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06/04/2006 | FRANCE | N°04VE02945

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 06 avril 2006, 04VE02945


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Jean X, demeurant ..., par Me Gentilhomme ;

Vu la requête, enregistrée le

6 août 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, ...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Jean X, demeurant ..., par Me Gentilhomme ;

Vu la requête, enregistrée le 6 août 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle M. Jean X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0201580 en date du 27 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation du plan d'occupation des sols de la commune de Saint Martin du Tertre approuvé le 20 septembre 2000 en ce qu'il se rapporte aux parcelles n° B 229, 230 et 235 lui appartenant, du certificat d'urbanisme négatif qui lui a été délivré pour les mêmes parcelles le 1er décembre 2001 et de la décision du 30 janvier 2002 du maire adjoint de la commune rejetant sa demande de modification du plan d'occupation des sols de la commune en ce qui concerne ces parcelles, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la commune de modifier le plan d'occupation des sols afin de rendre aux dites parcelles leur caractère constructible ;

2°) d'annuler le plan d'occupation des sols du 20 décembre 2000 de la commune de Saint Martin du Tertre en tant qu'il se rapporte aux parcelles B 229, 230 et 235 ;

3°) d'annuler le certificat d'urbanisme négatif du 1er décembre 2001 et la décision du 30 janvier 2002 ;

4°) de condamner la commune de Saint Martin du Tertre à lui verser une somme de 7 000 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le tribunal administratif, après avoir examiné la recevabilité de ses conclusions tendant à l'annulation du plan d'occupation des sols puis la légalité du certificat d'urbanisme, a omis de statuer sur ses autres conclusions ; que ses conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 20 décembre 2000 approuvant le plan d'occupation des sols de la commune n'étaient pas tardives dès lors que la réalité des formalités de publicité de la délibération du 20 décembre 2000 n'était établie par aucune pièce, que la commune n'avait pas invoqué cette tardiveté et qu'elle avait défendu au fond ; que l'auteur de la décision du 30 janvier 2002 était incompétent pour la prendre ; que le classement des parcelles B 229 et B 230 en zone UH avec mention de terrains cultivés à protéger est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le maintien d'îlots de verdure au centre d'une commune disposant de grands espaces forestiers est injustifiée et qu'il réduit abusivement les possibilités de construction dans le centre ville que la municipalité souhaite elle-même rénover ; que la création sur la parcelle B 235 d'un emplacement réservé en vue de la création d'un parc de stationnement avec square, dont la surface serait d'ailleurs de 562 m² et non de 603 m², est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le parking de la mairie est inoccupé ; que les décisions attaquées sont entachées d'excès de pouvoir du maire de la commune qui veut, en réalité, faire échec à tout projet de construction privée sur les parcelles en cause ; que l'illégalité du certificat d'urbanisme négatif du 1er décembre 2001 résulte de l'illégalité des dispositions contestées du plan d'occupation des sols ;

……………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le plan d'occupation des sols de la commune de St Martin du Tertre approuvé le 20 septembre 2000 ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mars 2006 :

- le rapport de M. Dacre-Wright, président ;

- les observations de Me Sourou, substituant Me Gentilhomme, pour M. X et de Me Lejeune, substituant Me Bousserez, pour la commune de Saint Martin du Tertre ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Sur le recevabilité de la demande de première instance en tant qu'elle tendait à l'annulation de la délibération du 20 septembre 2000 du conseil municipal de Saint Martin du Tertre approuvant le plan d'occupation des sols :

Considérant qu'aux termes de l'article R.123-12 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable en l'espèce : « … La délibération approuvant le plan d'occupation des sols fait l'objet des mesures de publicité mentionnées au 3ème alinéa de l'article R.123-10. … » ; que le 3ème alinéa de l'article R.123-10 du même code auquel il est ainsi renvoyé précise qu'une mention de l'acte doit être insérée en caractères apparents dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le département ;

