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04/04/2006 | FRANCE | N°04VE03038

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3eme chambre, 04 avril 2006, 04VE03038


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Z... , demeurant ..., par Me Y... ;

Vu la requête, enregistrée le 12 a

oût 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Z... , demeurant ..., par Me Y... ;

Vu la requête, enregistrée le 12 août 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle Mme demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0001749 en date du 24 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles ne lui a accordé qu'une décharge partielle des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1994 et 1995, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de lui accorder la décharge de l'imposition restant en litige au titre de l'année 1994 ainsi que des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement attaqué n'a pas examiné le moyen selon lequel la procédure de redressement propre aux bénéfices non commerciaux n'a pas été suivie ; qu'en effet, la procédure d'imposition ainsi que l'évaluation des résultats devaient suivre les règles concernant les activités libérales et non celles relatives aux activités industrielles et commerciales puisque l'administration a estimé que la société L.E.A. Conseil ne devait pas bénéficier du régime en faveur des entreprises nouvelles au motif qu'elle n'exerçait pas une activité de nature commerciale ; que les prestations de transport à l'exportation directement réalisées par l'EURL L.E.A. Conseil sont de nature commerciale ; que, si à l'importation l'entreprise était contrainte de faire sous-traiter ses dossiers par la société Air Océan et a dû recruter et former un responsable d'exploitation pour le compte de cette société, ces prestations ne relevaient pas d'un secteur d'activité autonome détachable de l'activité commerciale de transitaire ; que, de plus, ces activités de recrutement et de formation d'un membre de la société Air Océan n'ont eu lieu qu'au cours d'une partie du premier exercice social ;

……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du commerce ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mars 2006 :

- le rapport de Mme Brin, président-assesseur ;

- les observations de Me Y..., pour Mme ;

- et les conclusions de M. Bresse, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts applicable à l'année 1994 : « I. Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu'au vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. Les bénéfices ne sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés que pour le quart, la moitié ou les trois quarts de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours de la première, de la seconde ou de la troisième période de douze mois suivant cette période d'exonération. (…) III. Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au I. » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'entreprise L.E.A. Conseil dont Mme est la gérante a été constituée le 31 janvier 1992 sous forme de société à responsabilité limitée puis transformée le 14 décembre 1992 en entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée ; qu'elle a commencé son activité le 1er février 1992 ; qu'à la suite de la vérification de comptabilité de cette entreprise, l'administration a remis en cause le régime d'exonération de l'imposition des bénéfices réalisés par une entreprise nouvelle, selon les modalités prévues par les dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts, sous lequel elle s'était placée dès sa création ; que ne reste en litige devant la Cour que la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle Mme a été assujettie au titre de l'année 1994, qui correspond à l'exercice d'activité de la période du 1er février 1993 au 31 janvier 1994 ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte notamment des dispositions précitées de l'article 44 sexies éclairées par les travaux préparatoires de l'article 14 de la loi n° 88-1149 du 23 décembre 1988 dont elles sont issues, que le législateur a entendu réserver le régime prévu par cet article aux entreprises nouvelles dont l'activité est de nature industrielle, commerciale ou artisanale et en exclure les entreprises nouvelles dont les bénéfices proviennent, en tout ou partie, d'activités d'une autre nature, du moins lorsque ces activités ne constituent pas le complément indissociable d'une activité exonérée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté par le ministre que, dès sa création, la société L.E.A. Conseil exerçait à raison de 60,5 % de son chiffre d'affaires une activité à l'exportation de commissionnaire de transport et de transitaire sans opération de douane ainsi que l'atteste le contrat d'assurance multirisque souscrit auprès de la compagnie d'assurance le GAN prenant effet le 15 octobre 1992 ; que l'exercice de cette activité constitue l'accomplissement d'actes réputés de commerce par l'article 632 du code de commerce, repris désormais à l'article L. 110-1 du même code ; que, par ailleurs, la société, par les contrats qu'elle a conclus les 3 février et 29 octobre 1992 avec la SA Air Océan Transport International, société de fret maritime, d'une part, a confié à cette dernière la sous-traitance des dossiers de ses propres clients en ce qui concerne les opérations commerciales de transport et de transit à l'importation moyennant une commission de 20 % sur le résultat brut et, d'autre part, dans le cadre de cette sous-traitance, a recruté et formé un responsable d'exploitation maritime pour le compte de la société Air Océan Transport International ; que le chiffre d'affaires résultant de l'exécution de ces contrats a représenté 38,39 % du chiffre d'affaires de l'entreprise L.E.A. Conseil lors du premier exercice de son exploitation ; qu'en raison du caractère temporaire de ces missions, cette proportion est, par la suite, devenue négligeable, voire nulle ; que le traitement des dossiers des clients de la société L.E.A. Conseil par la société Air Océan Transport International ne fait pas obstacle à ce que cette activité soit regardée comme celle de commissionnaire de transport à l'importation, qui est de nature commerciale ; que les prestations de formation et de recrutement de personnel pour le compte de la société Air Océan Transport International, qui sont des prestations intellectuelles, doivent être regardées, en raison des conditions de leur accomplissement ci-dessus décrites, comme le complément indissociable de l'activité par nature commerciale exercée par l'entreprise L.E.A. Conseil ;

