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04/05/2006 | FRANCE | N°04VE01980

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 04 mai 2006, 04VE01980


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Annie-Claude X, demeurant ..., par Me Olivier Denis ;

Vu la requête, en

registrée le 7 juin 2004 au greffe de la Cour administrative d'ap...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Annie-Claude X, demeurant ..., par Me Olivier Denis ;

Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle Mme Annie-Claude X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304752 - 0304755 - 0304756 du 19 février 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions des 3 et 30 juillet 1998, du 27 août 1998, du 6 novembre 1998 et du 10 mai 1999 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) de condamner La Poste à lui verser une somme de 1 525 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle avait opté en 1985 pour conserver le bénéfice de la titularisation en attendant que le Conseil d'Etat détermine si les agents à temps incomplet de La Poste avaient vocation à être titularisés au même titre que les agents à temps complet ; qu'une circulaire du 25 juillet 1997 précise que les agents remplissant les conditions se verront proposer un poste parmi les postes vacants offerts au recrutement au sein de la délégation Ile-de-France dans le cadre des règles du comblement des postes mis en oeuvre en 1997 ; qu'ainsi une titularisation lui a été proposée avec un choix de mutation entre huit départements alors qu'elle avait demandé à être titularisée dans l'emploi qu'elle occupait à Petite Forêt ; que le refus de la titulariser est illégal ; qu'elle devait bénéficier des conditions faites aux agents titularisés en 1985 dont certains l'ont été sur place ; que le plan de comblement des postes en Ile-de-France de 1997 ne saurait lui être applicable, aucune disposition légale ne justifiant la mutation qu'on lui impose pour être titularisée ; que cette mutation forcée, non prévue par la loi, constitue un détournement de pouvoir puisque rien ne s'opposait à ce qu'elle soit titularisée sur place et a été prise en raison du recours qu'elle a introduit ; que cette mutation n'est pas justifiée par les besoins du service ; que les emplois proposés ne sont plus les mêmes depuis 1985 ; que sa situation personnelle a aussi changé ; que le jugement est irrégulier dès lors qu'il ne répond pas à son argumentation de première instance ; que, contrairement aux stipulations de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni le rapport ni les conclusions ne lui ont été communiqués afin qu'il puisse en être débattu contradictoirement ;

………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 85-1158 du 30 octobre 1985 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 avril 2006 :

- le rapport de Mme Kermorgant, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X a été recrutée en 1978 par La Poste et affectée comme agent de distribution à temps incomplet au bureau de Petite Forêt en 1996 ; qu'elle a opté pour conserver le bénéfice de la titularisation qui lui a été refusée en 1985 au motif qu'elle occupait un emploi à temps incomplet ; que La Poste lui ayant fait connaître sa décision de la titulariser sur un emploi dans un département d'Ile-de-France, Mme X a demandé, le 12 juin 1998, à être titularisée sur le poste qu'elle occupait ; que, par lettre du 2 juin 1998, La Poste a confirmé à l'intéressée que sa titularisation serait prononcée sur un poste vacant en Ile-de-France et lui a précisé, par lettre du 3 juillet 1998, confirmée le 30 juillet suivant, qu'elle serait affectée dans le département de l'Essonne à compter du 1er septembre 1998 ; que la date de cette affectation ayant été reportée à deux reprises, La Poste a, le 6 novembre 1998 et le 10 mai 1999, pris acte de son refus d'être titularisée au motif que Mme X n'avait pas pris ses fonctions dans sa nouvelle affectation en Ile-de-France ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, que si Mme X soutient que les premiers juges n'ont pas répondu à son argumentation de première instance, il ressort du jugement attaqué du 19 février 2004 que les premiers juges ont expressément écarté tous les moyens de la requérante ; que, par suite, ledit jugement est suffisamment motivé et n'est pas entaché d'irrégularité pour omission à statuer ;

Considérant, en second lieu, que si Mme X soutient que le rapport et les conclusions visés par le jugement ne lui ont pas été « notifiés », contrairement à ce que, selon la requérante, imposeraient les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort, d'une part, des mentions du dit jugement, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, que le dit rapport et les conclusions ont été lus lors de l'audience à laquelle la requérante n'était pas présente ; que, d'autre part, elle ne soutient ni avoir demandé communication du sens des conclusions du commissaire du gouvernement ni s'être vue refuser une telle communication avant l'audience ; que, par suite, le jugement n'est entaché d'aucune irrégularité ;

Sur le bien-fondé :