Considérant que la commune de Saint Martin du Tertre, produit en appel les pièces établissant que la mention du plan d'occupation des sols approuvé le 20 septembre 2000 a été publiée dans l'Echo régional le 27 septembre 2000 et dans Le Parisien le 28 septembre 2000 ; qu'elle établit ainsi que la formalité de publicité prévue par ces dispositions a été régulièrement accomplie ; qu'en conséquence, le délai de recours contentieux ouvert aux tiers à l'encontre de la délibération susvisée était expiré le 28 novembre 2000 ; que la tardiveté des conclusions de M. X tendant à l'annulation de cette délibération a été soulevée par la commune dans son mémoire déposé le 27 juin 2002 devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ; qu'en première instance, la commune s'est bornée à répondre aux moyens tirés par M. X de l'illégalité du plan d'occupation en estimant à juste titre que ceux-ci devaient être regardés comme étant soulevés, par la voie de l'exception, à l'appui de ses conclusions dirigées contre le certificat d'urbanisme négatif qui lui avait été délivré le 1er décembre 2001 ; qu'il suit de là que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté pour irrecevabilité les conclusions susvisées de sa demande ;

Au fond :

En ce qui concerne le certificat d'urbanisme négatif du 1er décembre 2001 :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.123-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable en l'espèce, les plans d'occupation des sols fixent « les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols, qui peuvent comporter notamment l'interdiction de construire. Les plans d'occupation des sols doivent, à cette fin, en prenant en compte la préservation de la qualité des paysages et la maîtrise de leur évolution : …7° Identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les … secteurs à protéger … pour des motifs d'ordre esthétique, historique ou écologique et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur protection. … 9° Localiser, dans les zones urbaines, les terrains cultivés à protéger et inconstructibles, quels que soient les équipements qui, le cas échéant, les desservent. … » ; qu'aux termes de l'article UH 13 du plan d'occupation des sols de la commune de Saint Martin du Tertre : « …Terrains cultivés à protéger : Les terrains cultivés en coeur d'îlots, localisés au plan des Eléments Patrimoniaux devront être protégés en application des articles L.123-1-7 et L.123-1-9. … » ; que selon l'article UH 1 du même plan d'occupation des sols, dans les terrains cultivés à protéger, les constructions et installations liées et nécessaires au bon fonctionnement des jardins familiaux sont admises dans la limite d'une seule surface hors oeuvre brute de 20 m² ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les parcelles B 229 et B 230 appartenant à M. X, incluses dans la zone UH, ont été classées en terrains cultivés à protéger ; qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par la commune de Saint Martin du Tertre que ces parcelles n'ont pas fait l'objet de cultures dans le passé et qu'elles sont toujours à l'état de friches ; qu'il suit de là qu'en les classant en terrains cultivés à protéger, les auteurs du plan d'occupation des sols ont commis une erreur de droit ; que la référence au 7° de l'article L.123-1 dans l'article UH 13 précité du même plan n'est pas de nature à justifier le classement litigieux fondé sur le caractère cultivé desdites parcelles ;

Considérant, d'autre part, que le même plan d'occupation des sols a créé, sur la parcelle B 235, appartenant également à M. X et située en bordure de la rue Gabriel Péri, un emplacement réservé de 603 m², dit « B », en vue de la réalisation d'un parc de stationnement planté ; que le requérant fait valoir, sans être sérieusement contredit par la commune y compris par les pièces qu'elle produit, que cinq parcs de stationnement existent déjà sur le territoire communal dont l'un de dix-neuf places, situé à proximité de l'emplacement réservé litigieux, n'est jamais utilisé dans sa totalité et que, plus généralement, les besoins en stationnement dans la commune, aux abords de la rue Gabriel Péri, ne sont pas d'une importance telle que la création d'un nouveau parc de stationnement sur la parcelle lui appartenant réponde à une nécessité publique ; qu'au surplus, il ressort des pièces du dossier que la superficie dudit emplacement réservé s'établit, ainsi que le démontre un relevé effectué par un géomètre-expert, à 562 m² au lieu de 603 m² ; que, dans ces conditions, le classement en emplacement réservé de la parcelle B 235 en vue d'y réaliser un parc de stationnement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir, par ces seuls moyens, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme du 1er décembre 2001 ;

