 mai 1981 le département a usé de son droit de s'acquitter de la dette de son choix au titre de l'article 1253 du code civil ; qu'un accord est manifestement intervenu sur l'imputation faite par la caisse des dépôts du paiement de la commune ; que le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE a droit au remboursement en sa qualité de subrogé dans les droits de la caisse des dépôts et consignations en application des articles 1249 et suivants du code civil ainsi que l'a d'ailleurs jugé le Conseil d'Etat le 30 novembre 2004 par une décision transposable à la créance litigieuse ; que la convention du 2 juillet 1985 stipule que la commune s'est engagée à prendre à sa charge la totalité du passif connu ou à connaître ; que le département dispose d'une action directe contre la commune ; qu'en tout état de cause, la créance a été produite au syndic de la liquidation des biens de la SEMEASO ; que la créance est certaine, liquide et exigible ;

………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi du 31 décembre 1968 ;

Vu la loi n°82-218 du 2 mars 1982 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2006 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller ;

- les observations de Me Y..., substituant Me X..., pour le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la Société d'économie mixte pour l'aménagement de la Seine-et-Oise (SEMEASO), à laquelle la commune de Ris-Orangis avait concédé la réalisation d'une opération de rénovation urbaine a contracté, le 19 juillet 1978, pour les besoins de cette opération, deux emprunts, cautionnés par la commune ainsi que par le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, auprès de la caisse des dépôts et consignations ; que la caution apportée par le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE à la société résultait d'une convention signée entre les parties le 13 juillet 1978 dont l'article 4 précise que si la société ne réglait pas ses dettes, « le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE effectuera ce règlement entre les mains des prêteurs au lieu et place de la société dans la mesure des insuffisances constatées. Ce règlement constituera le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE créancier de la société » ; que la liquidation des biens de la société ayant été prononcée par le Tribunal de commerce de Versailles le 21 juillet 1981, le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE a été saisi à titre de garant par la caisse des dépôts et consignations d'une demande de paiement d'une annuité d'emprunt venue à échéance en mai 1981 et a, par mandat encaissé le 7 septembre 1982, réglé la somme de 4 214 750 francs correspondant à cette échéance ; qu'une convention du 2 juillet 1985 a été conclue entre la commune et la SEMEASO organisant un transfert du passif et de l'actif au profit de la commune ; que le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE estimant que la commune était devenue sa débitrice de cette somme qu'il avait réglée à sa place a saisi la chambre régionale des comptes aux fins que lui soit payée sa créance ; qu'à la suite de l'avis favorable émis par la chambre régionale des comptes en 1997, le préfet, qui a estimé ne pas devoir suivre cet avis, a refusé d'inscrire cette créance en dépense obligatoire sur le budget de la commune ; que le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE demande l'annulation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Versailles a refusé d'annuler la décision du préfet ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des mémoires produits devant les premiers juges que le préfet de l'Essonne avait soutenu devant le Tribunal administratif de Versailles que la commune de Ris-Orangis avait, dans une affaire distincte enregistrée devant le Tribunal administratif de Paris, opposé la prescription quadriennale de la créance qui fait l'objet du présent litige ;

Considérant que le juge d'appel, auquel est déféré un jugement ayant rejeté au fond des conclusions sans que le juge de première instance ait eu besoin de statuer sur une opposition de prescription présentée devant lui, ne peut faire droit à ces conclusions qu'après avoir statué sur cette opposition, alors même que le défendeur, sans pour autant l'abandonner, ne l'aurait pas reprise en appel ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements les communes et les établissements publics que seul le maire auquel incombe le règlement d'une dette de la commune sur les crédits dont il a la gestion peut opposer, le cas échéant, la prescription prévue par la loi ; qu'il est constant que la prescription a été opposée par le préfet de l'Essonne ; que par suite les conclusions tendant à l'application de la prescription quadriennale à la créance du DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, présentées par le préfet de l'Essonne qui n'a pas qualité pour les introduire, ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1165 du code civil : « Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent pas au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 », où il bénéficie d'une stipulation faite pour autrui ; que le tiers dispose, dans ce cas, d'une action directe contre le promettant ; que la même action appartient à la caution qui, ayant payé pour la dette du promettant, est subrogée, en vertu de l'article 2029 du code civil, à tous les droits du créancier contre le débiteur principal ; qu'il résulte des stipulations des deux conventions dont la teneur est ci-dessus rappelée que la commune de Ris-Orangis était devenue à compter du 2 juillet 1985 débitrice du DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, subrogé dans les droits de la caisse des dépôts et consignations à hauteur des sommes qu'il avait réglées à titre de garant au lieu et place de la SEMEASO ; que ces stipulations font obstacle à ce que le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, qui est intervenu à titre de garant au regard des obligations qu'il avait contractées, soit regardé comme ayant versé cette somme à titre de libéralité ; qu'eu égard aux indications de la caisse des dépôts et consignations et à la décision prise par le département le 2 juillet 1982 de payer en exécution de son engagement de caution l'échéance de 1981, il ne résulte pas de l'instruction que le règlement de la somme de 4 215 750 francs ait en réalité porté sur l'échéance de 1982 payée par la commune ; que la circonstance que la caisse des dépôts et consignations ait produit au syndic de la liquidation de la SEMEASO les sommes restant dues à cette date par la SEMEASO, et notamment celle de 4 214 750 francs dues au titre des échéances des prêts du 25 mai 1981, est sans influence sur la solution du litige ; que si le préfet fait valoir, en outre, que la créance n'a pas été recensée dans le passif de la SEMEASO dans la convention de 1985, il résulte des termes mêmes de cette convention que la SEMEASO a transmis à la commune l'ensemble de l'actif et du passif de la société concernant les programmes de rénovation de la ville de Ris-Orangis et ce quand bien même « certains éléments d'actif ou de passif n'auraient pas été désignés dans le présent acte en raison d'un oubli ou de difficulté des parties à établir leurs créances » ; que par suite le préfet ne peut utilement faire valoir que la créance du DEPARTEMENT DE L'ESSONNE serait éteinte du fait de l'abstention de celui-ci à en réclamer le paiement ; qu'à supposer que le préfet invoque, en l'espèce, la prescription quadriennale, il n'aurait, en tout état de cause, et comme il a été dit ci-dessus, pas qualité pour le faire ; qu'il résulte de ce qui précède que la somme en cause doit être regardée comme ayant pour la commune de Ris-Orangis le caractère d'une dette certaine et exigible ; qu'il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du préfet refusant d'inscrire cette dépense obligatoire au budget 1997 de la commune de Ris-Orangis ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer au DEPARTEMENT DE L'ESSONNE une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°9800794 du Tribunal administratif de Versailles du 6 mai 2003 et la décision du préfet de l'Essonne du 17 novembre 1997 refusant de procéder à l'inscription au budget 1997 de la commune de Ris-Orangis de la somme de 4 214 750 francs représentant l'échéance du 24 mai 1981 des emprunts contractés par la SEMEASO que le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE a garantis sont annulés.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser au DEPARTEMENT DE L'ESSONNE une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 03VE03423
Date de la décision : 26/05/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : GUENAIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-05-26;03ve03423 ?
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