Considérant qu'aux termes de l'article 73 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : « Les agents non titulaires qui occupent un emploi présentant les caractéristiques définies à l 'article 3 du titre Ier du statut général ont vocation à être titularisés, sur leur demande, dans des emplois de même nature qui sont vacants ou qui seront créés par les lois de finances, sous réserve : 1°) soit d'être en fonctions à la date de publication de la loi du 11 juin 1983, soit de bénéficier à cette date d'un congé en application du décret n° 80-552 du 15 juillet 1980 relatif à la protection sociale des agents non titulaires de l'Etat…2°) d'avoir accompli, à la date du dépôt de leur candidature, des services effectifs d'une durée équivalente à deux ans au moins de services à temps complet dans un des emplois susindiqués ; 3°) de remplir les conditions énumérées à l'article 5 du titre Ier du statut général » ; qu'aux termes de l'article 83 de la loi du 11 janvier 1984 : « …dans l'intérêt du service, des agents peuvent être titularisés sur place. » ; qu'enfin, aux termes de l'article 1er du décret du 30 octobre 1985 fixant les conditions exceptionnelles d'intégration de personnels non titulaires au ministère des P.T.T. : « Les auxiliaires du ministère des P.T.T. qui occupent un emploi présentant les caractéristiques définies à l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée et qui remplissent les conditions énumérées à l'article 73 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ont vocation à être titularisés, sur leur demande, dans un corps de fonctionnaires de catégorie D… » ;

En ce qui concerne les refus du 3 et du 30 juillet 1998 opposés à la demande de titularisation sur place :

Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'ouvre au profit des agents titularisés en vertu des dispositions précités de l'article 73 de la loi du 11 janvier 1984 un droit à être nommés sur place ; que l'affectation des agents titularisés doit être prononcée en considération de l'intérêt du service, lequel peut permettre qu'une titularisation soit, à titre dérogatoire, prononcée sur place ainsi que le prévoit l'article 83 précité de cette même loi ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme X demande à ce que la circulaire de La Poste du 2 août 1985 lui soit appliquée au même titre qu'aux agents titularisés en 1985 qui ont pu bénéficier d'une titularisation sur place ; que, d'une part, la requérante n'est pas fondée, au seul motif qu'elle avait opté en 1985 pour conserver le bénéfice d'une titularisation, à se prévaloir d'une circulaire qui n'est, en tout état de cause, plus en vigueur à la date des décisions attaquées ; que, d'autre part, Mme X n'est pas fondée à soutenir que le refus de titularisation sur place qui lui a été opposé le 30 juillet 1998 méconnaîtrait le principe d'égalité entre les agents titularisés en 1985 et les autres, ces derniers n'étant pas placés dans une situation juridique identique ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que si Mme X soutient que, pour l'affecter dans l'Essonne, La Poste ne se serait pas fondée sur des considérations tirées de l'intérêt du service, cette circonstance est sans incidence sur le refus de la titulariser sur place ; que l'article 83 précité de la loi du 11 janvier 1984 subordonnant la titularisation sur place à l'intérêt du service, Mme X n'établit pas que sa titularisation devait être prononcée à titre dérogatoire sur place en se bornant à faire valoir la nécessité de son remplacement sur le poste libéré à la suite de son départ alors même que La Poste n'est tenue ni de pourvoir ledit poste, ni de l'affecter en priorité à la requérante ;

Considérant, en quatrième lieu, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant, enfin, que si Mme X invoque sa situation familiale et les difficultés que lui pose une affectation éloignée de son domicile, ces considérations, étrangères à l'intérêt du service, ne sauraient, à elles-seules, lui ouvrir un droit à nomination sur place ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les décisions des 3 et 30 juillet 1998 de La Poste rejetant la demande de titularisation sur place de Mme X ne sont pas entachées d'illégalité ;

En ce qui concerne les décisions du 6 novembre 1998 et du 10 mai 1999 « prenant acte du refus de titularisation » de Mme X :

Considérant que Mme X conteste les décisions du 6 novembre 1998 et du 10 mai 1999 « prenant acte de son refus de titularisation » au motif que la mobilité qui lui est imposée en Ile-de-France par les dispositions de la circulaire du 25 juillet 1997 pour être titularisée n'est pas légalement justifiée ; qu'aucune des dispositions précitées de la loi du 11 janvier 1984 et du décret du 30 octobre 1985 n'exigeant que la titularisation soit subordonnée à une mobilité géographique en Ile-de-France, La Poste ne saurait, ainsi, légalement subordonner la titularisation de ses agents, prononcée sur le fondement de ces dispositions, à une condition supplémentaire tenant à l'obligation d'accepter préalablement un emploi en Ile-de-France ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du 6 novembre 1998 et du 10 mai 1999 « prenant acte de son refus de titularisation » ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de condamner La Poste au versement à Mme X d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0304752 - 0304755 - 0304756 du 19 février 2004 du Tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il rejette les demandes de Mme X tendant à l'annulation des décisions du 6 novembre 1998 et du 10 mai 1999.

Article 2 : Les décisions du 6 novembre 1998 et du 10 mai 1999 du directeur des ressources humaines de la délégation Ile-de-France de La Poste sont annulées.

Article 3 : La Poste versera à Mme X une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

N° 04VE01980

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 04VE01980
Date de la décision : 04/05/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: Mme Martine KERMORGANT
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : OLIVIER DENIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-05-04;04ve01980 ?
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