En ce qui concerne la décision du 30 janvier 2002 :

Considérant que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte est d'ordre public et peut donc être soulevé pour la première fois en appel contrairement à ce que soutient la commune de Saint-Martin-du-Tertre ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.123-13 du code de l'urbanisme dans sa rédaction issue de la loi du 13 décembre 2000 applicable à la date de la décision susvisée par laquelle le maire adjoint de la commune a rejeté la demande de M. X tendant à la modification du plan local d'urbanisme : « Un plan local d'urbanisme peut également être modifié par délibération du conseil municipal … » ; qu'aux termes de l'article L.2121-10 du code général des collectivités territoriales relatif à la convocation du conseil municipal : « Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. » ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que si le conseil municipal est seul compétent pour modifier le plan local d'urbanisme de la commune, il n'appartient qu'au maire, saisi par la demande d'un tiers tendant à la modification de ce plan, de décider s'il y a lieu d'inscrire cette question à l'ordre du jour d'une réunion du conseil municipal ; qu'il suit de là que le maire est compétent pour rejeter, le cas échéant, la demande dont il est saisi ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le maire adjoint de la commune de Saint Martin du Tertre, dont il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est pas contesté qu'il ne disposait pas d'une délégation régulière, était incompétent pour rejeter la demande de modification du plan local d'urbanisme présentée par M. X doit être écarté ;

Considérant toutefois qu'en raison des illégalités entachant les dispositions du plan local d'urbanisme de la commune de saint Martin du Tertre relatives aux parcelles appartenant à M. X, le maire de cette commune était tenu d'inscrire à l'ordre du jour du conseil municipal la question de la modification de ce plan en vue de remédier à ces illégalités ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision susvisée du 30 janvier 2002 ;

Sur la demande d'injonction :

Considérant que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a omis de statuer sur les conclusions à fin d'injonction présentées par M. X ; qu'il y a lieu de faire droit à son appel sur ce point et d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il n'a pas statué sur ces conclusions puis, par voie d'évocation, d'y statuer ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.911-2 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public … prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. » ; que l'article L.911-3 du même code précise : « Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L.911-1 et L.911-2 d'une astreinte… » ;

Considérant que l'annulation de la décision susvisée du 30 janvier 2002 par le présent arrêt, implique nécessairement que le conseil municipal de la commune de Saint Martin du Tertre se prononce sur une modification du plan local d'urbanisme de nature à remédier aux illégalités l'entachant en ce qui concerne les parcelles B 229, B230 et B 235 appartenant à M. X ; qu'il y a lieu, dès lors, en application des dispositions rappelées ci-dessus, d'enjoindre le maire de la commune d'inscrire cette question à l'ordre du jour du conseil municipal dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Considérant que, par voie de conséquence de tout ce qui précède, les conclusions de la commune de Saint Martin du Tertre, qui perd pour l'essentiel, tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la commune de Saint martin du Tertre le paiement à M. X d'une somme de 1 500 € ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0201580 du 27 mai 2004 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme du 1er décembre 2001 et de la décision susvisée du 30 janvier 2002 et en tant qu'il a omis de statuer sur ses conclusions à fin d'injonction.

Article 2 : Le certificat d'urbanisme du 1er décembre 2001 et la décision susvisée du 30 janvier 2002 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au maire de la commune de Saint Martin du Tertre d'inscrire à l'ordre du jour du conseil municipal, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, la question de la modification du plan local d'urbanisme en ce qui concerne les parcelles B 229, B 230et B 235 appartenant à M. X.

Article 4 : La commune de Saint Martin du Tertre versera à M. X la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de M. X et les conclusions de la commune de Saint Martin du Tertre tendant à l'application des dispositions de l'article L761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

04VE02945 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 04VE02945
Date de la décision : 06/04/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: M. Gildas DACRE-WRIGHT
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : BOUSSEREZ CHRISTIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-04-06;04ve02945 ?
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