Considérant, en second lieu, qu'en excluant du champ d'application de l'exonération instituée par l'article 44 sexies précité, les entreprises « créées dans le cadre … d'une extension d'activités préexistantes », le législateur n'a entendu refuser le bénéfice de cet avantage fiscal qu'aux entreprises qui, eu égard à la similarité ou à la complémentarité de leur objet par rapport à celui d'entreprises antérieurement créées et aux liens de dépendance qui les unissent à ces dernières, sont privées de toute autonomie réelle et constituent de simples émanations de ces entreprises préexistantes ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... était attaché de direction depuis le 7 mars 1991 au sein de la société Air Océan Transport International ; qu'il a démissionné de ce poste le 13 décembre 1991 ; qu'il est devenu associé à raison de 13 parts sociales sur 50 de la SARL L.E.A. Conseil créée le 31 janvier 1992 dont Mme était la gérante, puis le 14 décembre suivant a cédé ses parts à celle-ci, devenue ainsi associée unique et gérante de l'EURL L.E.A. Conseil ; que, si l'exécution des contrats susrappelés des 3 février et 29 octobre 1992 peut s'apprécier comme un complément d'activité pour la société Air Océan Transport International, il n'en ressort pas de liens de dépendance qui uniraient l'entreprise L.E.A. Conseil à cette société dès lors que c'est l'entreprise de Mme qui confiait certaines missions en sous-traitance à la société préexistante, et non l'inverse, et que la cession de clientèle concrétisée par l'accord du 29 octobre 1992 concerne celle de l'entreprise L.E.A. Conseil à la société Air Océan Transport International ; qu'il a déjà été dit que la part du chiffre d'affaires de cette entreprise correspondant à l'exécution de ces contrats représentait moins de 40 % de son chiffre d'affaires total lors du premier exercice clos le 31 janvier 1993 et est devenue négligeable puis nulle par la suite ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'entreprise L.E.A. Conseil ne saurait être regardée comme ayant été privée de toute autonomie réelle et comme constituant la simple émanation de la société Air Océan Transport International ; que, par suite, la société L.E.A. Conseil, qui n'a pas été créée dans le cadre d'une extension d'activités préexistantes au sens des dispositions précitées de l'article 44 sexies du code général des impôts, entre dans le champ d'application de l'exonération instituée par lesdites dispositions ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a remis en cause le régime d'exonération en faveur des entreprises nouvelles selon les modalités définies par l'article 44 sexies du code général des impôts sous lequel elle s'était placée ; qu'il y a lieu, d'une part, de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, en droits et pénalités auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1994, d'autre part, de réformer en ce sens le jugement attaqué ; qu'il y a lieu, enfin, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Mme de la somme de 1 500 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Mme est déchargée de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1994, en ce qu'elle résulte de la remise en cause du régime en faveur des entreprises nouvelles, ainsi que des pénalités y afférentes.

Article 2 : Le jugement n° 0001749, en date du 24 juin 2004, du Tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : L'Etat versera à Mme la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme est rejeté.

04VE03038 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 04VE03038
Date de la décision : 04/04/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: Mme Dominique BRIN
Rapporteur public ?: M. BRESSE
Avocat(s) : MAINETTI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-04-04;04ve03038 ?
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